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E1 | Défi N-2 #1 ● Textes des Participants ●

Ici se trouvent les 10 textes des 10 participants au Défi N-2 #1 ! La phrase donnée sera mise en gras.  

***

AliouSaturne 

Je cherchais toujours ma petite soeur perdue dans ce bois quand j'entendis un son une première fois, puis une deuxième, jusqu'à ce qu'un cri fit exploser le profond silence de la nuit.

J'avais reconnu cette voix. C'était la sienne. J'aurais pu crier à plein poumons son nom pour l'appeler à me répondre, mais le bruit qui avait accompagné le hurlement de ma sœur me figea net. Ce n'était pas humain, ni animal, ni quoi que ce soit de naturel. Cela ressemblait à un coup de tonnerre mélangé au grognement d'un dinosaure, ce qui signifiait que j'avais affaire à une créature féroce possédant de nombreuses dents pointues. Je ne réfléchis pas plus et m'élançai vers l'origine des différents sons avec l'espoir que les autorités locales soit prévenu qu'un ''T-rex éclair'' vivait dans ces bois. Je courais à en perdre haleine entre les arbres sinueux. Plus je m'enfonçais dans la forêt, plus l'endroit me semblait sombre et menaçant.

Et soudain, je me retrouva dans une clairière. Le feuillage des arbres qui bordaient cette plaine vierge était d'une couleur étrangement rougeâtre. J'aurai pu passer mon chemin et continuer de cavaler mais une douce odeur s'infiltra dans mes narines. C'était vraiment incroyable. Un mélange d'épices, d'aromates enchanteurs, de sucreries en tout genre et surtout de pain chaud s'engouffrait en moi, me titillant l'esprit. Je ne pus résister à la tentation. Mes jambes marchèrent d'elles-mêmes vers le centre de cette clairière. J'appris bien plus tard que ce parfum était une création des fées vertes qui aidaient régulièrement certaines espèces de ce bois à s'alimenter. Le charme dans lequel j'avais été pris engourdissait mes sens, m'empêchant ainsi d'apercevoir les serpents de bûches qui se faufilaient dans mon sillage.

Je fus brusquement mit à terre et lacéré par des branches vivantes. Avant de fermer mes yeux, j'aperçus l'arbre le plus imposant étirer ses bourgeons près d'une de mes plaies pour aspirer le sang qui en coulait. Je me mis à rire quand je compris d'où venait la drôle de couleur des feuilles. Je devins encore plus hilare lorsque je réalisai que j'allais mourir très lentement. Et cette odeur qui me retournait la tête.

Je pleurais d'amusement lorsque le charme s'interrompit. Les racines persévéraient en s'entortillant autour de mes membres tandis que les « bouches» de l'arbre alpha se délectaient de mon sang. Malgré cela, je rouvris les yeux avec une énergie nouvelle : pas le temps de mourir, il fallait que je sauve ma sœur du monstre.

Lokie06 

Pas le temps de mourir, il fallait que je sauve ma sœur du monstre. Il fallait que je sauve ma sœur d'elle-même.

Du matin jusqu'au surlendemain, j'étais un Elfe rond comme une queue de pelle, à l'âme torturée et aux tendances suicidaires. En plus, ma stupidité frôlait les étoiles. J'avais tout pour plaire donc.

Récemment, je n'avais rien trouvé de mieux à faire que d'offrir à ma petite sœur un bijou maudit par une fée cruelle. J'avais craqué pour une bague perdue sur un étalage, torsadée et en or fin. Les deux petites perles empilées au sommet reflétaient ma joie à l'idée d'offrir à Edwina un cadeau pour l'anniversaire de son neuvième printemps. L'ivoire de l'une d'entre elles capturait des éclats de lumière, tandis que la deuxième aurait pu se confondre avec une esquille de charbon.

Bien évidemment, le vendeur, un gros Ork plein de poils et à la peau granuleuse, avait oublié de m'indiquer que la bague, une fois fixée au doigt de son destinataire, ne pouvait se retirer. Autre insignifiant détail : si la perle noire se décrochait, ma petite sœur serait d'une bienveillance à toute épreuve et sa vie aurait une saveur délicatement sucrée, certainement ce goût de fleur d'oranger que renfermaient les rayons du soleil. En revanche, si la perle blanche se décollait, mon ange, éprise d'une folie meurtrière, deviendrait aussi mauvaise qu'un Troll.

