45| Assommés
Kim Taehyung
Ma silhouette est avachie dans le canapé du salon, se fait absorber entre les coussins. L'impression de peser une tonne, la flemme engourdit mes membres, une curiosité maladive anime cependant mes pupilles. Elles scrutent mon petit frère qui a la tête dans les nuages en ce moment. Son regard fixe le vide, sa cuillère touille inlassablement son chocolat chaud depuis dix bonnes minutes. Le coude posée sur la table, la tête reposant dans sa main, Jungkook adopte la parfaite pose de Pierrot La Lune. Bientôt, on verra des étoiles briller tout autour de lui, son âme se laissant transporter dans des contrées que je ne lui avais jamais vu explorer. Aujourd'hui encore il a été un véritable danger ambulant.
Les nuages dansaient encore autour de lui lorsqu'il s'est réveillé, la brume encerclait ses pensées. Il s'est pris la porte de sa chambre alors qu'il ne l'avait même pas ouverte. La marque sur son front ne l'a pas perturbée plus que ça. Il n'a rien dit en voyant son reflet dans le miroir de la salle de bain, j'ai d'ailleurs bien cru qu'il voulait noyer sa brosse dent dans le dentifrice. Encore une fois, aucune réaction lorsqu'il a commencé à se brosser les dents, pourtant, je sais à quel point Jungkook a horreur de son goût mentholé chimique. Il a loupé une marche d'escalier en descendant à la cuisine et depuis qu'il s'est installé à table, il s'est fait un chocolat chaud au lieu de prendre un grand verre de sang et cela fait maintenant quinze minutes qu'il rêvasse.
Je me décide enfin à me lever de mon coin et vais à sa rencontre. Ses prunelles tombent sur ma silhouette, elle obstrue son point fixe et se pose face à lui. Il se redresse alors sur sa chaise, se racle la gorge avant de se concentrer sur ma présence.
« Qu'est-ce qui t'arrive Jungkook ? Pourquoi t'as la tête en l'air comme ça ? » Lui demandé-je tout de même soucieux de son état.
Il fronce les sourcils et stoppe tout mouvement –il se met à calculer la probabilité pour laquelle je commencerais à lui poser des questions indiscrètes.
« Tu fais la milice des rêves ou comment ça se passe ? » Me dit-il d'un ton renfrogné.
Son attitude défensive me fait tilter, Pierrot la Lune était : soit sur une autre planète, soit a trois mille pieds sous terre.
« Ahah. » Ris-je ironique avant de reprendre plus doucement. « Non, tu peux rêver mais avec un sourire aussi niais, on est en droit de se poser des questions. » Le provoqué-je.
Il fronce des sourcils et se tourne vers un miroir. Il essaie plus ou moins de reformer son sourire de tantôt et prend une mine dégoutée en voyant cet air niais et amoureux sur ses traits. J'aurais dû y penser plus tôt.
« Je vois pas de quoi tu parles. » Persiste-t-il.
Il apporte sa tasse à ses lèvres et en boit quelques gorgées, ses traits abordent une mine désintéressée.
« Bah je sais pas... peut-être que quelqu'un te rend heureux en ce moment ? » Demandé-je avec hésitation.
Jungkook avale sa boisson de travers et tousse comme un cheval à travers la maison. Son attitude suspecte me fait plisser les yeux, ok j'ai forcément un peu raison.
« Tu me le dirais si tu avais rencontré quelqu'un ..? »
« Non. » Me répond-il du tac au tac.
Un rictus en coin apparaît sur mes lèvres. Cependant, une drôle de douleur s'immisce dans mon estomac. Je ne comprends pas vraiment d'où elle vient mais ne me focalise point dessus. Jungkook pose alors ses prunelles sur moi, il comprend vite le sous-entendu dans mon regard rieur et se rattrape.
« Mais ça ne veut pas dire que j'ai rencontré quelqu'un, idiot ! » Rage-t-il, en se levant de table.
Le suspect prend la fuite. Il se dirige vers la cuisine et je fais de même, un grand sourire collé aux lèvres.
« Roh, elle est comment au moins ? » Insisté-je pour le taquiner.
Il dépose son verre dans l'évier et fait couler l'eau.
« Il n'y a rien. » S'entête-t-il.
C'est qu'il a la tête dure le petit. Il attrape l'éponge et se met à frotter avec hargne le verre. La mousse jaillit un peu partout et atterrit sur les bords du plan de travail. Les gestes de Jungkook sont rapides, nerveux, il veut s'extirper de cet interrogatoire le plus vite possible, l'anxiété anime son corps.
