L'air avait une odeur de pluie.
C'était un parfum doux et frais, lourd et prenant, une humidité qui s'infiltrait jusqu'au plus profond de la gorge. Elle y restait et pesait sur le cœur. Elle s'en allait en une seconde et revenait, légère, avec une inspiration de vie.

L'herbe était parsemée de rosée et moelleuse au toucher.
C'était semblable à un doux matelas laissant passer toute la rudesse de la terre ramollie par les fines gouttes matinales. Elle tachait les vêtements et nettoyait l'esprit de toute pensée.

Le ciel avait une teinte enflammée.
C'était un limpide amas de couleurs rougeoyantes sans aucun nuage pour les masquer, sans aucun nuage pour les réfléchir à l'infini.

C'était un matin orageux.

C'était un bel après-midi ensoleillé.

Non, l'un ou l'autre. Oui, les deux.

L'orage éclata et un rideau de pluie s'étendit, tombant d'un ciel dégagé.

L'eau ruisselait, coulait, ondulait sur le sol, sur la peau, s'accrochait à la fourrure. Elle rafraîchissait les Hommes, désaltérait les animaux, nourrissait les végétaux.

Le soleil à demi-caché derrière l'horizon envoyait des regards de braise, séducteur et réconfortant, réchauffant le monde sous la puissance de ses rayons.

Et la fleur était là. Délicatement tenue aux creux de tes mains.
Qu'elle avait de la chance. Qu'elles avaient de la chance.

Ses couleurs étaient ravivées par l'immense et lointaine flamme dorée, l'eau s'écrasait sur ses pétales les faisant scintiller.

Et tu étais là, près de moi. Sous le saule, les cheveux mouillés et les yeux pétillants de ravissement.

L'éclair tomba, illuminant ton visage, accentuant les ombres du feuillage, et le fruit défendu resplendissait de tentation.

Et elle était là, seule dans l'herbe, l'empreinte de ta chaleur encore présente sur son pétale.

L'orage passa, le soleil se coucha, et la nuit illumina le monde. La dame apparût de face, sa figure ronde présentait de légers cratères qui ne la rendait que plus belle.

L'air avait une odeur d'orage.
L'herbe était parsemée de pluie et froide au toucher.
Le ciel avait une élégante teinte obscure.

Mais dans ce vaste univers fourmillant de joie et de vie, ta présence manquait, ton absence créait un immense gouffre que l'on ne pouvait combler.