Ai-je besoin de mentionner qu'hier soir, plus ivre que vif, mon coude raccrocha malencontreusement sa main ? Est-ce vraiment nécessaire de préciser que la petite perle nacrée chuta sur le plancher, sous mes yeux qui louchaient ?

Avec cet espoir naïf que mon âme sombre n'étouffe pas la pureté de la sienne avant l'heure, j'étais déterminé à me noyer avec Edwina dans ce bain de cruauté. À lui donner mon cœur, quand le sien se serait brisé parce que le Soleil aurait embrassé les Enfers de trop près.

Alors, même si mon petit papillon en cristal s'abîmait les ailes à butiner trop vite le temps imparti, tuant mon espoir avec du verre pilé, j'étais heureux de mourir de sa main. Ma vie se fânerait sans elle. Ma sœur évoluerait en un nuage de perfidie, mais j'étais prêt à rester cette ombre suffocante, recroquevillée, et dont les larmes ne se tarissaient jamais, pour qu'elle reste ne serait-ce qu'une seconde de plus cet arc-en-ciel sans artifice.

Je l'aimais à m'en perdre. 

Araigne1  

Je l'aimais à m'en perdre. Oui. Je vénérais notre maison qui exsudait la joie et une douce senteur de fleur d'oranger. Quel sentiment que celui d'aimer quelque chose à ce point !

En bas, dans le vaste hall menaçant qui enveloppait les déménageurs, j'étais persuadé que l'architecte avait tout fait pour rendre notre demeure inquiétante, pour la transformer en une sorte de manoir moderne. Et du haut de mes neuf ans, j'escaladais une dernière fois les marches de l'escalier, la larme à l'œil, les joues rougies par l'effort, alors que les vieux meubles élimés par le temps contrastaient avec le blanc immaculé des murs.

Je serrais ma peluche contre moi, observant, ému, les miroirs impeccables qui trônaient sur les murs, reflétant mon visage cerné et affligé. Les cartons s'amassaient sur le parquet. Je m'enfuis loin d'eux, le cœur serré. Non ! C'était trop dur ; je n'y arrivais pas. Je ne pouvais regarder la vérité en face ; j'allais devoir quitter ma maison.

Errant dans les couloirs, des odeurs me parvinrent. Les effluves dégagés par le vieux bois d'abord, une odeur de saucisse grillée ensuite, et enfin, le parfum capiteux de ma maman me titilla les narines. Non ! Elle se dirigeait vers moi. Il fallait que je m'enfuisse, je ne voulais pas quitter mon doux chez-moi.

Je repris ma course, traversant une enfilade de couloirs, de chambres et de pièces, refusant l'évidence qui s'offrait à moi. J'allais déménager. Pourquoi avait-il fallu que mon père perde son boulot et qu'il se retrouve sans argent ? Que ma mère tombe brusquement enceinte et qu'il nous faille agrandir la maison pour accueillir le nouveau-né ?

J'inspirai. J'expirai.

Mon cœur se fendait d'une douleur ineffable ; il s'était brisé en mille morceaux et moi, accroupi au milieu de cette chambre, au milieu de mon passé sur le point de s'évaporer, je pleurnichai sans m'arrêter. Je n'en avais pas la force. Je ne pouvais pas me retenir. Cette maison était toute mon enfance ; une sorte de paradis sur Terre. Dans le salon, j'avais fait mes premiers pas et dans ma chambre, j'avais prononcé mon premier mot. « Papa. »

Alors je pleurais, et les mots ne me vinrent plus. Comment pouvait-on accepter ça ? Car j'allais tout perdre. Mon passé. Mes souvenirs. Mon enfance. Alors je me promis que je quitterai cet endroit paradisiaque les yeux clos, pour ne pas craquer devant toute ma famille.

VALEM77 

Alors je me promis que je quitterai cet endroit paradisiaque les yeux clos, pour ne pas craquer devant toute ma famille.

Le lendemain, je partis pour le continent. Le cœur lourd, j'observais la mer et ses reflets d'argent. Mon île, le berceau de mon enfance, venait d'être avalée par l'horizon.

— Qui est-ce ? demanda l'homme à côté de moi.

— Ma mère, mon père et mes deux sœurs, répondis-je en fixant la photo agitée par le vent du large.

