Fourth
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Assis sur une couchette, Chan ne parvenait pas à s'endormir. Il avait reçu l'autorisation de son hôte d'occuper sa chambre d'amis, à condition que la porte soit fermée à clé. Il avait acquiescé, car à vrai dire, il comprenait la raison de sa méfiance.
Mais désormais, il savait qu'il pourrait aisément brûler le pan de bois qui le retenait enfermé.
Le blond ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Depuis qu'il avait roussi la table de Changbin, une étrange énergie circulait dans tout son corps.
« Est-ce que Bokie ressent la même chose ? » se demanda-t-il après un moment.
Cela ressemblait à une vague froide, puissante, sauvage. Cette sensation lui faisait infiniment peur. Il avait l'impression qu'elle pouvait fuser de lui à tout instant, et qu'il ne parviendrait pas à la dompter.
« Évidemment. Bokie a appris à la maîtriser étant enfant, mais pas moi », songea Chan en poussant un profond soupir.
Pourquoi sa magie se manifestait-elle seulement maintenant ? Il n'avait pourtant pas fait appel à elle.
Son monde s'en voyait profondément bouleversé. Peut-être n'était-il pas aussi faible qu'il l'avait pensé, finalement.
Le jeune homme fouilla dans sa mémoire, à la recherche d'une explication quant à l'apparition tardive de son pouvoir. Il ne se souvenait pas qu'un conteur ait déjà expliqué quoi que ce soit à ce sujet. Mais par contre, il se rappelait d'une nuit, lorsqu'il avait espionné la conversation entre ses parents et le Sorcier du village.
« Nous avons reçu le don de magie pour y avoir recours et en tirer le meilleur parti possible. Si votre enfant ne s'en sert pas, c'est simplement parce qu'il n'en voit pas l'utilité. »
— Je n'en voyais pas l'utilité ? s'enquit le blond. Mais pourquoi ? Je vivais un enfer à cause de cela !
« Et surtout, j'ai fini par croire que je n'avais pas de pouvoirs et que j'étais inférieur aux autres », maugréa-t-il intérieurement.
— Je sais créer du feu, réfléchit-il à voix haute. Pourtant, je n'ai aucun lien avec les Terriens. Et en outre, le mien est aussi pâle que le ciel... Une flamme bleue est plus chaude qu'une orangée, non ?
Chan lâcha un énième soupir et se laissa retomber sur son matelas.
— Tout ceci n'a strictement aucun sens !
Ses pensées se dirigèrent ensuite irrémédiablement vers le noiraud qui l'avait hébergé. Il ne parvenait pas à démêler ce qu'il ressentait à son égard, cela ressemblait à une sorte de profonde affection ou d'admiration. Mais ce qui l'intriguait davantage, c'était le court laps de temps. Après seulement deux jours il éprouvait déjà une forte attirance pour Changbin, et cela lui paraissait plus qu'étrange.
Le jeune homme se lova dans sa couette, cherchant à étouffer la sensation de froid qui résultait de son pouvoir. Mais ce fut en vain.
Lorsqu'il s'endormit enfin, ce fut quelques instants avant l'aube.
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Cela faisait maintenant plusieurs heures que Chaerin s'était rendue dans le lieu où avait sévi la tempête.
Elle avait fini par découvrir une trace du passage des assaillants. Il s'agissait d'herbes piétinées, à quelques pas à peine de la ruelle. En réalité, ce qui avait attiré son attention, c'était l'absence de glace sur les brins. Pas même une fine couche givre ne les recouvrait, rien.
En observant avec circonspection la végétation sèche et écrasée, la jeune femme en vint à la conclusion qu'une seule personne s'y était tenue. Elle ordonna alors à ses hommes de se mettre en quête de trouver un autre recoin épargné par la glace, mais ils revinrent bredouilles.
« Monsieur Seo se trompe, il n'y a qu'une personne importune », se vit-elle forcée d'avouer.