« Mmh ... Ok je vais te saouler. » Déclaré-je rieur.
Il me jette un coup d'œil, tout en continuant sa vaisselle avant de lui mettre de la mousse sur le bout de son nez. Il écarquille les yeux puis fronce les sourcils et oriente le jet d'eau en ma direction. Mon tee-shirt se retrouve tremper, ma mine choquée a l'air de beaucoup l'amuser. Ok, là il m'a déclaré la guerre. Je me saisis d'un verre et le remplis d'eau avant de lui balancer à la figure. Jungkook se retrouve à son tour mouillé, seulement, avant que je puisse comprendre ce qui m'arrive, il m'attrape par les jambes et me bascule sur son épaule. Il sort de la cuisine et se dirige vers les escaliers, où en haut se trouve la salle de bain. Je me mets alors à me débattre comme un diable, mes bras et mes jambes deviennent des serpents qui essaient de se faufiler et se resserrer autour de sa proie.
Soudain, le téléphone retentit dans la maison et nous stoppe net dans nos enfantillages, Jungkook s'arrête et observe le téléphone qui finit par arrêter de sonner au bout de vingt secondes. Il reprend alors sa marche mais le fixe sonne une deuxième fois. Il me laisse alors descendre et répondre. Mes prunelles s'égarent sur l'horloge du salon –car il était drôlement tôt pour que le postier appelle– et décroche finalement au bout de la dernière sonnerie.
« Allô, c'est bien le téléphone fixe de la famille Jeon ? » Me demande une voix tremblotante à l'autre bout du fil.
« Oui, c'est exact. Taehyung à l'appareil, vous êtes ? » Répondis-je perplexe.
« Bonjour, c'est Namjoon. On a un problème Taehyung et.. Yoongi est dévasté ... Est-ce que tu pourrais vite venir à la maison s'il te plaît ? » Sa voix craque par moment, comme s'il était sur le point de pleurer.
Mes yeux s'écarquillent, mon cœur bat des records de vitesse en entendant ses dires. Je sens ma main devenir moite, le téléphone devient une savonnette que je peine à garder dans la main.
« J'arrive tout de suite. » M'empressé-je de répondre.
« Merci ... » J'entends Namjoon renifler avant de raccrocher.
Les bip du téléphone résonnent dans la pièce, à l'instant où le silence prend place, mes membres se déverrouillent. Je retourne à ma chambre en quatrième vitesse et prends un tee-shirt sec, un manteau et mes chaussures. Mes pas me ramènent vite au salon, Jungkook m'intercepte.
« Il se passe quoi ? » Me demande mon frère en se rapprochant prudemment.
Je ne daigne lui jeter un œil, me débattant avec mon manteau. Mes mains tremblantes peinent à l'enfiler, ma poitrine s'affole. La panique emplit mes pensées, perturbe mes actions.
« Yoongi est pas bien, il y a un problème chez eux. » Lui répondis-je en vitesse.
J'enfile mes chaussures et vois Jungkook faire de même. Ma tête se redresse vers lui, ses yeux se posent un quart de secondes sur moi avant de répondre à ma question silencieuse.
« Je viens avec toi. »
Son initiative est quelque peu surprenante mais je ne m'en préoccupe guère davantage. Je ferme bien la porte à clé derrière nous et m'élance à travers les rues de Séoul. Ma silhouette se découpe sur les arbres alignés, la foule est compacte, elle me ralentit. Je rage entre mes dents contre ce monde envahissant. Mon cœur tambourine à toute allure, la peur s'immisce dans mon estomac. Ses traits se dessinent dans ma tête, son sourire si délicat avec ce petit nez arrondi ; une question me serre le ventre : dans quel état vais-je le retrouver ? Ma course folle continue, Jungkook suit mon rythme. Nous nous faufilons entre chaque personne, traversons les routes accompagnés par les klaxons. Le chemin jusqu'à sa maison est un automatisme, le paysage passe au second plan. Le revoir est mon seul but.
***
Nous arrivons au bout de dix minutes devant la demeure, le portail est ouvert. Nous pénétrons dans le jardin et arrivons devant la porte d'entrée qui est entrebâillée. Ma tête se faufile à l'intérieur, un œil curieux balaie l'espace, mes oreilles distinguent une grande agitation dans la maison. La porte s'ouvre brusquement et nous fait sursauter, Namjoon apparaît devant nous, les yeux rouges, la silhouette affaissée. La tristesse embaume le couloir, déteint sur les murs. L'atmosphère est pesante, nous cloue sur place, lacère notre esprit d'un mauvais pressentiment.
