Je retourne alors sur mes pas pour la prendre dans mes bras. Sentir à nouveau la chaleur de son corps me fait le plus grand bien. Nous restons quelques minutes dans cette position avant que je ne m'en aille, chercher mon téléphone. Je redescends alors dans la cuisine où mon père se trouve.

- C'est bon, j'ai mon téléphone ! je dis en rigolant.

- Allez, appelle tes frères maintenant. Ça les réveillera en plus de les surprendre.

On dirait un enfant ! Il me fait rire avec ses commentaires et ses manières.

- Bon, c'est parti.

Je cherche rapidement le numéro d'Emery et l'appelle. Matinal comme il est, il ne met que quelques secondes à répondre.

- Allô ? demande-t-il.

- Emery ? je l'interroge comme pour être sûre.

Et je comprends à son silence qu'il reconnaît ma voix.

- C'est bien toi, Selena ? m'interroge-t-il, la voix légèrement brisée.

- Oui, Emery, c'est bien moi. Je suis désolé pour ce qui est arrivé, tu seras mis au courant ce soir, à ton retour.

- Tu es revenu ? me demande-t-il de nouveau, ignorant mes phrases précédentes.

- Oui, je suis rentrée. Tu sauras tout en détails ce soir.

Un blanc s'installe. Aucun mot de semble vouloir sortir de ma bouche, à présent. Papa me regarde avec un petit sourire. C'est Emery qui brise ce silence :

- Je suis tellement heureux, Selena, tu ne peux pas imaginer à quel point. J'ai hâte de rentrer et d'enfin te prendre dans mes bras après cet année de séparation.

- J'attends aussi ce moment.

Je souris de toutes mes dents, mon grand frère m'a terriblement manqué.

- C'est qui ? j'entends de l'autre côté du combiné.

C'est une voix féminine.

- C'est ma petite sœur, Selena, répond Emery.

Il doit boucher le micro de son téléphone car je n'entends plus rien ensuite. J'allais raccrocher quand il reprend :

- Désolée Selena, c'était Marina.

- Qui est Marina ?

- C'est ma copine. Ça fait neuf mois que nous sortons ensemble.

- Dix mois ! j'entends crier à côté de lui.

- Oui, c'est vrai, dix mois, rectifie mon frère.

J'ai soudain l'impression de me sentir de trop. Je souhaite alors une bonne journée à Emery et raccroche. Après cet appel, je tire une tête d'enterrement.

- Que se passe-t-il, ma chérie ? demande mon père qui a suivi toute la conversation. Tu sais, c'est normal, tu n'étais pas au courant pour Marina.

- Ce n'est pas ça..., je dis doucement. C'est que... J'ai raté tellement de choses en un an. Et je n'étais pas là. J'ai l'impression de ne plus être de la famille. C'est horrible, je le sais. Mais c'est ce sentiment qui prend le dessus sur les autres.

C'est la première fois que je parle avec tant de profondeur avec mon père. Je décide alors de continuer :

- Plus le temps passe, plus ma vie magique a pris le dessus sur moi, jusqu'à ma disparition. Ma vie terrestre s'en est petit à petit allée et aujourd'hui je me retrouve entre les deux. J'avais une telle hâte de revenir ici. J'ai pris des risques énormes pour pouvoir vous revoir. Mais là, j'ai l'impression que tous mes espoirs s'effondrent. Vos vies ont continué après mon enlèvement, c'est normal. Mais je n'aurai jamais imaginé à ce point. Le temps continue son chemin malgré que le mien ce soit arrêté. Je suis désolée. Tout m'échappe...

Mon père me prend dans ses bras et me frictionne le dos. Il essuie les quelques larmes qui ont coulé et embrasse mon front.

- Je n'ai même pas de mot pour te réconforter, se désole-t-il. Je comprends ce que tu ressens. Je sais. Et c'est inconsolable.

Il comprend. C'est l'essentiel. Je me rends alors compte que tout a changé autour de moi et que rien ne sera jamais comme avant. Plus jamais.

- Tu veux que j'appelle moi-même Romy ? me questionne-t-il en prenant mon portable.

- Non, laisse, je vais le faire.

Je sais que Romy est toujours possédé. Mais j'ignore si Arittan l'utilise toujours. Sûrement trop occupé par la guerre. À l'heure d'aujourd'hui, mon frère doit être maître de ses faits et gestes. Mais pour combien de temps encore ? Je soupire et compose le numéro de mon grand frère. Ça sonne, ça sonne, et pendant une seconde, je m'espère à ce qu'il ne décroche pas. Mais non.

