-La valse des camélias- /Thomas X Ayato/
Contexte : Un OS écrit pour le concours de Cactasia ! Bonne lecture !
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Pdv Extérieur
Vers l'an 1756, en Angleterre, où le pays fonctionnait par les décisions du peuple et du Parlement, une reine régnait, Ei II du nom. Sa monarchie absolue s'était arrêtée en 1688, lorsque le peuple se révolta et où, cédant à sa pression, le reine Ei signa un traité où elle autorisa la création d'un Parlement.
Le Parlement était constitué d'un groupe de personnes, écoutant les décisions du peuple sur les lois qu'il souhaitait voir modifiées, et décidaient de prendre les propositions des habitants, ou de les refuser. Ei s'occupait uniquement d'appliquer les choix pris par le Parlement.
Mais les habitants du peuple avaient également le pouvoir d'élire de nouveaux membres parmi eux, ou d'éjecter ceux qu'il ne souhaitaient plus avoir à leur Parlement, n'étant souvent pas satisfaits des décisions que prenaient certains d'entre eux.
Le peuple était d'ailleurs beaucoup plus difficile qu'on ne le pensait, c'est ce que l'on déduit assez rapidement lorsqu'on voyait des nouveaux ministres partir parfois aussi vite qu'ils n'étaient venus.
Mais un noble en particulier, était resté au Parlement beaucoup plus longtemps que n'importe qui. Ce qui en étonnait certains, étant donné qu'à son arrivée, il ne ressemblait qu'à un jeune homme sans expérience politique.
Tout le monde avait ri de lui, tous étant sûrs qu'une personne pareille allait à coup sûr se faire avoir par les habitants exigeants qui habitaient le pays.
Pourtant, on se rendit très vite compte qu'il s'agissait de quelqu'un de beaucoup plus sérieux qu'on ne le pensait. Son visage aux traits fins lui donnait une expression enfantine, mais son regard maintenait un air calculateur.
Un calme étrange se maintenait dans ses gestes, et dans son sourire doux qu'il affichait en permanence.
Lors des réunions du Parlement, jamais le peuple n'a remis en cause ses décisions ni son avis, celui-ci écoutant et jugeant chacun de ses choix de manière formidablement intelligente, rationnelle, et mettait tout le monde d'accord.
"Il nous faudrait bien plus de personnes comme lui à notre Parlement, les autres sont des incapables !", entendait-on souvent des habitants lorsqu'on leur demandait ce qu'ils pensaient de lui.
Il se nommait Ayato Kamisato, bien que tous le connaissaient sous le nom de Duc Kamisato, le plus grand noble régnant sur les terres de Narukami.
Les habitants de sa région lui vouaient une grande confiance, et un très grand respect. Travailler dans son domaine à ses côtés était un véritable honneur, et les personnes qui méritaient un tel privilège étaient particulièrement enviées par tous ceux qui admiraient le Duc.
Mais quelqu'un, ayant eu la chance de ce privilège, s'estimait beaucoup plus chanceux que n'importe qui.
Le majordome même de Monsieur Kamisato, que celui-ci appelait tout simplement Thomas, vouait à son Duc une estime on ne peu plus remarquable.
Au point où, tout comme le Duc, son implication dans son travail était irréprochable.
Où que le Duc aille, Thomas était là. Quand il avait besoin de son majordome, celui-ci intervenait toujours au bon moment.
Il s'agissait d'un jeune homme honnête, au regard d'un vert clair ne laissant transparaître aucune hypocrisie. Ses cheveux blonds étaient soigneusement attachés derrière sa nuque, bien que quelques mèches rebelles ressortaient de par et d'autres de sa tête.
Deux types de personnes connaissaient Thomas : ses amis, qu'il possédait en grand nombre grâce à son caractère sociable et agréable, et les personnes qui le détestaient, qui bien souvent, étaient juste jalouses du rôle qu'il possédait au domaine du Duc. Mais bien qu'il n'était pas apprécié par un bon nombre de gens, Thomas ne s'en préoccupait pas.
La confiance qui régnait entre le Duc et son majordome était irréprochable, tout deux se disait tout l'un de l'autre.
Chaque jour passé avec Monsieur Kamisato était une belle journée pour Thomas, qui se contentait de chaque journée de travail à ses côtés pour être heureux.
Tous, sauf un. Un seul qui revenait chaque année. Le 14 février. Une date dont Thomas, redoutait l'arrivée en chaque début de ce mois en particulier.
Pour la simple et bonne raison que, bien que Thomas disait tout au Duc, il ne cachait qu'un seul secret...
Au fil des années passées à ses côtés, il commençait à constater d'étranges sentiments pour Monsieur Kamisato...Oui, Thomas avait fini par éprouver, ce que l'on appelait, "l'amour".
Au début, il n'y croyait pas. Pouvait-il vraiment avoir de tels sentiments pour un homme ? Qui plus est, n'est autre que le noble pour lequel il travaillait ? Sous les conseils d'amis plus proches, il arrêta de le nier, et accepta ce que lui disait son coeur, bien que cela ne lui convenait pas tout à fait...
C'est bien pour cette raison que le 14 février lui faisait plus de mal que les autres jours. Il s'agissait de la fameuse journée, après son anniversaire, où le Duc recevait le plus de lettres, de cadeaux, de roses, et plein d'autres choses signifiant toutes les mêmes intentions...