« Bonjour ... » Chuchoté-je.
Namjoon nous sourit faiblement, l'étincelle qui animait ses prunelles est totalement éteinte. Il nous fait signe de la main de le suivre, les mots semblent morts en lui. J'avance alors dans le couloir, ce dernier me semble si long, mes pas se font lourds, l'air est étouffant. Seulement, rien ne peut égaler l'atmosphère oppressante qui nous écrase dans le salon. Les alphas du père de Yoongi et Jimin grondent, menaçants. Ils sont en pleine querelle, les babines retroussées, crocs apparents. Dans un coin de la pièce, écroulée sur une chaise, les mains sur son visage, Kura pleure à chaudes larmes, seule Jiyo a l'air de se soucier de son état. Elle est accroupie à ses côtés, lui frotte le dos, essaie par tous les moyens de lui faire reprendre ses moyens.
Namjoon se trouve en retrait de la scène avec nous. Tout le monde est abattu par un chagrin incommensurable et chacun à sa manière essaie de l'évacuer. Le corps de Jungkook est tendu, il ne quitte pas un seul instant la joute verbale qui est en train de se dérouler sous nos yeux. Il a l'air complètement absorbé par la scène, la peur le pétrifie. Jimin et Chonay sont à deux doigts de se sauter à la gorge.
« Jimin tu crois que c'est le moment-là ? » Hurle le père, en faisant de grands gestes avec ses bras.
Ils se font face, leurs auras sombres pèsent dans la pièce.
« C'est une question que tu dois te poser ! Comment tu vas faire si tu as constamment la tête ailleurs ? » Riposte Jimin, les nerfs à vif.
Chonay ne pipe mot, sa bouche se coud, la rage tiraille son âme. Elle manie les ficelles de son corps et ses pensées, ces dernières semblent totalement embrouiller. Il sert ses poings, ses phalanges en deviennent blanches. L'impression d'entendre son cœur battre avec fureur dans sa poitrine, ou peut-être est-ce le mien ?
« Réponds-moi ! » Rugit Jimin, faisant exploser la raison du père de Yoongi.
La colère bouille en lui comme de la lave crépitante et finit par atteindre les sommets. D'un bond, il attrape le jeune loup par le col et le secoue avec brutalité. Jungkook est prêt à l'aider mais Namjoon lui en empêche, barrant sa route à l'aide de son bras. La rancœur s'abat en une tornade, arrache nos mots.
« Et bien je vais te léguer l'enquête, voilà ce que je vais faire ! De toute façon tu la voulais depuis longtemps hein ! » Crache-t-il avec véhémence, une veine apparaît sur son front. Il lâche ensuite son col et le projette sur le mur. « Maintenant arrête avec ça, tu n'as donc pas de cœur !? »
Cette dernière sentence implose dans la conscience de Jimin telle une bombe.
Il ne dit rien, son visage ne laisse paraître aucune émotion, son expression impassible. Un silence s'étend dans la salle, même Kura a cessé de pleurer en entendant les propos de son mari. Le corps de Jimin est enraciné, son buste gonflé, ses poings serrés. Il ne bouge pas de sa position, le regard droit, ses yeux vides ancrés dans ceux de Chonay. Ce dernier se rend compte au fil des secondes du poids de sa phrase. Cependant, il est trop tard : le dialogue est brisé. Jimin détourne le regard et le pose sur nous, ou plutôt à côté de moi. Ma tête se tourne, mes pupilles tombent sur un Jungkook peiné, abattu par les évènements. Puis, la voix du jeune loup s'élève, brise ce calme opprimant. Ses mots amers s'échouent dans les esprits, injectent leur venin dans le cœur de Chonay.
« Ouais t'as raison, j'ai pas de cœur. »
Son ton ne démontre aucune sensibilité, les sentiments ont dépeuplé son être. Il part ensuite de la pièce à grandes enjambées, passe à nos côtés sans même nous regarder. Un courant d'air s'enfouit dans la pièce, mon échine frissonne troublée par la sensation. Jungkook part alors à sa poursuite lorsque j'entends la porte claquer derrière nous.
Soudain, un fracas ébranle les murs de la demeure suivi d'un cri déchirant. Namjoon s'agite à mes côtés, il reprend ses esprits et m'enserre le bras, l'inquiétude frétille dans ses prunelles.
« Taehyung, on devrait aller voir Yoongi ... » Murmure-t-il, la gorge nouée.
