Chapitre 4-3
Clarke eut un violent frisson puis éternua dans son coude.
— À tes souhaits ! répondit Bellamy en souriant. Ça va, tu ne t'es pas fait mal ?
— Non, mais ce n'est pas passé loin...
Clarke lui décocha un sourire puis reprit son ascension de l'échelle sur laquelle elle était perchée. Elle se hissa sur la plate-forme métallique en haut et attendit que Bellamy la rejoigne, après quoi ils reprirent tous deux leur exploration de l'Arche en faisant très attention à ne pas aller dans les endroits dangereux ou occupés par des techniciens...
— Je crois qu'on parle de moi, dit soudain Clarke.
— Sûrement Lucia qui est jalouse.
Clarke ronfla.
— Ça ne m'étonnerait même pas, tu vois ? Elle l'a toujours été, de toute façon, car selon elle, je suis beaucoup plus jolie qu'elle avec mes cheveux blonds et mes yeux bleus, alors qu'elle est quelconque avec sa tignasse brune et ses yeux verts...
— Je la trouve mignonne, moi...
— Bellamy...
— Quoi ? Je n'ai pas le droit de dire que ta meilleure amie est mignonne ?
Clarke rigola en hochant la tête. Elle s'arrêta alors de marcher et observa la porte à roue devant elle. Elle jeta un regard sur le boîtier qui la contrôlait mais il était éteint.
— Il est en panne, dit-elle en appuyant sur les touches. Il y a quoi derrière ?
— Normalement, la seule et unique terrasse de l'Arche.
— Une... terrasse ?
— Oui, un grand espace plat avec une verrière.
— Une grande fenêtre qui donne sur l'espace ? Tu n'es pas sérieux !
Bellamy hocha la tête puis pesa sur la roue mais elle ne bougea pas. Il vit alors sur l'axe un petit cordon rouge et il le prit entre ses doigts.
— C'est ma veine, dit-il. Regarde, on a scellé la porte. Il n'y a que le vide derrière. Quel dommage ! Fait chier !
— Hey, ce n'est pas si important, il y a d'autres endroits magnifiques à visiter, ici... non ?
— Oui, mais... Bon, ce n'est pas grave, rentrons. J'aurais aimé te montrer cet endroit, c'est tellement beau de regarder l'espace ou la Terre en direct. C'est là que j'ai vu pour la première fois un vrai orage. Je n'entendais pas les bruits mais je voyais les éclairs et le vent qui faisait tourner les nuages sur eux-mêmes. C'était magnifique.
Clarke sourit. Bellamy la regarda fixement un moment puis tendit le cou et l'embrassa doucement. Elle lui tendit son baiser, non sans rougir légèrement, et quand elle baissa le menton, elle passa sa langue sur ses lèvres. Un silence passa puis la jeune femme sourit et décida qu'il était temps d'y aller.
.
Quand Clarke passa la porte de chez elle, elle ne s'attendait certainement pas à voir son père et sa mère assis sur le canapé devant elle, côte à côte, le dos raide. Aussitôt, elle sentit les ennuis venir et, se détournant, elle alla déposer ses affaires dans sa chambre puis, docilement, elle revint et s'assit en face d'eux dans un petit fauteuil.
— Je vous écoute, dit-elle, les mains sur les genoux.
Elle avait l'habitude de ces « confrontations » avec ses parents. Depuis qu'elle allait à l'école, dès quelque chose n'allait pas correctement, ils se retrouvaient tous les trois pour en parler au lieu de laisser les choses s'envenimer. Les lois de l'Arche étaient tellement strictes sur certaines choses qu'il valait mieux ne pas laisser traîner.
— Lucia est venue me voir, Clarke, dit alors Abby.
Clarke entrouvrit la bouche puis serra les lèvres.
— Je vois, dit-elle. Elle n'a pas pu s'en empêcher, alors.
— Clarke, ta mère t'a vue avec ce garde, intervint alors Jake.
— Et quoi ? demanda la jeune femme. Nous n'avons rien fait de mal ou de contraire aux lois de l'Arche. Je suis bien placée pour les connaître, en tant que fille de Conseillère.
— Le regard qu'elle lança à sa mère fit frissonner celle-ci qui baissa le nez et passa sa langue sur ses lèvres. Clarke, nous t'avons déjà parlé de tout ça l'année dernière, n'est-ce pas ? demanda alors Abby.
— Oh, oui, et je n'ai aucune envie de revivre ce moment si pénible, de toute ma vie ! répondit Clarke avec fougue.
— Comment s'appelle-t-il ? demanda alors Jake.
— Bellamy Blake. Il est Garde sur Factory, mais il a remplacé des collègues sur Alpha et on s'est rencontrés comme ça.
— Ce n'est pas ce que Lucia m'a dit, pourtant.