— Mignonnes, tes sœurs ! À notre retour, tu me les présenteras, lança-t-il d'un air graveleux. Une pour chaque genou !

Je m'empressai de glisser l'image dans ma poche et quittai le pont, les mâchoires serrées. Ce gars était un abruti de première. Je devais éviter de croiser sa route. Heureusement pour moi, nous étions nombreux sur ce bateau.

À l'intérieur, je retrouvai mes amis. Ils riaient et blaguaient en tapant le carton. Avec un plaisir non dissimulé, ils se poussèrent pour que je puisse m'asseoir à côté d'eux.

— Quelle est la mise de départ ?

— Dix cigarettes et une boîte d'allumettes, répondit Sam, mon meilleur ami, en se frottant les yeux.

Sam n'avait jamais été un lève-tôt. Au petit matin, sa mère l'avait obligé à saluer chaque membre de sa nombreuse famille. Moi, je n'en avais pas eu le courage. Les larmes de ma grand-mère, de mes parents et de mes sœurs adorées avaient amplement suffi à plomber mon moral.

— Tu sais que je ne fume pas, observai-je.

— Ta mère t'a préparé une boîte de ses fameux biscuits à la cannelle ? demanda Jack.

— Elle n'aurait pas pu s'en empêcher.

— Alors, ce sera trois biscuits, déclara-t-il en distribuant les cartes.

Mes amis, mes complices depuis mon plus jeune âge, étaient tous du voyage. À la dérobée, je scrutai leurs visages. Ils reflétaient encore les signes de l'adolescence. La peau de Sam était couverte de boutons. Jack venait tout juste d'enlever son appareil dentaire ; ses gencives irritées étaient gonflées. Quant à Jo, il ne devait pas encore avoir découvert le rasage : des poils filasses envahissaient ses maigres joues. Sans vraiment le vouloir, je ne pus m'empêcher de me demander lequel d'entre nous tomberait le premier.

Nous avions quitté notre île, la fleur au fusil, sans imaginer un seul instant que notre destin ne se jouerait pas sur un champ de bataille, car soudain, un bruit suraigu nous meurtrit les tympans. 

Kyrsayr  

Nous avions quitté notre île, la fleur au fusil, sans imaginer un seul instant que notre destin ne se jouerait pas sur un champ de bataille, car soudain, un bruit suraigu nous meurtrit les tympans. Nous ne comprîmes pas immédiatement quelle était l'origine de ce son affreux, soudainement agenouillés et les mains plaquées sur les oreilles pour nous protéger face à cet assaut inconnu. Ce blindage futile se révéla particulièrement inutile : l'onde semblait se répandre autour et au sein même de nos maigres corps, à la manière d'un écho tenace. Pour ma part, j'avais l'impression qu'un petit monstre prenait un malsain plaisir à sauter sur un tam-tam tout contre mes tympans, une sensation qui, vous l'imaginez bien, n'avait rien d'agréable.

Par moments, le courroux inexplicable du ciel envers nous, pauvres pêcheurs, paraissait s'atténuer légèrement. Ces instants de répits ne nous permettaient malheureusement pas grand chose : nous ne pouvions qu'échanger des regards où se mêlaient désarroi, terreur et colère. La seconde d'après, le bruit repartait de plus belle, sans que nous ne puissions rien y faire, et nous reprenions des postures grotesques dans des mouvements saccadés. Notre petit manège me rappelait les pantins de bois que je possédais étant enfant : nous n'étions plus que des poupées articulées aux mains d'un gamin capricieux.

Au moment où nous en venions à croire que le supplice ne s'arrêterait jamais, tout se stoppa brutalement. Le silence était tel qu'il me semblait bien plus assourdissant que la torture inexplicable que nous venions de subir. Malheureusement, je compris que nous n'étions pas tous idem alors que je me redressai difficilement à l'aide de mes muscles engourdis et que le voile de ténèbres abaissé devant mes pupilles s'estompait peu à peu. La moitié de mes camarades étaient étendus au sol, affreusement immobiles, leurs yeux laiteux fixant un point dans le ciel que eux seuls pouvaient voir.

Alors que j'achevais de reprendre le contrôle de mon être, des larmes de rages menaçaient de couler le long de mes joues. Je n'avais plus qu'une seule envie : tout abandonner. La désillusion qui nous frappait en cet instant était pire que tout : les rêves qui nous berçaient encore quelques minutes auparavant, n'étaient plus.