L'incompréhension me gagne lorsque le trou dans ma poitrine s'agrandit. La tristesse de Yoongi me broie de l'intérieur, celui qui est en train de fracasser les objets quelque part dans la maison n'est autre que lui.
« Je te suis. » Dis-je ferme, le cœur battant.
Nous arpentons les couloirs, les bruits de verre saisissent mon cœur, les hurlements prennent un sens. Une douleur écrasante habite mon esprit. C'est au tournant du quatrième couloir, mes pupilles tombent sur un inconnu déboussolé, brisé. Il jette les meubles contre les murs, leur donne des coups, fracasse les cadres, déchiquette le papier peint. Tout se transforme en lambeaux sous ses doigts, des marques bestiales sont laissées après son passage, les cris ponctuent son acharnement répété.
Ses yeux enflées se posent alors dans les miens, son teint pâle lui donne un air cadavérique, ses traits défaits me font penser à ceux d'une poupée de porcelaine brisée. Je m'approche de lui, ma main tendue lui intime de se calmer, cependant, rien n'y fait. Un brasier ardent brûle sa raison, le feu se propage dans son corps et le fait exploser.
« Cassez-vous ! » Hurle-t-il.
La violence de ses mots me fait tressauter, mon cœur s'emballe, pris dans les tourments de son âme. Seulement, mon corps reste immobile, pétrifié ; le regard de Yoongi me foudroie mais mon esprit se cristallise, mes pensées transparentes le laissent un moment dubitatif. Seulement, le poison brûle ses entrailles, le terrasse, le rend fou. Ce grain de folie vacille dans ses prunelles, mélangé à la tristesse et le remord qui dansent étroitement ensemble dans une valse épuisante. Le feu se réveille, jaillit de ses membres, la colère entretient sa flamme. La folie manie son corps comme un pantin décharné dont le désespoir et l'irrationnel ont aliéné ses pensées. Yoongi me pousse une fois, deux fois, ma poitrine reçoit les coups, lutte contre cette peine qui me lacère. Mon démon s'agite sans cesse à mes côtés, il me chuchote d'enivrantes tortures, flane tout autour de moi. Je l'avale alors sans réfléchir, mes poumons brûle de sa présence, mon sang commence à bouillir, mes veines semblent trop étroites pour cette rage épaisse qui parcourt mon corps. Mon cou reçoit d'innombrables décharges, pourtant, mes pensées se noient dans les ténèbres et consument ma raison.
Je perçois à peine Namjoon se reculer, son regard alternant entre moi et Yoongi. Une énergie traverse mes membres, l'enveloppe dans un tissu de lin : l'impression de me consoler dans cet état de délire. Mes poings se ferment, les hurlements de Yoongi se perdent sur la toile de ma conscience. Sa douleur et ses cris se font miens.
« Putain, j'ai dit de te casser ! » Hurle-t-il une dernière fois.
Mes yeux creux se peuplent de visions nocturnes, mon geste fou part dans un souffle. Mon poing s'abat sur sa joue de lait, imprime une tâche d'un rouge carmin du bout de ses phalanges serrées. Un torrent féroce submerge Yoongi pourtant son corps n'esquisse qu'un faible mouvement ; il reste immobile, la tête basculée sur le côté. Un orage éclate alors en lui et tranche son âme : la raison s'écarte de l'esprit. Son buste pivote brusquement, il se rapproche de quelque pas vers moi. Mes actions me reviennent de plein fouet, la honte et le regret tiraillent mon être. Je m'échappe en reculant et finis coincé par le mur.
« Barre-toi ! »
Son cri m'attaque le cœur, ses yeux sont des puits emplis d'un million de larmes. Ma rage me quitte et se perd dans ses pleurs qui enveloppent sa peine d'un goût salé. Ma vue se brouille, et voilà je m'en veux d'avoir succombé aux vices de mon démon. Dans ce paysage aux allures effacées et aux courbes serpentines, son bras se lève dans les airs et s'abat sur moi. Mes paupières se ferment, mon corps anticipe ce coup fatal.
Seulement, la chaleur rompt la douleur.
Yoongi m'enlace comme si sa vie en dépendait, ses sanglots s'échouent sur mon épaule. J'entends mon cœur se fissurer, ses mains agrippent mon tee-shirt et laissent des trainés de tristesse sur mon torse. J'enlace son corps tremblant et le berce doucement. Il hurle. Ma poitrine aspire sa peine, des larmes roulent bientôt sur mes joues, elles sont aux portes de mon âme. Il gémit. Mes sanglots retentissent aux côtés des siens. Il est désespéré. J'essaie de ramasser les bouts de son âme éparpillés au creux de mes bras frêles et apaiser son chagrin.
