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Reprendre sa vie

Le timing est serré, elle doit se dépêcher. Pas de temps à perdre, il sera bientôt minuit.

Parce qu'elle a passé beaucoup de temps à tout préparer et qu'elle a longuement répété les gestes, elle sait ce qu'elle a à faire. Même si ses mains tremblent, qu'elle a le souffle court et la tête qui tourne un peu, elle sait quoi faire. Et elle va le faire. De toute façon, la machine est lancée, elle n'a plus le choix, maintenant.

Elle prend le temps de respirer profondément, trois ou quatre fois, pour se calmer. Bien assise sur les chaises paillées de la salle à manger, le dos droit, les paumes à plat sur le velours de la longue jupe culotte de Clara, elle ferme les yeux et inspire. Expire. Voilà, ça va mieux, elle a repris un peu de contrôle. Elle ne pensait pas que le passage à l'acte la toucherait autant. Non, pas vraiment. Depuis le temps qu'elle mûrit l'idée, elle était franchement certaine qu'appliquer ses plans ne lui ferait ni chaud ni froid. A la rigueur, peut-être, une certaine excitation ou nervosité. Elle ne s'attendait pas à frôler la crise de nerfs.

Voilà. Le malaise est passé. Elle se relève, jette un regard à sa montre. Minuit moins le quart. Plus de temps à perdre, Jérôme sera bientôt là et...

La montre !

Elle n'a pas pensé à la montre ! C'est sa vieille Swatch qu'elle porte au poignet, et non la Fossil de Clara ! Une nouvelle décharge d'adrénaline la transperce et c'est en courant presque qu'elle va se jeter à genoux près de la chaise où se tient le corps immobile de Clara. Ses mains tremblent à nouveau, et elle peine à décrocher la montre du poignet de sa sœur avant d'y passer la sienne. Enfin, l'échange est fait, et elle respire en tremblant un peu, la sueur au front. Bon sang ! Elle a failli oublier un élément essentiel de son plan ! Jérôme n'aurait jamais pu être entièrement dupé sans la montre de Clara ! C'est lui-même qui l'a offert à Clara pour leurs quatre ans de mariage, le mois dernier. Et tout le monde sait que Clara arbore tous les présents de son cher amour avec fierté et ostentation.

Elle se relève, croit entendre un gémissement, se penche vers le visage de sa mère, écoute. Non. Son cœur bat si fort que ses oreilles bourdonnent. Elle doit entendre ses craintes. Rapidement, mentalement, elle refait un tour de sa check-list.

Empoisonner Clara et leur mère, au cours du traditionnel repas du dimanche soir, à l'aide d'un puissant narcotique.

Echanger ses vêtements (et sa montre !) avec ceux de Clara.

Appeler Jérôme depuis le portable de Clara pour lui demander de venir la chercher à minuit très précises.

Préparer le dispositif de mise à feu de l'incendie.

Elle a tout bon, n'a rien oublié. Son regard se pose sur l'alliance d'or rose qu'elle porte au doigt. Elle se souvient encore du jour où Jérôme l'a passée au doigt de Clara. Elle se souvient de sa rage, ce jour-là. De sa certitude que ça aurait dû être elle, face à l'autel, en robe de soie, aux côtés de ce jeune médecin plein d'avenir. Elle a été la première à rencontrer Jérôme, et à sortir avec lui, après tout. Si Clara n'était pas arrivée comme un roquet dans son jeu de quilles, c'est elle que Jérôme aurait épousée. Elle et pas Clara. Surtout pas Clara ! Clara avait toujours eu la vie belle, elle. Depuis toutes petites, c'était Clara qui avait eu la chance, l'affection, la reconnaissance. Clara, et jamais elle. Clara avait été une brillante petite danseuse. Clara avait eu son bac avec mention. Clara avait fait des photos de mode pour un couturier. Clara avait fait des études avec succès. Clara avait passé quelques années à l'étranger. Clara gagnait bien sa vie. Tout le monde aimait Clara. Tout le monde. Surtout leur défunt père. Jusqu'à Jérôme, qui l'avait quittée après être tombé amoureux de Clara.

Clara lui avait volé sa vie, voilà tout, songe-t-elle. Elle, elle trainait la malchance en bandoulière depuis sa naissance. En tutu, elle avait toujours été ridicule et sans grâce. Elle avait redoublé sa terminale et avait fini par décrocher son bac au rattrapage. Elle avait dû travailler comme femme de ménage le soir pour pouvoir étudier pendant deux ans. Elle n'avait jamais réussi à finir le moindre cursus universitaire et avait quitté la faculté sans aucun diplôme, avec l'horrible impression qu'on ne lui avait pas donnée sa chance. Elle avait passé toute sa vie au même endroit, à vivre dans sa chambre étriquée de petite fille, sous les toits de la maison de leur mère. Elle travaillait comme caissière dans un petit magasin de village, à gagner une misère dont elle devait verser une bonne moitié à sa mère en guise de loyer. Personne ne l'aimait. Personne. Surtout pas leur père.

