PDV Arthur :

- Vous êtes sûre que vous souhaitez que ce soit nous ? je demande à Dame Luciana.

Elle hoche doucement la tête, l'air pensif mais le visage, tout de même, dur.

- Oui Arthur, je suis sûre de mon choix. Toi, Liya, Liam et Jennifer m'accompagnerez. Ma décision est prise. Vous êtes mes meilleurs élèves et je veux que ce soit vous et personne d'autre.

D'accord Madame, si tels sont vos désirs...

Je m'incline légèrement et quitte son bureau pour aller préparer mon armure vermeille. Le stress est double maintenant que je sais que je ferai partie des cinq nominés.

Faire partie des nominés pour une guerre est une place importante car, quand tous les rangs des deux armées adverses sont en place, cinq personnes des deux camps se rejoignent au centre du commencement de la bataille. Des paroles sont dites et la guerre débute lorsque les dix nominés commencent le combat.

Pour cette guerre, c'était évidemment à Dame Luciana de choisir ses quatre nominés. Elle nous a choisis et j'accepte cette place avec plaisir même si j'appréhende beaucoup. Être aux premières loges à sa toute première guerre est quelque chose de très dur psychologiquement. Surtout qu'on ne sait pas contre qui on va se retrouver...

PDV Diana :

Nous avons fini de réduire la distance qui nous séparait de l'armée Endorienne. Nous nous sommes arrêtés car, si ce que m'a raconté Raphaël est vrai, cinq d'entre nous vont devoir marcher jusqu'aux cinq personnes désignées dans le camp adverse et la guerre sera déclarée officiellement.

J'appréhende beaucoup. J'ai versé pas mal de larmes pendant le trajet. Raphaël les a vues mais n'a fait aucune remarque, heureusement.

Je commence à avoir de plus en plus chaud. Je transpire de plus en plus et ma respiration est de plus en plus saccadée. Mon corps est parcouru de petits tremblements et je donnerais n'importe quoi pour être ailleurs qu'à l'endroit où je suis en ce moment.

Les armées des Démons sont rangées en rangs droits et serrés. Ils sont rangés par blocs de cinq cents, il me semble.

Arittan attend que tout le monde soit silencieux et ait trouvé sa place avant de déclarer d'une voix forte :

- Nous devons être cinq pour aller à la déclaration de guerre. Je vais y aller, bien évidemment, et quatre autres vont m'accompagner. Alors j'ai déjà fait mes choix personnellement et personne ne peut faire d'objection, c'est bien compris ?

Tout le monde hoche la tête, sauf moi. Il ne le voit pas, trop plongé dans son discours.

- Alors pour cela, j'ai choisi Raphaël, Ulrick, Pelco et bien entendu Diana.

Il me lance un regard disant qu'il doit me garder sous sa surveillance et je détourne les yeux. Pelco, quant à lui, sort des rangs pour se placer à côté d'Arittan.

- Vous connaissez les règles, commence Arittan. Dès que les premiers coups d'épées sont donnés, vous descendez la plaine et vous attaquez selon le plan prévu, est-ce clair ?

Ils bougent tous leur tête, tels des ânes.

- Je veux des prisonniers, bien évidemment, mais seulement ceux qui sont vulnérables ou qui sont dans la haute catégorie. Comment les appelle-t-on déjà, Diana ?

- Les Maîtres..., je dis doucement.

- Ah oui ! Voilà. Les Maîtres ! Capturez-en autant que vous pouvez, on les reconnait à leur armure rouge. Bon, vous avez bien compris ?

- Oui ! disent tous les Démons en chœur ce qui forme un brouhaha assourdissant.

Arittan se retourne et nous nous plaçons en une lignée de cinq. Raphaël est en premier, en partant par la gauche, suivi par moi-même qui suis à la gauche d'Arittan. Á la droite de ce dernier, c'est bien évidemment Ulrick suivi de Pelco, le Démon.

Arittan, Ulrick et Raphaël ont gardé leur aspect humain, mais je ne pense pas que ça va durer très longtemps.

J'essuie mes mains humides sur ma combinaison noire avant d'avancer en rythme avec mes quatre acolytes. Nous voyons l'armée adverse au loin. Elle est tellement lointaine que nous ne voyons que des points se dessinant sur l'herbe.

« Il ne nous reste plus qu'à les rejoindre... », je me dis avec effroi.

PDV Liya :

Dame Luciana vient de donner les dernières directives. J'ai pu constater qu'Arthur et Liam étaient anxieux, beaucoup même. Jennifer un peu moins, mais elle le reste malgré tout. Mais pas moi. Je n'irai pas jusqu'à dire que je ne ressens rien, car ce serait mentir. C'est juste que depuis neuf ans, depuis la mort de Diana, je me suis surentraînée et je n'ai plus du tout peur de faire face aux Démons. Ils ont tué ma meilleure amie et ils vont en payer le prix !

Mes yeux remplis de haine, je regarde dans quel ordre particulier nous sommes : Dame Luciana est au milieu, à sa droite, il y a Liam puis moi. Et de l'autre côté de Dame Luciana, à sa gauche, donc, c'est Arthur, puis Jennifer.

Après avoir soufflé une dernière fois, nous entamons la marche vers cette fameuse guerre prévue depuis des dizaines d'années maintenant. J'ai ma main droite sur mon épée tandis que la gauche pend sur le côté de mon corps.

« J'espère qu'on tiendra le coup... », je me dis dans un soupir.

PDV Diana :

Nous nous approchons encore et encore. J'ai presque la bile dans la bouche, j'ai envie de vomir, j'ai les larmes aux yeux et je veux plus que tout m'enfuir d'ici. Mais je ne peux pas. Arittan contrôle chacun de mes gestes. Si je fais quelque chose de travers, il sera là quoiqu'il arrive.

