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Os 6-Pretty boy

Xdinary Heroes, GunilxJooyeon

 TW mort, manipulation, folie (esprits sensibles ou pas en état s'abstenir, c'est assez violent)

Le rire qui résonne dans la salle fait se hérisser les poils de mes bras alors que je garde comme tous mes collègues la tête basse, et un homme s'avance devant nous, son aura nous pétrifiant.

-Une cargaison entière perdue, voilà un bon travail que vous avez fait.

Des milliers de dollars partis en poussière, tout ça par la faute d'une erreur d'attention, une minuscule erreur qui va conduire à des conséquences terribles.

Le bras sanglant du patron, c'est ainsi qu'on appelle son bras droit, passe devant nous avec son sourire fou, et nous fixons tous le sol, priant pour ne pas croiser son regard qui cherche à happer les nôtres.

-Personne ne se dénonce ? rit le jeune homme, il est très jeune même, un adulte certes mais tout juste, cependant il a le pouvoir.

Comment dénoncer une erreur commune ? Un problème de communication simple....

Le silence lui répond, et son rire secoue de nouveau son échine, gelant encore plus chaque goutte de sang dans mes veines. Ses jambes passent devant moi, continuant leurs cents pas le long de la ligne que nous formons, et je frissonne au son des talons sur le béton.

Le bruit typique de la sécurité d'une arme qui saute se fait entendre, et mon souffle se coupe quand une détonation résonne, suivi d'un bruit de chute et d'un nouveau rire.

Ce rire, je n'en peux plus, il me bouffe le ventre tant il n'a rien d'humain.

L'odeur du sang envahit mes narines, et les déambulations devant nous reprennent. Il fait durer le suspens, il attend de voir qui tremblera le plus, il s'enivre de la terreur qu'il inspire. Il veut la graver dans nos regards, dans nos mains tremblantes, l'incruster en nous pour que jamais nous n'osions refaire une erreur après cela.

Et il aime ça.

Soudain, la morsure du métal brûlant relève mon visage et je me retrouve bloqué, comme pris dans les phares de ses yeux étincelants. Deux orbes fous, entièrement noirs, comme deux gouttes du sang de Lucifer tombées dans la blancheur parfaite de ses yeux.

Le canon de son arme est contre mon menton, prêt à me tuer, et l'odeur de la poudre encore chaude me pique la gorge alors qu'il sourit de toutes ses dents étincelantes en me fixant.

J'avale péniblement ma salive, la tête haute alors qu'il joue avec sa gâchette, et sa voix chante dans un nouveau rire.

-Pretty privilege here.

L'arme s'éloigne lentement de mon visage, et le coup de feu passe très proche de mon oreille, touchant la personne à côté de moi.

Le corps tombe, heurtant violemment mon flanc, et jamais je n'ai tant lacéré ma paume que lorsque la tête du mort glisse contre ma jambe avant de choir définitivement à mes pieds, teintant de rouge poisseux mes chaussures.

Je ne bouge pourtant pas malgré la tension dans chacun de mes muscles, gardant ma tête dans la position où il l'a laissé histoire qu'elle reste sur mes épaules. Respirer est compliqué dans une telle pression, et j'entends les pas cette fois derrière nous.

Tout pour traumatiser.

Il connaît très bien son jeu, et il est impossible de ne pas être pris dedans, marionnettes de sa folie, et de son travail accessoirement.

Le froissement du tissu à quelques pas de moi m'apprend qu'il s'est appuyé sur l'épaule d'un des nôtres avant de reprendre sa marche et soudain, une chaleur se colle à moi, me faisant me lâcher vivement les mains pour qu'elles tombent le long de mes cuisses.

Il s'est adossé à mes épaules, et sa tête bascule contre la mienne alors qu'il rit de nouveau, secouant ma carcasse et la sienne.

-Tell me pretty boy, who's next ?

Mes yeux s'écarquillent quand je comprends ce qu'il me demande et je ne peux répondre, la bouche soudainement aussi sèche que si j'avais avalé un pot de sel entier.

