18.
D'un geste rageur, Stephen jette son arme au sol. Son visage devient très rapidement rouge de colère. Il passe sans arrêt sa main dans ses cheveux et sur son visage, comme si cela allait tout arranger. Cédric reste silencieux, ne sachant probablement pas comment agir. Stephen fait les cent pas en prononçant toutes sortes de jurons incompréhensibles.
J'ai un mauvais pressentiment. Je sens qu'il va agir sur un coup de tête, sans réfléchir plus longtemps. Et cela ne présage rien de bon pour nous.
- Bastian, il me fait peur, je murmure.
- A moi aussi, m'avoue-t-il sincèrement. Décale-toi derrière moi.
- Mais-
- Fais ce que je te dis.
Je ne proteste pas plus longtemps et me place donc derrière lui. J'entoure son corps de mes jambes, cherchant à le protéger même si je suis consciente que c'est complètement inutile. Mes bras encerclent son corps. Je sens ses muscles tendus et son cœur qui bat à vive allure. Je pose ma tête entre ses omoplates et ferme les yeux quelques secondes.
Et dire qu'il y a à peine quelques heures, je ne voulais même pas lui parler. Et maintenant, me voilà en train de le serrer dans mes bras. Plutôt cocasse comme situation.
Lorsque j'ouvre à nouveau les yeux, Stephen attire immédiatement mon attention. Que fait-il? Il décroche le téléphone et attend que quelqu'un lui réponde.
Je ne remarque que maintenant que la salle s'est clairement assombrie. Etant donné que nous n'avons plus d'électricité, nous pourrions tenter de sortir ou bien tenter n'importe quoi. Mais, faire quelque chose. C'est ce que j'aurais très probablement fait si l'homme qui a pointé une arme sur ma tempe ne me faisait pas si peur.
Malheureusement, un homme n'a pas l'air du même avis que moi puisqu'il se lève, souhaitant probablement profiter de l'inattention des deux hommes. Sauf que Stephen se retourne.
- Va t'asseoir, ordonne-t-il.
- Et pourquoi? Je ne compte même plus le nombre d'heures passées ici alors, je commence à en avoir plus que marre.
Stephen se baisse, récupère son arme et tire. Sans état d'âme. L'homme d'écroule par terre, mort sur le coup. Je sursaute et m'arrête de respirer pendant quelques secondes. Encore un mort. Ça suffit, je n'en peux plus.
- Quelqu'un d'autre en a marre de sa situation? s'exclame-t-il.
Tremblante comme jamais, je me cache derrière le dos de Bastian tandis qu'il s'empare de mes mains pour les serrer fort. Qui va-t-il tuer encore? Je veux que ça s'arrête. Je veux que tout ça s'arrête. Oui, j'en ai marre de ma situation. Mais non, je ne suis pas suffisamment stupide pour le lui dire.
- Parfait.
Il semble avoir une réponse dans le téléphone puisqu'il dit très clairement :
- C'est fini.
Avant de raccrocher.
- Je te l'ai déjà dit, mais je vais le répéter quand même. Mi dispiace, Alia. Vraiment.
- Tais-toi.
- Je te jure que je le pense.
- Là n'est pas le problème. Le problème, c'est que tu es en train de me faire tes adieux. Et ça, je le refuse.
Son souffle se saccade, même si je vois très bien qu'il tente de rester le plus calme possible.
- Je ne sais pas quoi te dire Alia, soupire-t-il.
- Alors, ne dis rien.
Stephen empoigne Cédric par le bras et l'entraîne vivement vers les armes quasiment vides.
- Nous aurions dû vérifier avant de rendre les enfants, marmonne-t-il. Nous nous sommes faits avoir et plus d'une fois.
