Chapitre 8
Le retour d'Oikawa au Japon ne fut pas si terrible que Tobio l'avait craint.
Il prit ses précautions, ne sortit que quand c'était nécessaire, et réussit à ne pas donner prétexte au lien de les réunir. Même si Oikawa était devenu beaucoup plus proche et du même coup beaucoup plus perceptible, ce n'était plus aussi intense qu'à l'époque du lycée ; peut-être parce que le lien avait continué à se défaire, petit à petit. Il suffisait encore d'un an, un an et demi maximum, et Kageyama pourrait enfin vivre pleinement sa vie de manière autonome sans dépendre d'une relation imposée à sa naissance.
Il croyait qu'Oikawa aurait adopté la même ligne de conduite. Il se trompait.
En octobre, les Adlers reçurent les Jackals pour un match de championnat à domicile. Tobio était de bonne humeur –il attendait de jouer contre Hinata depuis plusieurs mois, et le jour était enfin arrivé de se confronter. Il fit l'entrée traditionnelle sur le terrain, lança une balle dédicacée dans le public, et le match allait commencer quand il le sentit.
Oikawa était là. Il était dans la salle. Pour la première fois depuis cinq ans, Tobio et lui étaient au même endroit, au même moment.
Pourquoi ? Après tant de temps à se fuir réciproquement, ce n'était pas par hasard. Cette fois, ce n'était pas le destin. Si Oikawa était entré dans le gymnase où jouait les Schweiden Adlers, c'était parce qu'il le voulait. Il savait que Tobio était là.
Et il venait le voir.
Pour aussi perturbé qu'il soit par le retour de son aîné et cette proximité inattendue, Kageyama ne pouvait pas se permettre de se faire déconcentrer. Il joua avec tout ce qu'il avait, comme s'il échapperait au lien en se jetant dans le match. Les commentateurs le remarquèrent, se demandant vaguement la cause de ce bon jour –et elle était toute simple. Elle était dans les gradins. Oikawa n'était pas seulement son âme sœur, il était toujours son modèle, même en dépit de leurs rapports plus que compromis
Regarde-moi, Oikawa-san. Regarde mes services.
Regarde comme j'ai changé.
Il attendit la fin du match pour le chercher des yeux. Des tas de sentiments le traversaient, certains qui lui appartenaient, d'autres pas, d'autres dont il n'était pas certain. Mais quand il reconnut enfin Oikawa au milieu du public et que leurs yeux se croisèrent, il n'eut plus aucun doute. Tous les deux éprouvaient la même chose.
De la surprise. Du bonheur.
Non, c'est le lien qui parle. Mais Tobio n'arrivait pas à rompre le sort, plongé dans les yeux d'Oikawa pour la première fois depuis leur adolescence –même à cette distance, il le voyait clairement, quasiment identique à ses souvenirs sinon plus adulte, ses cheveux châtains un peu plus courts et son teint un peu plus coloré qu'autrefois, mais cette même présence écrasante, redoutable et séductrice.
Mon âme sœur.
Il ne se détourna que lorsque Nico lui passa un bras autour des épaules pour l'attirer contre lui en le félicitant du match.
-Eh, t'es trempé, protesta faiblement Tobio.
Il sentait ses joues cuire –mais était-ce parce qu'il était si proche de Romero en public, ou parce qu'il savait qu'Oikawa les regardait ? Il n'en savait rien. Dans tous les cas, Hoshiumi éclata bruyamment de rire à l'arrière-plan, et Nico continua joyeusement de le mettre mal à l'aise, l'embrassant sur le front comme à son habitude :
- És tímido agora, docinho ?
Il le testait en portugais depuis quelques temps –un échange équitable au vu de ses progrès en japonais, et Tobio avait accepté d'apprendre un peu de sa langue natale.
-I'm not, répliqua-t-il toutefois en anglais, trop perturbé pour chercher ses mots en portugais.
Il se retourna vers les gradins, mais Oikawa avait disparu, et le lien, dans sa poitrine, était lourd et douloureux, signe qu'il se sentait mal. Mais pourquoi ? Parce qu'il avait vu que Tobio avait trouvé quelqu'un, qu'il était passé à autre chose ? C'est l'hôpital qui se fout de la charité, songea Kageyama, et il décida de ne plus y penser et de laisser le lien s'étioler tranquillement.
Jusqu'à cette journée de février où tout bascula.
Il se fit une légère entorse à l'entraînement, rien de trop grave, mais tout de même assez pour être soutenu jusqu'à son appartement par Ushijima et Nicolas –et il maudissait sa malchance, les Adlers avaient un camp de prévu le lendemain et les coachs avaient déclaré net, en voyant sa cheville gonfler, qu'il valait mieux que Tobio reste se reposer plutôt que de les accompagner. Passer deux jours dans son appartement en solitaire ne le tentait pas du tout, surtout quand il aurait pu faire du volley à la place, mais il s'y plia de mauvaise grâce sous l'insistance de son colocataire et de son petit-ami.