Chaerin passa alors le restant de la matinée à examiner les alentours avec zèle, à la recherche d'un autre indice. L'herbe était à peine écrabouillée et elle en vint à croire que la personne était d'une physionomie filiforme et légère. Mais une pensée démoralisante lui effleura l'esprit : peut-être avait-elle usé de son contrôle sur l'air pour paraître moins lourde.
Elle essaya alors de raisonner comme l'aurait fait ce parasite. S'il était venu dans l'unique but de semer la zizanie, alors elle ne voyait pas la raison pour laquelle il se serait soulevé magiquement. Surtout qu'il n'avait même pas tenté d'effacer ses traces.
« Il s'agit donc de quelqu'un d'élancé », comprit-elle.
Il lui était impossible de deviner son sexe uniquement en analysant ses pas. En revanche, elle pouvait affirmer qu'il atteignait un peu plus d'un mètre septante, car les branches à cette hauteur étaient légèrement abîmées.
La stagiaire décida donc de poursuivre l'interrogatoire des témoins. Ce qu'ils lui confièrent alors lui parut très intéressant.
Impatiente de partager ce qu'elle avait découvert à son patron, elle s'empressa de s'éloigner du groupe pour l'appeler.
— Monsieur ? J'ai plusieurs informations pour vous.
— Je vous écoute.
— Il n'y a qu'un seul et unique fautif, monsieur.
— Vous en êtes certaine ? s'étonna l'ambassadeur.
— Absolument. Il s'agit de quelqu'un de mince et léger, mais il m'est impossible de savoir son sexe. Sa taille est dans la moyenne des jeunes adultes.
— Beau travail.
— Merci, monsieur. Mais il y a autre chose. Des témoins ont affirmé avoir aperçu deux adolescents au moment des faits. Ils auraient fui devant la tempête, nous ne pouvons donc pas affirmer avec certitude qu'ils y sont impliqués d'une quelconque manière.
— Essayez de creuser de ce côté-là... Nous devons les retrouver pour les interroger.
Chaerin ouvrit la bouche afin de répondre, mais un bruit sec l'interrompit. Des iris fantomatiques s'allumèrent au milieu des fourrés.
— Chaerin ? Mademoiselle, vous m'entendez ?
Un hurlement glaçant s'échappa d'entre les lèvres de la jeune femme alors qu'un grand froid l'envahissait.
— Chaerin !
Mais seul le silence répondit à son appel désespéré.
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Aussitôt après avoir entendu sa stagiaire crier, l'ambassadeur se rendit dans la rue en question. Ses employés lui indiquèrent qu'elle s'était isolée d'eux pour pouvoir l'appeler en toute tranquillité, mais qu'ils ne l'avaient pas entendue crier.
Finalement, il finit par la dénicher, sous le couvert d'un buisson.
— Par tous les dieux..., s'étrangla Monsieur Seo en apercevant sa stagiaire qui gisait, sans vie, à quelques mètres de là.
Sa peau blafarde était plus glaciale que la neige, et ses doigts crispés agrippaient encore son téléphone. Une fine couche de givre s'étendait de ses épaules à ses avant-bras, et constellait même sa chevelure brune : il s'agissait de la signature de l'individu qu'il recherchait.
Ses yeux vitreux grands ouverts lui firent comprendre qu'il s'agissait d'une attaque prompte et cruelle. Elle n'avait visiblement pas eu le temps de réagir.
Attristé par cette perte, l'ambassadeur rapatria ses hommes et appela immédiatement une ambulance.
Ce meurtrier était bien plus dangereux qu'il l'avait cru au premier abord. À l'avenir, il tâcherait de faire preuve d'une grande prudence.
Inquiet pour son fils, l'homme choisit de retourner chez lui avec deux de ses employés. Il posta le premier devant l'immeuble, et le deuxième devant la porte de son appartement. Ensuite, il poussa la porte et pénétra chez lui.