Le téléphone à la coque rose et à strass se remet à sonner. Stephen l'attrape et le lance violemment sur le mur, le détruisant. La propriétaire lâche un cri. Mais, qu'est-ce que la perte d'un téléphone alors que deux vies se sont éteintes aujourd'hui? Notre société est tellement matérialiste que s'en devient ridicule. Cette fille me fait presque de la peine en fait. Elle regarde les restes de son téléphone, un air horrifié sur son visage. J'ai presque envie de lui dire : un téléphone, ça peut se racheter. Pas une vie. Mais, je regarde mes pensées pour moi.
Je dérive à nouveau mon regard sur nos deux braqueurs mal lunés. Ils déchargent des armes pour en charger d'autres entièrement.
- Ce n'est pas une bonne idée Stephen, déclare Cédric. Vraiment pas une bonne idée.
De l'autre côté de la vitre, dans l'obscurité d'un début de soirée, des dizaines de policiers sont armés, vêtus de gilets pare-balles et de casques pour protéger leurs têtes. Nous, nous n'avons rien. Nous sommes nus face à l'attaque qui se prépare très clairement. C'est comme si deux clans se préparaient pour une guerre. Et que nous sommes les civils qui n'avons rien demandés à personne.
- Tu vas probablement m'en vouloir pour ce que je vais te dire mais, je ne suis plus à ça près.
- Ne me dis rien qui ressemble de près ou de loin à des adieux, je t'en supplie.
Il baisse la tête sur nos mains liées, m'affirmant que dans ce cas, il ne dirait rien.
- Stephen ne fais pas ça! s'exclame Cédric, maintenant très énervé.
Jusqu'à présent plutôt passif, il a l'air maintenant bien remonté. Il arrache l'arme des mains de Stephen et le défie du regard.
- Regarde dehors. Au moindre coup de feu, ils entreront et je peux te dire qu'ils ne réfléchiront pas deux fois avant de tirer.
- Tu as beau être mon frère, tu pourras dire ce que tu veux, je n'en ai rien à faire.
- Bon, laisse-moi au moins te dire une chose, dit Bastian.
- Bastian, je murmure entre mes dents.
- Tout à l'heure, lorsque j'ai dit que j'avais un rencart, c'était avec toi que je le voulais, ce rencart. Toi et personne d'autre. Quitte à t'attacher à la chaise, je voulais pouvoir m'expliquer avec toi, confie-t-il.
- Maintenant, c'est fait. Alors, je t'en conjure, ne me dis plus d'adieux détournés.
- D'accord, d'accord.
Je relève la tête et c'est à ce moment précis que le cauchemar commence. Stephen s'approche en grandes enjambées et tire dans le tas sans réfléchir. Je lâche un cri de terreur, comme beaucoup de personnes présentes ici. Je me couche immédiatement pour éviter des dommages qui s'avéreraient fatals. Les forces de l'ordre n'attendent rien d'autre pour entrer et tirer à leur tour. Sauf qu'eux, ils ont une cible : Cédric et Stephen. Du moins, seulement Stephen puisque Cédric est couché par terre, les mains sur la tête. Il se rend.
- Lève-toi et cours te cacher où tu peux! s'exclame Bastian en se levant.
Je fais très rapidement de même et le suis sans savoir où je vais. Des personnes nous suivent tandis que d'autres sont clouées au sol. Soit parce qu'ils sont tétanisés. Soit pour une autre raison, bien plus morbide. Des larmes coulent sur mes joues, sans s'arrêter. C'est la peur qui me fait avancer. Ma vision étant brouillée, je me prends un mur en place face. Mais, je n'ai pas le temps de m'en inquiéter plus longtemps.
Bastian pousse une porte d'un coup d'épaule et s'engouffre à l'intérieur. Nous sommes suivis de quelques personnes qui se laissent glisser sur le sol, essoufflés. Quant à moi, je barricade la porte en poussant un bureau devant, pour que personne ne puisse entrer. Il fait presque nuit ici, seules les lumières des lampadaires nous éclairent.
