Chapitre 7
— Tu t'en sors avec les photos des autres membres ? s'enquit Daeyeon devant la machine à café de l'agence.
Il me tandis le gobelet plein et appuya sur la touche chocolat tout en passant son badge sur le capteur.
— Pour le moment, oui. Il ne me reste qu'Insook et Eunji. J'ai réussi à fixer une séance demain avec le premier. Les décors et les tenues sont prêts.
— Parfait ! J'ai hâte de voir le rendu à l'exposition. Et pour Hyung ?
Je déglutis difficilement. Eunji. Je n'avais pas eu l'occasion de lui parler, il était tout le temps occupé. À vrai dire, à part la fois où nous avions discuté devant le piano lors de ma première nuit dans les locaux et aujourd'hui, dans les couloirs avec Minjae, je ne lui avais pas adressé la parole.
— Pour lui, c'est plus compliqué, admis-je.
— Ahahah, je me doute. Même moi qui suis son colocataire depuis des années, j'ai parfois du mal à comprendre à quoi il pense. Il paraît froid au premier abord, mais il est en fait attentionné et prend soin des autres.
— Oui, je m'en suis rendu compte.
L'épisode de la couverture me revint en mémoire. J'étais persuadée que c'était lui. Qui aurait pu me la laisser là, il était le seul à savoir que je dormais ici.
— Mon souci, c'est surtout de trouver un moment dans son emploi du temps de ministre. Les idées, je les ai. Je ne maîtrise pas trop encore comment les mettre en scène.
— Envoie-lui un message. Il répondra peut-être pas tout de suite, mais il gardera ça dans un coin de sa tête. Précise-lui ta deadline et il s'arrangera pour te caler sur un créneau. Il reste très professionnel et carré. Sois la plus méthodique possible, indique-lui le temps dont tu auras besoin, comment tu veux qu'il soit coiffé ou habillé, ce qui lui permettra de prévoir, avant de venir te voir. Plus tu lui donneras d'indices, plus ça sera facile de te caser dans son organisation.
J'écoutais attentivement les conseils de Daeyeon, rangeais ses informations dans une sorte de mémo mental.
— Pour le concept en lui-même, explique-lui carrément tes attentes. N'essaie pas de le duper. Intelligent, il s'en rendra compte tout de suite.
— D'accord. Je te remercie pour ces précieux conseils.
Il serait délicat de lui dire exactement mes ambitions pour le shooting, mais j'allais jouer la carte de l'honnêteté avec lui.
Après cette journée riche en émotions, je passais rapidement au vestiaire récupérer mes affaires et pris la direction de l'arrêt de bus. Pour une fois, il n'était pas trop tard, je rentrerai sans encombre dormir dans mon lit. Bien qu'il soit pratique de coucher sur place, il n'en était pas confortable pour autant. Même si j'avais toujours droit à ma couverture tête-de-mort. Je souris à ce souvenir. Apparaissait-elle uniquement quand j'étais là ou dans le doute, venait-il la déposer tous les soirs ? Peut-être n'était-ce pas Eunji, mais mon intuition m'affirmait le contraire. Je songeais à mener mon enquête. Assise au fond du bus, je repensais aux conseils de Daeyeon. Je devais absolument envoyer un e-mail à Eunji ce soir, pour prendre rendez-vous avec lui. Le voyage durerait environ une heure, autant le mettre à profit pour réfléchir à ce que j'allais écrire. Je me torturais les méninges, recommençais une dizaine de fois, effaçais une partie ou la totalité du message pour verrouiller mon écran dans un soupir. Je n'arrivais pas à formuler ma demande. Il ne me restait plus qu'une semaine avant son départ à l'étranger avec le groupe, le temps jouait contre moi. Je repris précipitamment mon téléphone, retins ma respiration et écrivis d'une traite.
