Chapitre 3
« La vérité de demain se nourrit de l'erreur d'hier. » Saint-Exupéry
L'homme maintenu prisonnier par Ethan, avait été menotté et se trouvait alors allongé sur un canapé beige du salon. Une atmosphère pesante régnait mêlée à une odeur de transpiration et de respirations lourdes. Gabrielle fut étonnée de constater que les menottes qui enchaînaient le détenu ne soient pas en fer ou en métal mais avec ce beau matériau blanc qu'est la nacre. La curiosité grandissait de plus en plus en elle et son esprit tendait à comprendre l'inexplicable. Tandis que, sous le choc, elle tentait de se concentrer sur les réponses de l'homme en noir, Lia, assise dans un fauteuil moelleux et sculpté très minutieusement dans du bois rouge pâle, usait de son talent de comédienne, laissant Ethan, assis près du prisonnier, l'interroger.
— L'interrogatoire que je vais vous soumettre peut se dérouler de deux façons, commença le père de Gabrielle. Si vous coopérez, tout se passera dans le calme ; à l'inverse, si vous usez de violence, de dédain, d'énervement ou si vous élevez la voix, nous aurons alors un problème majeur que je me verrai alors dans le devoir de résoudre.
Enzo ne retint pas un rictus qui tordit sa bouche en une expression effrayante. Ses yeux marrons riaient d'eux-même défiant Ethan de le tuer.
— Je vois très bien où vous voulez en venir, dit-il ensuite, mais si vous croyez me faire peur, vous faites fausse route.
— Je vois très bien quel homme vous êtes, répliqua Ethan en reprenant la formulation de son adversaire, mais si vous croyez que je ne sais pas comment communiquer avec ce type de personne, vous faites fausse route.
— Qui êtes-vous pour me menacer de la sorte ?
— Qui êtes-vous pour me tenir tête de la sorte ?
Il y eut un instant d'arrêt durant lequel les deux hommes se jugeaient. La tension était palpable, le silence pesant. Ils semblaient s'analyser l'un l'autre pour riposter au mieux. Ce fut Enzo qui reprit la parole.
— Vous êtes fort, Monsieur.
— Et vous bien trop insolent, riposta Ethan.
A nouveau, le silence s'imposa, suspendant leur joute orale. Gabrielle ne réagit pas, impressionnée par la tournure de cet interrogatoire. Finalement, son père dont le calme sembla l'abandonner reprit la parole.
— Je suis Ethan dil'Arivachi, lança ce dernier comme une attaque qui devait atteindre son adversaire en plein cœur.
Gabrielle sursauta à ce nom inconnu. Ethan, fixant Enzo, vit dans les yeux de celui-ci un voile sombre apparaître. Une lueur de peur venait y briller et sa voix, d'une insolence persistante, tentait de dissimuler la crainte qui venait de s'imposer en lui.
— Vraiment ? dit-il. Le chef royal ? C'est un honneur pour moi, Enzo fat Menchi, anobli par sa Majesté Isabelle, reine du royaume d'Elémentarius, de rencontrer un homme tel que vous ; un homme que mes maîtres ont vaincu et qui a fui sur Terre.
Ethan eut un sourire de dégoût. Cet homme avait du caractère et de l'audace pour oser répliquer de la sorte. Néanmoins, en entendant la tonalité de ses cordes vocales, il fut soulager de remarquer que son influence restait d'actualité. Le soldat ne chercha même pas à relever la pique de son adversaire.
— Ce sont vos supérieurs qui vous ont envoyé enlever cette jeune fille ? enchaîna-t-il.
Enzo acquiesça.
— Mais la raison m'est inconnue ; Lucas nous a laissé dans l'ignorance.
— Qui est ce dénommé Lucas ? interrogea Ethan.
— Le chef de la troupe que vous avez tué avec agilité et sans compassion aucune, lâcha Enzo. J'étais son second. Qui est cette fille pour laquelle mes amis sont morts ? En vaut-elle réellement la peine ?
— Tu ne sauras rien, répliqua le garde en passant à un tutoiement violent. Elle n'a rien d'important que tu as à savoir et l'ignorance dans laquelle tu te trouves est un état qui te convient parfaitement.
Il se dirigea ensuite vers l'armoire derrière le fauteuil où était installé Lia, et ouvrit le tiroir pour en sortir un parchemin, comme celui utilisé pour l'anniversaire de Gabrielle, et un stylo. Puis il s'assit devant la petite table basse au centre du salon et écrivit. Gabrielle s'approcha de lui et lut au-dessus de son épaule :
Madame et Monsieur tra Torturemenchi,
Vous nous avez enfin démasqués ? Franchement c'était long, je pensais que vous seriez plus rapide.
Toujours est-il que mes réflexes ne m'ont pas fait défaut et nous avons décimé votre troupe. Si c'était votre puissance, je sens que vous vous êtes affaiblis. Profitez de vos derniers mois de gloire, bientôt nous vous verrons en prison, implorant la pitié. Nous avons laissé en vie cet imbécile qui vous porte la lettre mais vraiment il n'en vaut pas la peine. Ne cherchez plus à nous retrouver nous sommes déjà loin.
Que la puissance vous perde !
Ethan ferma l'enveloppe après y avoir soigneusement rangé la lettre.
— Tu donneras cette lettre à tes maîtres, dit calmement Ethan. Ne fais pas de mauvais mouvement ou la mort te frappera plus tôt que tu ne le penses. N'abuse pas de ma clémence. Est-ce clair ?
— Comme de l'eau de roche.
Ethan alla chercher le collier d'Enzo et le lui attacha. La chaîne argentée était composée d'une flamme en rubis qui eut un reflet effrayant avec un rayon de lumière. L'homme ne broncha pas mais semblait content de la retrouver. Puis Lia tendit la petite clef en nacre à son mari qui le détacha précautionneusement. Libéré, il attrapa la lettre que lui tendait Ethan puis visa Lia encore assise. Mais Ethan avait prévu le coup et para grâce à son épée qu'il dégaina avec la rapidité de l'éclair. Le sort rebondit et alla frapper Enzo en pleine poitrine. Il hurla et se retrouva bientôt l'épée sous la gorge.
— Je commence à croire que tu es sourd ! Imbécile ! s'énerva Ethan. Alors ouvre ton collier et disparais ou tu es mort.
Enzo s'exécuta. Il sortit de son pendentif une sorte de poussière et se la versa sur lui. Puis il disparut. Littéralement. Le corps physique de l'homme n'était plus là. Il s'était dématérialisé. Ethan soupira et rangea son épée. Quant à Gabrielle, elle était complètement abasourdie par tout ce qu'elle venait de voir. Elle décida que le moment était venu d'éclaircir toute l'ombre.
— Votre mascarade a assez duré. Qui sont ces gens ? Que me veulent-ils ? Qui suis-je ? Qui êtes-vous ? demanda-t-elle. Je crois que vous me devez un certain nombre d'explications.
La colère était présente dans sa voix. On lui avait caché tant de choses, n'avait-elle pas le droit de savoir ? Ses yeux foudroyaient ses parents pour lui avoir menti. Depuis toujours on la faisait vivre éloignée de tout et tous et pourquoi ? Elle allait le savoir. Oh, oui, aujourd'hui elle voulait des réponses, toute la vérité.
— Nous allons tout t'expliquer Gaby, coupa Ethan. Assieds-toi et calme-toi.
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