— Ah non ? Et que t'a-t-elle encore dit ?
Abby serra les mâchoires.
— Ton amie Lucia m'a révélé que tu lui avais confié avoir rencontré ce Bellamy dans le couloir A116 alors que tu n'étais pas censée t'y trouver à l'heure à laquelle tu y étais, finit-elle par dire.
Clarke resta silencieuse. Il était hors de question qu'elle dise qu'elle et Bellamy parcouraient les couloirs interdits de l'Arche depuis un mois et demi, sûrement pas !
— C'est cela, finit-elle par dire. Je me suis retrouvée en malencontreuse posture face à une poignée de voyous et Bellamy m'a tirée de là en m'entraînant dans une gaine de service. Il m'a ensuite reconduite sur Alpha juste à temps pour le dîner, c'était il y a plus d'un mois et demi maintenant.
— Et tu l'as ensuite revu ?
— Non, répondit Clarke. Du moins, pas pendant trois semaines.
— Continue...
Et à Clarke de raconter comment, depuis ce vendredi où Bellamy était encore arrivé au bon moment dans le couloir A116 où Clarke était embêtée par Murphy et sa bande, elle et le jeune garde se retrouvaient le vendredi soir entre les cours et le dîner.
— Que faites-vous pendant ces heures ?
— On se promène dans l'Arche, on va à la bibliothèque, des trucs classiques entre copains quoi... répondit Clarke en haussant les épaules.
Répondre franchement à ses parents, elle l'avait toujours fait. Jeune fille modèle, elle n'avait jamais menti jusqu'à ce qu'elle rencontre Bellamy, depuis, elle avait remarqué que mentir de temps en temps – il ne faut jamais abuser des bonnes choses – provoquait un sentiment de supériorité très étrange qu'elle commençait à apprécier.
— Et vous êtes juste des copains ? demanda Jake.
— Oui, papa... Tu crois que je ne suis pas assez mature pour retrouver un ami garçon dans les couloirs, seule, sans faire de bêtises ?
Le ton était railleur et Jake serra les mâchoires.
— Ne parle pas à ton père sur ce ton, répliqua Abby.
— Maman, je croyais que tu me faisais confiance...
— C'est le cas, nous te faisons confiance, chérie...
— Alors pourquoi cette discussion officielle comme si j'avais fait la pire bêtise de ma vie ? J'ai seize ans, je ne... Je veux dire, je sais ce qui peut se passer en sortant avec un garçon, mais Bellamy est très gentil, et puis tu l'as vu maman, c'est un Garde, il...
Clarke se tut et soupira profondément.
— Je ne sais même pas pourquoi je m'escrime à vous dire tout ça, dit-elle alors en se levant. Les lois de l'Arche ne m'interdisent pas de voir un garçon si je ne suis pas majeure, de toute façon.
— Non, en effet, dit Jake en se levant à son tour. Mais ta mère et moi n'avons pas envie que tu aies des ennuis... à ton âge.
— Des ennuis ? Oh... Je vois. Aucun souci de ce côté-là, papa, ne t'en fais pas ! Il me considère comme une petite sœur, mais si je ne sais pas exactement ce que ça veut dire...
À ce mot, les parents Griffin tiquèrent, mais ne dirent rien et laissèrent leur fille aller dans sa chambre pour se préparer pour le dîner.
— Tu la crois ? demanda Jake.
— Pourquoi je ne le ferais pas ? Elle est ma fille, notre fille, Jake, nous n'avons aucune raison de ne pas la croire, elle ne nous a jamais menti.
Jake s'adossa contre le dossier du canapé en soupirant. Il finit par hocher la tête puis se leva.
— Je te laisse régler « ça » entre filles, dit-il en s'éloignant vers la porte de l'appartement.
— Ça ?
— Oui... Ça.
— Oh, je vois.
Abby sourit et son mari s'en alla ensuite après avoir consulté une petite tablette tirée de sa poche pendant qu'il parlait. Secouant la tête, Abigail décida que Clarke était encore trop jeune pour songer à la génération future. Elle n'avait que seize ans, n'était pas majeure, et même si la mère se doutait que la fille savait tout ce qu'il y avait à savoir sur ces choses-là, elle estimait qu'elle était encore trop jeune.
— Qu'elle s'amuse avec ce Bellamy, dit Abby en quittant le canapé. Qu'elle en profite autant que moi je n'ai pas pu...
À cause de ses études de médecine auprès de sa si stricte mère, Abigail n'avait pas profité de sa jeunesse comme elle l'aurait voulu. Oh, elle adorait son travail, sauver des gens était sa vocation, mais parfois, quand elle voyait un groupe d'adolescents ou un tout jeune couple, elle regrettait de ne pas avoir su dire stop à sa mère. À cause de ces prenantes études, elle avait perdu dix ans de sa vie dans les livres et les enregistrements vidéo, à apprendre toutes les manipulations qui pouvaient exister sur un être humain. Et une fois son diplôme en poche, elle avait rencontré Jake et ils s'étaient mariés. Deux ans plus tard, Clarke venait au monde, et depuis, Abby n'avait plus eu un instant de liberté.