Ushijima partit vers quatre heures du matin –les départs se faisaient souvent très tôt ou très tard pour gagner une journée ; et quand Tobio se réveilla, il était seul. Il passa les deux jours à flemmarder, regardant quelques vieux matchs de volley qu'il se souvenait avoir découverts avec Kazuyo des années plus tôt, en profita pour prendre quelques nouvelles de sa famille, et répartit son temps entre le canapé et son lit. Finalement, la veille du retour des Adlers, il alla se coucher à minuit, sachant qu'Ushijima serait rentré quand il se lèverait –le champion lui avait envoyé quelques messages pour lui raconter comment se passait le camp un peu plus tôt dans la soirée. Il mit son téléphone en charge, et prit soin de souhaiter bonne nuit à son petit-ami.
Moi : bonne nuit
Nico : goodnight, see you tomorrow <3
Y penser fit chaud au cœur de Tobio, et il sourit vaguement, le visage à moitié plongé dans son oreiller.
Moi : <3 <3
Nico : <3 <3 <3
Kageyama posa le téléphone au bord de son lit, puis se retourna et ferma les yeux.
Il fut réveillé par un bruit de clefs dans la porte d'entrée. Ça doit être Ushijima. Elle s'ouvrit puis se referma, et il entendit des pas dans le salon –mais il n'y avait pas qu'une personne, ils étaient deux. Peut-être que Nico est venu aussi, songea-t-il avec espoir. Il se redressa sur les coudes, alluma son téléphone pour voir l'heure, et se rendit compte que quelque chose clochait.
Il était beaucoup trop tôt. Il n'était que deux heures vingt-cinq du matin, et il ne les attendait pas avant cinq ou six heures. Et ces bruits de pas furtifs –ce n'était pas la démarche d'Ushijima. Il entendit des murmures, une voix de femme, et son sang se glaça. Il y a des gens dans mon appartement. Ils avaient allumé la lumière, elle filtrait sous la porte de sa chambre. Il se leva sans un bruit, le cœur battant, cherchant des yeux quelque chose dans sa chambre, n'importe quoi pour se défendre –et alors la porte s'ouvrit et il se retrouva en pleine lumière face à deux personnes qu'il identifia immédiatement.
Les concierges... ?
Le reste se passa en un clin d'œil. L'homme voulut le frapper, Tobio le repoussa, la femme se jeta sur lui pour l'empêcher de crier. Il se débattit pour respirer, bouscula la table basse où traînait encore un bol qui se cassa –puis l'homme revint à la charge, le précipita par terre, et Kageyama sentit les éclats lui ouvrir les doigts, le sang mouiller sa paume, l'air manquer dans ses poumons. La panique lui comprimait la poitrine, il était coincé sur le ventre, mais il pouvait relever la tête et crier, quelqu'un viendrait l'aider, quelqu'un, n'importe qui –et il était en train d'inspirer quand une douleur aveuglante lui traversa la tête, et il ne fut plus conscient de rien, seulement de sons qui ne faisaient pas sens et de vagues impressions.
Quand Tobio reprit conscience, il avait les yeux bandés et un bâillon dans la bouche. Ses poignets étaient liés derrière son dos avec ce qui devait être de la corde, le nœud beaucoup trop serré et qui coupait sa circulation ; ses chevilles étaient également attachées, et il était assis contre un mur dans une pièce glaciale. Il n'était qu'en T-shirt et en jogging –ses affaires de nuit- et il se mit immédiatement à grelotter, essayant de se rappeler ce qui s'était passé, sentant la panique le submerger par vagues.
Où est-ce que je suis ?
D'horribles migraines lui vrillaient la tête et lui donnaient la nausée. Il testa les entraves pour voir s'il pouvait s'en défaire, mais impossible, et la corde lui entailla la peau. Il était enfermé, retenu prisonnier, personne n'avait rien vu ni entendu, et il était incapable de se libérer seul. Il ne voyait aucune solution, noyé par l'impuissance et le désespoir, et il eut tout à coup envie de pleurer en se rendant pleinement compte de sa situation. Il était seul, complètement seul.
Qu'est-ce que je dois faire ?
Il mordit le bâillon à défaut de sa lèvre inférieure, comme si ce geste allait suffire à étouffer la peur et la douleur. Il fallait qu'il se calme. Qu'il réfléchisse. Il se repassa la scène dans l'appartement, floue et confuse, chercha à trouver une explication rationnelle –ils étaient là dans le hall quand je parlais du camp avec Ushijima-san. Ils ont dû entendre qu'on allait partir. Mais ils ne savaient pas que je m'étais blessé et que j'étais encore là, et voulait profiter de l'appartement vide pour s'y introduire avec leurs doubles et nous voler.
