La pluie coule sur son visage émacié, creusé par la douleur et le temps. Il ne pleure plus depuis longtemps, ses larmes se sont taries. Il n'est plus que vide, même la tristesse et le chagrin, autrefois omniprésents, se sont enfuis, lui ont dérobé ce dernier reste d'humanité.

Maintenant, il est seul, le regard insondable. On ne peut le regarder sans se noyer dans ce puit sans fond, tomber, encore et encore, une chute vertigineuse et sans fin. Pour finalement atteindre les tréfonds de son âme ravagée.

Il est seul et le restera. Cela n'a pas toujours été le cas : il fut un temps où la vie lui souriait, de ses dents blanches, dansait avec lui dans des vêtements chatoyants et le prenait par la main en lui faisant découvrir le monde et ses joies. Où il lui souriait en retour, heureux de pouvoir en profiter. Mordant avec entrain dans ce beau fruit sucré, vivant avec passion.

Mais ce temps est loin, perdu dans les méandres des souvenirs de l'homme. Il ne s'en rappelle déjà plus, perdu qu'il est dans les brumes du néant. Voilà à quoi ressemble sa vie, maintenant, le néant. Un vide absolu qui engloutit tout sur son passage.

Il y eut d'abord les joies qui disparurent peu à peu, la joie de vivre persistant, ne voulant s'éteindre à aucun prix, mais elle céda, finalement vaincue. Ensuite, vinrent les peines et le chagrin qui s'effacèrent à leur tour, comme à regret. Puis, enfin, la rage et la colère balayant tout sur leur passage, mais il était trop tard, l'homme ne pouvait plus se révolter et elles disparurent, sans grands remous finalement.

Il ne resta plus rien de cet homme dévasté, uniquement ce vide, toujours, qui lui emplissait la tête, déniant à tout autre le droit d'exister.

L'homme ne vit plus, il est même incapable de comprendre le sens de ce mot, il survit tout au plus.

Il n'est plus. Il saute. Et le vide disparait.