Et bien que Thomas tentait de se convaincre que se sentir agacé et dérangé par tout cela était une mauvaise chose, c'était bel et bien ce qu'il ressentait. Car étant donné que le Duc était trop occupé pour s'occuper de tout ce qu'il recevait, c'est son très cher majordome qui s'occupait d'ouvrir chaque lettre pour les lire, et de trouver un vase pour chaque bouquet de roses...À son plus grand désarroi...
Et cette année encore, il n'y échappera probablement pas...
Le 13 février 1756, alors que tous les braves gens qui travaillaient au domaine Kamisato s'appliquaient à leur travail, Thomas semblait bien plus agité que d'habitude...
Tous le voyaient déambuler dans les larges couloirs aux piliers de marbre et aux murs sculptés, avec une allure bien plus rapide que d'ordinaire.
On le reconnaissait à sa tenue habituelle de majordome, composée de sa veste rouge brodée en queue-de-pie, son gilet noir uni qu'il portait par-dessus sa chemise qui laissait dépasser de belles manches bouffantes, et un jabot en dentelle qui descendait sur sa poitrine.
Il allait et venait un peu partout, s'arrêtant à chaque personne qu'il croisait, pour leur poser à toutes la même question.
-Avez-vous quelque chose de particulier de prévu pour demain ?
-Oui, Monsieur Kamisato m'a demandé de tailler la haie au portail...
-Eh bien, je m'en occuperais à votre place ! Ah ! Vous ! Excusez-moi, vous êtes en charge des cuisines, pour demain, je ne me trompe ? Laissez-moi faire, faîtes-moi confiance !
Et il repartait, sans explications, laissant les gens dans l'interrogation, mais plutôt satisfaits d'avoir du travail en moins. Pendant que Thomas, lui, l'accumulait, demandant à un maximum de gens de lui laisser leurs travaux.
Il s'arrêta alors, s'adossant contre un mur, épuisé d'avoir fait plusieurs fois le tour du domaine. Il se repassa alors en marmonnant chacune des tâches qu'il s'était rajoutées pour le lendemain. Thomas n'avait cependant pas remarqué que son étrange comportement avait incité quelqu'un à le suivre pour en savoir plus.
- ...Après le repas, j'enchaîne avec le message à distribuer à la Duchesse Ningguang, ensuite la gestion des impôts, puis préparer le goûter, ensuite recoudre le manteau de Monsieur le Duc...
Il sursauta lorsque qu'une voix se fit entendre juste à côté de lui, continuant ses propos.
- Puis tu dois nettoyer le sol, astiquer la rampe des escaliers, et je ne me rappelle plus tout à fait de la suite...Mais je sais que tout ça ne suffira pas à tenir toute la journée ! Je l'ai bien saisie, ta stratégie, Thomas !
Yoimiya, la gestionnaire des fêtes et événements au domaine, et la meilleure artificière du pays, était l'amie en qui Thomas avait le plus confiance, et une des seules personnes à connaître son secret à propos du Duc...
Ayant vu le jeune majordome se précipiter dans les couloirs, elle l'avait suivi discrètement pour saisir plus d'informations, pour apparaître soudainement. Et malgré ce qu'elle en avait déduit, Thomas continuait de nier en vain.
- Que...Quelle stratégie ? Je propose juste mon aide à qui peut en recevoir ! Tu me connais !
Elle eut un petit sourire en coin, avant de regarder autour pour s'assurer que personne ne l'entende.
- Justement, je te connais ! Et je t'aurais bien cru, si nous n'étions pas le jour qui précède cette date que tu détestes tant ! Tu essayes d'accumuler du travail pour toute la journée, comme ça, tu en auras trop, et Monsieur le Duc ne te demanderas pas de t'occuper de tous ses cadeaux de Saint-Valentin, car tu n'en auras pas le temps ! J'ai raison, n'est-ce pas ?
Thomas s'apprêtait à répliquer, lorsqu'il s'arrêta en soupirant, confirmant tous les propos de Yoimiya, qui elle sourit malicieusement, satisfaite d'avoir vu juste. Voyant son ami dépité, elle le regarda contempler le vide, en baisse de morale, voyant le soleil se coucher par la fenêtre, lui rappelant à quel point le lendemain était proche.
- Toi qui est si optimiste toute l'année, c'est bien le seul jour où tu deviens jaloux !
-Jaloux ?! s'écria le blond en regardant Yoimiya avec des yeux écarquillés, détournant immédiatement le regard par embarras, contestant toujours ses propos sans trop de conviction.
-Je ne suis pas jaloux...
-Arrête de tout nier en bloc ! Tu sais bien que je suis au courant de tout ! Au fond, voir les si belles roses, et les lettres parfumées des jeunes demoiselles envoyées en cadeau pour le Duc, ça t'agace toujours ! Tu détestes les rosiers du jardin juste parce qu'ils te rappellent tout ça !
Ne tenant plus, Thomas débita tout ce qu'il était désormais inutile de contredire, dans un élan d'honnêteté qui lui arrivait toujours après avoir pris trop de temps à mentir, à lui-même ou aux autres.
- C'est bon ! Je l'admets ! Si je pouvais supprimer ce jour de l'année, je le ferais !
- Quand même pas ! Il y a déjà assez peu de jours comme ça au mois de février !