Les concierges devaient savoir qu'ils avaient une bonne situation –la Jaguar en disait assez, la résidence elle-même était huppée, et ce n'était pas impossible qu'ils les aient déjà vus à la télé et sachent qu'ils étaient des célébrités dans leur milieu. L'appât du gain avait dû les attirer... et leur petit cambriolage avait mal tourné.
Et maintenant ?
Tobio essaya de reprendre son souffle. Il faisait froid et humide, sa peau était hérissée de chair de poule, il se sentait mal, sa tête cognait toujours autant.
Et comme si ce n'était pas suffisant, il sentit le lien tirer, lui aussi, se serrer dans sa poitrine, signe qu'Oikawa vivait des choses de son côté. Ce n'était rien de positif, mais Tobio n'arrivait pas vraiment à distinguer ce dont il s'agissait, le lien était trop faible...
Et soudain il s'activa.
Ce fut bref et intense. Tout d'un coup, il ressentit Oikawa, sa présence, quelque chose de familier et d'intime qui se glissait dans son cerveau, une empreinte forte et soudaine, qui l'étouffait presque, et il sentit la panique monter en flèche, il crut étouffer –et tout aussi vite, elle se dissipa, le laissant haletant, les migraines encore pires qu'avant.
Qu'est-ce que c'était que ça ?
Il frissonna. Le lien n'avait jamais fait ça. C'était brutal et fort, la présence d'Oikawa l'avait quasiment intoxiqué, il ne l'avait jamais ressentie ainsi avant, avec autant de puissance.
Il se souvint d'avoir entendu un jour que le lien des âmes sœurs pouvait servir dans des cas d'enquêtes –était-ce ce qui se passait ? Est-ce que la police était chez Oikawa, à sa recherche, et lui avait demandé de participer à sa manière ? Mais seul Hinata savait –avait-il été contacté, lui aussi ? Ou bien peut-être juste qu'Oikawa avait vu sa photo à la télé et prenait les initiatives de lui-même ?
Dans tous les cas, le lien s'était réveillé. Et Tobio ne savait pas ce que ça signifiait exactement –mais est-ce que tous ses efforts depuis plus de deux ans n'avaient servi à rien, est-ce que toutes les restrictions qu'il s'était imposées, à Nico et à lui-même, venaient d'être ruinées par ces quelques secondes où Oikawa s'était immiscé dans son esprit ? Le malaise grandit en lui, épais, amer, à la fois de l'expérience qu'il venait de vivre et des conséquences qu'elle pouvait avoir.
Il n'eut pas à s'interroger bien longtemps. Une vingtaine de minutes plus tard, ça recommençait, et il perçut mieux ce qui se passait –le lien prit de plus en plus d'importance, la présence d'Oikawa se fit de plus en plus forte. Tobio restait sur ses gardes, ne sachant comment réagir, que céder, son esprit envahi par une sensation étrangère et déplaisante.
Et soudain une voix.
Tobio-chan.
Il n'avait pas entendu ce surnom depuis des années. Personne ne l'appelait comme ça à part Oikawa, il lui appartenait, il était sa marque de fabrique. Il n'avait jamais aimé cette appellation, mais l'entendre tout à coup après plus de six ans lui fit un coup au cœur.
Je suis là.
Je suis avec toi.
Tobio fut arraché à la transe avec violence. Sa tête tournait. Il sentait des larmes rouler sur ses joues, lentes et chaudes.
Je suis avec toi. Il n'avait plus espéré entendre ces mots venant d'Oikawa depuis des années. Etait-ce bien lui qui les avait prononcés ? Etait-ce bien la même personne que celle qui lui avait dit, à l'époque, je ne veux pas de toi ? Oikawa qui ne le supportait pas, qui l'avait renié toute sa vie comme cadet et comme âme sœur, qui l'avait fui jusqu'à l'autre bout du monde –cet Oikawa lui disait à présent qu'il était à ses côtés ?
Tobio ne voulait pas s'en réjouir. Il voulait garder Oikawa à distance, aussi loin que possible, le rejeter de son existence –mais comment ne pas sentir cette pointe d'espoir ? Le lien était la seule chose qui le raccrochait encore au monde extérieur, là où il était. Le seul avec qui il pouvait communiquer, c'était Oikawa. Le seul capable de lui apporter un peu de soutien et de réconfort dans un moment pareil, c'était Oikawa. Kageyama ne le voulait pas, mais c'était les faits.
L'usage du lien l'avait épuisé. Le froid et la faim sapaient déjà assez ses forces, en plus de la peur et des doutes. Est-ce que ce serait vraiment utile ? Oikawa pouvait-il vraiment le retrouver à travers le lien ? Tobio gardait les yeux fermés, de toute façon incapable de voir.
Je voudrais que Nico soit là.