- Selena ? Oh mon Dieu, c'est impossible. Selena ? crie Romy dans le combiné.

- Oui, c'est moi, je dis, hésitante.

- Mais qu'est-ce que tu fais ici ? Où étais-tu ? J'ai eu tellement peur... Je t'ai vu dans la clairière le jour où...

Mon cœur rate un battement. Mais après une seconde de réflexion, et un regard vers mon père, je préfère retenir mes questions et les lui poser ce soir ou demain.

- Je suis là, maintenant. Je suis à côté de papa, regarde.

Je tends le téléphone vers mon père et celui-ci le prend, me voyant au plus mal. Il parle à Romy et moi, je quitte la cuisine pour ma chambre. Cette fameuse chambre. J'y ai tellement de souvenirs qu'y revenir me ferait presque mal. Je déteste me rappeler. Mais rien n'a bougé dans ma chambre. Tout est à sa place, comme je l'avais laissé, le jour de la fête des voisins, il y a plus d'un an de cela. Mon père toque à la porte pour me rendre mon téléphone et repart aussitôt. Lorsque j'ouvre mon cellulaire sur les messages, je retrouve ceux d'avant mon départ. Et ceux de mes meilleurs amis de l'époque : Claire, Enzo et Adrien. Mais que sont-ils devenus ? La question résonne dans ma tête sans réponse. Je pose alors mon portable et m'en vais à la rencontre de ma mère. Elle est dans l'ancienne chambre de Romy et habille Maxime.

- Maman ?

Elle tourne la tête vers moi, elle ne m'avait pas entendu arriver. Pendant ce temps, Maxime exprime sa gaieté avec des petits bruits d'enfants.

- Oui, Selena ? Que se passe-t-il ?

Elle arrête de vêtir mon petit ange quelques instants et celui-ci en profite pour s'extirper et courir un peu partout dans la pièce.

- Je voulais savoir ce que sont devenus Claire, Enzo et Adrien.

- Oh..., laisse-t-elle échapper. Attends deux minutes, s'il te plaît.

Son visage s'est transformé en quelques secondes. Elle est à présent préoccupée. Je m'adosse alors au mur lorsqu'elle attrape Maxime, finit de l'habiller et l'envoie à Mélina pour qu'elle lui brosse les dents. Maman ferme la porte derrière elle et se tourne vers moi.

- J'ai dû mentir sur ta disparition lorsque les bruits ont commencé à courir, me dit-elle doucement en prenant place sur le lit.

Quant à moi, je reste debout. J'ai été assise bien trop longtemps dans ma cellule. Je la laisse continuer, sans émettre d'objection.

- J'ai été tentée de leur dire la vérité, que tu avais été enlevée. Mais je m'y suis résignée. Cela allait nous engendrer trop de problèmes. Claire aurait été folle de rage de te savoir disparue. J'ai donc expliqué aux personnes qui sont venus me voir, tes amis comme tes professeurs, que tu avais décidée de prendre du recul sur ta vie. Je leur ai dit qu'en ce moment tu n'étais pas en grande forme et que tu m'avais toi-même demandé de quitter cette ville pour une autre, où tu pourrais te retrouver.

Les larmes perlent dans mes yeux. Je n'arrive pas à retenir les émotions qui m'envahissent.

- Claire a été d'abord en colère, puis triste. Elle m'a suppliée d'aller te rendre visite mais je lui ai répondu que c'était impossible, pas dans l'internat où je t'avais placée. Elle se demandait sans cesse pour qu'elle raison cela s'était fait du jour au lendemain, sans prévenir. Te connaissant, j'ai dit que tu détestais les au revoir.

Claire a aujourd'hui dix-huit ans, comme moi. Elle ne me pardonnera jamais cette disparition. Je la connais trop pour cela.

- Je pense que je ferai mieux de ne pas aller lui rendre visite, n'est-ce pas ? j'interroge ma mère.

- Elle n'habite plus ici, de toute façon.