- Je n'y échappe jamais ! C'est toujours à moi, que Monsieur le Duc demande de s'en occuper ! Et si je lui dis que je n'aime pas faire ça, que pourrais-je lui répondre, s'il me demande pourquoi ? Je n'envisage même pas avoir une chance avec lui !
Il s'assit contre le mur, entourant ses genoux de ses bras, d'un comportement très infantile, qui fit presque rire l'artificière, se retenant par respect pour le jeune majordome.
- Depuis combien de temps, est-ce que tu l'aimes ? Deux ans ? Trois ?
Thomas hésita, avant de lui donner une réponse peu assumée d'une faible voix.
- Cinq ou six, plutôt...
Yoimiya s'écria soudain.
- Si longtemps ?! Mais il faut se secouer, Thomas ! Tu ne peux pas rester comme ça !
C'est alors qu'une idée lui vint en tête, elle tira alors Thomas vers elle pour le rapprocher et lui parler à voix basse, pour être sûre que personne ne les entende.
- Écoute-moi bien, cette année, ce sera la bonne ! Fonce !
- Fonce ?
- Oui ! Parmi tous les cadeaux que le Duc recevra, le tien sera le meilleur qu'il n'ait jamais reçu !
- Tu veux que je lui offre quelque chose ?!
Yoimiya lui fit signe de parler moins fort, avant d'acquiescer.
- Oui ! Tu lui feras un petit quelque chose, que tu déposeras directement sur son bureau, puisque tu y as accès !
- Mais il saura que c'est moi !
- Eh bien...Ce n'est pas le but ?
Le majordome accéléra en parlant, paniquant déjà à cette l'idée de cela.
- Non mais tu te l'imagines ?! Me déclarer sur une chose pareille ?! Je ne veux même pas savoir comment il va me regarder, après ça ! Je risque même de perdre mon travail ! Ou même pire ! Est-ce que tu imagines ma tête, sous la lame de la guillotine ?!
- Tu exagères, calme-toi...
Elle regarda son ami dépité, avant de prendre la décision de ne plus insister, voyant que ça lui faisait plus de mal qu'autre chose. Elle lui parla donc d'un ton plus calme.
- Très bien, si tu ne veux rien faire, je respecte ton choix. Mais je te conseille d'y réfléchir, demande à ton coeur s'il souhaite continuer à cacher ce qu'il veut, et tu ne regretteras pas sa décision. Moi, j'y vais, j'ai encore du travail !
Sur ces mots, elle s'en alla, laissant Thomas seul à l'intersection du couloir, toujours recroquevillé contre le mur, écoutant le bruit du silence, et regardant vaguement les sculptures de marbre sous la lumière des chandeliers.
Il se releva avec quelques efforts, en tirant sur sa veste en queue de pie pour la remettre correctement. L'esprit trop embrumé, il décida de se rendre à l'un des endroits qui le détendait le plus.
Thomas traversa la large demeure, pour sortir faire un tour dans le grand jardin du domaine, où poussaient de nombreuses fleurs, dont il connaissait tous les noms, tout autant que le jardinier qui en était chargé.
Le soleil était presque couché, laissant ses derniers rayons éclairer les couleurs des pétales, qui flottaient gracieusement à la légère brise. Le majordome s'avançait avec lenteur sur le pavé des étroits chemins qui s'y trouvaient, se sentant déjà plus détendu qu'avant.
C'est alors que ce sentiment de sérénité disparut soudainement, lorsqu'il passa à côté d'un petit arbuste en particulier.
Il s'agissait de fleurs, dont la couleur virait d'un rose pâle à un rouge plus vif, mais qui n'étaient néanmoins pas des roses. Thomas s'accroupit, pour en cueillir une, qu'il tint dans le creux de sa main en soupirant.
Ce n'était pas les roses, qu'il appréciait le moins regarder, mais les camélias. Car ceux-ci ne lui apportaient pas un sentiment de jalousie, mais une mélancolie chargée de vieux souvenirs dont il avait du mal à se défaire...
En vérité, il n'avait jamais tout dit, à Yoimiya...
***
- Maman ! Maman ! Tu es là ? Maman !
À bout de souffle, boitillant à chaque pas, un enfant s'avançait avec difficulté sur la terre. Il contournait les racines des arbres qui l'entouraient, évitant ainsi de se blesser plus qu'il ne l'était déjà, les jambes, les bras, et le visage égratignés de partout. Ses cheveux blonds étaient désormais emmêlés et salis par la terre.
Une lueur d'espoir l'animait encore, bien qu'elle faiblissait à chaque appel qu'il criait de plus en plus à pleins poumons. Il ne s'était jamais senti aussi seul de toute sa vie.
En s'avançant encore, il réalisa qu'il venait de sortir de la forêt, déboulant dans une grande clairière éclairée par le soleil. Ébloui, il plissa les yeux pour tenter d'apercevoir où il venait d'atterrir.
Il s'agissait d'un vaste champ, d'un sol tapissé d'herbe, où étaient alignés d'étranges arbustes. La vue du jeune garçon se faisant plus net, il y distingua de jolies fleurs, brillant sous les derniers rayons de soleil d'une couleur rosée et rouge. Il s'avança avec prudence, avant de s'enfoncer dans les chemins qui zigzaguaient entre chaque petit arbre à fleurs.