Le silence qui tombe est extrêmement court, mais surtout si lourd, faisant presque plier mes genoux sous son poids, et je sens l'homme se tourner, appuyant son torse contre moi.

-Don't be shy ~ Choose ~

Il passe un bras autour de mon ventre et me fait reculer d'un pas, écrasant sans gêne le cadavre à côté de moi.

-Si tu choisis, il sera le seul qui mourra, susurre sa voix à mon oreille, Sinon j'en massacrerai encore quatre.

Mes yeux passent sur tous les dos, de tous ces gens que je connais, un bruit strident résonnant dans mes oreilles alors que ma gorge se serre comme jamais.

Je ne suis pas un tueur. J'ai déjà vu la mort évidemment, mais jamais je ne l'ai amenée. J'ai toujours lavé ma conscience ainsi. Connard oui, mais avec espoir.

Mais je dois faire un choix.

La respiration de l'homme derrière moi me presse, et je le sens compter contre ma cuisse, repliant ses doigts dans un compte à rebours.

Alors ma main se lève d'un coup, et pointe un des hommes là-bas, un de ceux que je connais moins bien que les autres, dans un pauvre geste égoïste.

-Tu as fait ton choix, rit le bras sanglant, et je suis repoussé à mon emplacement originel avant que la balle ne parte.

Il y a un cri, et une deuxième balle, sur le même corps cette fois encore vivant. Le bruit mat d'une chute, un nouveau tir, un nouveau cri.

Quatre balles sont tirées au total, trois cris, et puis une agonie.

-J'espère que la leçon a bien été comprise, déclare d'un ton atrocement joyeux l'homme en s'éloignant, Je serai beaucoup moins clément si j'ai à la rappeler.

Il quitte le hangar avec les autres supérieurs venus, et lentement, mes jambes me lâchent.

Je tombe violemment sur le sol, la tête me tournant fort, et j'entends d'autres personnes s'effondrer à leur tour.

La bile me brûle l'oesophage mais je la retiens, restant là, incapable de bouger ou de respirer autrement que par sifflements pendant plusieurs minutes avant qu'un coup de pied n'explose mon épaule.

-Relève-toi enculé ! hurle Jinghwan en me soulevant de force, les yeux remplis de haine, T'aurais pas pu te faire tirer une balle dans la tête ?! Nan t'as choisi ! Espèce d'ordure ! Sale chien ! Tu l'as choisi ! Il l'a tué ! Espèce de salope !

Il me jette violemment en arrière et je me rééquilibre lentement, encaissant l'insulte sans pouvoir rien dire d'autre. Après tout, il a raison.

Mon souffle est rapide, comme essoufflé, et je me redresse lentement, acceptant la droite qu'il me colle furieusement.

-Quatre balles ! Il lui a mis quatre balles ! Il avait des enfants ! Espèce de...

Il vacille, incapable de finir sa phrase, rattrapé par l'émotion, et ses coups se transforment en une étreinte de désespoir.

-Pourquoi... Pourquoi lui ? Tu le connaissais pas...

Justement....

Je reste immobile, n'osant pas bouger, et Jinghwan gémit dans un sanglot.

-Ce chien... Ce chien n'est pas un homme...

Je ne dis rien, incapable de parler, écoutant sa litanie qui perd peu à peu du sens, devenant une vague de sons désespérés, sanglotés.

Tout ça pour des billets... Prendre des vies pour de l'argent...

Société qu'as-tu fait ?

Tu ne tueras point, où es-tu ?

Moral, te voilà vendu au Diable.

Je recule lentement et m'avance dans le hangar, les yeux presque clos. Je savais que je vendais la mort avec la drogue, je savais que je détruisais des vies, je ne voulais pas mais je me lavais la conscience à grands coups d'innocence, d'indulgence.

Même quand j'ai assisté à des rixes mortelles dans les ruelles de la misère, je ne me suis pas accusé d'être celui qui vendait cette drogue. Même si je tenais indirectement la gâchette de leur folie, je me dédouanais en en accusant un autre.