« Bonsoir, Eunji,
Serait-il possible que tu m'accordes 2 h pour le shooting de l'exposition s'il te plait ? Je souhaiterais le boucler avant que vous ne décolliez pour les US. Dis-moi ce qui t'arrange en termes de disponibilités.
Je me charge de te préparer tes vêtements. Pour le maquillage et la coiffure, viens comme tu es et je réaliserai les retouches moi-même si nécessaire. J'aurais besoin de te prendre en photo dans ton studio de production si tu es d'accord et dans la salle du piano. Tiens-moi au courant.
Bonne continuation
Mark »
De peur de ne pas être satisfaite encore une fois, je ne me relus pas et l'envoyai directement. Le message n'était pas trop suppliant ? Ou directif ? Bon, c'était trop tard, maintenant de toute façon. Je me tassais sur mon siège pour ne plus y penser et dans l'espoir de fusionner avec et me laissait emporter par la musique de mon fidèle compagnon depuis dix ans : mon vieil iPod. Les gouttes de pluie s'écrasaient avec fracas contre la vitre. Eh merde. Je ne possédais pas de parapluie et quinze minutes de marche étaient nécessaires depuis mon arrêt jusqu'à mon appartement. Avec un peu de chance, la météo se calmerait entre-temps.
***
Bah, tiens ! De la chance. Non, mais tu rêves, ma pauvre fille. Merci Murphy et sa loi à deux balles : il pleuvait trois fois plus fort. Je me ruais jusqu'à mon appartement. Après avoir tapé le code de la porte d'entrée, je balançais à l'arrache mes chaussures et retirais mes vêtements gorgés d'eau au même endroit. J'aurais pu remplir une baignoire en les essorant. Pour me réchauffer, je filais directement sous la douche.
Dix minutes plus tard, calée sur mon matelas devant une série, j'engloutissais une cup de ramyeon. Ne l'avais-je pas déjà vu cet épisode ? La sonnerie de mon portable m'interrompit dans mes réflexions. Qui pouvait bien me téléphoner à cette heure-là ? Numéro masqué. En général, je ne répondais pas à ce genre d'appel. C'était souvent des démarcheurs et je ne supportais pas ça. Même en Corée du Sud, ils harcelaient les gens, c'était un phénomène universel. Sauf qu'il était quand même dix heures et demie passées.
— Allô ?
— Mark ? Salut, c'est Insook. Je ne te dérange pas ?
Comment s'était-il procuré mon numéro ? D'habitude, nous échangions via nos adresses e-mail professionnelles. Hmmm, probablement grâce au dossier personnel rempli lorsque j'avais intégré l'agence.
— Non. Que veux-tu ?
Ce n'est pas parce que c'était par téléphone que j'étais plus à l'aise pour communiquer.
— J'ai trouvé ton numéro grâce au registre de l'entreprise.
Et d'un mystère résolu, un !
— Je souhaitais confirmer avec toi le shooting de demain.
— C'est toujours bon pour moi.
— OK, bah, je te laisse alors. À demain.
— À demain.
— Bonne soirée.
Il raccrocha. Étrange. Pourquoi appelait-il juste pour ça ? Le sentiment qu'il l'avait fait plus pour me rassurer sur sa présence, que pour valider le rendez-vous persistait. J'appréciais l'effort. Pour son concept, j'avais prévu une mise en scène complètement différente par rapport aux autres. D'ailleurs, je ne devais pas oublier d'apporter ma peinture.
Mon portable sonna à nouveau. Décidément ! Il ne l'avait jamais autant fait que depuis que j'habitais dans ce pays, c'était dire. D'habitude, le téléphone ne me servait qu'à me commander à manger. Était-ce encore le Maknae qui rappelait, après avoir changé d'avis ?
— Allô ? Par réflexe, je répondis en coréen.
— Mark, c'est toi ? questionna une voix en français à l'autre bout du fil.