Depuis qu'ils sortaient ensemble, Kageyama avait commencé à comprendre Oikawa un peu mieux. Leurs situations s'étaient renversées. Tobio s'était trouvé seul à voir son âme sœur aimer quelqu'un d'autre que lui ; et à présent c'était lui qui était dans une relation et laissait Oikawa sur le côté. Mais les choses ne pouvaient pas suivre le même cours. Nico n'avait plus d'âme sœur, ils ne pouvaient pas rompre sur ce prétexte.
Oikawa avait probablement voulu qu'Iwaizumi soit son âme sœur. Kageyama avait trouvé ça stupide en y pensant dans les premiers temps, quand il était convaincu que le système était infaillible et que les âmes sœurs étaient nécessairement faites pour être ensemble et se compléter. Il n'imaginait pas que lui aussi un jour aurait préféré ce lien sur quelqu'un d'autre –sur Nicolas, pour pouvoir en sentir la bonne humeur permanente, pour puiser en lui encore un peu plus, pour n'avoir aucun regret à aller jusqu'au bout de leur relation.
Il entendit des pas au-dessus de sa tête, et se demanda si les concierges descendraient le voir. Est-ce qu'ils comptaient le nourrir ? Ou juste l'oublier là jusqu'à ce qu'il meure de faim et de froid ? Il essaya de nouveau de forcer sur la corde qui retenait ses mains, mais ne réussit qu'à abîmer ses poignets davantage. Le bâillon était trop serré, il sentait les coins de ses lèvres tirer et se craqueler, et il n'arrivait pas à bien respirer dans l'atmosphère humide et poussiéreuse de la cave. Il envisagea de rouler sur le côté, mais doutait que le sol soit beaucoup plus chaud que le mur, et resta en position assise en dépit des crampes qui commençaient à apparaître.
Je dois être dans les sous-sols de la résidence.
Qui irait le chercher là ? L'enquête ne risquait pas d'avancer, et il ne savait pas au bout de combien de temps il serait retrouvé, si déjà ils le retrouvaient. Les concierges semblaient vivre normalement au-dessus –il entendait le bruit d'une télé, des pas, quelques paroles.
Il attendit, à défaut d'autre chose, essayant de frotter ses mains ensanglantées ou ses genoux ensemble dans l'espoir de récupérer un peu de chaleur pour tenir le coup jusqu'à ce que les secours arrivent. Il n'avait aucune notion du temps qui passait, de l'heure qu'il était, ne pouvait se fier qu'à sa faim et sa fatigue, et au rythme des concierges au-dessus, se demandant si le lien se manifesterait à nouveau.
Et, pour la troisième fois, Oikawa prit contact avec lui.
C'était légèrement différent de la fois d'avant, sa présence était plus intrusive, presque douloureuse, et Tobio se referma sur lui-même par réflexe, par pure défense. Oikawa était son âme sœur, mais ça restait un étranger, et qu'il utilise le lien pour s'approprier ses perceptions ne lui plaisait pas, peu importaient les circonstances, son système n'était pas habitué à ça, pas prêt à ça.
Et de nouveau, sa voix résonna dans l'esprit de Kageyama :
Tobio, fais-moi confiance.
Oikawa et lui n'étaient pas amis. Ils n'étaient même pas proches. De fait, ils se connaissaient à peine.
Mais c'était sa meilleure chance de sortir d'ici.
Alors Tobio céda, le laissa emplir son esprit, le posséder tout entier. Oikawa apparut dans chacune de ses cellules, dans chaque fibre de son être, inscrit là depuis que le lien avait commencé à les unir –et Kageyama eut, pour la première fois, un aperçu de ce qu'était le lien des âmes sœurs. Ce fut comme s'ils étaient en symétrie parfaite, faits pour se ressembler et s'imbriquer, et un instant, la peine disparut, remplacée par une sorte d'ivresse.
Où es-tu, Tobio-chan ?
Et le lien se rompit tout aussi soudainement. Tobio inspira violemment, se sentant tout à coup étrangement vide, étrangement seul. Il n'avait jamais pensé que la présence d'Oikawa lui manquerait si cruellement, mais il ne pouvait pas faire autrement après ce qu'il venait de connaître, ces quelques secondes où ils ne formaient plus qu'un, cette connexion fusionnelle qui s'était établie entre eux pour la première fois. D'un coup, il avait l'impression d'avoir perdu la moitié de lui-même.
Il n'avait jamais connu ça. Et il aurait voulu ne jamais le connaître. Ça ne faisait qu'attester que sa théorie était la bonne depuis le début, que Kazuyo avait eu raison, que les âmes sœurs étaient vraiment reliées par la nature de sorte à créer une harmonie parfaite, et il venait de la goûter à l'instant.
Mais j'aime Nico.
Le lien était puissant, mais ça ne pouvait pas se comparer à ce qu'il avait construit avec Romero depuis bientôt trois ans. De nouveau, sa volonté s'opposa à la nature. Il aurait voulu y réfléchir plus amplement, mais il était exténué, affaibli par le lien et par la détention, avec l'impression que le froid ralentissait ses fonctions vitales.