Il fureta partout, jusqu'à trouver l'adolescent assis sur le canapé du salon. Il souffla de soulagement.
— Papa ? s'étonna Changbin en l'apercevant. Qu'est-ce que tu fais là ?
Sans un mot, l'adulte l'attira dans ses bras et le serra de toutes ses forces contre lui.
— P-Papa, bredouilla-t-il en l'étreignant en retour. Tu...
— Promets-moi que tu feras attention à toi, Bin.
— Hein ?
« Pourquoi tout le monde me dit ça ? » grommela intérieurement le jeune homme.
— Il y a un meurtrier dehors. J'ai peur qu'il te fasse du mal...
— Comment ça ? Est-ce que ça a un rapport avec la tempête ?
— Tu es futé comme ta mère..., s'attendrit l'ambassadeur.
— Papa, réponds-moi.
— Oui, alors écoute-moi bien. Tu ne dois faire confiance à personne, compris ?
Son ton empli de gravité fit craindre le pire au noiraud. Il opina du chef en silence, et laissa Monsieur Seo le serrer contre lui une nouvelle fois.
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Lorsque son père quitta le domicile avec ses employés pour se rendre à son bureau, Changbin était perplexe. Ses propos lui avaient semblé être décousus, mais ils correspondaient étrangement avec ceux de Chan. Ce n'était pas tout à fait la même chose, après tout, son ami lui affirmait que quelqu'un de dangereux lui voulait du mal, tandis que l'ambassadeur l'avait simplement averti qu'un assassin rôdait.
Mais il savait que l'ambassadeur avait passé certaines choses sous silence. En soit, il avait l'habitude. Il lui avait toujours caché énormément de choses, et la plupart du temps, c'était par confidentialité.
« Et si Chan avait raison ? Et si la tempête avait véritablement été engendrée par quelqu'un ? » se demanda l'adolescent.
Après tout, maintenant qu'il y avait clairement réfléchi, il ne voyait pas comment la glace pouvait s'être formée aussi rapidement. Malgré tout, la théorie des Martiens lui semblait toujours autant tirée par les cheveux.
Pourtant, Changbin avait fait tout ce qu'il avait pu. Mais ses recherches sur la terraformation demeuraient infructueuses, et celles sur l'évènement qui avait séparé les humains ne rimaient à rien. Soit on avait voulu en effacer la trace, soit le blond lui mentait depuis le début. Oui, devant sa vive intelligence et sa sapience, il avait définitivement rayé de son esprit la possibilité qu'il soit fou. Mais cela n'excluait pas pour autant le fait qu'il se soit peut-être moqué de lui.
« Tu ne dois faire confiance à personne, compris ? »
Son père l'avait prévenu, alors peut-être devrait-il remettre en question la confiance qui avait commencé à s'établir entre Chan et lui. Comment pouvait-il être certain de la véracité de ses dires sans preuves pour les corroborer ?
Le noiraud se vêtit chaudement et quitta son appartement en fermant à clé derrière lui. Il avait besoin de réfléchir loin du concerné qui dormait dans la chambre avoisinant la sienne.
Cette fois-ci, il avait retenu la leçon. Il s'assit sur l'asphalte et s'adossa contre le mur de l'immeuble. Il ne comptait de toute façon pas s'éloigner, il avait bien trop peur de se faire surprendre par un individu indésirable.
Le jeune homme poussa un profond soupir de dépit. Il se sentait pris au piège, il était dans l'incapacité d'aller où il le désirait. Heureusement, le lendemain, il pourrait prendre l'air en se rendant en cours. Entouré de tous les élèves et des professeurs, il serait en sécurité, non ?
Inévitablement, Chan recommença à le tourmenter. Son identité ne cessait de l'intriguer, il aurait bien en savoir davantage, mais l'avertissement de son père le hantait.
Après un instant, Changbin commença à souffrir du froid, puisqu'il n'esquissait pas le moindre mouvement. Néanmoins, il resta assis. Il n'avait pas du tout envie de faire face au blond qui se disait extraterrestre. Lui laisser son appartement était déjà suffisamment risqué comme ça.