Elle me lâche ces paroles comme une bombe. D'abord, je ne comprends pas la portée de ses mots, puis tout devient claire dans mon esprit. Et sans que je ne dise quoique ce soit, ma mère continue :

- Après ta disparition et donc, ton faux transfert dans un internat, Claire a commencé à se sentir mal. Elle m'a avouée devenir dépressive. J'essayais de la réconforter mais c'était peine perdu. Puis ses parents ont divorcé. Elle était au fond du fond, mais elle avait Adrien. Jusqu'à ce qu'il lui annonce qu'il partait faire sa terminale à des centaines de kilomètres d'ici. Claire a touché le fond à ce moment-là. Trop de problèmes arrivaient dans sa vie. Et le pire, c'est qu'elle ne t'avait plus, toi, pour la réconforter.

Je me sens tellement coupable. Tellement. Claire mérite le bonheur.

- Un soir, alors que j'allais me coucher, j'ai reçu un appel de sa maman et Claire avait tenté de s'ôter la vie. Elle a été sauvée de justesse. C'était un peu après la rentrée, il y a huit mois. Après cet accident, Claire avait des rendez-vous réguliers chez un psychologue mais rien à faire. Puis sa maman a été mutée dans le Sud de la France, pour Claire, c'était comme une délivrance. Elle a donc suivi sa mère et maintenant, d'après les dernières nouvelles que j'ai eu d'elle, elle va beaucoup mieux.

Je suis heureuse pour elle. Claire était de celles qui avaient une joie de vivre infinie. Elle se doit de la retrouver.

- Pour Adrien et Enzo, c'était plus facile. Ils ont compris ton choix et l'ont accepté. Aujourd'hui, Adrien est parti finir ses études dans une autre région et Enzo est toujours dans son lycée. J'ai    conscience que ça fait beaucoup de changements d'un seul coup, mais le temps n'attend pas. Le cas de Claire était très grave mais aujourd'hui elle va bien, c'est l'essentiel.

- Je n'étais plus là lorsqu'elle avait besoin de moi, c'est tout ce que je retiens. Je n'étais pas là ! Ma meilleure amie, je l'ai lâchement abandonnée.

- Tu n'as pas choisi de disparaître, Selena. Ce n'était pas ton choix.

Ma mère se lève et me prend dans ses bras. À ce moment-là, je fonds en larmes, sans pudeur. Elle me frictionne le dos mais rien à faire. Je suis inconsolable.

- Dana ? murmure Maxime en ouvrant la porte. Dana pourquoi tu pleures ?

Il est tellement mignon. Il vient m'attraper la jambe et me fait un câlin. Je pleure encore plus devant tant de gentillesses. Les sentiments prennent une nouvelle fois le dessus.

- Maman ? questionne Mélina depuis la salle de bain. Je peux rester avec Selena aujourd'hui ?

- Tu as ton brevet à la fin de l'année scolaire, dans un mois et demi, répond-elle en me lâchant.

Je prends mon petit ange dans mes bras en essuyant mes larmes.

- Une journée de plus, une journée de moins, ça ne change pas grand chose, je dis en haussant les épaules.

- Mais vous resterez toutes les deux ? nous demande maman.

- Oui ! nous nous exclamons en même temps, Mélina et moi.

- Dans ce cas, tranche ma mère, je n'y vois pas d'inconvénient. Par contre, Mélina, va avertir Victor.

Elle court voir mon père. Je reste donc seule avec Maxime et ma mère.Cette dernière, avant de partir avec mon petit frère, me dit doucement :

- Les choses ont changé Selena. N'espère pas que tout redeviendra comme avant. Il est préférable d'oublier que de se rappeler.

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Ce chapitre annonce mon retour pour mes fictions 😊 je suis vraiment heureuse de revenir. Je vous avoue que ce chapitre est écrit depuis deux semaines, je crois. Mais je préfèrais attendre avant de le publier. Voilà, voilà, j'espère que tous vos examens ce sont bien passés, aussi 😏

PS : sur differents_friends (un nouveau compte que j'ai créé avec teha17 ) j'ai écrit une nouvelle fiction en collaboration avec Chloé ❤️ elle s'appelle "Dans le mille", voici le résumé :

"- Avant de te venger Ellie, il faut être sûr de haïr.
- Je suis sûre de les haïr.
- Il faut que tu sois prête à tuer, de sang froid.
- Je suis prête à tuer, de sang froid.
- Et pour finir, il faut savoir mentir. Les gens, tu dois les manipuler.
- J'en suis parfaitement capable.
- Alors, bienvenue parmi nous !"

Bonne lecture si vous décidez d'aller y jeter un coup d'œil 😘