Bien que trop petit pour voir par dessus les plantes, il n'hésita pas à continuer son chemin dans ce vaste champ, semblable à un véritable labyrinthe. Déterminé à trouver le bout au plus vite, le jeune garçon se mit à accélérer le pas, progressivement, jusqu'à courir, sans savoir où aller. Il voulait partir loin, bien que sa destination restait indécise et inconnue pour lui, mais il espérait simplement que ce bel endroit allait le mener quelque part.
C'est alors qu'il fut brusquement stoppé dans sa course, lorsqu'il percuta quelque chose, ou plutôt quelqu'un, à l'intersection d'un chemin.
Il tomba en arrière, dans une chute qui lui fit plus mal que prévu, de par la douleur de ses blessures qui se ravivait.
En relevant la tête, il distingua le visage de la personne qu'il venait de heurter.
Il s'agissait d'un autre enfant, qui semblait avoir le même âge que lui, environ une dizaine d'années. C'était un garçon au teint pâle, et à l'apparence bien soignée.
Ses yeux étaient d'une couleur lavande très captivante, à la fois douce et reflétant une lueur d'intelligence venant d'un esprit vif. Ses cheveux clairs et bleutés étaient coiffés élégamment, attachés avec soin par un ruban violet, les laissant tomber sur le devant de son épaule droite.
Il portait de beaux habits, faisant comprendre la haute classe sociale dont il faisait partie. Son beau veston assorti à ses cheveux se complétait de manches bouffantes en dentelle, et de hauts collants blancs en dessous d'un pantalon descendant à ses genoux.
Le blondinet regarda, figé, celui qui venait d'apparaître en face de lui. Cela faisait déjà un moment qu'il n'avait plus vu autre chose que des plantes et des animaux.
Le jeune noble eut la même réaction, avant de briser le silence, en tendant une main vers l'inconnu.
- Tout va bien ?
Il acquiesça timidement, avant de saisir la main tendue, qui le tira pour le relever. Une fois sur pieds, le garçon aux cheveux bleus l'interrogea à nouveau.
- Quel est ton nom ?
Il ne reçut pas de suite une réponse, mais il finit par entendre une faible voix.
- Thomas.
- Thomas ? Tu n'es pas d'ici, je me trompe ?
Sur ce, le jeune noble se présenta à son tour, en reculant pour pouvoir s'incliner avec élégance.
- Je suis Ayato Kamisato, fils et héritier du Duc Kamisato. Enchanté de faire ta connaissance, Thomas !
Ne sachant pas comment répondre à une approche aussi polie, le petit Thomas s'inclina à son tour, copiant sa façon de faire avec hésitation, ce qui amusa Ayato.
- Donc dis-moi, d'où viens-tu, Thomas ? Et pourquoi es-tu ici dans un tel état ?
Il l'observa de la tête au pieds, remarquant ses égratignures et ses modestes vêtements sales et déchirés par endroits.
C'est à cette question qu'il put entendre mieux la voix de Thomas, qui s'était montré taciturne jusqu'à présent.
- Je...Je viens d'Allemagne. De la ville de Mondstadt, plus précisément...Nous avons pris le bateau, ma mère, moi, et d'autres marchands, pour exporter quelques marchandises jusqu'ici. Après...
Il s'interrompit, avant de regarder Ayato, qui par son regard, l'incitait à continuer.
- Après...Il y a eu une grosse tempête...Le bateau bougeait beaucoup...Il y a eu une grosse vague, et après...Je ne me rappelle plus...Je me suis réveillé sur une plage en pleine nuit, à quelques dizaines de kilomètres d'ici. Alors j'ai marché, tout le reste de la nuit, et toute la journée...
Son regard s'attrista à ses derniers propos.
-...Et...J'ai appelé ma Maman, pendant mon chemin...Mais elle ne m'a pas répondu...J'espère quand même qu'elle s'est échouée comme moi, et qu'elle est juste partie chercher de l'aide ! N'est-ce pas ? N'est-ce pas, que nous allons la retrouver ?
L'étincelle d'espoir et d'innocence dans le regard du jeune Thomas peinait encore plus Ayato, qui lui avait bien compris que sa mère n'avait sûrement pas eu autant de chance que lui, de se retrouver en vie sur cette plage...
Bien qu'il s'en voulait de faire ça, il mentit.
- Oui...Nous allons la retrouver, c'est promis. Ne t'inquiète pas pour elle, elle va certainement bien...
Un petit sourire s'afficha sur le visage du blond, qui fit sourire plus tristement le fils du Duc. Ayant retrouvé une soudaine énergie et un enthousiasme qui semblait propre à sa vrai personnalité d'enfant, Thomas dériva soudain de sujet, attrapant avec délicatesse une fleur qui poussait sur un des arbustes.
- Dis-moi, quelles-sont ces fleurs ? Elles sont jolies !
- Ce sont des camélias, ils fleurissent généralement en hiver, ou au début de l'automne. On peut aussi en faire du thé. Mais moi, je préfère les regarder ! Ils sont magnifiques...
Thomas les contempla encore de plus près, fasciné par la couleur de leurs pétales si joliment alignés en cercle. Voyant ses yeux pétillants, Ayato avait retrouvé son moral.
- Si tu veux, tu peux en cueillir.
- C'est vrai ? Je peux ?
- En réalité, pas vraiment...Nous sommes sur une propriété privé, mais la personne qui possède ce champ est tellement vieille qu'elle n'y vient même plus, alors nous ne risquons rien ! Personne ne le verra, si quelques fleurs ont disparues !