Je me tourne et cherche Bastian des yeux. Puis je le trouve. Il est assis par terre, deux mains sur sa hanche droite, refoulant un gémissement. Je veux crier son prénom mais ce n'est qu'un croassement peu élégant qui sort de ma gorge. Je me précipite vers lui pour constater les dégâts. Je passe outre ma phobie du sang et découvre une plaie vraiment pas rassurante.
- Tu vas t'en sortir, ok? je murmure, complètement affolée. Couche-toi.
Il s'exécute avec mon aide, gémissant de douleur. Il s'est pris une balle et, je ne sais pas quoi faire. Je retire le gilet que je porte et compresse sa plaie pour qu'il perde le moins de sang possible. Il murmure mon prénom mais je lui somme de se taire.
- Tu n'as pas le droit de mourir, ok? Tu n'en as pas le droit. Tu me dois encore beaucoup de chapitres de cette histoire et je veux que ce soit toi qui me les donne. Toi, et personne d'autre.
Mes paroles sont ponctuées de sanglots incontrôlables à la seule idée de le perdre. Pas maintenant. Pas alors que je viens tout juste de le retrouver. En grimaçant de douleur, il tend sa main et pousse mon visage vers le sien. Ses yeux sont emplis d'inquiétude et étrangement de soulagement.
- Je t'aime encore, murmure-t-il.
- Je t'ai dit de ne pas me faire d'adieux! je m'exclame en pleurant de plus belle.
Sans réfléchir un instant de plus, je pose mes lèvres sur les siennes. Brutalement mais dans l'urgence. Je n'ai pas besoin de lui demander son avis avant de mêler ma langue à la sienne pour le baiser le plus intense que je n'ai jamais vécu. Une main sur sa plaie, l'autre sur sa joue, je ne coupe jamais le contact tactile entre nous.
Ne voulant pas qu'il perde plus de force, je m'éloigne et appuie un peu plus fort sur la compresse contre sa plaie.
- Survis pour moi. Je t'en supplie.
Des larmes coulent le long de ses joues. Mais, ce ne sont pas les miennes, ce sont les siennes.
- Tu me dois au moins ça, j'ajoute.
Une boule m'obstrue la gorge et tout ce qui en sort maintenant, ce sont des plaintes presqu'animales. Je conserve le contact visuel avec Bastian et il fait de même, comme si c'était ce qui lui permettait de continuer à vivre.
- Mademoiselle, décalez-vous, m'ordonne une voix masculine derrière moi.
Je sursaute et suis forcée de détourner le regard pour me rendre compte qu'un pompier est agenouillé derrière moi.
- Laissez-moi faire mon travail. Vous avez fait ce que vous avez pu mais, maintenant, c'est à moi de gérer la situation.
- Sauvez-le, je vous en supplie.
Je me décale comme il me l'a demandé et le laisse faire ce qu'il a à faire. Je me penche et dépose un long baiser sur le front de mon italien.
- Tu dois survivre. Tu m'entends?
- Je ne te promets rien, parvient-il à me dire.
- Nous allons l'emmener à l'hôpital, me prévient l'homme. Je ne peux pas me prononcer quant à savoir s'il va survivre ou non mais je vous promets de faire de mon possible.
J'acquiesce tandis qu'il soulèvent Bastian, lui arrachant un râle de douleur pour le déposer dans un brancard. Je dépose un dernier baiser sur sa joue avant qu'ils ne l'emmènent loin de moi. J'aimerais pouvoir le suivre. Mon corps tout entier le demande. Mais, je n'y parviens pas. Je suis clouée au sol, parcourue de spasmes et de sanglots incontrôlables.
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Salut tout le monde! Eh bien voilà, le braquage est terminé. Je sais que vous voulez connaître la suite. Vous l'aurez vendredi, promis!
Laissez-moi deviner, je suis quelque chose qui commence par sa-, finit par -que et qui contient -di-? x)
J'espère que vous aurez aimé le chapitre, malgré la fin!
TrueWordOfLOve
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