En dépit de son épuisement, le lien était beaucoup plus clair qu'avant. Il sentait Oikawa avec une acuité qu'il ne connaissait pas, et suivit tour à tour ses différentes humeurs –l'indignation, le doute, le soulagement, la détermination. Tobio se demanda ce qui se passait. Peut-être qu'il était avec d'autres personnes. Peut-être qu'il avait rencontré Nico. Il ne savait plus, il avait envie de dormir, mais la douleur l'empêchait de prendre du repos.
Il lui sembla que plusieurs heures étaient de nouveau passées avant qu'Oikawa ne réapparaisse, et Kageyama l'attendait presque, cette fois, espérant à demi que sa présence revienne le tirer du noir, du froid et de la solitude. Il le laissa prendre le dessus, infiltrer sa présence en lui, et il s'accrocha à cette sensation avec le même désespoir qu'à l'époque où il sortait de l'adolescence et s'attachait à tout ce qui était susceptible de le faire sentir mieux.
Oikawa-san.
Ce n'était pas vraiment une pensée, c'était une sensation, les mots apparurent tout seuls dans son esprit, naturels, évidents. Le lien s'équilibra.
Je suis là, Tobio.
Le cœur de Kageyama se serra à cette nouvelle déclaration. Oikawa n'avait jamais été là. Pourquoi aujourd'hui ? Parce qu'il y était poussé, ou agissait-il de son propre chef ? Ces mots devaient être inconscients, comme les siens, à la fois involontaires et absolument sincères... Il entendait les concierges parler au-dessus, mais n'arrivait pas à comprendre leurs mots, à deux doigts de perdre connaissance.
Viens me chercher, songea-t-il à moitié conscient.
Oikawa disparut à nouveau, et Tobio laissa sa tête retomber contre sa poitrine. Il se repassa en boucle les mots qu'il avait entendus, croyant aveuglément à leur sincérité en attendant de pouvoir y penser convenablement –il avait besoin d'y croire, besoin d'un point d'ancrage. Il demeura dans un état de semi-conscience pendant une durée indéterminée, les sens engourdis par le froid, terrassé par l'épuisement. La seule chose qui bougeait encore en lui était le lien, et, de l'autre côté, Oikawa.
Il ne revint à peu près à lui que lorsqu'il entendit du mouvement et des voix différentes de celles des concierges, se demandant confusément s'il allait pouvoir sortir. Mais ce n'était pas le bon endroit –ils étaient à côté, il l'entendait, des gens étaient en train de parler, de marcher, de déplacer des choses, mais ils étaient de l'autre côté du mur. Il essaya de crier, mais ne put produire qu'un faible son étranglé, et ses espoirs s'éteignirent définitivement en entendant les hommes d'à côté –la police, supposa-t-il- remonter et abandonner leur piste, le laissant seul une fois de plus.
Ils étaient passés si près, et ne reviendraient plus, c'était terminé pour lui. Il crut qu'il allait passer le reste de son existence seul dans cette cave, qu'il y mourrait là, à vingt-deux ans, enterré avec ses regrets.
J'aurais dû voir ma famille plus souvent.
J'aurais dû profiter à fond avec Nico au lieu de me mettre des bâtons dans les roues.
J'aurais dû dire le fond de ma pensée à Oikawa. Que je l'admirais, que je l'aimais un peu, et qu'il a tout gâché.
Les pas réapparurent au-dessus de sa tête, mais quelque chose avait changé. Il entendit un meuble déplacé, puis une trappe s'ouvrir, et la panique revint, brutale, glacée, impossible à refouler. Les concierges allaient descendre le voir. Pourquoi, il ne savait pas, mais il avait un mauvais pressentiment.
Oikawa, songea-t-il alors qu'il entendait les premiers pas dans les escaliers. Oikawa, il faut que je contacte Oikawa.
Il fallait qu'il attire son attention pour activer le lien, qu'il trouve quelque chose, un stimulus, n'importe quoi –et il fit la seule chose qu'il pouvait faire dans sa situation. Il heurta violemment sa tête contre le mur dans un bruit sourd, sa plainte perdue dans le bâillon pendant que sa vision virait au blanc. La douleur devrait suffire. Oikawa avait dû la sentir. Il viendrait.
Les pas se rapprochèrent. Les concierges étaient dans la cave. Tobio ne voyait rien, ne pouvait pas bouger, ne pouvait qu'entendre –et sentir la présence d'Oikawa planer sur la sienne.
-Il est encore vivant ? murmura la femme.
-Evidemment, qu'est-ce que tu crois, répliqua l'homme sur le même ton. Les policiers viennent de partir. Je pense qu'on est tranquilles.
-On ne peut pas le garder ici. Il faut qu'on le relâche.
-Arrête ton délire. Il ira nous dénoncer si on le relâche. C'est ce que tu veux ? Finir tes jours en prison ?
