Le monde s'effondre autour de moi. Je n'en reviens pas qu'ils aient choisi cette cible. En même temps, c'était largement prévisible !

- Quoi ? Mais pourquoi See&Luce ? Pourquoi pas une autre région ? je    crie à Arittan.

Un sourire diabolique vient se nicher au creux de ses lèvres.

- Oh, je vois Diana. Tu es toujours attachée à cette contrée remplie de    traîtres et de manipulateurs !

« Le seul manipulateur ici, c'est vous ! », je pense avec dédain. Mais je me retiens de lui dire cela car il en est de ma survie et de celle de ma famille.

- J'y ai vécu pendant des années, c'est normal, non ?

- En attendant, c'est ici que tu vis et que tu vivras. Tu n'as plus aucune attache là-bas ! Ils te croient morte et personne n'a cherché à venir te délivrer, tu t'en rappelles ?

Mes membres restent paralysés. Il ne m'avait jamais avoué cela. Je m'étais toujours fait ma propre opinion là-dessus.

- Comment ça ? Comment savez-vous qu'ils me croient morte ?

- J'ai des espions partout, Diana, sache-le, lâche-t-il en se tournant vers une table pour y prendre la carte posée dessus.

Il me laisse avec cette phrase avant de nous inviter autour de la table pour lire le plan d'attaque. Je l'écoute d'une oreille distraite. Je suis plongée dans mes pensées et je n'arrive pas à rester concentrée.

- La région de l'Eladaméa comporte deux chaînes de montagne, une plus    petite que l'autre..., intervient Ulrick.

Mais toutes ces paroles sont trop lointaines pour moi.

« Mais qui leur a dit que j'étais morte ? je me demande. Comment se fait-il que tout le monde m'ait abandonné ? Peut-être que, finalement, Arritan a raison, ma place est auprès des Démons... ».

- Alors Diana, tu es d'accord avec le plan ? m'interroge Arittan.

Il me sort totalement de ma rêverie mais je ne lui montre rien.

- Oui, je pense qu'il est parfait !

Il nous intime l'ordre de disposer en chargeant Raphaël de me ramener à ma cellule. Sur le trajet, nous parlons peu. Il m'explique simplement le plan car je lui ai confié que je n'avais rien écouté. Après ça, j'entre dans ma cellule et nous nous souhaitons une bonne nuit.

***

Mon entraînement vient tout juste de se terminer. Je souffle de soulagement car pendant ces entraînements, mon corps fait beaucoup d'efforts et je suis épuisée à chaque fois. Arittan ne me fait pas souffrir que psychologiquement mais aussi physiquement.

- Tiens, me crie Raphaël en me lançant une serviette mouillée que j'attrape en vol.

- Merci !

Je m'essuie avec, essayant de sécher chaque partie de mon corps. Quand je finis enfin ma tâche, je remarque que mon frère me fixe de haut en bas.

- Qu'est-ce qu'il y a ? je le questionne.

- Non, rien. C'est juste que si tu n'étais pas ma sœur, il y a longtemps que je t'aurai embrassée !

- Tu l'as déjà fait, je te rappelle !    

Il rigole doucement et nous quittons la salle d'entraînement. Je croise Domios en chemin, le Démon que j'aime bien.

- Salut Domios ! Ça va ?

- Comme d'habitude et toi ?

- Pareil ! Tu fais quoi ?

- Arritan m'a chargé de laver toutes les tenues de combat avec plusieurs    autres Démons pour demain, alors il faut que j'y aille !    

Je lui fais un signe de main et Raphaël me demande :

- Tu l'aimes bien ce Démon, pas vrai ?

- Oui, beaucoup. Il m'a énormément aidée durant mon séjour ici !

- Et je ne l'en remercierai jamais assez, me confie-t-il.

Je comprends les remords de Raphaël vis-à-vis de mon emprisonnement mais il ne peut s'en vouloir qu'à lui-même.

Nous nous quittons quand j'entre dans ma cellule. Je demanderai à prendre ma douche tout à l'heure. Je jette ma serviette dans un coin de la pièce et m'assois à la petite table qui constitue l'un des rares meubles de ma prison.