Ils se regardèrent quelques secondes, avant de se mettre à rire gaiement de leurs rires d'enfant, qui les rendaient toujours insouciants pendant ces instants de plaisir semblables à des rayons de soleil.
Lorsqu'ils s'arrêtèrent pour reprendre leur souffle, Thomas ramassa quelques fleurs, comme prévu. Une fois qu'il eut fini, Ayato l'attrapa soudainement par la main, pour le tirer derrière lui à travers les chemins couverts d'herbe.
- Où...Où allons-nous ?
- Chez moi ! Regarde, j'habite juste là-bas !
Il désigna une très grande demeure au loin, d'une grandeur et d'une telle architecture qui rappela à Thomas à quelle niveau de noblesse appartenait ce garçon, avec qui il avait partagé un fou rire juste avant.
Les deux enfants arrivèrent au grand domaine, où Thomas fut nourri, logé, pendant plusieurs jours, plusieurs mois, et plusieurs années...
Il avait été traité aussi bien que le jeune héritier du Duc, connaissant le confort de vie que ceux-ci possédaient.
C'est aussi au fil de ces années également, qu'il avait fini par réaliser que sa mère ne reviendrait certainement pas...
Mais un jour, alors qu'ils n'étaient qu'adolescents, le Duc Kamisato rendit l'âme, laissant la succession de son poste à son fils. Qui lui hérita, bien qu'à son jeune âge, de sa fortune, de son rang, et de toutes ses responsabilités...
Mais cela le réussit bien. Ayato atteignit sans trop de difficultés les rangs du Parlement, où il accomplira son devoir mieux que personne.
Thomas, lui, depuis la mort du père de son très cher ami, avait décidé de lui en être reconnaissant jusqu'au bout. Le jeune Kamisato lui avait très certainement sauvé la vie, et qui sait, où il aurait pu finir, si celui-ci ne l'avait pas guidé jusqu'à chez lui pour le recueillir...
Il prit alors la décision de rester jusqu'au bout à ses côtés, en endossant le rôle de majordome du Duc.
Ayato lui avait expliqué que de grandes responsabilités risquaient de venir avec, mais Thomas insista, et, brilla lui aussi on ne peut mieux dans son travail.
Lorsqu'ils eurent tous les deux une vingtaine d'années, tandis que les employés du domaine partaient de leur poste, et de nouveaux arrivaient, un en particulier se démarqua des autres...
Il s'agissait d'un jardinier, au comportement fort suspect...
Les autres employés se plaignaient souvent de son comportement désagréable, de tous ces moments où il enfreignait les règles, et lorsqu'on le trouvait dans des endroits où il ne devait pas être, comme à proximité du bureau du Duc...Il prétendait que le Duc l'y avait convoqué, sauf que celui-ci en dit le contraire lorsqu'on le lui posa la question.
Les travailleurs du domaine avaient porté plainte à Ayato, qui lui avait prit en compte les témoignages, et comptait agir pour tenter d'en savoir plus sur lui.
Malheureusement, il n'eut pas pu agir suffisamment à temps...
Un soir, à une heure tardive, où la nuit était déjà tombée, le domaine dormait, faisant régner le calme dans chaque pièce et chaque couloir. Seules deux personnes étaient encore debout, dans la plus grande salle de la demeure...
Les chandeliers n'étaient pas tous allumés, éclairant le lieu assez faiblement, mais assez pour pouvoir voir l'endroit dans ses détails.
Un bal avait eut lieu ici, dans la journée, et nettoyer avait prit plus de temps que prévu, c'est pour cela que le majordome avait prit gentiment en charge les dernières choses à régler, laissant ainsi aller se coucher le personnel chargé du nettoyage.
Thomas tenait un dernier chandelier dans ses mains, tandis qu'il soufflait sur les bougies de ceux accrochés aux murs, baissant la luminosité peu à peu. Il se tourna vers l'homme qui était assis sur un fauteuil derrière lui, en lui souriant.
- Vous devriez aller vous coucher, Monsieur !
Ayato le regardait d'un regard doux et de son sourire mystérieux, toujours dans sa tenue de bal de la journée, observant son majordome en plein travail.
- Je ne suis pas très fatigué, je préfère te tenir encore un peu compagnie.
- "Pas très fatigué" ? Après une journée aussi longue et éprouvante ? Je ne vous crois pas !
Il conclut sa phrase en soufflant encore sur une bougie.
Ayato ria légèrement, avant de se lever de sa chaise, en s'approchant de Thomas.
- Je ne comprendrais jamais ta décision.
Dit-il en éteignant une flamme à son tour à côté du blond pour l'aider.
- Laquelle ?
- Celle de travailler pour moi. Nous avons passé tant d'années ensemble, et tu avais même droit à une partie de l'héritage de mon père, qui te considérait comme son deuxième fils. Mais à part ça, tu as préféré endosser ce rôle de majordome...C'est pour ça que je te le demande...Pourquoi ?
Il regarda Thomas, qui lui prit un temps de réflexion avant de parler, cherchant les mots justes, avant de lui répondre très sincèrement.
- Je voulais juste...Rester à tes côtés.
Le blond constata avec surprise une expression sur le visage du jeune noble, qui lui baissa les yeux d'embarras, avant de sourire, mais différemment de d'habitude...En général, Ayato affichait toujours un léger sourire poli, mais cette fois-ci, il était différent, il semblait d'une expressivité si honnête qu'il réchauffa le cœur de Thomas.
