Noël. Joie, fête et dinde aux marrons.
Noël. Paix, amour et autres balivernes.
Et pourtant, ce soir de Noël, il y a eu un meurtre. Un vrai, pas quelque chose qui implique un oncle Marcel qui a trop mangé de dinde.

Et ce meurtre, c'est moi qui l'ait commis. Je regarde mes mains tachées de sang, de l'horreur empreinte dans mes pupilles.
J'ai. tué. quelqu'un. le. soir. de. Noël.
Un étrange sentiment de plénitude m'emplit alors, sans que je ne sache le pourquoi du comment.
C'est comme ça à chaque fois. Je ne peux m'empêcher d'éprouver de l'horreur envers moi même et pourtant de la satisfaction.

Le corps du jeune homme gît à terre, quelques gouttes de sang coulant lentement de sa bouche pour rejoindre la marre de sang qui se forme sur le goudron.

On est seuls, sur ce grand parking. Une brise légère vient me chatouiller les narines, fait voleter mes courtes mèches brunes. Mes yeux noirs fixent la petite lumière provenant d'un sapin à l'horizon.

Noël. Tous est calme. Et j'ai tué quelqu'un.

⁂

Noël. Famille. Sapin. Guirlande.
Noël. Harmonie et fausses bougies.

Qu'est ce que je fais alors dans un petit bâtiment exiguë, lui même situé dans une rue mal éclairée ?

Excellente question.

Je regarde les fines gouttes d'eau exploser contre la vitre, ou le nom Locton détective™ est savamment écrit à la peinture blanche. Je suis assise à mon bureau, mes ongles coupés courts tapotant sur le bord de la table au rythme de la pluie.
Une mélodie me vient en tête, et je me met à la fredonner.

La porte s'ouvre brusquement, me faisant sursauter. Le visiteur est trempé, ses cheveux clairs collés sur son front à cause de la pluie, ses yeux couleur chocolat scrutant les lieux.
Il esquisse un sourire perdu de ses fines lèvres roses et s'avance vers moi.

— Enchanté, vous devez être madame Locton ?

Enfin quelqu'un qui ne me prend pas pour une secrétaire.

— Mademoiselle Locton. Que puis-je faire pour vous ?

Il me fixe de ses yeux marrons, et je tapote mon bureau pour le ramener à la réalité. Il ouvre grand la bouche dans un murmure d'exclamation et fouille dans ses poches, sortant un prospectus de la police. Il le pose délicatement sur le bois sombre. Il est marqué «avis de disparition» dessus.

— C'est Élias... Un ami à moi, reprit-il.

Je lui sourit et l'invite à continuer son récit.

— Il a disparu il y a une dizaine de jour. On l'a signalé à la police, et elle a pensé à une fugue. En plus, Élias et majeur, donc ils n'ont pas fait grand chose. Et hier, je me rendais vers son bistrot préféré pour demander au barman de ses nouvelles et je suis tombé sur ça.

Le jeune homme sort son téléphone portable pour me montrer une photo prise tard le soir. J'aperçois dessus un corps ensanglanté, baignant dans son sang d'une couleur vermeille.

— Il s'est fait poignardé dans le dos... murmurais-je.

— Alors ?

— J'accepte l'affaire. Et vous pouvez m'appeler Irina.

505 mots