J'attrape mon carnet. Un cahier qu'on m'a donné après mes multiples demandes. J'étais obligée d'écrire tout ce qui m'arrivait sur un support. C'était une obligation pour moi que de décrire ma vie, surtout en ce moment.

J'écris en moyenne une fois par semaine mais là c'est une exception. Demain, la guerre commencera et la terreur fait partie de mon quotidien à chaque fois que j'y pense. L'appréhension se mélange à la peur. Je vais revoir toutes ces personnes qui ont compté pour moi par le passé. Elles me croient mortes. Comment vont-elles réagir quand elles me verront ?

Je prends mon crayon et commence à écrire. Les minutes et les minutes passent et je n'ai plus aucune notion du temps. C'est Pelco qui me sort de mes pensées.

- Diana, on m'a chargé de t'emmener à ta toilette quotidienne. La dernière    avant la guerre. Pendant que tu te laveras, Domios va ramener ta tenue de combat dans ta cellule.

Je pose mon crayon et mon carnet et me lève. J'attrape le sweat et le legging que Raphaël m'avait apporté de la Terre quand je me suis faite emprisonner ici.

Pelco me précédant, je suis ses pas jusqu'à la salle de bain. Elle n'est composée que d'une baignoire et d'une toilette. Je suis la seule à l'utiliser avec Raphaël et Ulrick ainsi qu'Arittan, de temps en temps.

Je pose toutes mes affaires à même le sol et je ferme la porte. Le Démon est de l'autre côté et surveille la porte. J'ai déjà songé à utiliser mes pouvoirs mais Arittan le ressentirait immédiatement et je signerais mon arrêt de mort ainsi que celui de ma famille...

Après m'être convenablement nettoyée et changée, je retourne dans ma cellule où je trouve ma tenue de combat. Je l'ai déjà portée cinq ou six fois lors de petits combats où l'on visait à éliminer des villages entiers. Ça a été une horreur pour moi mais je n'ai rien pu faire. J'ai dû tuer plusieurs centaines de personnes durant ces combats.

J'étends ma tenue sur la table pour qu'elle ne soit pas froissée. C'est une sorte de combinaison très moulante, noire. Elle est très confortable mais un peu trop serrée à mon goût. Mais je ne dis rien à Arittan pour éviter qu'il ne déchaîne toute sa colère sur ma misérable personne.

Sur ce, je m'endors, me disant que demain sera une journée qui marquera un tournant dans ma vie...

***

- Diana... Diana... Réveille-toi !

Je reconnais la voix de Domios et ouvre un œil. Je frotte mes yeux et commence à me lever.

- Tiens, ton repas...

- Merci Domios mais... Je n'ai pas faim... J'ai mal dormi toute la nuit et    j'ai juste envie de vomir. Je ne suis vraiment pas bien...

- Oh... Tu veux que je te ramène quelque chose ?

Je tourne ma tête de gauche à droite.

- Non, c'est bon... Je ferai avec, mais c'est gentil à toi.

- De rien, Diana. Je venais aussi te dire qu'Arittan veut toutes ses troupes dans une heure, à l'emplacement habituel. Je crois que c'est Raphaël qui viendra te chercher.

Le petit Démon quitte les lieux, me laissant seule. J'essaie de ne pas trop réfléchir car cela me fait plus de mal qu'autre chose. Surtout dans ces circonstances.

Je finis de m'habiller et me fais une queue de cheval à l'aveugle puisque je n'ai aucun miroir. Je la fais bien haute pour éviter que mes cheveux ne viennent se coller à mon visage pendant les combats.

Je place ensuite ma ceinture autour de ma taille. Elle est composée de deux fourreaux en cuir orné, un pour mon épée et l'autre pour mon poignard. Je les installe dans leurs emplacements respectifs. Cette ceinture a aussi deux petites pochettes en cuir à l'avant qui se referment grâce à un petit clapet. Dans l'une, j'y place des bouts de plantes de Hamamélis, que j'ai piqué à de nombreuses reprises à ces stupides Démons. Ces plantes peuvent endormir n'importe qui si l'on sait la préparer, évidemment. Le dernier emplacement, je le laisse vide, il pourrait m'être utile.