Dès qu'il se réveillerait, le noiraud se promit qu'il le ferait partir.
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Sur sa couchette, l'aîné se réveilla en sursaut. Tous ses sens étaient en alerte, et son ventre, noué par la peur. Comprenant qu'il s'agissait d'un mauvais pressentiment, il ne se posa pas plus de questions et repoussa sa couette pour se précipiter dans la cuisine.
— Bin ! appela Chan sur un ton angoissé.
Il ne reçut aucune réponse. Sans réfléchir, il enfila une veste qui traînait sur le porte-manteau et ses sandales, puis secoua vivement la poignée. La porte refusa de s'ouvrir, et il réprima un juron. « Je n'ai pas le choix », se résigna-t-il.
Il avait immensément cogité. Tout d'abord, il avait fait en sorte de se rappeler de toutes les explications possibles sur la façon de maîtriser la magie. Il voulait être absolument certain de ne pas en perdre le contrôle malgré son inexpérience. Puis, il avait repassé mentalement tous les pouvoirs connus à ce jour. Finalement, il en était arrivé à une conclusion qu'il se devait de confirmer.
Avec appréhension, il toucha la serrure du bout du doigt en visualisant dans son esprit le loquet se lever et la porte pivoter sur ses gonds. Obéissant à son ordre silencieux, ces derniers s'ouvrirent aussitôt vers l'extérieur en émettant un claquement sec.
Le jeune homme passa outre sa joie d'avoir enfin compris ce qu'il était capable de faire et s'élança dans les escaliers de l'immeuble.
Il aperçut directement la silhouette du noiraud contre la vitre, et il poussa un soupir de soulagement. Mais malgré tout, son instinct ne cessait de l'avertir de la présence d'un danger imminent. Il quitta promptement le bâtiment.
— Binnie !
Changbin tressaillit violemment et porta une main à son cœur pour se calmer. Son visage se détendit légèrement lorsqu'il vit l'auteur de cet éclat de voix.
Chan sonda les alentours du regard, et constata rapidement que quelque chose n'allait pas. Il n'y avait aucune voiture, aucun passant, pas même le pépiement d'un moineau. Il s'agissait d'une atmosphère similaire à celle qui avait précédé la tempête, une ambiance lourde pressentant un guet-apens.
— Pourquoi tu...
Le noiraud n'eut pas le loisir de terminer sa phrase. Une flamme ambrée jaillit brusquement sur son flanc droit et lécha sa peau. Vif comme l'éclair, le blond lui saisit le poignet et le tira vers lui d'un geste preste, mais il ne put lui éviter une morsure enflammée.
Changbin cria sous la douleur, levant un regard baigné de larmes sur son vis-à-vis.
— Mets-toi derrière moi, ordonna placidement le blond malgré son cœur qui tambourinait furieusement contre sa cage thoracique.
Son cadet ne se fit pas prier pour obtempérer. Au bord de la crise de nerf, il avait beaucoup de difficulté à calmer ses tremblements. Sans rien laisser paraître, Chan agrippa doucement une de ses mains.
« C'est juste pour le protéger », essaya-t-il de se convaincre en se sentant rougir.
Une nouvelle flamme fusa devant eux, et le blond la détourna de sa main de libre. Étonnement, il ne ressentit aucune douleur en esquissant ce geste.
— Montre-toi ! cria-t-il alors à son assaillant invisible.
Un grondement sourd se fit entendre, alors que peu à peu, un jeune homme prit forme en face de lui.
— Encore toi, siffla le Martien sans cacher son déplaisir.
Un sourire perfide aux lèvres, Hyunjin ne répondit pas. Il se contentait de dévisager sa proie de son regard flamboyant.
— Je te préviens, tu oses t'en prendre à Changbin, et j'en finis définitivement avec toi.
