Chapitre 7
Bonjour !
J'espère que vous allez bien ^^
Aujourd'hui, Harry fait une nouvelle rencontre...
*****
— Chapitre 7 —
15 décembre 2019.
J'ai repris le travail au supermarché. J'arrive à peu près à faire ma vie normalement. Il faut juste que j'évite de lever trop les bras et de porter des charges lourdes. Sinon ça va. Je suis vraiment trop content. J'ai ma nouvelle carte d'identité et mon nouveau torse tout plat. Je n'ai jamais été aussi serein de ma vie. J'arrive à faire abstraction de toute les démarches encore à venir, parce qu'il y en a une tripotée. Mais j'ai décidé que même ça ne pourrait pas saper ma bonne humeur aujourd'hui.
C'est ma journée. Et aujourd'hui sera une bonne journée. Une très bonne journée. C'est mon anniversaire. Mes collègues m'ont écrit une carte avec des mots beaucoup trop mignons me souhaitant un bon retour. Ils ne savent pas que j'ai fait une mammectomie bien sûr, j'ai juste dit que j'ai dû être opéré pour un truc bénin. Ils n'ont pas trop insisté.
Même si je travaille, je passe une bonne journée. L'univers semble enfin s'être décidé à tourner en ma faveur, les clients que j'ai eu jusqu'à présent ont été polis et personne ne m'a payé intégralement en pièces de 1 et 2 centimes. Ce soir, on va au restau avec maman, Gilles, papa et Damien. Avoir papa et maman a la même table, c'est quelque chose. Après leur divorce, ils n'étaient pas du genre à se déchirer dans les larmes ni à se faire des crasses, mais ils s'évitaient soigneusement. J'ai l'impression que ça va enfin mieux entre eux. On verra comment le dîner se passe dans les faits, mais j'ai bon espoir.
22 ans. Ce nombre commence à faire vraiment adulte. Je sais pas si c'est normal, mais j'ai pas l'impression d'être réellement adulte. C'est bizarre. Je suis plus un ado, mais je me sens pas comme une grande personne pour autant. Je ne sais pas ce que je fous de ma vie, ni ce que je veux. Je suis juste un gamin qui a arrêté ses études. Je me dis que je les reprendrai l'an prochain, parce que c'est que une « césure » mais en vrai, j'en sais rien. C'est le flou total.
Je regarde l'heure. Il est bientôt 11h. Ça va être le défilé des gens qui réalisent qu'on va bientôt fermer. Parce qu'évidemment, ils n'ont plus rien dans le frigo et que leurs courses ne peuvent pas attendre demain. Je suis totalement contre l'ouverture des magasins le dimanche, c'est une vraie plaie. Ça va, personne va mourir parce qu'il doit attendre un jour de plus pour acheter je ne sais quelle connerie. Mais évidemment, ce n'est pas moi qui décide. Et contrairement à mes collègues qui ont des gosses, j'en ai rien à faire de bosser le dimanche. Donc je ferme ma gueule.
Comme pour me donner tort, mon prochain client pose sur le tapis un paquet de serviettes hygiéniques. Ah. Ouais, ça c'est essentiel. Je comprends totalement. Ça me fait penser que je suis content de pouvoir reprendre de la testo. J'ai arrêté pour la mammec, parce qu'il paraît que ça aide à cicatriser. J'ai eu des règles un peu bizarres, super douloureuses, pas très abondantes. Ça m'avait absolument pas manqué.
Fait assez rare pour être noté, c'est un mec qui passe en caisse. Et il ne s'est pas senti obligé d'acheter en plus une pizza et un pack de bières pour se donner un genre. J'imagine que c'est pour sa meuf. Il est grave mignon. Brun, avec des yeux noirs, les cheveux bouclés. Des lunettes rondes avec des montures fines. Il doit être un peu plus jeune que moi.
Je lui souris et j'ai même pas besoin de me forcer. Il pique un fard, je ne peux retenir un petit rire. Il doit penser que je me fous de sa gueule, le pauvre.
— Ça fera 2 euros 95.
Il cherche sa monnaie, fait tomber des pièces et se confond en excuses. J'attends patiemment, il n'y a personne derrière pour le moment.
— Désolé, répète-t-il en me tendant une pièce de 2 euros.
— C'est rien.
Je le regarde compter ses centimes. Il a les mains qui tremblent. Sans doute est-il de nature un peu anxieuse, j'en sais rien.
— Vous... vous êtes de retour, bafouille-t-il en me donnant finalement une pièce de 1 euro.