Nous avions abaissé les paupières du dernier défunt, prononcé la dernière prière, quand soudain, une silhouette surgit à l'horizon. Si cet inconnu était responsable de la tragédie qui venait de nous frapper de plein fouet, nous étions prêts : plus jamais nous ne nous risquerions à croire en un destin illusoire.

ScarlettTheRose  

Si cet inconnu était responsable de la tragédie qui venait de nous frapper de plein fouet, nous étions prêts : plus jamais nous ne nous risquerions à croire en un destin illusoire. Pour cela, je décidai de prendre quelques précautions. Le regard vide, comme depuis la récente disparition de sa mère dans l'attentat de Nice, ma fille me fixa pendant que je réunissais tous les livres de la maison. C'est avec amertume que je me remémorai une dernière fois tout ce qu'ils pouvaient apporter à l'homme : de la joie, du chagrin, de la colère, des rêves... Mon cœur se serra quand je compris qu'elle me manquait tant. À sa manière, elle était mon livre, celle qui me faisait voyager d'émotion en émotion. Maintenant qu'elle n'était plus là, un grand vide avait empli mon âme, et je pris conscience que rien ne serait jamais plus comme avant. Je rassemblais les derniers livres, pressé d'en finir avec cette histoire, quand une main se posa sur mon épaule. De ses grands yeux noisette, une petite tête brune me fixait tristement. Je devais reprendre mon rôle de père rassurant au plus vite.

« Qu'est-ce qu'il y a ma puce ? glissai-je en tentant un sourire.

À voir sa mine déconfite, je compris que ma bouche devait se tordre en une grimace effrayante.

— Maman... Elle lisait toujours ces livres. Elle était toujours heureuse. Peut-être que, elle tendit un doigt vers la pile de bouquins, c'était grâce à ça. J'en veux un, pour être joyeuse comme elle.

La petite saisit rapidement un livre au hasard, s'installa par terre et commença sa lecture. Je la laissai faire, tout en sachant pertinemment ce qui allait se passer. Mes craintes se confirmèrent quelques minutes plus tard, quand des larmes perlèrent au coin de ses yeux. Elle jeta l'ouvrage et se recroquevilla sur elle-même.

— Ta mère a laissé sa présence dans chacun de ces livres. C'est pour cela que nous devons nous en séparer, tu comprends ? Chaque émotion transmise par le livre nous rappelle son absence, et ce n'est pas une bonne chose. »

Je pris le livre avec précaution et le remis en haut de la pile. Ma fille resta silencieuse, et, la tête baissée, elle m'aida à apporter tous les autres ouvrages de la maison. Une fois que tout fut dans la pièce, je recouvris tous les bouquins d'essence. Sans plus attendre, j'allumai une allumette, la jetai et partit en courant, entraînant la petite brune à mes cotés. En silence, je réalisai que la mort de ma femme était à l'origine du plus grand autodafé depuis la seconde guerre mondiale.

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Actus Fidei

En silence, je réalisais que la mort de ma femme était à l'origine du plus grand autodafé depuis la Seconde Guerre Mondiale. Quand un vieillard meurt, c'est une bibliothèque qui brûle, songeais-je en m'appuyant au lavabo, impuissant, vidé, conscient qu'il était déjà trop tard pour appeler les pompiers, au propre comme au figuré : le visage de mon épouse était déjà trop blanc, plus que ses cheveux, plus que la faïence de la baignoire, remplie d'une eau trop rouge. Autodafé. C'était son propre mot, qu'elle avait tracé d'une main tremblante, en lettres de sang sur le carrelage.

Elle s'était toujours intéressée à tout, elle voulait tout savoir, tout comprendre : les oiseaux et les méduses, le cosmos et les insectes, les grands hommes du passé et les petits du présent. Sa mémoire était phénoménale, elle retenait tout ce qu'elle lisait et vivait. Elle me parlait du sac de Rome de -390 comme si elle avait pu y assister de ses yeux et dissertait sur notre premier anniversaire de mariage comme l'aurait fait d'un grand événement historique, puis m'exposait la recette de bolognaise de sa grand-mère avec autant de précision qu'elle me résumait le phénomène de mitose cellulaire.