Ce tutoiement soudain lui avait également rappelé cette époque où ils étaient encore enfants, et se parlaient comme des amis.
Un silence s'ensuit, qui fut coupé par Ayato.
- C'est...Une proposition étrange, mais...Tant que nous sommes ici, tous les deux...
Il marqua un temps d'arrêt, avant de tendre une main au majordome.
- M'accorderais-tu cette danse ?
Thomas resta figé, surpris. Avait-il bien entendu ? Cette demande lui semblait fort étrange venant de lui...De plus, le pouvait-il vraiment ? Il se rappela alors qu'ils étaient, en effet, seuls dans la salle de bal.
Il posa donc son chandelier sur une table, pour attraper timidement la main que lui tendait le Duc, qui l'attira prêt de lui, et l'entraîna très vite en quelques mouvements fluides dans une valse élégante, virevoltant au centre de la salle.
Les dernières lumières leur étaient bien suffisantes, et le lustre en cristal qui s'élevait au dessus de leur tête reflétait les faibles lueurs de celles-ci. Le sol propre et brillant glissait sous leurs pieds, et la lueur nocturne de la lune leur tombait presque dessus par les rayons de la fenêtre.
Leurs pas s'ensuivaient, et Thomas sentait plus qu'autre la chaleur que dégageait le corps de son partenaire, qui se rapprochait peu à peu alors que la danse continuait. Celui-ci l'avait serré plus fort contre lui, remontant le bras qu'il passait dans son dos jusqu'à sa nuque.
Le majordome commençait à ressentir le souffle chaud d'Ayato dans son cou, réalisant l'étrange et soudaine tournure sensuelle que prenait cette valse à chaque pas, ressentant les frissons que cela lui procurait lorsqu'il entendait son nom susurré près de son oreille.
Malgré toutes les pensées raisonnables qui obstruaient son esprit, quelque chose en lui l'empêchait de repousser celui qui se permettait tant d'approches, lui faisant bien plus d'effet qu'il ne s'en rendait compte...
Jamais Thomas n'avait ressenti une telle sensation auparavant, et leur danse tenait désormais à la cadence de ses battements de coeur, qui s'agitait bien plus que d'habitude.
Les lèvres du Duc remontait peu à peu en dessous de sa tête, passant par la courbe de sa mâchoire, avant de frôler ses joues, avant de s'arrêter subitement.
Une voix se fit soudain entendre prêt du couloir.
- Je vous tiens.
Des bruits de pas se firent entendre, s'éloignant à vive allure dans la demeure, sans se faire voir. Cette voix...Thomas reconnu sans difficultés celle du jardinier, celui tant suspecté par le reste du personnel.
Il se retourna vers Ayato, qui lui regardait toujours dans la direction de la voix, une once de panique dans le regard. Il repoussa alors brusquement le blond, qui manqua de tomber en arrière. Le regard du jeune noble était le même, ce même affolement y était présent, observant Thomas avec une étrange frayeur.
Il s'en alla alors d'un pas décidé vers le couloir, sans se retourner.
- Je vais m'occuper personnellement de cette affaire. Va te reposer, nous nous reverrons demain.
- N'y va pas seul ! Laisse-moi t'aider, Ayato, je-...
- Va-t'en !
Il cria ses derniers mots, qui résonnèrent dans la grande salle. Il s'était arrêté, pour se retourner vers Thomas, qui le regardait avec incompréhension, sans un mot, comme figé sur place.
Jamais il ne lui avait parlé ainsi, et jamais il ne l'avait vu perdre son calme de cette façon, mélangeant dans ses yeux une apparence de fureur, laissant transparaître tout autant une lueur triste qui l'affligeait bien plus que le reste.
- Et ne m'appelle plus comme ça. Tu travailles pour moi, maintenant, et il s'agissait de ton choix. En voulant rester à mes côtés de cette façon, tu n'as fait que nous éloigner.
Ayato se retourna donc, quittant la salle une bonne fois pour toutes. Thomas continua d'observer dans le vague le couloir dans lequel il avait disparu, avant de répondre, dans un murmure.
- Oui, Monsieur le Duc...
Jamais il n'aurait pensé que prononcer ces mots lui ferait aussi mal, bien que personne ne l'ait entendu.
Ils lui sonnaient si faux, lorsqu'il était seul. Comme quoi, cette partie de lui n'acceptait pas non plus, cette distance qui s'était installée entre lui et son ami d'enfance.
Car ce soir-là, lors de cette danse, Ayato avait réveillé chez lui des sentiments insoupçonnés qui allaient désormais lui ronger le coeur pour bien longtemps...
Les intentions du jardinier qui les avait épiés ce soir-là avaient été mises au grand jour. On apprit que celui-ci avait tenté à plusieurs reprises de trouver des documents confidentiels dans le bureau du Duc, pour l'accuser et le faire chuter de son poste au Parlement, sous les ordres d'une personne dont il ne révéla pas le nom. N'ayant rien trouvé qui relèverait de la fraude dans ses dossiers, il espionna celui-ci pour tenter de déceler n'importe quoi qui puisse le mener à sa perte.
Ce rapprochement ambigu entre lui et son majordome lui avait fourni une occasion parfaite. Bien qu'il ait été condamné à la prison, il aurait révéler en public ce qu'il avait vu cette soirée-là. Bien malheureusement pour lui, personne ne le cru.