Tobio avait l'impression que la panique et le froid l'empêchaient de bien réfléchir. Qu'est-ce qu'ils allaient faire de lui ? Il ne pouvait rien faire, la police ne reviendrait plus, il allait rester là...
-Tu n'as pas vu, à la télé !? s'écria la concierge d'une voix effrayée. Les infos ne parlent que de ça ! Ils vont nous retrouver, c'est sûr !
Son mari se mit à crier lui aussi, et Kageyama tressaillit.
-Merde, fait chier ! On pouvait pas savoir qu'il serait là !
Il se tut ensuite, et tandis que le silence s'étirait, Tobio commença à comprendre qu'ils ne comptaient pas le relâcher. Ni même le garder ici, c'était prendre trop de risques. Son souffle se raccourcit. Il ne voulait pas mourir. Pas maintenant. Pas comme ça.
-On a pas le choix. Faut le supprimer. Si on prend nos précautions, ils le retrouveront jamais... On est déjà plus ou moins innocentés... Putain, Fuyuko ! Arrête de chialer ! Ça me fait flipper aussi, mais c'était ton idée !
Oikawa disparut brutalement, le laissant complètement seul. C'était le coup de grâce avant l'heure. Tobio resta immobile, seul et impuissant, ne pouvant qu'attendre ce qui arriverait, incapable de faire quoi que ce soit à part penser –et encore, la fatigue et la peur l'empêchaient d'avoir les idées claires. Il entendait le concierge jurer et sa femme pleurer.
-Faudrait pas qu'il reste de traces... Comment on pourrait faire...
Tobio aurait voulu quelqu'un avec lui. N'importe qui. Il avait passé des années à souffrir de la solitude, et être seul jusqu'au bout lui semblait une cruelle ironie du sort. Quelqu'un. S'il vous plaît. Nico. Miwa. Hinata, quelqu'un, peu importe, Ushijima, Suga...
Oikawa.
-On peut pas sortir, c'est trop de risques, on pourrait nous voir. Faut qu'on reste ici.
Kageyama n'écoutait plus ce qu'il disait. Son instinct de survie était en ébullition, mais il ne pouvait rien faire de toute façon –il tira de nouveau sur les cordes qui entravaient ses poignets, ne réussit qu'à rouvrir ses plaies. Il ne pouvait pas s'échapper. La police ne reviendrait plus. Quoiqu'il arrive, il ne sortirait pas de cette cave vivant.
Peut-être que ce n'est pas plus mal. Peut-être que d'une manière ou d'une autre, je retrouverai Kazuyo et on pourra de nouveau jouer ensemble.
Un bruit de sirène résonna tout à coup, et le concierge jura de nouveau.
-Merde, ils reviennent ?
-Pas possible ! s'écria sa femme en pleine crise d'hystérie. Ils viennent de partir !
-Remonte, dépêche !
Ils l'abandonnèrent de nouveau là, grimpèrent l'escalier et refermèrent la trappe derrière eux avant de pousser un meuble dessus. Même si la police revenait, comment pouvaient-ils le retrouver là-dessous ? Tobio aurait voulu avoir de l'espoir, mais il était trop fatigué pour ça. Il entendit des coups insistants contre la porte, puis, finalement, les concierges ouvrir.
Tobio n'entendait pas grand-chose, mais une des voix lui parut familière et il tendit l'oreille, regagnant un semblant d'intérêt.
C'était la voix de Daichi.
Quelque chose s'apaisa en lui en dépit de la situation où il se trouvait –un sentiment de sécurité et de confiance lié à ses années à Karasuno, quand Sawamura était son capitaine. Il avait toujours eu foi en lui, avait admiré sa stabilité et sa détermination, et le reconnaître à cet instant, si près de lui, faisait renaître une bulle d'espoir dans sa poitrine.
Comme s'il l'avait entendu, Daichi parla de nouveau, plus fort, et Tobio l'entendit clairement :
-Excusez-moi ! Monsieur, Madame, je suis désolé pour cette intrusion. Je m'appelle Sawamura Daichi, de la police municipale. Nous sommes revenus sur nos pas grâce à une piste de dernière minute...
Une piste de dernière minute. Daichi venait le sauver. Tobio releva un peu la tête, toujours aveuglé, le cœur battant. Il entendit les concierges protester, et des pas au-dessus de sa tête, nombreux et lents –les policiers cherchaient l'entrée de la cave. Il essaya de nouveau de crier, mais n'y arriva pas, sa gorge était trop sèche. Il entendait qu'ils tâtonnaient, qu'ils n'arrivaient pas à trouver la trappe, et écouta attentivement, priant intérieurement qu'ils le trouvent.
Et soudain, quelqu'un déplaça le meuble qui cachait l'accès.
-Chef ! s'écria aussitôt la voix d'un policier. On a trouvé une trappe ! Elle était cachée sous le mobilier.
-Descendez voir, tout de suite ! répondit la voix de l'officier. Tu as une lampe ?