Mais là... Que puis-je dire ? Que je n'avais pas le choix ? Si... J'aurai pu lui dire de me tirer dessus, de prendre ma vie, mais j'ai choisi l'égoïsme, j'ai pointé un autre pour ne pas tomber.

Je titube hors de l'entrepôt et fixe le ciel noir de la nuit, aspirant les grandes goulées d'air pollué qui me parviennent.

Partons, je ne peux pas rester là, je n'y survivrai pas.

Mon dos heurte le mur et l'eau ruisselle sur mon corps épuisé alors que je pleure violemment au fond de la douche.

Je veux me laver de tout ça, me purifier de cette soirée d'horreur, mais ni l'eau ni le savon aussi sauvagement appliqués soient-ils ne pourront purger la brûlure de ma gorge coupable.

"Who's next ?''

J'entends encore sa voix fredonner ces mots contre moi, m'enfermant dans l'horreur.

"Pretty privilege"

Mon corps se lève brutalement et je sors de la douche pour m'appuyer devant mon miroir, me regardant longuement.

C'est ça qui m'a sauvé la vie ? Mon visage ?

Parce qu'il l'a trouvé beau ?

Je veux en rire, mais j'en pleure, et je me recule, sortant comme ivre de la salle de bain pour m'effondrer dans mon lit, seul dans ma souffrance.

Mes yeux se ferment et je laisse les ténèbres engloutir mon cerveau bruyant.

-C'est la fin de la vente de ce soir ? demande Minho en observant les sacs.

-Ouais, tout est vendu, réponds-je, vérifiant qu'il ne reste pas un gramme là-dedans.

-Putain, c'était interminable, soupire-t-il en se levant, Je n'en pouvais plus. Tu sais combien de soirs d'heures supp il nous reste ?

-Trop pour compter, coupé-je, froid.

-Ok ok, sois pas comme ça. Aller on se voit demain, lance-t-il alors que je m'éloigne dans la ruelle, et je le salue d'un bref geste de la main, passant le relais à deux autres hommes.

Je suis fatigué, mes insomnies teintent mon visage, mais je commence à prendre l'habitude.

Mes pas se font entendre dans la petite ruelle déserte qui mène à mon appart, et je rentre par la vieille porte en fer grinçant avant de grimper les escaliers. Je sors mes clés et déverrouille soigneusement avant de me glisser dans mon chez-moi, allumant la lumière.

Enfin, je vais pouvoir me doucher et souffler.

Je m'avance dans le salon, me dirigeant vers la salle de bain, quand je m'immobilise complètement. Quelque chose ne va pas.

Comme pour confirmer mon intuition, des pas résonnent sur le carrelage derrière moi, et je cherche brutalement une arme dans ma poche mais une main entoure la mienne, bloquant mes doigts dans ma veste.

-Bonsoir Pretty boy ~

Mon souffle se coupe quand je réalise qui est derrière moi, et mon autre main se retrouve emprisonnée dans la sienne alors qu'il se glisse contre moi.

-Tu ne me réponds pas ? Je suis déçu, je t'ai attendu juste pour entendre ta voix ~

Un frisson secoue mon dos et je souffle, la gorge serrée et la voix étouffée.

-Que me voulez-vous ?

-Oh j'aime ce que j'entends là.

Il laisse un silence, respirant lentement près de mon oreille.

-Je ne veux que discuter un peu. Alors je m'invite.

Il me lâche et je fonce vers l'avant pour fuir aussi loin que je peux, vers la cuisine.

Son rire, son putain de rire, envahit ma demeure et je l'entends s'installer dans mon canapé.

-Ramène-moi un verre d'eau s'il te plaît, Gunil ~

Mon nom a roulé dans sa bouche, savouré, et je m'arrête lentement.

Evidemment qu'il allait savoir qui j'étais... Il peut savoir tout ce qu'il veut... Ce n'est pas un petit sous-fiffre.