"Le Duc Kamisato ? Pour qui se prend-t-il, celui-là, de l'accuser de telles choses ?"
...(...)...
"Bien évidemment, que je n'y crois pas ! Mais bien sûr que si cela s'avérerait vrai un jour, il chuterait bien vite de notre Parlement ! Vous vous imaginez, quelqu'un comme lui, au pouvoir de notre pays ? Cela me dégoûte, rien que d'y penser !"
...(...)..."
"Le Duc ? Bien sûr que non, jamais il ne se rabaisserait à ça !"
Thomas eut exactement la même pensée lorsqu'il finit de lire les témoignages dans le journal. Bien sûr que non, le grand Duc Kamisato ne se rabaisserait jamais à ça. Il gardait encore la sensation sur ses épaules de ses mains qui l'avaient repoussé, ce regard d'effroi qu'il avait posé sur lui, après avoir réalisé ce qu'il venait de faire, et ce ton si violent, qu'il avait employé à son égard.
C'est ainsi que plus jamais, ils n'avaient reparlé de cette histoire, reprenant le cours de la vie comme si rien ne s'était passé entre eux ce soir-là. Cela arrangea bien Thomas, qui préférait garder cela dans l'ombre de ses souvenirs, bien que ces images et sensations restaient nets dans son esprit.
Et c'est bel et bien son coeur, qui lui dictera plus tard, ce qu'il souhaite réellement réparer...
***
"À vos côtés, là où le soleil brille encore,
Dans vos yeux, cette étincelle telle de l'or,
Me font toujours attendre, jusqu'au crépuscule,
Pendant chaque journée, où mon coeur se bouscule,
La nuit, bien que je la sente fort délicate,
Me rappelle sans cesse cette terrible date,
Où le monde me ramène à la réalité,
Qui me rappelle : "Qui suis-je pour vous aimer ?"
Ce soir, où vous m'avez invité à danser,
Quand j'ai senti, sous la lumière des chandeliers,
Votre regard, votre chaleur, qui dans le temps,
N'avait pas changé de ce souvenir d'antan,
Où dans ce champ, quand le soleil descendait bas,
Se reflétait la couleur rose des camélias."
Ayato repassa avec application chaque vers, de ce poème qu'il venait de trouver plié avec soin dans une enveloppe qui reposait sur son bureau. Au début, il pensait que cette lettre était sûrement un des cadeaux du 14 février qui s'était égaré comme à chaque fois que ce jour tombait dans l'année.
Mais ces mots semblaient beaucoup plus personnels que n'importe quel poème qu'il avait reçu. Une mélancolie s'installa en lui, tandis qu'il tenait le papier dans ses mains avec délicatesse. Des souvenirs, qu'il contenait en lui comme de vieilles blessures lui revinrent. Jamais il n'aurait pensé que tout cela reviendrait dans sa vie, déterré au fond de son coeur, alors qu'il avait pris tant de temps à l'y enfouir.
La lettre ne finissait par aucune signature, mais Ayato n'en avait pas besoin. La personne qui le lui avait écrit avait si bien exprimé ces vieux moments que son nom n'était même pas nécessaire pour l'identifier.
Tout était si clair dans ces vers qu'il avait même compris où il devait se rendre. Ne perdant pas de temps, il quitta son bureau à vive allure, avant de se diriger là où ses souvenirs le guidaient...
Rien n'avait changé depuis sa dernière venue. Le même paysage, la même lumière du soir, et surtout, les mêmes fleurs.
Ce champ de camélias avait entretenu ses instants d'autrefois, ceux qu'il chérissait tant mais avait renié pendant si longtemps.
C'est alors qu'en passant à travers les arbustes, Ayato aperçut une silhouette, qu'il reconnut sans difficultés.
Il s'approcha de la personne assise dans le parterre d'herbe.
- Tu es toujours aussi doué, pour les poèmes, Thomas.
- Merci.
Il vint s'asseoir à ses côtés, ne recevant pas de réponse supplémentaire de sa part. Le blond regardait l'horizon, légèrement ébloui par le soleil.
Ayato fit de même, et les deux restèrent ainsi pendant une bonne minute au moins.
Le jeune noble finit par briser le silence, bouillant de l'intérieur. Ils se rejoignaient aujourd'hui, dans cet endroit, pour une même raison, et il voulait aborder le sujet.
- Cela fait déjà cinq ans...
Thomas baissa les yeux vers le sol, évitant son regard à tout prix.
- Oui...
Voyant que bien que ce soit lui qui l'ait convoqué ici, Thomas ne souhaitait pas lui parler, ou ne l'osait pas. Ayato prit alors l'initiative de le faire, après avoir inspiré un grand coup.
- Excuse-moi.
Thomas écarquilla les yeux, avant de lui jeter un regard discret de côté, tandis que le Kamisato s'expliqua.
- Ce soir-là, j'ai eu peur. Après la mort de mon père, je ne souhaitais pas gâcher son honorable travail, je voulais que tout soit parfait dans mon travail de Duc. Notamment mon image, alors...J'étais tant submergé par cette envie de perfection que, lorsqu'on nous a vus danser ce soir-là, j'avais l'impression d'avoir commis une erreur...
Il s'arrêta un peu, avant de reprendre.
- Hors, la véritable erreur que j'ai faîte ce soir-là, était de te repousser et te parler comme je l'ai fait. Je l'ai regretté tellement d'années, j'ai eu si peur de te perdre...