À cet instant, mon cerveau cessa de fonctionner. Pourquoi ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi après tout ce temps ? Comment cette personne avait obtenu mon numéro coréen ? Mes mains commencèrent à trembler, les larmes coulèrent toutes seules sans que je m'en rende compte et j'avais de plus en plus de mal à respirer. Malgré moi, je lâchais le téléphone qui s'explosa sur le sol, déboîta la batterie et par conséquent coupa l'appel.
***
Réveillée aux aurores — enfin, il aurait fallu que j'arrive à dormir —, je sortis de ma pseudoléthargie et me préparais à partir en direction de l'agence malgré l'heure matinale. Je n'avais pas envie de cogiter sur l'événement de la veille dans mon appartement.
Mes cours étaient terminés. Après avoir validé mes derniers examens et la fin d'un niveau, j'avais décidé de ne pas continuer et de me concentrer uniquement sur mon travail au sein de la compagnie. Je perfectionnerai mon coréen sur le tas. Je profitais d'avoir de l'avance et donc un peu de temps, pour prendre un petit-déjeuner dans ma chaîne de café préféré, au logo bien connu de sirène sur fond vert. Comme il était encore tôt, j'effectuai un crochet par un magasin de graphisme, j'avais envie de tester de nouvelles techniques. Agrandir le champ des possibles ne pouvait pas faire de mal, au vu de mon activité actuelle. La tentation de tout acheter dans ce style de boutique menait un combat sans nom à mon portefeuille. Ma raison devait impérativement remporter cette bataille.
Parfois, je m'exaspérais moi-même. J'étais faible. Je repartais avec beaucoup trop de choses. Qui boufferait des ramyeons encore ce mois-ci ? C'était bibi ! Mon alimentation se résumait à ce genre de nouilles instantanées, des boulettes de riz et du café. Pas le plus healthy du monde. Le bus me déposa devant l'agence vers neuf heures. Je filais directement au studio afin de m'y installer et dessiner avant que le plus jeune n'arrive.
***
— Bah, dit donc, ça s'arrange pas ta tronche toi.
Ah, Daeyeon et son franc-parler légendaire. Toujours agréable. Je venais de tomber nez à nez avec lui au détour d'un couloir.
— Bonjour à toi aussi Daeyeon. Oui, merci, je vais pas mal et toi ?
— Me mens pas ! Si j'ai de grands yeux, ce n'est pas un hasard ! Je visualise quand les gens me leurrent !
Qu'est-ce qu'il racontait celui-là ? Même si la perspicacité le caractérisait, à quel moment pouvait-il imaginer que je me repose sur lui ? Non, j'avais beau chercher, je ne comprenais pas.
— Je ne vois pas de quoi tu parles, répondis-je d'un ton le plus neutre possible.
— Très bien ! Tu préfères nier ! Sache que si tu as besoin de te confier, compte sur moi. Ça sert à ça les amis, me livra-t-il dans un grand sourire, avant de me planter là.
À oui ! Nous étions amis. Ce concept m'était sorti de l'esprit. Une autre fois peut-être, hein. Je continuais mon chemin vers le studio tout en cogitant. Mon cerveau ne pouvait-il pas me laisser un peu de répit ? Visiblement, non.
***
Je n'avais aucune idée du temps écoulé quand une voix me sortit de ma bulle.
— Mark ! Mark ! MARK ! MAAAARRRRKKK !
— QUOI ?! Non, ce n'est pas moi, je n'étais pas là, j'avais piscine !
Je sursautais quand j'aperçus Insook.
— Oh ! Désolée, je ne t'avais pas entendu, j'avais mis la musique une peu forte, expliquais-je le doigt pointé sur mes écouteurs dans mes oreilles. Tu te caches derrière moi depuis longtemps ?
— J'avais remarqué ! Ça fait dix minutes que je t'observe, me répondit-il hilare.
Il n'avait pas l'air de l'avoir mal pris, tant mieux.
— Je ne savais pas que tu dessinais. Je peux voir ?
Pourquoi rougissais-je, moi ?!
— Euh, je gribouille, mais rien de fou, aucune technique j'ai appris toute seule.
Comment, j'essayais de noyer le poisson pour ne pas avoir à le lui montrer ?
— Je peux voir ? répéta-t-il.
Et merde.
— C'est-à-dire que...
Tout à coup, mon cerveau se déconnecta et se brancha uniquement sur mon odorat. Snif snif. C'est lui qui sentait le café ? Je me penchais légèrement pour regarder ce qu'il cachait derrière son dos. Il dut percevoir que je ne faisais plus du tout attention à lui et agita la cup sous mon nez.
— Si tu me laisses voir tes dessins, considère-le comme à toi.
Oh le fourbe ! Il avait lui aussi trouvé ma faille. Je soupçonnais même son acolyte de m'avoir balancé ! J'allais régler mes comptes.
— Vendu !
Oui, je sais, ne me jugez pas !
Il avait à peine eu le temps de s'approcher, que la tasse fumante demeurait déjà dans mes mains. Pétard que c'était bon ! Je l'entendis vaguement commenter mon travail dans un coin, mais je n'y prêtais pas attention, trop occupée à savourer mon délicieux breuvage. J'avais tout de même remarqué qu'il possédait lui aussi une cup. Avait-il prévu depuis le début de m'en donner une ? J'étais partagée entre le sentiment de m'être vraiment fait rouler, et la reconnaissance qu'il ait pensé à moi.
— Merci pour le café ! lançais-je sans le regarder.
— Ah, de rien, j'ai croisé Dae ce matin qui m'a dit que tu en aurais sûrement besoin.
Mystère numéro deux résolu ! Il lui avait bien balancé ma faiblesse. Cela dit, déjà deux fois, qu'il se débrouillait pour m'en obtenir alors que mes réserves internes de caféine frôlaient le point de non-retour. J'imaginais devoir le remercier. Mon attention se porta finalement sur Insook — il m'avait apporté le Graal, je ne pouvais décemment pas lui donner des noms d'oiseaux, enfin de lapin, bref, vous avez suivi —. Je l'observais feuilleter mes dessins tout en sirotant ma boisson préférée. Quand il ferma mon carnet, j'attendis la sentence.
— Ce n'est vraiment pas mal. Tu fais ça depuis longtemps ?
— L'aquarelle ? Depuis ce matin, je suis tombée dessus au magasin et j'ai voulu essayer.
Ce café était un délice, il venait d'où ? Son sourire en coin me fit me reconcentrer sur notre discussion.
— Tu dessines toi aussi ?
— J'aime bien, ça me détend.
Nous nous observions un instant dans le blanc des yeux, sans savoir quoi dire. Il s'agissait de notre échange le plus long jusqu'à présent. Du moins de façon civilisée et sans animosité. Au bout de quelques secondes, il se racla la gorge, visiblement mal à l'aise de ce qu'il s'apprêtait à me dire :
— Mark ?
— Oui ?
— Je crois qu'il faut qu'on parle tous les deux.
— Je pense aussi.
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C'est vendredi!!
Alors je sais que la photo en média pouvait laisser croire qu'il s'agissait du shooting de Insook.... mais non ^^. Pas taper!!
Mais au moins on a un début d'apaisement.
Sinon vous en pensez quoi? Rien de tel qu'un café et qu'un rayon de soleil appelé Shin quand on est ronchon non? Vous ne trouvez pas?
L'histoire se met en place doucement je sais mais c'est pour rendre les choses réalistes. Ils deviennent pas tous best friend du jour au lendemain. Déjà que...
Vous avez donc des bribes d'informations dispersées par-ci, par là pour mettre l'intrigue en place. Les chapitres sont courts donc ça n'avance pas vite mais je vous demande de me faire confiance ^^
On se retrouve donc dimanche pour le shooting de Jin.
Je vous souhaite un bon début de weekend !
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