La trappe s'ouvrit, et Tobio eut l'impression qu'il allait pleurer de joie.
-On l'a retrouvé ! cria quelqu'un.
Les pas se précipitèrent, et soudain ils furent tous autour de lui. Ils lui enlevèrent d'abord le bandeau qui lui cachait les yeux, et Tobio fut aveuglé par la lumière de leur lampe après tant d'heures dans l'obscurité la plus totale –puis ils dénouèrent le bâillon et défirent les cordes qui retenaient ses poignets et ses chevilles.
-Comment allez-vous ? lui demandèrent les policiers.
-Vous vous souvenez de ce qui s'est passé ? Vous pouvez vous relever ?
Ils le soutinrent pour le remettre debout. Ses poignets saignaient, constata-t-il lorsque ses yeux purent s'adapter à la luminosité. Il était affaibli, mais tenait à peu près, et les policiers l'aidèrent à gravir l'escalier de la cave. Le salon était empli d'hommes en uniformes, et il ne comprit que quelques phrases au milieu du brouhaha :
-L'ambulance arrive !
-Allez chercher le kit de premiers secours !
Tobio aperçut vaguement les concierges menottés, guidés hors de chez eux par quatre policiers. Daichi apparut soudain dans son champ de vision, et le soulagement réapparut. Il pouvait dire que Sawamura était au bord de le prendre dans ses bras, mais n'osa pas dans le cadre professionnel, se contentant d'une main sur son épaule :
-Kageyama. Comment tu te sens ?
Il remplaça un des policiers pour le soutenir jusqu'au hall, et un de ses collègues posa une chaise contre un mur pour que Tobio s'y asseye.
-Sawamura-san..., marmonna Kageyama, la langue pâteuse. Mon appart...
Il voulait rentrer chez lui et tout oublier de cette histoire, comme si retrouver son lit ferait passer sa journée au statut de rêve éphémère. Il voulut faire un pas vers les escaliers, mais Daichi le maintint sur sa chaise par les épaules :
-On ferait mieux d'attendre l'ambulance ici. Il faut qu'on vérifie que tu n'es pas blessé.
Tobio était complètement gelé, mourrait de soif et de faim, sa tête le lançait toujours autant et le contrecoup de son calvaire le faisait presque somnoler. Il sentit qu'on lui passait une couverture de survie sur les épaules, puis qu'on lui mettait une bouteille d'eau dans les mains. Enfin, Daichi lui tendit un yaourt à boire de la même marque que ceux que Tobio achetait à Karasuno, et l'attention lui fit chaud au cœur.
-J'ai vu un distributeur dans la rue, glissa-t-il à Kageyama avec un sourire. J'ai envoyé un de mes gars t'en prendre un.
Il aurait voulu continuer à parler, mais son officier lui demanda d'aller aider à calmer les médias qui s'étaient massés à l'extérieur du bâtiment, et Daichi lui tapota le dos avant de quitter le hall. Il n'y avait plus qu'à attendre l'ambulance. Tobio serra la couverture contre lui, toujours aussi frigorifié. De ce qu'il apercevait par les portes d'entrée, il faisait nuit et il pleuvait à verse. Il avait dû passer près de seize ou dix-sept heures retenu dans cette cave.
Le lien se manifesta soudain, et il sentit Oikawa avec une sensibilité toute particulière –son angoisse, son inquiétude, ses doutes... et sa proximité physique. Kageyama releva immédiatement les yeux, se tournant vers l'entrée du hall –et ses yeux croisèrent des yeux bruns qui lui étaient particulièrement familiers. Il eut tout juste le temps de saisir qu'Ushijima, Hinata et Romero étaient là aussi que les deux derniers se précipitaient sur lui, faisant leur chemin au milieu des policiers pour le rejoindre au plus vite.
Tobio se leva pour aller à leur rencontre, oubliant Oikawa, incapable de détacher ses yeux de Nicolas –il l'enlaça dès qu'il fut à portée, accrochant ses bras autour de son cou et plongeant sa tête dans son épaule, retrouvant du même coup tout ce qui lui avait tant manqué au fond de cette cave, la chaleur, la sécurité, l'affection, un sentiment profondément réconfortant de proximité, de contact, d'intimité. Il n'avait plus envie de relever la tête, il voulait juste se fondre dans cette étreinte et y demeurer jusqu'à ce que tout soit réparé.
Mais Nico l'écarta légèrement pour voir comment il allait, sondant son visage de ses yeux ambrés, prenant ses doigts entre les siens :
- Tobio, sweetie –you alright ? Geez, you're freezing, here, take my jacket...
Il dézippa sa veste des Adlers, la fit glisser de ses épaules et enveloppa Kageyama dedans –Tobio passa les manches, inclinant légèrement la tête pour nicher son nez dans le col tout en écoutant Nicolas parler :
-Tu vas bien ? J'ai eu peur, depuis ce matin, j'ai eu peur –how's your head? your wrists? Did they hurt you? Do you need something? Just tell me, docinho.