Je prends une profonde inspiration et attrape un verre dans le placard. Si je veux que mes proches s'en tirent, j'ai tout intérêt à être poli et gentil...

Je tire de l'eau rapidement et reviens dans le salon pour lui donner le verre.

-Installe-toi donc.

Il a un sourire très amusé sur les lèvres mais semble presque normal, assis confortablement chez moi.

Mes doigts sont pris de spasme de stress alors que je m'installe sur une chaise, assez loin de lui, même s'il reste de la place sur le canapé, et il secoue la tête, toujours détendu.

Il n'a aucune raison d'être stressé en même temps...

-La vente s'est bien passée ? demande-t-il, l'air de rien en faisant tourner le verre devant ses yeux alors que je déglutis péniblement.

-Il n'y a pas eu d'accrocs, réponds-je, la salive désagréablement acide.

-Il y a rarement d'accrocs de votre côté des ventes, les clients sont sages ou les vendeurs avisés ?

-Nous ne vendons pas les plus grosses drogues, dis-je lentement.

-Justement. Vous vendez à plus. Le cannabis, c'est ce qui part le mieux, à la plèbe et au plus offrant, vous devriez avoir le plus d'étincelles, mais bizarrement ça ne vend pas tant que ça chez vous.

Il refait tourner le verre avant de prendre une gorgée.

-Dis-moi Pretty boy, tu sais pourquoi c'est si calme ?

-Non...

Mais j'ai l'impression qu'il le sait déjà.

-Il y a un groupe rival qui vend à moins cher près d'ici.

Il se lève et marche vers moi, contournant ma chaise alors que je me sens tendu, extrêmement nerveux.

-Contre toute attente, tu es le seul qui n'ai pas eu de contacts avec eux.

Ses grandes mains se posent sur mes épaules et il se penche contre mon oreille.

-Dans ton équipe, tu es le seul qui n'est pas trahi. A moins que tu ne le caches très bien, et dans ce cas-là, bravo ~

Son souffle est chaud contre mon lobe, et il rajoute.

-Demain soir, ne va pas à l'entrepôt. Rejoins-moi directement sur le point de vente à vingt heures.

Je hoche lentement la tête, et sens sa main glisser sur mon t-shirt dans un geste bref.

-Je n'aime pas les retardataires pretty boy, sois bien à l'heure.

Et sa chaleur se recule, ses pas s'éloignent, la porte de mon appartement s'ouvre se referme.... Puis plus rien.

Je mets quelques minutes à vérifier qu'il est bien parti avant de vaciller.

Je ne la sens pas du tout cette affaire, il n'y a pas de raisons qu'il ne décide de me signaler ça... Tout du moins, pas gratuitement.

Je me lève lentement et prends son verre pour le fracasser violemment sur le sol.

Que suis-je censé faire maintenant ?! Il va clairement tous les tuer... Ils n'ont aucun moyen de fuir...

A moins... A moins que je ne leur dise...

La sensation fantôme du corps du bras sanglant contre moi me fait directement secouer la tête malgré ma bile. Ce serait un suicide de faire ça... Et même si je les prévenais, pourraient-ils même fuir ? Ne faut-il pas que je sauve ce qui peut être sauvé ?

Une pensée si égoïste... Je veux juste sauver ma peau.

Mes épaules tressautent dans un rire nerveux, et je secoue la tête. Qu'est-ce que je crois ? Que eux m'auraient aidé ? Chacun pour soi...

Oui... Fuir la culpabilité par des excuses bancales. Je veux vivre.

Ma gorge me brûle de stress et l'atroce sensation de faire une erreur pèse sur mes épaules alors que je m'avance dans la ruelle, fixant ma montre.

19:50.

Je suis en avance, ce n'est pas mon genre pourtant, mais aujourd'hui, je ne veux pas prendre la moindre seconde de retard, alors je continue mon chemin, parcourant les derniers mètres fatidiques.