Et le diagnostic était tombé, par une lâche lettre du neurologue, comme la dernière relance avant la saisie des biens. Alzheimer sonnait pour elle comme le nom d'un huissier cruel, menaçant un érudit échevelé de saisir sa collection de livres; et elle était bien le genre d'intellectuelle passionnée qui se serait immolée avec ses ouvrages plutôt que de laisser une telle chose arriver. C'était ce qu'elle avait fait, mon épouse s'était fait exploser avec la bibliothèque de Babel qu'était sa mémoire, pour ne pas laisser l'immonde ver parasite effacer ce qu'elle avait mit une vie à acquérir. La mort plutôt que l'oubli.

Saisissant sa main glacée, effleurant son poignet tailladé, je songeais qu'elle avait par son suicide placé le préfixe ''auto'' au début du mot ''autodafé''.

Et puis, brusquement, aussi clairement que si elle m'avait corrigé en riant, je me remémorais soudain que ce terme ne venait pas du grec ''autós'', ''par soi-même'', mais que l'expression était une déformation du latin ''actus fidei'' : ''acte de foi''. Alors, je compris que dans ce mot, une fois ramené à son sens originel, se cachait à la fois son message d'espoir et sa lettre d'adieu.

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Alors je compris que dans ce mot, une fois ramené à son sens originel, se cachait à la fois son message d'espoir et sa lettre d'adieu.

Mais l'espoir me fatiguait. J'avais déjà tant espéré que j'avais l'impression que toutes les cellules de mon corps avaient été consumées à force de déception. On peut espérer, c'est bon d'espérer, mais quand au final la réalité vous revient à la gueule, comme un immense boomerang métallique, vous tombez à terre plus durement que jamais.

J'étais trop tombée, et son adieu était ma chute fatale. La chute dont je refusai de me relever, le nez enfoncé dans la terre, et le temps courant sans moi. Il pouvait bien courir, le temps ! Je n'en avais plus rien à faire.

Ce n'était même pas sa perte qui m'accablait, non, je n'avais pas assez d'affection pour elle pour être affectée à ce point. Simplement, c'était trop pour moi. Mes genoux étaient pleins d'éraflures qui refusaient de se refermer, à force de chutes, et la gravité m'accablait.

Ce que j'aurais réellement aimé, c'est aller dans l'espace. Là bas, pas de gravité, juste le froid immuable et les planètes lointaines.

Et si elle avait pu m'y rejoindre, dans l'espace, ç'aurait été parfait. Nous aurions flotté, longtemps, sans se soucier d'en bas la Terre qui mourrait. Et les hommes qui s'y tuaient.

Peut être que nous nous serions embrassées. Quand on est seules dans l'espace, on ne sait jamais ce qui peut arriver... Mais je crois que je n'aurais pas aimé ça. Parce que ça m'aurait rappelé sa manière de disparaître. C'est épuisant, d'essayer de tisser des liens avec une personne qui s'enfuit sans arrêt, qui semble glisser entre mes mains comme du sable.

Elle se glissait et se faufilait si bien, alors pourquoi avoir finalement décidé de faire face brutalement ?

Sa brusque volte face, et toute la violence dans cette demande d'abandon et d'espoir... ça ressemblait un peu à la chanson de Lomepal Dave Grohl : et juste avant de démarrer elle m'a avoué qu'elle aimait un autre marin, en ajoutant : les mecs comme toi sont plus heureux dans l'eau tout seul.

Et le problème, au final, c'est que je n'en étais pas un, de mec.

Non, son putain d'espoir je n'en voulais pas. J'allais plutôt me faire nonne.

_melys_raimbow_ 

J'allais plutôt me faire nonne. Oui, c'était ça la solution ; me faire nonne. J'allais me renseigner sur comment me convertir, sur où aller et comment intégrer ce cercle de religieuse. J'allais tout quitter et me consacrer à Dieu ; c'était ça la solution à tous mes problèmes. Comment n'ai-je pas pu y penser avant ? J'ai toujours cru que les nonnes n'étaient que de vieilles femmes sans famille qui n'avaient pris la voie de la religion que pour dernier recours. Qu'est-ce que j'ai pu être bête !
Convaincue que je venais d'avoir une idée de génie, j'attrapai mon téléphone, composa le numéro de ma mère et attendis qu'elle décroche. Une sonnerie, deux sonneries... Elle ne répondit qu'au bout de la quatrième, me laissant le temps de réfléchir encore une fois à mon idée.

