Après avoir récupéré les cartes, Cassandre a insisté pour qu'on aille boire un verre. Je n'ai pas eu le courage de le lui refuser. Nous sommes donc maintenant en train de faire poireauter tout le monde, pendant que Madame fait du charme au serveur pour se faire servir un verre d'alcool sans avoir à montrer sa carte d'identité. Je me suis rabattu sur un Diabolo pêche depuis un moment, et je le sirote en attendant qu'elle ou qu'il lâche l'affaire. C'est avec soulagement que je le vois céder.

     Elle s'installe face à moi, et m'étudie du regard, tout en prenant de petites gorgées de son cocktail alcoolisé. Elle meurt d'envie de me dire quelque chose, mais ne veut pas briser d'elle même le silence. Je ne suis pas décidé à perdre face à elle, et mes lèvres s'étirent en un fin sourire. Elle est sur le point de craquer.

« T'en penses quoi, de cette Rosalie ? cède-t-elle.

- Comment ça ? fais-je semblant de pas comprendre, sans arrêter de sourire.

- Et bien, fait-elle semblant de réfléchir, est-ce qu'elle t'inspire vraiment confiance ?

- Je ne la connais pas assez bien pour en juger. Et à toi ? ajouté-je pour la forme.

- Et bien, j'ai un peu peur qu'elle mette le boxon dans notre bande, assène-t-elle, comme si c'était un scoop.

- Et pourquoi le ferait-elle ? demandé-je pour la forme. Qu'est-ce qu'elle y gagnerait ?

- Octave, bien évidemment ! s'emporte-t-elle. Et vous aussi, ajoute-t-elle en me caressant tendrement la joue. Elle veut vous voler, c'est la seule raison pour qu'elle accepte de partir comme ça avec nous, conclue-t-elle, assez fière d'elle.

- Et si en vrai, elle ne voulait que passer du temps avec son meilleur ami, et apprendre à le connaitre quand il est avec nous, comme elle n'en a jamais vraiment eu l'occasion ? proposé-je.

- Elle serait vraiment stupide, dit-elle en roulant des yeux.

- C'est vrai que ta jalousie ne l'est pas, soupiré-je tout bas, avant d'ajouter plus fort : C'est pas faux. »

     Elle se met à rire, mais je me lève. Aucune envie d'être le petit rigolo quand elle est comme ça. 

« Eh, qu'est-ce que t'as ? me demande-t-elle.

- Rien de particulier, réponds-je en haussant les épaules. Les autres nous attendent depuis assez longtemps comme ça, et j'ai hâte qu'on se pose quelque part.

- Dis plutôt que tu veux la revoir, grogne-t-elle en croisant les bras comme une gamine de cinq ans.

- Merde, Cassandre, y a pas qu'elle à la caisse ! m'emporté-je un peu. Tu deviens lourde, là, vraiment, avec ton obsession pour cette fille, me radoucis-je un peu en voyant sa surprise. Mets de côté tout sentiment négatif que tu nourris à son égard, pour qu'on puisse passer d'inoubliables vacances, entre amis.

- Je ne te promets rien, soupire-t-elle après un long duel de regard.»

     Je lui tends la main, et elle l'accepte, avec un petit sourire en coin. Quand on arrive à la voiture, les autres nous dévisagent, Octave et Ambrose tiquant sur nos mains, et Rosalie et Bastien pour s'assurer qu'on est bien enfin là.

  « J'avais peur qu'elle se perde une nouvelle fois, plaisanté-je en lui lâchant la main. On s'met en route ?

- On attendait que vous pour le faire, sourit Octave. »