L'odeur du sang me prend directement le nez alors que je suis derrière le mur me séparant du lieu de rendez-vous, et je remonte mon masque noir, assurant ma capuche avant de tourner.

Il est presque vingt heures.

Devant moi, précisément sur le lieu de la vente, plusieurs corps gisent, dans un état qui me flanquerait presque la nausée, et je m'avance lentement, malgré le sang qui s'accroche à mes semelles.

-Quel dommage de cacher ton si beau visage, rit l'homme debout au milieu du massacre, ajustant ses gants noirs.

Il n'est pas seul, il est rarement seul, de nombreux hommes de main clairement surentraînés se trouvent autour de lui ou à proximité, et ils sont plusieurs à m'observer alors qu'il vient vers moi.

-Tu es à l'heure, c'est bien. Quoiqu'un peu en avance.

Il s'arrête devant moi et m'offre un de ses sourires qui me glacent le sang.

-Tu as bien tenu ta langue.

Sa main monte vers mon visage, et il passe son pouce ganté, couvert de sang, contre mon masque, ses yeux se plongeant dans les miens.

-J'ai hâte de voir ce que tu vas valoir Gunil ~ Ne me déçois pas.

La sueur qui coule dans mon dos est gelée, et je sens sa deuxième main glisser dans ma nuque, sous la capuche, terrifiante.

Ce n'est que trop tard que je réalise la morsure du métal qui me fait brutalement vacillé, la vision trouble et le coeur s'accélérant.

Qu'est-ce qu'il a fait ?

Ses bras retiennent mon corps tombant, soudainement faible, et je l'entends rire avant de sombrer dans l'obscurité.

Ma tête me vrille encore quand je me réveille, torse-nu dans une chambre minuscule, rudimentaire, et je me redresse brutalement, paniqué.

Où suis-je ?!

-Ses bilans sont très positifs, il n'a aucun problème de santé, est de constitution robuste bien qu'il manque de sommeil et est physiquement totalement apte pour ces fonctions.

-Bien, il ne devrait pas tarder à s'éveiller si ce n'est pas déjà fait.

Deux voix résonnent, dont une m'est connue. Pour cause, c'est celle du bras sanglant qui vient d'ouvrir la porte.

Ma respiration est rapide alors que je fixe les deux hommes qui viennent de rentrer, debout sur mes jambes malgré mes poignets liés dans mon dos, et celui en blouse blanche me jauge.

-Il a récupéré vite, définitivement solide.

Le grand jeune homme se rapproche de moi, souriant comme d'habitude, et je sens ses yeux glisser avidement sur mon corps, me détaillant sans aucun discrétion.

-Still a pretty privilege.

Mes muscles se tendent quand il se trouve bien trop proche de moi, sa chaleur se répercutant sur ma peau nue, et sa main glisse sur mon dos, prenant bien son temps.

Ses doigts trainent tranquillement le long de ma colonne vertébrale sans que je ne puisse fuir avant de se refermer brutalement sur mes poignets pour trancher, avec une lame que je n'avais ni vu ni senti, mes liens.

Il reste face à moi malgré mes mains libérées, et il sourit en attrapant mon regard de ses putains d'yeux fous. La peau de ses phalanges court sur ma nuque et il murmure.

-Attaque-moi, montre-moi ce que tu as dans le ventre.

Pardon ?

Un éclair d'incompréhension passe dans mes yeux et je recule légèrement. Comment ça l'attaquer ? Je ne veux pas crever.

Son regard cependant est toujours dans le mien, et il m'ordonne clairement de faire ce qu'on m'a dit. Alors, lentement, je me mets en mouvement, lui tournant autour avec prudence.

Je sais me battre, j'ai pratiqué plusieurs sports de combat et souvent participé à des rixes dans la rue avec des ivrognes, des drogués ou des enculés, mais jamais je n'ai été confronté à un adversaire de sa trempe.

Même sans prendre en compte les rumeurs, je vois bien qu'il est redoutable. Sa musculature est déjà un bon exemple. Il est épais, mais pas trop, clairement souple, et chacun de ses muscles visibles est d'une nervosité absolument parfaite, signe de son niveau.