Un Démon passe devant la cellule et je lui demande gentiment d'appeler Domios pour qu'il vienne me voir. Cela ne tarde pas car à peine cinq minutes plus tard, il entre dans ma cellule.

- Qu'est-ce qui se passe Diana ? Tu as peur ?

- Bien sûr que j'ai peur mais ce n'est pas pour ça que je t'ai fait venir.

Il ne répond rien, me laissant continuer.

- Je ne sais pas de quoi l'avenir va être fait, et je souhaite te faire part de quelque chose, si je viens à mourir pendant cette guerre, ou si je ne reviens jamais.

Je me retourne et attrape mon cahier posé sur la table.

- Je sais que tu ne participeras pas à la guerre Domios et comme je t'aime beaucoup, je voulais te faire cadeau de ceci, je dis en lui tendant mon carnet. J'y ai écrit tout ce que j'avais dans la tête depuis mon arrivée ici. Il renferme mes pensées les plus intimes depuis neuf ans. Je veux que tu le gardes durant toute la guerre, je ne veux pas qu'il tombe entre de mauvaises mains.

Il observe le cahier avec de grands yeux. J'ignore ce qu'il pense jusqu'à ce qu'il dise :

- De toute ma vie, on ne m'a jamais fait de cadeau. Ça me touche beaucoup ce que tu fais là, Diana.

Il caresse doucement la couverture.

- Je te promets d'en prendre soin. Si tu reviens un jour, ce que je ne te    souhaite pas, je te le montrerai pour que tu saches que je l'ai gardé, comme tu me l'as demandé.

Mais je reste bloquée sur une seule phrase de son petit monologue :

- Tu ne souhaites pas que je revienne ?

- Non... Je sais que tu es malheureuse ici et que tu mérites de revoir ta    famille et tes amis. Tu ne mérites pas de rester enfermée ici à longueur de journée. C'est pour cela que j'ai essayé tant bien que mal de te redonner le sourire. Tout le monde mérite d'être heureux et toi, tu es loin de l'être ici...

Ça me touche tellement ce qu'il me dit, que je me mets à pleurer. Je pense que les nerfs jouent aussi là-dessus. Je le prends pour la première fois dans mes bras et il me chuchote des mots doux.

Il planque ensuite mon cahier dans son tablier et repart de ma cellule après m'avoir souhaité bonne chance.

J'essuie tant bien que mal mes larmes avant que Raphaël ne fasse irruption dans la pièce.

- Tu es prête ?

- Je ne pense pas que ce soit le bon terme, mais oui.

Il passe son bras au-dessus de mes épaules et nous quittons le Palais pour arriver devant les troupes d'Arittan. Nous nous plaçons à la droite d'Arittan tandis qu'Ulrick est à sa gauche.

Les milliers de Démons se tiennent en face de nous et Arittan donne les dernières consignes et le blabla habituel. Je n'arrive pas à me concentrer. Je me demande comment vont se passer les prochaines heures ?

- ... nous passerons par le grand portail magique derrière moi et nous    marcherons à peine un quart d'heure jusqu'à l'école See&Luce, là où se déroulera la première bataille...

Á chaque fois que le nom "See&Luce" est répété, un pincement au cœur surgit, me faisant encore plus appréhender les moments à venir.

J'ai dit à Domios que je ne savais pas si j'allais mourir mais je sais très bien que non. Je possède le Dragon au plus profond de moi et j'ai très peu, mais très, très peu de chance de perdre la vie durant cette guerre.

Arittan finit son monologue et nous passons tous les quatre le portail suivis de milliers de Démons. Je ressens de la joie en reconnaissant les plaines de l'Eladaméa, et ce malgré ce qui va suivre.

Nous nous approchons à chaque pas un peu plus. Mes mains deviennent de plus en plus moites mais je suis sûre d'une chose : cette guerre va tous nous changer quoiqu'il arrive et va marquer les esprits à vie...

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Hey ^^ alors quelques avis sur ce chapitre ? :)

Plus de 2000 mots quand même !

Vous allez rire mais j'ai pleuré en écrivant ce chapitre, au moment où Domios lui parle qu'elle n'est pas heureuse et tout :'(

Merci pour les personnes qui votent et commentent et aussi celles qui lisent ;)

Bisous <3