Tobio ne se sentait pas vraiment en état de répondre, mais il marmonna tout de même :
-I'm okay.
Nico l'embrassa sur le front, et Tobio savoura la sensation –il avait bien cru ne plus jamais le revoir. Il se tourna ensuite vers Shouyou, resté debout à côté de lui :
-Hinata. Ça me fait plaisir que tu sois là aussi.
-A moi aussi, Bakageyama. Je suis content de te voir sorti de là. Enfin, celui qu'il faut remercier, c'est Oikawa.
Oikawa. Comment oublier qu'il était présent, lui aussi ? Plus près encore que ce jour au gymnase de Sendai quelques mois plus tôt... Il était resté en retrait avec Ushijima, à quelques mètres de là. Kageyama croisa ses yeux, mais plus encore que dans son regard, il pouvait lire dans le lien –Oikawa était mal à l'aise, il ne se sentait pas à sa place ; lui aussi était au bout de ses forces, complètement éprouvé par la journée.
C'est lui qui m'a retrouvé.
Tobio ne sut plus vraiment ce qu'il faisait. Il se dirigea vers lui, réduisant la distance qui les séparait en quelques pas douloureux, le cœur battant, l'esprit vide –est-ce que c'était le lien qui parlait, qui contrôlait ses gestes ? Ou simplement la conséquence logique des épreuves qu'ils avaient traversé tous les deux ce jour-là, chacun de son côté et pourtant l'un avec l'autre ? Il ne savait pas si c'était un geste d'instinct, de reconnaissance ou d'épuisement. Mais dès qu'il arriva près d'Oikawa, les choses se firent toutes seules, et ils tombèrent dans les bras l'un de l'autre.
Il n'avait jamais pensé que ce jour arriverait où son âme sœur lui témoignerait de l'affection. Oikawa l'avait rejeté, l'avait quitté, l'avait ignoré –et pourtant il était là à le serrer contre lui, joue contre joue, bien plus près qu'ils ne l'avaient jamais été. La même sensation que lors des contacts resurgit, cette impression de plénitude, de sérénité, d'harmonie, poussée au centuple à présent qu'ils avaient enfin un contact physique, qu'ils se touchaient, qu'ils se retenaient enfin après tant de temps à se fuir.
Tobio rompit l'étreinte après quelques longues secondes. S'arracher à la sensation était douloureux, mais il ne pouvait pas se permettre de s'y prélasser davantage –c'était un moment de faiblesse, j'ai laissé le lien agir.
Il m'a sauvé et je lui en suis reconnaissant.
C'est tout.
-Merci, Oikawa-san, dit-il simplement.
Merci d'avoir été là aujourd'hui. Merci d'avoir aidé la police à me retrouver.
-C'est normal, Tobio-chan, répondit Oikawa, et Tobio n'avait pas entendu sa voix en vrai depuis six longues années.
Il avait pris des traits plus adultes, Tobio le voyait clairement de si près ; sa mâchoire s'était un peu durcie, ses épaules s'étaient élargies –et il avait dû grandir un peu, aussi, mais Kageyama l'avait amplement rattrapé et il eut l'impression qu'il était même un chouïa plus grand. Il avait les mêmes yeux bruns, larges, bordés de cils noirs, les mêmes cheveux châtains agencés d'un côté, les mêmes traits purs. Tobio eut simultanément l'impression de le découvrir et de n'avoir jamais oublié qui il était.
-Tobio ! s'écria tout à coup la voix de sa sœur.
Miwa apparut soudainement et manqua de bousculer Oikawa, attrapant les joues de Tobio pour le regarder bien en face.
-Tu n'es pas blessé !?
Tobio était soulagé de la voir, bien sûr, mais ça commençait à faire trop de monde. Il avait besoin de respirer, de récupérer de ce qu'il avait traversé aujourd'hui, et il se recula un peu :
-Je vais bien, Miwa, je t'assure.
Elle continua à lui poser des questions, Hinata et Nicolas les rejoignirent, et ils attendirent l'ambulance tous ensemble. Kageyama était épuisé, et ne trouvait même plus la force de repousser Miwa qui lui remettait les cheveux en ordre, ni d'écouter Hinata, ni de maintenir le regard d'Oikawa.
-L'ambulance est arrivée, annonça Ushijima.
Ils sortirent, escortés par les policiers, et Kageyama s'appuyait à moitié contre Nico. Il sentit vaguement que son petit-ami lui glissait son téléphone dans la poche, puis deux ambulanciers le firent grimper, et Hinata le rejoignit, jetant ses clefs de voitures à quelqu'un avant que les portes ne se referment.
-Je monte avec toi, sourit-il.
L'ambulance démarra, les gyrophares s'allumèrent, les sirènes se mirent à hurler, et ils quittèrent les lieux.
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