- Ma chérie, que se pas...

- Maman, c'est décidé de me faire nonne.

Un silence se fit entendre à l'autre bout du fil. Une seconde, puis deux... Durant plus d'une minute, j'attendis, le téléphone collé à l'oreille, que ma mère daigne me donner une réponse. Pourquoi ne me répondait-elle pas ? Avait-elle une dent contre la religion sans qu'elle ne m'en ait jamais parlé ? Trouvait-elle cela absurde ? Ou alors c'était mon idée qui était absurde...
Oui, c'était ça. Comment avais-je pu penser une seule seconde que me faire nonne aurait pu faire changer ma vie ? Dieu, la religion, les prières... Tout ça ne changera rien. Il n'y a que moi qui peux tout arranger.

- Ecoute maman, ce n'était pas...

Et elle me raccrocha au nez, comme ça, tout simplement. Sur le coup, j'ai cru que c'était moi qui rêvait mais non ; ma mère venait de raccrocher, sans que je ne comprenne pourquoi. Mais que lui était-il passé par la tête ???!
Prise d'incompréhension, je composai le numéro de ma mère une fois, deux fois... Elle ne répondait pas. Durant plus de dix minutes, je tentais de la joindre, en vain. Alors, j'attrapai les clés de ma voiture, enfilai mon manteau et me dirigeai vers le seul lieu capable d'apaiser ma bouffée de colère : la fontaine de la ville.
Une fois arrivée sur place, je me rendis compte que seule une petite fille était présente avec sa mère ; j'allais pouvoir me défouler dans le calme. Alors, sous les yeux ébahies de la petite fille, j'hôte mes chaussures et mes chaussettes et saute à pied joint dans la fontaine.

emano9950 

Alors, sous les yeux ébahis de la petite fille, j'hôte mes chaussures et mes chaussettes et saute à pied
joint dans la fontaine.
Je ne vais pas très loin car elle est froide. Et je crois que je mouille mon pantalon... Ou ma jupe. Je ne m'en souviens plus. On se souvient de bien peu de chose, après. Je crois qu'elle avait l'air bien heureuse ! Ou pas.
Vous savez... je ne sais plus ce que j'ai fait, sur le coup. Vraiment ! Je vous le raconte et... plus je vous le raconte, plus j'ai l'impression que tout ce que je vous dis n'est qu'un beau mensonge inventé par un artisan zélé qui montre à la galerie une invention de bon goût. J'ai vraiment cette impression. Si ! Et pourtant toute cette histoire est vraie ! Mais non je ne mens pas ! Tout ce que je vous raconte s'est vraiment passé. C'est net dans ma mémoire. Un vrai film. Mais la fin, elle est comme embrouillée et illogique. C'est plus des flashs d'événements.

Regardez ! Là j'ôte mes chaussures et mes chaussettes. Là je saute à pieds joints dans la fontaine sous les yeux ébahis de la petite fille. Regardez ! Là je mouille le truc que je porte alors. Là je m'arrête en plein milieu. Là je me sens conne et grotesque. Là je me rends compte que la petite fille n'était pas la seule à me regarder, et que plusieurs smartphones sont braqués sur moi et me filment, penaude, au milieu de la fontaine. Là j'ai honte. Et là j'ai envie de disparaitre de la surface de la Terre comme si je n'avais jamais existé.

Mais le pire c'est le lendemain, quand la vidéo fait le buzz sur internet, que la twittosphère s'emballe et que des mèmes apparaissent. D'ailleurs, vous m'en avez envoyés. Et mon père et ma mère qui me disent que je suis qu'une couillonne qui n'arrivera jamais à rien.
Oui. La honte, oui. Mais le pire, le pire, c'est VOUS ! Oui VOUS, mes amis, en qui j'ai toujours cru. De toute manière ça n'intéresse personne cette histoire, hein ! Vous m'avez rabaissée ! Vous m'avez trainée en place publique ! Vous m'avez humiliée devant tout le monde ! Je vous hais. Je vous hais de toutes mes forces ! Je vous ai toujours haïs ! Depuis si LONGTEMPS !!! »

Et elle frappa soudainement avec le culot de la cinquième bouteille qu'elle avait bue et qu'elle tenait encore.
Une tête se trouvait en dessous.

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