Thomas resta sans voix, avant de finalement lui répondre.
- Après ce soir-là...Tu as réveillé quelque chose de nouveau en moi...Rester à tes côtés était un choix irréfutable, bien que garder tout ça au fond de moi me faisait mal. Après ces années, j'ai réalisé que faire comme si de rien n'était, en cachant cette histoire dans la pénombre ne faisait que nous blesser encore plus, alors j'ai décidé qu'il valait mieux que l'on ramène ces instants pour les éclairer ensemble...
Son regard croisa enfin celui d'Ayato, et un sourire radieux s'était même dessiné sur son visage. Le blond continua.
- Mais t'entendre dire tout ça me libère d'un poids énorme...
- Alors...Tu me pardonnes ?
- Honnêtement, je ne t'en ai jamais voulu. Je m'en voulais bien plus à moi-même, j'avais l'impression que c'est moi, qui ai commis une erreur...
- Mais tu n'avais aucune raison de t'en vouloir.
- Peut-être bien...
Ils se turent tous les deux, contemplant le ciel qui se teintait d'une couleur orangée au dessus d'eux, prenant un moment pour ressentir le soulagement que cela leur procurait d'évoquer ces moments tant redoutés dans chacune des discussions.
Le silence dura un moment jusqu'à ce qu'Ayato désigne un des arbustes fleuri.
- Ils sont beaux, cette année.
- Les camélias ? Oui, ils sont encore nombreux, bien que leur floraison est sensée prendre fin à cette période de l'année...
Le jeune noble en cueillit un, qu'il glissa dans la poche poitrine de la veste de Thomas, qui sourit tendrement à ce charmant cadeau.
- Finalement, je crois que je commence à les apprécier, ces fleurs....
- Pas comme les roses, n'est-ce pas ?
- Comment ça ?
- Tu détestes en voir, lorsque tu t'occupes de trier mes cadeaux de Saint-Valentin !
Thomas se retourna vers lui, vivement, les joues rouges d'embarras.
- Comment sais-tu que...?!
- Chaque année, quand je te demande de t'en occuper, je le constate à ton expression ! Je vois que tu hais ça, mais je ne me lasse jamais de venir te regarder en cachette pour rire des têtes que tu tires en lisant les lettres !
Le majordome marmonna une plainte incompréhensible, gêné, qui fit rire de bon coeur Ayato. Thomas reconnut alors le même visage qu'il avait vu lorsqu'ils s'étaient rencontrés, quand ils avaient rit, dans ce même champ.
C'est alors qu'Ayato se leva.
Sans comprendre où il comptait aller, Thomas se leva également. Il aperçut alors une main qui se tendait vers lui, et cette vision lui sembla bien familière...
Il leva les yeux sur le jeune Duc, pour s'assurer qu'il avait bien compris, ce que celui-ci confirma.
- Nous avions été interrompus, la dernière fois, n'est-ce pas ?
Le blond resta figé quelques instants, avant d'acquiescer en souriant. Il attrapa sa main, qui l'entraîna dans la même valse qu'il y a quelques années déjà. Les mêmes sensations lui revenaient, mais cette fois-ci, aucun des deux ne craignait d'être arrêté...
Ce nouveau 14 février se termina alors par les derniers rayons du soleil, éclairant la plus belle danse que le champs aux camélias n'ait jamais connue...
***
(Scène bonus)
- "...Votre beauté et votre splendeur, Monsieur le Duc, semblable aux lys sous le soleil d'été..." Tiens ? C'est très charmant, cela !
- Mh...
- Qu'est-ce qu'il y a ? Tu n'es pas d'accord ? Ma beauté n'est pas suffisante pour être comparée aux fleurs de lys ?
Thomas se redressa d'un coup du bureau, pour s'exclamer.
- Bien au contraire ! C'est la beauté des lys, qui ne peut être comparée à la tienne !
- Oh ? Tu me flattes !
Réalisant ce qu'il venait de dire, le blond se rassit, rougissant de ses propos si spontanés.
Ayato ria, avant de ramasser une nouvelle lettre sur le bureau en désordre.
- Je devrais ouvrir mes cadeaux de Saint-Valentin avec toi plus souvent, c'est plus amusant que je le pensais ! Surtout pour t'entendre dire à chaque compliment dans les poèmes "J'aurais dit mieux !" !
Thomas roula des yeux, certain qu'il n'assumerait jamais cette adorable jalousie en lui, qui ne cessait de faire rire celui qu'il aimait.
Et cela lui suffisait pour apprécier ces instants ...
Fin
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Bonjour la compagnie ?
Voilà un nouveau chapitre dans un univers de l'époque victorienne, avec les personnages de Thomas et d'Ayato (pour changer mdrrr...).
La longue introduction au début vient de mon cours d'histoire, qui, a finalement servi à quelque chose dans ma vie, en plus de la culture générale...
J'hésitais à me débarrasser de cette partie, mais finalement, j'ai préféré quand même la garder !
Le thème du concours auquel je participe était la Saint-Valentin. Au départ, je voulais faire un univers moderne, dans un lycée. Mais bon, à chaque fois que je me dis "pour ce projet je vais faire un truc simple", mon imagination répond "Haha, nope."...Mais elle ne me déçoit que très rarement !
J'espère que cet OS vous aura plu, et je vous dis :
Bye byyyye
Deidachat
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