Leur père les appelait 'le jour et la nuit'. Il disait toujours que jamais jumelles n'auraient pu être aussi dissemblables qu'elles deux. Que, même si leur symétrie physique pouvait flouer une personne qui ne les connaissait pas, il suffisait de quelques minutes de discussion avec elles pour se rendre compte que l'une était la lumière et l'autre la noirceur. Elle, elle ne s'était jamais sentie noirceur, mais dupée par les préférences parentales, volée dans l'affectif par sa jumelle, abusée par une mauvaise répartition des chances et des dons qui avait tout donné à Clara et ne lui avait rien laissé. Clara avait toujours réussi tout ce qu'elle avait touché, sans jamais fournir le moindre effort. Ce n'était pas juste. Ca n'avait jamais été juste.

Quand Jérôme l'avait laissée pour Clara, elle avait décidé que cela devait cesser. Que sa sœur devait payer. Que sa sœur devait disparaître. Que ce serait sans doute le seul moyen pour qu'enfin, elle puisse jouir de ce qui lui revenait de droit mais que Clara l'avait empêchée d'obtenir.

Jérôme n'était qu'un homme. Il se laisserait si facilement abuser ! Clara et elle étaient parfaitement semblables. Physiquement, il n'aurait jamais le moindre doute. Pas même pour les horribles vergetures qui zébraient son ventre, vestige d'une grossesse adolescente subie, et contrainte par sa mère de mener à son terme 'pour lui servir de leçon'. Heureusement, la leçon s'était arrêtée avant qu'on ne la force à garder l'enfant ou à s'en occuper. Elle avait laissé sa mère s'occuper du problème. Evidemment, Clara n'était jamais tombée enceinte à quatorze ans... Quand Clara leur avait annoncé, deux mois auparavant, la future naissance de l'héritier de Jérôme, elle avait compris que le moment d'agir était venu. Enceinte depuis peu, Clara avait déjà, elle aussi, des vergetures. Jérôme ne s'étonnerait donc pas de leur présence sur son ventre. Bien sûr, l'incendie déclencherait une fausse couche, et il n'y aurait pas d'enfant. D'ailleurs, il n'y en aurait jamais. Il était hors de question qu'elle repasse par là. Nul doute que Jérôme serait effondré de la stérilité de son épouse, causée par l'interruption violente de sa première grossesse. Jérôme était un homme bon et généreux. Il ferait de son mieux pour aider sa jeune épouse affligée à se remettre du drame, et la couvrirait de présents. Elle avait hâte d'y être.

Plus que quelques minutes avant l'arrivée de Jérôme. Il est temps de lancer l'incendie. Mentalement, elle remercie toutes les séries télévisées policières dont elle se gave chaque semaine, et qui lui ont appris à déclencher un feu rapide et violent sans laisser d'indices. Ou si peu.

Voilà. C'est fait. Elle recule jusqu'à la fenêtre, qui est bloquée et n'ouvre plus depuis des années et que sa mère n'a jamais voulue faire réparer, et regarde les premières flammèches lécher le mur. Son cœur se dilate soudain, de plaisir. Elle reporte son attention sur les corps inertes de sa mère et de sa jumelle. Elle s'en veut un peu de ne pas avoir trouvé de quoi les tuer, pendant le repas, au lieu de les endormir. Un tout petit peu. Non seulement elle n'avait pas envie de laisser une quelconque trace dans leurs organismes qui aurait pu laisser penser que l'incendie n'était pas un accident, mais surtout, il est essentiel pour son plan que ses victimes soient vivantes quand le feu les dévorera. Et puis, après tout, toutes deux méritent un peu de souffrir, comme elle a souffert à causes d'elles. Clara lui a volé sa vie, alors elle l'a reprend. Sa mère l'a emprisonnée dans un carcan de règles stupides, alors elle brise ses chaînes et s'envole.

Minuit moins deux. Il commence à faire chaud, et l'exaltation laisse place à une angoisse diffuse, qui doit être naturelle, face à un feu qui prend de l'ampleur. Jérôme ne va plus tarder maintenant. Elle doit se tenir prête, pour traverser les flammes avant de sortir par la porte principale. Traverser les flammes, c'est important pour son plan. Elle se doit d'être blessée. Mais pas trop. Sinon, adieu l'excuse de la fausse couche.

Voilà. Minuit.

Elle entend les cloches de l'église, toute proche, qui se mettent à sonner. Une, deux. Ce qu'elle a pu les haïr ces cloches, qui sonnent toutes les heures, même la nuit, sans jamais s'arrêter ! Trois, quatre. Comme si la mairie ne pouvait pas comprendre que même leur petit village devait entrer dans le nouveau millénaire et suspendre les sonneries nocturnes. Cinq, six. Il commence à faire vraiment très chaud, la fumée la fait tousser, et elle continue de guetter les phares de Jérôme, par la fenêtre. Sept, huit. Elle se met accroupie et commence à râler contre Jérôme, qui est en retard ! Neuf, dix. Qu'il se dépêche, bientôt, les flammes seront trop hautes et trop puissantes pour qu'elle puisse les traverser. Onze. Déjà, le montant de la fenêtre lui brûle les mains et... Onze ? Où est le douze ?! Minuit, douze coups !! Où est le douze ? Elle regarde la montre en plissant les yeux et toussant. Sa montre marque bien minuit et...

Et elle se souvient. Nous sommes fin octobre. Le changement d'heure a eu lieu la veille. Jérôme ne viendra pas avant une heure. Alors, elle hurle en essayant d'ouvrir la fenêtre.

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