Sans crier gare, l'adolescent à la chevelure châtain leva brutalement ses paumes dans leur direction. Ils crachèrent des étincelles orangées qui mirent en garde le blond.
Ce dernier remarqua avec appréhension que ses doigts s'étaient mis à luire. D'un mouvement imperceptible du poignet, Chan positionna instinctivement sa main de sorte à contrer la prochaine offensive de son vis-à-vis. Il ne savait pas vraiment ce qu'il pouvait faire contre lui, mais il se tenait prêt à protéger le noiraud terrifié.
— Changbin doit mourir pour payer toutes les injustices qu'ont déclenchées les décisions de son père, persifla Hyunjin.
Le blond ouvrit la bouche pour répliquer, mais, profitant de cette distraction, les paumes du demi-Terrien laissèrent échapper des vrilles enflammées qui fondirent sur eux en tourbillonnant.
La main de libre de Chan brilla d'une forte lumière immaculée, éblouissant momentanément le concerné qui fut forcé de fermer les paupières. Le cri de surprise de son compagnon terrorisé l'interpela, et il se força à regarder.
Un bouclier de flammes bleutées s'était formé devant eux, retenant ainsi l'attaque qui finit par se résorber.
La mine ahurie de Hyunjin se transforma rapidement en un masque de fureur. Animé par la rage, il lâcha des spirales de feu incandescentes qui poussèrent des crépitements aigus en s'élançant sur ses proies.
Le blond n'eut pas le temps de se remettre de son ébahissement. Il contre-attaqua aussitôt en faisant jaillir des gerbes de flammes d'un bleu éclatant.
Derrière lui, Changbin assistait à un véritable duel sans merci. Malgré sa peur, on pouvait discerner une admiration sans bornes sur son visage.
Le châtain changea brusquement de tactique. Il matérialisa des boules de feu couleur corail et les projeta sur Chan. Désemparé, ce dernier ne parvenait plus à riposter ; il ne faisait que créer des boucliers ignés pour protéger le Terrien. « Que faire ? » se demanda-t-il désespérément.
— Chan, essaie des offensives plus subtiles, suggéra le noiraud.
Aussitôt, un sourire fendit les lèvres du Martien.
— Je ne sais pas si dans mes cordes, déclara-t-il, mais je vais essayer.
Il risqua le tout pour le tout : il fit tomber son bouclier, prenant ainsi Hyunjin par surprise. En se concentrant intensément, il fit partir un faisceau azuré qui atteignit son vis-à-vis en pleine poitrine.
Cela ne le brûla pas, mais il chut à la renverse, étourdi. « C'est maintenant ou jamais d'attester ma théorie », décida le blond. Il lâcha la main de son cadet malgré ses vociférations, et s'élança vers le châtain.
Ce dernier se releva sur ses coudes, mais n'eut pas le temps de faire quoi que ce soit. De sa poigne d'acier, Chan lui saisit les avant-bras. Ce contact les parcourut en une décharge fulgurante et provoqua des gerbes d'étincelles immaculées. Les prunelles de l'aîné se mirent alors à luire d'une étincelante lumière d'un bleu pâle.
Hyunjin se retrouva cloué au sol, incapable d'esquisser le moindre geste. Une force surnaturelle l'empêchait de se mouvoir. Furibond, il poussa un cri d'impuissance.
Ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'il sentit une curieuse attraction émaner de son assaillant. Mais ce n'était pas lui qu'elle attirait, c'était sa magie !
— Non ! hurla-t-il en comprenant ce qui se passait.
Il usa de toute sa volonté pour tenter de bouger, mais ce fut vain. Imperturbable, Chan draina la puissance sauvage et hybride du demi-Terrien. Son regard impassible fixait le vide, tandis que son esprit était focalisé dans sa tâche qui consistait à se débarrasser une bonne fois pour toute de ce scélérat.
Le lien se coupa brutalement. Le blond tomba sur ses fesses à côté de Hyunjin, assommé par le pouvoir de celui-ci.