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Clarke était assise sur son lit. Dans quelques minutes, tous les habitants de l'Arche allaient prendre la direction des messes, pour le dîner, mais la jeune femme n'avait pas faim.
Cependant, sauter un repas n'était pas conseillé du tout car les aliments lyophilisés qu'on leur donnait contenaient tout ce qu'il fallait pour tenir le coup jusqu'au prochain repas.
Avec un soupir, Clarke quitta son lit, changea de t-shirt puis rejoignit ses parents qui l'appelaient pour partir. Elle pria pour ne pas croiser Bellamy dans les couloirs menant au mess d'Alpha, ou même Wells ou Lucia. Le premier, elle voulait lui éviter une confrontation avec ses parents, les deux autres, d'avoir à leur faire face et leur fournir des explications. Ils auraient tout le lendemain samedi pour en discuter tranquillement à la Bibliothèque, entre deux devoirs, inutile donc de précipiter les choses.
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Après le dîner, Abby fut contrainte de laisser sa famille pour une urgence à l'Infirmerie, et Jake, visiblement peu enclin à passer la soirée seul avec sa fille, l'autorisa à aller se promener, mais interdiction de rejoindre son bellâtre sur Factory.
Un peu amusée par cette jalousie typique de père, Clarke lui promit et s'en alla faire un tour dans les couloirs d'Alpha, s'arrêtant pour discuter avec Untel ou Unetelle, jouant un moment avec les plus jeunes dans un grand espace vide ou ils pouvaient jouer avec un vieux ballon de cuir tout craquelé.
À vingt-deux heures, cependant, elle reprit le chemin de sa cabine et, les mains dans les poches, elle longeait le dernier couloir quand elle sentit un frisson lui glisser dans le dos. Lorsqu'elle se retourna, elle sourit à Bellamy et regarda autour d'elle avant de le rejoindre. Il la prit aussitôt dans ses bras et la serra contre lui.
— Qu'est-ce que tu fais ici, si mon père te trouve avec moi, tu vas avoir des ennuis, dit la jeune femme en le repoussant doucement.
— Je sais, mais j'avais envie de te voir... Je ne peux pas t'expliquer pourquoi, j'en avais juste envie.
— Toi, t'es en train de tomber amoureux...
— Arrête, Clarke, on ne peut pas tomber amoureux de quelqu'un en seulement quelques jours.
— Ah non ? Bellamy, écoute, tu devrais retourner sur Factory, c'est trop risqué pour toi d'être aussi proche de mon père. Tu sais, il n'est pas trop d'accord pour que sa petite fille chérie traîne avec un garçon qui a six ans de plus qu'elle...
— On ne fait rien de mal, pourtant, s'étonna le jeune homme.
— Tu ne peux pas comprendre, tu n'es pas une fille, et ton père est mort, Bellamy... Je t'en prie, sauve-toi avant qu'il ne sorte voir si j'arrive...
— Parce qu'il fait ça ?
— Bellamy...
— Ok, d'accord. Mais avant...
Bellamy s'empara des lèvres de sa compagne et ils échangèrent un solide baiser avant que Clarke ne recule.
— Va ! dit-elle en le poussant, ne pouvant s'empêcher de sourire malgré elle.
Le jeune homme finit par se détourner et Clarke le regarder se hisser dans une gaine de ventilation.
— Alors comme ça, tu profites des conduits de maintenance pour venir me voir, c'est nouveau ça... s'amusa Clarke en se détournant.
Elle se rendit alors compte qu'elle souriait presque niaisement et elle s'efforça de défendre ses zygomatiques en grimaçant. Elle reprit rapidement une expression neutre et rentra chez elle comme la pendule sonnait vingt-deux heures.
— Pile à l'heure, dit Jake, assis dans le canapé.
— Comme toujours, papa.
— C'est vrai, admit l'homme. Aller, va te coucher maintenant, il est tard.
— Oui. Bonne nuit, papa.
— Bonne nuit mon petit cœur.
Clarke alla l'embrasser sur la joue puis se rendit dans sa chambre et enfila le long t-shirt fatigué qu'elle portait pour dormir. Elle se glissa ensuite entre ses couvertures et attrapa un rouleau de papier. C'était un livre qui avait été retranscrit de cette manière à l'époque, et qui commençait à montrer des signes de fatigue mais Clarke adorait cette histoire de chevalier et de princesse en détresse, qui lui faisait penser à son histoire avec Bellamy.
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