- Essaie de réguler ta respiration Diana, me chuchote Raphaël, tu verras, ça passera mieux.

Je hoche la tête et essaie de suivre ses conseils mais ça ne marche pas. Je suis toujours aussi mal. Je me demande qui seront les personnes en face de nous ?

« Des Maîtres sûrement. Et... ma mère... », je pense en déglutissant.

Je sens la présence d'Arittan à ma droite et ça m'est juste insupportable.

Mes yeux contemplent l'herbe, sur laquelle nous marchons. Je n'ose pas relever la tête. J'ai peur de ce que je pourrai y trouver en la relevant.

- Les voilà enfin..., s'exclame Arittan, un sourire aux lèvres, je suppose.

Ma curiosité dépassant toutes mes peurs, je lève immédiatement la tête, par réflexe. Mon corps se fige malgré tout devant le spectacle qui s'offre à moi...

« Oh merde... ».

PDV Liam :

J'ai les yeux rivés devant moi. Je n'arrive pas à détacher mon regard du camp des Démons. Plus nous avançons, plus nous distinguons la grandeur de leur armée. Ils doivent être aussi nombreux que nous, c'est rassurant, déjà, ils ne sont pas plus que nous.

Mais alors que je suis en train de contempler l'étendue de leur armée, je n'ai pas fait attention aux cinq personnes qui s'avancent vers nous.

- Mais c'est impossible..., disent Dame Luciana ainsi que mes trois amis en choeur.

Je tourne la tête et distingue chacune des cinq personnes qui se trouvent à une centaine de mètres de nous.

Je plaque brutalement une main sur ma bouche pour me retenir de crier. Les larmes me montent vite aux yeux mais je les chasse d'un revers de la main.

« Mais qu'est-ce qui s'est passé ? », je me demande, l'angoisse me tiraillant de plus en plus.

Diana. Ma Diana. Elle est vivante, elle est là devant moi et pourtant elle est encore tellement loin.

Trop de questions se bousculent dans ma tête. Qu'est-ce qu'elle fait avec eux ? Pourquoi est-elle aussi maigre ? Qu'est-ce qui lui est arrivé ? Pourquoi son regard exprime de la tristesse ? Pourquoi nous a-t-on menti sur sa mort ? Pourquoi ne l'avons-nous pas secourue ?

Mais qu'est-ce qui s'est passé à la fin ? Pourquoi est-elle dans cet état ?

PDV Diana :

Je suis au plus mal. Liya, Arthur, Jennifer et... Liam, ils se tiennent tous à quelques mètres de moi, aussi choqués les uns que les autres, mais ils sont là.

Malheureusement, ils sont là. Ils sont en train de voir le monstre que je suis devenue. Ils sont en train de me reluquer se posant des centaines de questions, je suppose.

Vingt mètres seulement nous séparent. Vingt misérables mètres qui font que nous sommes dans des camps différents. Les larmes me montent aux yeux et Raphaël doit le ressentir car il me dit :

- Je sais combien ça fait mal de voir ceux qu'on aime de l'autre côté de la barrière...

Je ne comprends pas vraiment le sens de ces mots mais je les écoute. Je les retiens.

Je n'ai pas encore eu l'occasion de croiser le regard d'une des cinq personnes qui ont beaucoup compté dans ma vie d'avant.

Il faut que tu le fasses, Diana... Que tu le veuilles ou non. Tu es obligée, tu en as besoin, me dit ma conscience.

Alors, sur ses conseils, je tourne légèrement la tête et croise le regard de Liya, en premier. Elle a le regard rempli de rage et de haine. Sa nouvelle couleur de cheveux, noire, ne fait qu'accentuer cet effet.

Quand vient le tour de Liam, je baisse automatiquement les yeux. Je m'en veux. Je m'en veux terriblement de les faire souffrir à ce point.

Il faut que tu croises son regard..., me répète ma conscience.

Mes yeux noirs arrivent enfin à croiser son regard bleuté. Ses yeux sont aussi vides que les miens. Il doit être en train de réfléchir à toute cette situation complètement invraisemblable. En même temps, combien avait-il de chance de retrouver la jeune fille qu'il aimait et qu'il croyait morte ? Il doit être aussi effondré que moi...

Quand à Arthur et Jennifer, je n'ai récolté que des regards noirs et remplis d'une haine immense. Par contre, je n'ai pas osé croiser les yeux de ma mère. C'est à cause d'elle que j'en suis arrivée là... J'ai et j'aurai toujours une profonde haine contre elle !

- Alors, comme on se retrouve Luciana ! lance Arittan, un sourire plaqué sur les lèvres.

- Pour moi, ce sont loin d'être des retrouvailles Arittan, commence Luciana.

Puis, elle tourne son visage vers le mien.

- Alors c'est là-bas que tu étais pendant tout ce temps ?

- Comme si tu ne le savais pas..., je lui réponds en posant ma main sur le manche de mon épée.

- Alors tu serais prête à nous tuer pour le compte d'Arittan ? me demande-t-elle.

Je sais que l'ensemble des personnes ici présentes me regarde, y compris Arittan. Je sais que je n'ai pas le droit à l'erreur, pas en sa présence. Je relève la tête doucement en lui disant :

- Je n'ai pas le choix...

Arittan rigole fort en plantant ses iris dans celle de Luciana :

- Je te serai infiniment reconnaissant Luciana de te l'être mise à dos ! Grâce à toi, ma victoire est assurée.

Luciana se place en position défensive :

- C'est ce qu'on verra...

Tout le monde sort son épée de son fourreau respectif et se place en position d'attaque. Et c'est à ce moment-là que je réalise une chose : c'est contre Liam que je vais devoir commencer le combat...