Le châtain s'empressa de faire appel à sa magie, profitant de l'instant de vulnérabilité du jeune homme. Mais malgré tous ses efforts, pas même une bluette ne jaillit de sa paume.
— Qu'est-ce que tu m'as fait ?! tonna-t-il en tâchant de maîtriser la peur qui venait de s'éprendre de lui.
— J'ai absorbé ton feu, haleta Chan en lui décochant un regard incendiaire.
— Tu...?!
L'adolescent poussa un hurlement de rage. Il avait longtemps craint son pouvoir, mais après avoir reçu quelques leçons, il avait découvert qu'il était puissant. Il ne voulait plus s'en séparer.
Le corps de Hyunjin fut secoué de violents spasmes sous l'effet de sa fureur incommensurable. Il posa un regard brûlant de hargne sur le blond. Incapable de résister à ses pulsions vindicatives, il se jeta sur lui avec l'intention de lui régler son compte.
Deux mains lui saisirent les bras pour stopper son geste. En levant les yeux, il aperçut Changbin, celui qu'il avait si souvent injurié.
— Lâche-moi !
— Non, refusa sèchement le noiraud. Tu as assez fait de mal comme ça.
Il indiqua d'un geste le quartier en un bien piteux état. Les arbres et les véhicules gisaient çà et là, incendiés, des braises voletaient dans l'air brûlant, des volutes de fumée serpentaient dans le vent et s'enroulaient autour d'eux.
— Encore heureux que personne n'était là. Tu aurais bien pu détruire des vies, le sermonna sévèrement le plus petit.
— Les conséquences de tes actes irréfléchis auraient pu être terribles, concéda Chan, toujours à bout de souffle.
— Ils n'étaient pas irréfléchis ! s'emporta Hyunjin. J'obéissais simplement aux ordres !
— Aux ordres de qui ?
— Je n'en sais rien ! Cette personne voulait que je tue Changbin, et j'ai bien voulu le faire parce que c'est tout ce qu'il mérite, ce connard !
Le noiraud se mit à trembler, mais il ne relâcha pas sa prise sur le châtain. Ce dernier était bien trop affaibli et fourbu pour se débattre, mais cela ne l'empêchait pas de leur faire connaître sa colère par le biais de la parole.
— Premièrement, si tu as un problème avec le père de Binnie, c'est à lui que tu dois faire des reproches, pas à son fils, poursuivit le blond malgré sa faiblesse. Deuxièmement, la violence est un vice qui ne réglera pas ta situation.
— Et toi, alors ?! cracha Hyunjin, écumant de rage.
— Je voulais simplement te neutraliser, et c'est fait. Maintenant, tu ne pourras plus brûler qui que ce soit.
Son vis-à-vis ouvrit la bouche pour répliquer, mais le Martien le coupa.
— Que cela te serve de leçon. La perte de ton pouvoir te fera sûrement réfléchir.
« Et surtout, cela le rendra bien moins belliqueux », songea-t-il.
Une terrible pensée fit surface dans son esprit. Il avait absorbé sa magie. Son comportement allait-il changer en conséquence ?
En priant pour que cela ne soit pas le cas, Chan demanda à Changbin de laisser Hyunjin sur le sol. De toute façon, les ambulanciers et les pompiers débarqueraient sous peu et le prendraient en charge.
Le châtain, terriblement exténué, s'effondra sur l'asphalte une fois que le noiraud l'eut lâché. Il était tout bonnement incapable de s'en prendre à qui ce soit, bien qu'il fulmine intérieurement.
Le blond essaya de se lever, mais il fut pris d'un violent vertige et sa tête se mit à tourner.
— Ça va ? s'alarma son cadet en s'approchant de lui.
Sa mine était impavide, et pourtant, il venait d'avoir la confirmation que quelqu'un souhaitait sa mort.
— Oui, ça va.
À peine quelques secondes plus tard, le Martien retomba sur le sol, évanoui.
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