Il est léger sur ses appuis, en permanence, même quand il semble s'ancrer fermement sur ses deux jambes, et il est clairement attentif en permanence à chaque son, je le vois dans la façon dont il me suit des yeux.

Ses poings sont ouverts, les doigts reposant machinalement le long de ses cuisses et il n'est pas immobile, esquissant des gestes classiques de repos.

Ce qui le rend redoutable cependant, en plus de son supposé niveau, c'est son aisance à se glisser, même sans bouger, dans son espace.

Il peut être partout à la fois en une fraction de secondes, ça j'en suis sûr, je l'ai déjà vu bouger et c'est absolument terrifiant. Impossible de prédire ses actions, ou bien il faudrait que je sache décrypter à la perfection SON langage corporel personnel, chose que je ne peux pas faire.

Or il va bien falloir que j'attaque ou bien je risque encore plus gros.

Alors lentement, je me décide à bondir, visant son épaule, et je n'ai que le temps de me projeter sur le côté pour esquiver sa riposte.

Putain, il est beaucoup plus rapide que ce que je ne pensais.

Ma concentration est à son comble, et je le suis du regard en me glissant sur le côté, cherchant ne serait-ce qu'une faille dans sa défense, mais le problème est que je ne la vois pas... Il est tellement détendu, tout en restant une boule de nerfs, qu'il m'est impossible de trouver précisément un point faible.

Il m'offre trop de possibilités qu'il peut totalement retourner à son avantage, et il rit fortement de mon hésitation avant de soudain rentrer dans l'offensive.

Je n'ai pas le temps d'esquiver le premier coup qui rencontre mon épaule, et je saute en arrière avant de glisser sur le côté. Il a pertinemment visé un endroit qui ne me paralyserai pas, il veut continuer la lutte, et je serre les dents.

C'est un jeu du chat et de la souris dans lequel j'ai intérêt de me concentrer.

Peu à peu, mes sens semblent s'accroître alors que je retrouve mes réflexes et je me redresse, assouplissant mes pas.

Je vais difficilement pouvoir le déstabiliser, il est clairement capable de lire mes actions, et je ne vois pas comment l'en empêcher. Agir de façon désordonnée ne le désarçonnera pas, c'est un art qu'il maitrise puisqu'il le pratique clairement, ses gestes ne semblant pas avoir de cohérence entre eux, pourtant ils sont une chorégraphie redoutable.

Alors on va tenter du classique. Si je ne peux pas le battre, je dois quand même déployer mon jeu.

D'un bond, j'attaque, poing en avant vers son thorax, et j'esquive sa main qui fond sur mon visage avant de sentir mon souffle se couper brutalement, son genou ayant heurter mon ventre que j'ai découvert, trop concentré sur sa défense pour me pencher sur la mienne.

Je me redresse le plus vite possible, n'échappant cependant pas aux coups sur mon échine, et je reprends des distances alors qu'il rit.

-Pretty boy, concentre veux-tu ~ Tu me déçois ~

J'agis comme un débutant, ça ne va pas.

Dois-je cependant me contenter de lui tourner autour dans cet espace restreint sans même me servir de mon environnement ? Dois-je être fair-play ?

Il n'a rien précisé.

Lentement, j'élargis mon cercle pour raser autant que possible les murs, prenant un risque considérable.

S'il me coince contre le placo, je suis mort, mais c'est le seul moyen que j'ai de me rapprocher discrètement du lit.

Finalement, je réussis à passer près du matelas, mais je me force à continuer à tourner.


Ce n'est pas encore le moment.

A la porte, le médecin est appuyé, l'air sérieux, mais je ne lui prête guère d'attention, il n'est que secondaire ici.

J'attrape brutalement la couverture et me rue sur mon adversaire pour la lui jeter dessus sans prévenir, coupant sa visibilité.

Je me déploie aussi vite que je le peux pour me ruer au sol, fonçant dans ses jambes, décider à frapper.