Les secondes se déroulent ainsi, Yoongi se blottit dans ma poitrine. Une atmosphère lourde pèse sur nos épaules chétives.
« Tae... je sais pas quoi faire. Aide-moi. » Murmure-t-il dans mon cou.
J'aide son corps chancelant à s'asseoir sur une chaise ayant réussi à subsister à la tornade. Sa tête rejoint le sol, se baisse vers les tréfonds de la terre, là où le mal réside. Je me mets alors à genoux devant lui, mes mains prennent son visage en coupe et le relève. Ses orbes onyx troublés se posent dans les miens, ma voix se fait douce comme le lit d'un ruisseau à l'abri du vent tourmenté.
« Explique-moi d'abord. » Susurré-je.
Moi qui pensais qu'une âme forte et généreuse pouvait braver les ouragans et ne jamais plier, je vois Yoongi souffrant et malheureux ; mes pleurs ont repris. Il secoue la tête avec acharnement, se débat avec son propre démon. Je me penche alors sur ses lèvres et l'embrasse avec tendresse, une pointe d'ivresse se mêle à mes sentiments. Ma langue vient caresser son âme et mes lèvres y déposent mon amour. Je me décale, mon front collé au sien, les yeux fermés, mon souffle frais chatouille sa bouche. Mes mots s'infiltrent sans angoisse dans son être désarçonné.
« Yoongi ... Ne te détruis pas plus que tu ne l'es déjà ... »
Ses doigts se faufilent dans ma nuque, tirent mes cheveux. Il dépose un chaste baiser sur mes lèvres, sa respiration chevrotante fait frémir mon corps.
« Taehyung, tu ne peux même pas imaginer ce que je vais t'annoncer. » Murmure-t-il la voix brisée.
Ma main longe mon visage à l'aveugle et vient retrouver la sienne, les pulsations de son cœur tambourine au creux de ma paume. Il pleure dans mon cœur. Cette pluie s'écoule dans mon berceau, se déverse dans mon âme. Yoongi murmure sa douleur, sa chaleur semble mourir.
« Une des personnes qui supervisaient le boulot d'Eumae nous a appelés à l'aide d'une cabine de secours et.. » Je sens les ténèbres envahir ses pensées. « ..leur base a été attaquée, il y n'a quasiment pas de rescapés. Ils ne savent pas qui les a attaqués, ni pourquoi mais ce que j'ai retenu c'est qu'ils ont.. » Ses sanglots reprennent de plus belle. « ..capturé mon frère. À l'heure qu'il est, il est peut-être ... »
Cette phrase n'a pas de fin, elle n'en a pas besoin. Il est d'ailleurs préférable qu'elle n'en ait pas, cela nous permet de nous consoler, nous conforter dans l'idée que tout ira bien. Yoongi se détache brutalement de moi et se lève, la chaise bascule en arrière, le mur reçoit une pluie de coups. Je me relève rapidement et l'enlace par derrière, lui implore en silence de cesser sa torture. Mon cœur ne peut le supporter. Ses bras retombent le long de son corps, du sang goutte sur le parquet. Son cœur pulse à s'en arracher la cage. Mon nez se faufile alors dans ses mèches noires, mon pouce exerce de légères caresses sur son torse.
A cet instant, je haïs le soleil pour briller si fort aujourd'hui, délivrer sa chaleur tandis que cette demeure est plongée dans la noirceur d'une nouvelle accablante.
« Calme-toi Yoongi. Je comprends ce que tu ressens mais je t'en prie, ne te fais pas de mal. » Ma parole se brise.
Je prends délicatement ses mains et garde le silence. Un mal lâche et sournois le saisit à la gorge comme s'il voulait étouffer ses plaintes. Sa voix chaude et profonde se mue en un simple soupçon d'air qui laisse échapper quelques mots de sa serre.
« Comment je vais faire ..? »
Sa question m'agrippe au corps, la réponse m'est inaccessible et je me retrouve à ne savoir que faire. Alors en un dernier espoir fourbe et injuste, je lui susurre à l'oreille une promesse vaine et naïve.
« Tout ira bien Yoongi ... Je te le promets. »
***************
*Boum* Les emmerdes commencent ...
(je vous rappelle qu'il reste 10 chapitres ?)
Ame_futuriste xx
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