22. Allez viens, Bastien !
Au réveil, l'esprit encore un peu embrumé, je cherche Cassandre du regard. Elle est toujours bien sagement dans son lit, malgré la nuit agitée qu'elle semble avoir passée. Son nombril pointe le bout de son nez, entre la bordure de son haut de pyjama et celle de sa couverture, qui pend dans le vide entre nos deux lits. Le tableau me fait sourire.
Je me glisse discrètement hors de la chambre, après avoir attrapé quelques vêtements. Direction la douche, puis le salon pour préparer le petit déjeuner. L'heure qu'indique mon portable est assez tôt pour que je sois le seul réveillé. Bientôt, ce sera de nouveau l'effervescence. Je compte bien profiter des quelques minutes de calme qu'il me reste.
Lorsque je ressors de la salle de bain, Octave est déjà attablé et fait une tête de dix pieds de long. J'en connais un qui s'est levé du mauvais pied. Je ne sais pas si c'est à cause de la progression qu'ont fait Rosalie et Ambrose hier soir, si c'est parce que d'ici ce soir, on sera chez les grands-parents de Léo, ou encore si c'est parce que Rosalie, Ambrose et Léo ont finalement décidé de s'amuser sans lui pendant la nuit. Je me retiens de lâcher un petit rire malvenu, et vais fouiller les placards.
« Bonjour, le salué-je en m'attrapant un mug, et en mettant de l'eau à chauffer.
- B'jour, grogne-t-il sans bouger.
- Bien dormi ? demandé-je, plus pour la forme que pour avoir une véritable réponse.
- Genre, le grand Bastien en a quelque chose à foutre, ricane-t-il en me lançant un regard désabusé. »
C'est pire que ce à quoi je m'attendais.
« T'as dû faire un sacré cauchemar pour être une telle tête de con dès le réveil, commenté-je en haussant les épaules.
- M'en parle pas. J'ai rêvé d'Ambrose et Rosalie toute la nuit, et quand je me suis réveillé en sursaut, j'ai cru que j'étais encore en train de dormir, tellement ils étaient collés l'un à l'autre, explique-t-il en sirotant son jus d'orange.
- T'as mis de l'alcool dans ton jus ? froncé-je le nez, une odeur à la fois familière et déplaisante le chatouillant.
- Un peu, avoue-t-il. Le mal par le mal.
- Je t'ai connu plus joyeux.
- Je t'ai connu moins bavard, rétorque-t-il.
- Un point pour toi.
- C'était bien, avec Cass ? demande-t-il, pour changer de sujet.
- On a dormi, lui réponds-je.
- Je m'en doute un peu. Pas de discussion ? insiste-t-il.
- Pas vraiment. J'avais besoin de dormir, pour être en forme aujourd'hui, ajouté-je, comme pour me justifier.
- C'est vrai que c'est toi qui conduis, hoche-t-il la tête en regardant dans le vide.
- On aurait dû prendre d'autres gens ayant le permis, pour me relayer un peu, souris-je en mettant quelques tranches de pain à griller.
- On aurait pas dû emmener Rosalie.
- Parce que ça te fait chier qu'elle s'attache à quelqu'un d'autre que toi ? osé-je lui demander, en le fixant droit dans les yeux.
- Ouais. Mais pas vraiment non plus. Je sais qu'Ambrose est un gars cool. Et que Rosalie peut pas passer sa vie dans mon ombre, à être ma bonne action pour que je puisse me regarder dans une glace, mais...
- Sympa, je croyais qu'on était ami, fait l'intéressée en prenant place bruyamment à côté de lui.
- C'est pas ce que je voulais dire, et tu le sais aussi bien que moi, se renfrogne Octave.
- Fallait pas me proposer de venir, si ça te déplaisait tant. »
Elle pointe du doigt la bouteille de lait que je viens de sortir du frigo, sans un mot. Je la lui tends. Elle me remercie d'un sourire et d'un hochement de tête.
« Je m'attendais pas à ce que ça se passe comme ça, essaie-t-il de plaider.
- Moi non plus. Si ça te plait pas, rentre en stop, et fais pas chier, lui assène-t-elle comme un coup de massue. »
Il faut dire qu'Octave a de quoi la saouler plus sûrement que n'importe quel alcool. Je ne sais pas si je peux encore intervenir dans la discussion.
« Tu peux pas penser ça ! Rosalie, enfin ! s'exclame-t-il, choqué.
- Mais tu t'attendais à quoi, Octave ? Un coup tu souffles le chaud, l'autre tu souffles le froid. Tu te comportes à la fois comme un étranger, et comme un amant jaloux. Faudrait savoir, à la fin. Je croyais qu'on avait réglé le problème hier soir, ajoute-t-elle, avec un regard de reproche. »
Elle sourit malicieusement en levant son coude, mais s'interrompt quand Octave reprend la parole.
« J'ai passé une sale nuit, s'excuse-t-il, boudeur.
- Sérieux, Octave... soupire-t-elle en levant les yeux au plafond. Il serait peut-être temps d'arrêter de te comporter comme un gamin pourri gâté.
- Y a que toi avec qui je me comporte comme ça... »
Je décroche totalement de la conversation. La situation semble s'être à peu près apaisé, ils rediscutent calmement. Ils tournent en rond, mais ce sont leurs oignons. On peut pas faire grand-chose pour eux. Sur le pas de la porte de la chambre au lit double, Léo m'appelle à grands gestes. Je suis surpris de le voir déjà levé, j'oublie parfois qu'il n'est plus vraiment la marmotte qu'il a pu être au collège.
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