La douleur qui se répand dans mon dos est terrible, et je roule violemment sur le côté, paralysé par la souffrance qui se répand peu à peu alors que l'homme sourit, jouant de ses longs doigts devant mes yeux.

-Tu peux faire mieux ~

Sa main attrape ma gorge et il me lève d'un poigne de fer, rapprochant son visage du mien.

-Tu sais faire mieux n'est-ce pas Gunil ?

Je peine à déglutir contre sa paume, mais je hoche lentement la tête, répondant par un son étranglé.

-Nous remettrons ça ~

Son souffle vient s'échouer contre mon oreille, dans une sensation qui va finir familière à ce rythme, et sa voix susurre, aussi dangereuse que belle.

-Je vais faire de toi un élite pretty boy. Tu as le potentiel que je cherche.

-Relève-toi ! Dépêche-toi ! On recommence !

Le souffle court, je me redresse, face à Hoseok qui relance directement un round, et je recommence à boxer avec hargne, cherchant le point faible de mon entraineur.

Depuis un mois, je ne fais que ça, m'entrainer.

Kidnappé par Jooyeon, j'ai appris par les autres que c'était son nom, je me suis retrouvé à subir les formations intensives des élites.

Les entraineurs étaient déconcertés de savoir que j'étais techniquement le poulain du bras sanglant, mais aucun d'eux n'étaient non plus choqués. Il est cinglé mais il a l'oeil, c'est ce que dit toujours Hoseok.

Au programme de mon entrainement, des classiques comme de la lutte, de la boxe, du tir, de la course, enfin bref du sport, mais aussi de l'économie, moi qui n'aimait pas les maths au lycée déjà j'en ai marre, de la danse, je sais pas pourquoi mais ils ont dit que c'était important, des cours de manière, du camouflage, de la cuisine, de l'acting et des nuits blanches.

Oui, oui, j'ai des cours de nuit blanche une fois par semaine, et ils ne sont pas simples.

Je suis rarement entouré d'autres personnes que les entraineurs, ne voyant quasiment pas les autres en formation. Ma chambre est isolée des autres, et je déteste y aller.

Jooyeon a la fâcheuse manie de s'y trouver quand je ne m'y attends pas, c'est atroce.

Je déteste cet homme autant qu'il me terrifie.

Ici, les autres l'admirent. Ils le considèrent comme un génie malgré le fait qu'il soit complètement fou. Il est quasiment impossible de rivaliser avec ce type.

C'est une machine à tuer.

-Ok, va boire c'est pas mal, lâche finalement la masse de muscles alors que je reprends mon souffle.

Je descends du ring et me dirige vers le banc où se trouve ma bouteille, assoiffé. Je transpire énormément pendant ces séances, elles demandent une quantité démente d'énergie.

J'attrape ma gourde et commence à la porter à mes lèvres avant de brutalement voler en avant, mes bras se coinçant dans mon dos alors qu'un poids s'y appuie.

-Ne relâche jamais ta concentration, gronde Chanyeol, l'entraineur de lutte, me tordant les coudes, N'importe qui aurait pu te tuer.

Sa poigne se relâche et je me redresse avant qu'une lame ne se plante dans le mur, éraflant le géant qui se fige.

-Pourquoi l'as-tu relâché ?

C'est Jooyeon.

-Il méritait de se prendre une correction, sourit l'homme en se rapprochant, pourtant sérieux, Il a baissé sa garde et n'a même pas été fichu de se défaire de ta prise par lui-même.

Je me suis relevé aussi vite que possible et j'ai instinctivement remonté ma garde alors que le méché s'avance vers moi, contournant Chanyeol qui ne bronche plus du tout.

-Pretty boy, je suis déçu. Améliore-toi.

Son corps est proche du mien, et je vois le coup venir, il n'essaie pas de le cacher.

Je pare à deux bras comme si c'était un impact de Hoseok, et serre les dents sous la douleur. Ce type a un don pour atteindre les nerfs.