— Pardon ?
— Je... Vous étiez plus là ces dernières semaines. Enfin... désolé ça doit être super creepy dit comme ça... C'est juste euh... je fais tout le temps mes courses le jeudi après-midi comme j'ai pas cours et... bref c'est souvent vous en caisse et... désolé. Juste je... oubliez ce que je viens de dire, OK ?
Je hausse les sourcils. Ça arrive que les clients me fassent la causette en vérité, il y en a que je connais bien. Quand ils passent à ma caisse, on discute environ une minute trente. De la météo, du prix des tomates, des conneries. En voyant que j'étais revenu, certains m'ont souhaité un bon retour. La petite mamie du samedi matin par exemple. Je sais pas comment elle s'appelle, mais elle fait toujours ses courses à la même heure. Et c'est du genre à beaucoup parler. Mais celui-là ? Franchement, je suis sûr que je lui ai jamais parlé. Je serai même pas capable de dire si son visage m'est vaguement familier ou pas.
En tout cas, le pauvre garçon a l'air un peu en panique. Je prends la décision de le rassurer, j'ai pas envie qu'il me fasse une crise d'angoisse.
— Il n'y a pas de problème. Effectivement, j'étais absent le mois dernier. Mais me revoilà, je conclus avec un sourire.
Je n'ai aucune envie de dire que j'étais en arrêt, que je me suis fait opéré ou quoi, ça ne le regarde pas. Je lui rends sa monnaie. Il a l'air soulagé par ma réponse, même si son sourire est toujours crispé et ses joues furieusement rouges.
— Cool bah... bonne journée.
Il range son porte-monnaie dans son sac à dos et se détourne en direction de la sortie. Sauf qu'il a oublié ses achats. Ou plutôt son achat. Je récupère le paquet de serviettes et hausse la voix.
— Monsieur attendez ! Vous oubliez ça !
Nouveau fard, nouvelles excuses. Décidément. Je me force à rester sérieux et professionnel.
— C'est rien, mais votre copine n'aurait pas été très contente si vous étiez rentré sans.
Je ne réfléchis même pas à ma phrase. Ça sort tout seul, très naturellement. Sauf qu'au lieu de répondre un truc du genre « haha vous avez raison, merci », le jeune homme fronce les sourcils.
— C'est pas pour ma copine, répond-il simplement.
Il a l'air... vexé ? Ou gêné ? Je sais pas. En tout cas, il n'est pas ravi. Il a le regard fuyant. Je me sens con d'avoir présupposé 1/ que c'était pour sa meuf 2/ qu'il avait une meuf. Ça peut aussi bien être pour sa mère, sa sœur, sa coloc, n'importe qui.
— Pardon je-
— Bonne journée.
Alors qu'il remet son sac sur son dos, mon regard est attiré par un badge sur la poche avant. Rainbow.
AH.
Oh putain.
Je percute alors qu'il disparait derrière la porte du magasin. Il me draguait en fait, non ? Ou c'est moi qui me fait des films ? Il a noté mon existence, il a remarqué que j'étais plus là et il tente maladroitement de me parler à mon retour. Il était pas rouge comme une tomate parce qu'il avait la honte d'acheter des serviettes, il était juste gêné de m'adresser la parole.
Une nouvelle cliente pose ses courses sur mon tapis. Je lui dis bonjour avant de commencer à scanner ses articles en mode pilote automatique.
Quel con. Il était super mignon en plus. Enfin, ça reste un client et ça se fait pas de draguer au boulot, mais quand même. Je crois que c'est la première fois que ça m'arrive depuis... je sais pas. Des mois. Les petites vieilles qui m'appellent « beau jeune homme », ça ne compte pas vraiment. Autant mes collègues femmes passent leur temps à se faire draguer par les clients lourdingues, moi je suis relativement tranquille. Privilège masculin.
Je me demande si je le reverrais. Sans doute. Mais j'ai peur qu'il évite ma caisse. Non pas que j'ai envie de le revoir. Merde j'en sais rien. En plus si ça se trouve, je me fais des films. Peut-être qu'il était vraiment gêné et qu'il essayait pas du tout de me draguer. Je suis con.
Et il faut que j'accélère le mouvement parce qu'il commence à y avoir la queue à ma caisse. Vivement la fermeture.
****
Bon c'était un peu cliché mais en même temps on aime les clichés x)
Vous vous en doutez, cette rencontre va devenir un peu plus.
A la semaine prochaine ! (enfin si j'arrive à écrire le chapitre suivant oups)
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro