Chapitre 33
Point de vue d'Eunji
Une semaine s'était écoulée depuis le shooting au café. Une semaine que j'avais avoué à Mark qu'elle ne me laissait pas indifférent. Je n'avais pas formulé textuellement « tu me plais et je n'arrive pas à te sortir de ma tête » et elle crut d'abord à une stratégie pour rabaisser le clapet de Yuna, alors j'avais rétabli la vérité. La façon dont mon ex l'avait traitée m'avait mis hors de moi. Encore plus que Mark ne se défende pas. Je comprenais qu'elle ne souhaitait pas faire d'esclandre en plein milieu du café, mais elle n'avait même pas bronché, j'avais détesté son manque de réaction. Elle remballait les gens quand elle le voulait. Nous n'avions pas eu l'occasion d'aborder le sujet à nouveau. Je ne l'avais plus revue depuis la réunion le lendemain, trop overbooké à cause des répétitions et des préparatifs des concerts. Le premier approchait à grands pas. Je ne l'avais pas non plus croisée à l'agence. D'ordinaire, elle mangeait avec Dae ou je l'apercevais devant le studio. Personne. Ce qui me tracassait, c'était qu'au cours de cette réunion, elle avait blêmi à l'annonce de sa venue en France. Le PDG lui avait dévoilé qu'elle nous accompagnerait dans son pays d'origine. Nous partirions aux États-Unis après le début de la tournée, pendant qu'elle resterait ici pour gérer ses différents projets. Puis, elle nous rejoindrait à Paris, pour les dernières dates avant de rentrer en Corée avec nous. Sa mission consisterait à seconder nos interprètes, mais aussi d'entamer de possibles collaborations avec certaines marques. Notre directeur marketing misait sur sa nationalité et son travail à nos côtés depuis plusieurs mois maintenant, pour convaincre nos potentiels partenaires. Elle possédait l'expérience des deux pays, nous connaissait sur le bout des doigts, maîtrisait notre image. Elle conseillerait nos agents pendant les négociations. Si sur le coup, elle avait paru ravie de cette confiance et de ces nouvelles responsabilités, elle n'avait pas pu cacher son appréhension à revenir en France. Je la fréquentais depuis suffisamment longtemps pour savoir que ce n'était pas juste l'angoisse de prendre l'avion. Elle ne souhaitait pas remettre les pieds dans son pays natal. Cette attitude, couplée à son absence depuis plus d'une semaine m'inquiétait.
Je venais de croiser Daeyeon et il m'avait affirmé l'avoir aperçue ce matin. Apparemment, elle bossait depuis ce nouveau café, avait besoin de changer d'air et de rencontrer du monde. Je pouvais la comprendre, mais je n'arrivais pas à chasser ce pressentiment. De plus, j'étais investi d'une mission. Yoonho la cherchait. Il souhaitait la revoir avant rentrer chez nos parents.
Vingt heures et j'étais épuisé alors je mis fin à ma journée de travail de bonne heure, pour une fois. Mon frère avait-il déjà mangé ? Il passait la soirée avec Shin et Daeyeon pour profiter d'eux avant son départ demain. Comme je terminais plus tôt que prévu, je décidais de les rejoindre. J'allais toutefois tenter ma chance au studio avant. Peut-être que j'arriverais à croiser Mark. Cinq minutes plus tard, je poussais les portes du local dans lequel elle avait l'habitude de travailler. Merde ! Pour la trouver, je l'avais trouvée. Allongée par terre, entourée de plein de dessins similaires à ceux de la dernière fois. Recroquevillée sur elle-même, elle semblait frigorifiée et ses joues ruisselaient. Je me précipitais sur elle pour la prendre dans mes bras, toujours avec une pointe d'anxiété. Si elle me repoussait ? Si j'aggravais la situation ? À peine l'avais-je effleurée qu'elle chercha mon étreinte. Je tentais de la calmer et de la rassurer. Ses crises avaient diminué depuis un petit moment. Du moins, à ma connaissance. La raison de celle-ci ne laissait pas place au doute. Que fuyait-elle en France pour la mettre dans un état pareil ? Les indices s'éparpillaient partout sous mes yeux, je n'osais croire que ce qu'elle avait vécu était aussi noir et violent que ses dessins l'illustraient. Le rapprochement avec sa famille paraissait évident, j'espérais sincèrement me tromper. Je resserrai mes bras autour d'elle, caressais doucement son dos et murmurais des mots apaisants.
Après de longues minutes, elle retira son visage de mon coup et s'écarta de moi. Une vague de froid se propagea dans tout mon corps. J'essuyais une dernière larme sur sa joue à l'aide de mon pouce. Depuis combien de temps se trouvait-elle dans cet état ? Calmée, sa fatigue me sauta aux yeux.
– Viens là.
Je l'aidais à se relever et la portais jusque sur le sofa. Je m'installais confortablement et elle se cala contre moi pour enfouir une nouvelle fois son visage dans mon cou. Je la bordais de ma couverture, rappel de nombreux souvenirs. J'avais fini par lui dire de la laissée sur ce sofa, pour pouvoir s'enrouler dedans lorsqu'elle avait besoin d'une pause dans son travail. Son odeur l'imprégnait, masquant la mienne.
Je n'avais aucune idée du temps écoulé, quand le grincement de la porte me tira de ma somnolence. La tête de mon frangin dépassa, suivie de celle de Daeyeon. Mes yeux se baissèrent sur Mark qui dormait toujours. Je signifiais aux deux intrus de ne pas faire de bruit. Daeyeon me lança un regard interrogateur et tomba sur les dessins en vrac au sol. Il eut la vivacité d'esprit de les cacher à mon frère et lui intima discrètement de nous laisser, sous prétexte que nous avions besoin de repos et qu'ils nous retrouveraient demain. Celui-ci hocha la tête et m'adressa un petit signe de la main avant de partir. Je remerciais Dae d'un mouvement de lèvres silencieux et celui-ci, rassuré de me voir gérer la situation, sortit à son tour sans faire de bruit.
Je m'endormis rapidement, bercé par la respiration de la jeune femme, enveloppé par la chaleur de la couverture et de son corps contre le mien.
***
À mon réveil, une sensation de vide et de froid m'arracha un grognement. Mark ne se trouvait plus dans mes bras et ce constat me fit ouvrir les yeux d'un coup. Mon regard balaya la pièce. J'étais seul et le bordel avait été rangé. Je n'eus pas le temps de m'interroger sur la localisation de la photographe. Le bruit de la porte attira mon attention et sa silhouette apparut juste après. Ses cheveux encore mouillés m'informèrent de sa douche.
– Oh, pardon, je t'ai réveillé ! s'excusa-t-elle.
– Non non, ne t'en fais pas, j'ai refait surface il y a quelques minutes déjà.
Ma voix grave du matin qui partait en live lui arracha un sourire, qu'elle perdit instantanément au souvenir de quelque chose. Je me levais et m'approchais d'elle lentement pour ne pas la brusquer.
– Je... Désolé, pour hier soir, lâcha-t-elle après une minute de réflexion.
– Pourquoi t'excuses-tu ?
– À cause de moi, tu as dû dormir à l'arrache, encore une fois, et...
Elle laissa sa phrase en suspens.
– Je ne connais pas ton vécu ni même ce qui te met dans des états pareils, mais tu sais que je ne te jugerais pas. Tu peux me parler.
– Je ne souhaite pas dépendre de toi.
– Hein ?!
– Je ne veux pas me reposer sur toi et me dire que tout ira bien parce que tu seras là pour gérer mes crises.
OK. Je ne m'y attendais pas. Cela dit, je pouvais comprendre son point de vue, même si j'imaginais une raison sous-jacente.
– Tu sais, tu ne me déranges pas, tu m'aides aussi dans un sens. Je dors mieux avec toi.
Ce qui s'avérait complètement juste. Et je jugeais que c'était son cas. Elle paraissait toujours plus reposée avec moi. Au début, j'avais mis en cause l'épuisement de ses crises. Elle laissait tout sortir, ce qui devait l'exténuer au point de s'écrouler de fatigue. Sauf que durant les semaines où nous avions bossé ensemble, j'avais noté que même sans incidents, son sommeil semblait plus apaisé, plus profond. Pourtant nous en avions passé des nuits à l'arrache sur le canapé de mon studio. Était-ce dû à moi ou juste à la présence d'une personne ? Aucune idée. Je l'imaginais difficilement pioncer en présence de quelqu'un en qui elle n'avait pas confiance.
– Ça ne change rien. Tu ne seras pas toujours là pour m'aider.
Certes. Bon, elle avait complètement ignoré le fait que je lui avais affirmé aimer dormir avec elle. Essaie encore.
– Tu sais je...
– Toi aussi, tu vas finir par t'en aller, me coupa-t-elle.
OK. Nous rencontrions d'un gros sentiment d'abandon. Oui Park Eunji, psychologue à ses heures perdues. Si vous avez besoin de moi, je vous laisse ma carte. Toutes ces heures passées à lire Jung, me servaient enfin.
– Petit-déj ? enchaîna-t-elle sans que j'aie le temps de répliquer
– Euh, d'accord, répondis-je surpris par ce changement brusque de comportement. Donne-moi cinq minutes pour prendre une douche rapide et on y va, si ça te convient.
– Ça marche. Je t'attends là.
***
Nous nous dirigions vers la cuisine et plus nous nous approchions, plus je pouvais reconnaître distinctement les voix de ses occupants. Je ne fus donc pas surpris de trouver mon petit frère, en compagnie de Shinny, Daeyeon et Insook, en plein déjeuner. Rare étaient les fois où l'on mangeait ensemble. Encore moins fréquent, voir le plus jeune de la bande debout si tôt, sans ronchonner et les yeux parfaitement ouverts.
– Noona !
À peine avions-nous passé l'encadrement de la porte que mon frangin se précipita dans les bras de Mark.
– Eh bonhomme ! Tu as bien dormi ?
Elle s'installa à table à côté de lui après avoir salué tout le monde d'un signe de la main. Je l'imitais gratifiant mes cadets d'un bonjour auquel ils répondirent de façon enjouée.
– Non ! Sookie a ronflé toute la nuit ! articula Yoonho qui s'était finalement assis sur les genoux de la jeune femme pour lui faire un câlin.
– Hey ! C'est pas vrai ! répliqua le concerné.
– Si c'est vrai ! renchérit Daeyeon sous le regard moqueur et attendri de Shin.
– Tu sors avec mon frère ?
Voilà !
La bombe avait été lâchée d'un coup. Je n'étais pas le seul à ne pas l'avoir vu venir. Daeyeon s'étouffait avec ses ramyeons. Sook riait de façon machiavélique. Shinny, quant à lui, me scrutait d'un œil malicieux. Il me connaissait par cœur.
– Euh... non. Pourquoi penses-tu ça ? questionna Mark.
– Vous vous faisiez un câlin. Comme Dae et Sookie.
La jeune femme se mit à rougir. Le sourire dudit Sookie s'élargit, rejoint par l'espèce de renard chafouin qui lui servait de petit ami. Shinny était carrément mort de rire. Mark avait envie de se cacher sous la table. Moi, je ne bronchais pas, continuais de manger mon bol de riz comme si de rien n'était. J'attendais de voir comment elle allait s'en dépatouiller.
– Ce n'est pas parce qu'on fait un câlin à quelqu'un, qu'on sort avec. Regarde, là, je te fais un câlin. Pourtant, on ne sort pas ensemble.
Bien rattrapé.
– Tu me trouves mignon ? Tu m'aimes bien ?
Où voulait-il en venir ?
– Bien sûr ! Je t'adore, lui répondit-elle dans des chatouilles affectueuses.
– D'accord, je vais grandir et quand je serai adulte, on s'épousera, je prendrais soin de toi et te protégerais à la place de mon frère.
Et voilà ! On y était. Il ne perdait pas le nord, celui-là !
Mes cadets explosèrent, hilares.
– Hum, je serais probablement trop vieille pour toi quand tu seras en âge de te marier, mais on en reparlera à ce moment-là, si tu n'as pas changé d'avis.
– Tu as du souci à te faire, me souffla Shin s'essuyant une larme tellement il avait ri.
– Oh oui, soupirais-je le nez toujours dans mes nouilles.
Ma réponse, qui ne démentait pas ses propos, eut le mérite de surprendre tout le monde. Bah quoi ? Il avait raison. Il était temps que je prenne une décision.
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Bonjour à tous ceux qui ont survécu au repas de noël ^^
Les choses avancent de plus en plus !
J'espère que vous avez aimé ce chapitre qui se fini sur un note un peu plus positive que celle sur laquelle il a commencé.
Vous allez commencer à avoir des réponses, ne vous en faites pas.
En attendant prenez soin de vous et à très vite.
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