Je prends mes distances d'un bond, slalomant entre les obstacles pour mettre de la distance entre lui et moi.

Je sais que plus longtemps je lui résiste, moins violente sera la punition, et si j'arrive à le toucher vraiment, chose qui n'est jamais arrivé, je pourrai peut-être même y échapper.

Sinon je payerai le prix de sa présence.

C'est encore et toujours ce jeu du chat et de la souris, toujours ce cache-cache qui ne fait rire que lui, mais son rire a le pouvoir.

Cet homme n'est que Lucifer incarné. Une beauté absolument angélique détruite par la folie du sang, brûlée par le sang qui tâche ses mains et un charme fou à sa manière. Au fond, son charisme happe les plus faibles comme les plus forts.

Personne ne résiste à l'appel de la mort.

Je bondis brutalement pour éviter son attaque et tente de riposter avant de battre en retrait, sous les regards nerveux de Chanyeol et de Hoseok.

-Cesse donc de fuir. Il ne me semble pas qu'on t'ai appris à être une victime.

Je pousse brutalement le punching ball quand il parle, le visant de toute mes forces, et le bruit mat annonce que j'ai touché ma cible.

Maintenant.

Je bondis brutalement, et me jette sur lui, sans baisser ma garde, prêt à frapper. Son corps est parfaitement dans le bon axe, mais c'est trop facile pour ne pas être un piège.

Je dévie au dernier moment ma trajectoire pour éviter le coup qu'il lance, mais vole brutalement.

La vitesse de ce type est inhumaine. Comment a-t-il pu changer son appui si vite ?!

Mon corps roule violemment sur le sol, entrainant le sien dans la chute, j'ai réussi par miracle à emmêler nos jambes. Le roulé-boulé est bref, il l'a stabilisé à toute vitesse, et je balance mes deux pieds vers son ventre, cherchant à me dégager aussi vite.

Si proche de lui, je ne peux pas m'en sortir.

Mes jambes sont violemment basculées en haut alors qu'il se relève d'un saut souple, récupérant mes pieds au vol, et je tente de me dégager, trop tard.

Je me retrouve plaqué au mur et il me bloque fermement, me dominant de tout son charisme.

-Tu joues mieux, mais tu refais les mêmes erreurs.

Il attrape ma veste et m'attache les bras, me laissant choir au sol avant de détacher sa ceinture.

Celle-là va faire mal. Très mal.

Le cuir mord une première fois mon dos, et je retiens un hurlement de douleur, ma mâchoire se serrant. Je risque de me mordre la langue. Deuxième claquement, regard désolé de Hoseok, sensation du sang qui coule sur ma peau.

Je ne dois pas crier, je ne dois pas pleurer, je ne dois pas être faible, ou la punition sera pire. Jooyeon peut être inventif quand il veut.

Les coups partent, encore et encore, j'en perds le compte même s'il ne doit pas frapper tant que ça, et après quelques minutes, je suis totalement gisant au sol, la mâchoire entrouverte, les lèvres entièrement déchiquetée et le dos en lambeaux.

Jooyeon remet calmement sa ceinture et il se penche sur moi.

-Apprend de tes erreurs tant que je les tolère encore. Je ne serai pas toujours si gentil.

Quand il s'agit de mon apprentissage, il n'a rien de sa folie joueuse... Il paraitrait presque normal sans cette violence démente.

Ses pas s'éloignent finalement, et je sens Hoseok se rapprocher rapidement pour détacher mes bras.

-Il a été clément, tu es vraiment son poulain, lâche Chanyeol en restant à distance, J'espère que tu te rends compte de la responsabilité que tu as, et de la chance qu'il soit moins violent que d'habitude. Tout le monde sait qu'il t'a choisi, tu portes sa réputation dans un sens, et ce n'est pas ton pretty privilege qui te sauvera si tu touches à son image.

Hoseok est moins agressif, il me relève malgré la douleur qui me déchire, et il soupire.

-Tu as fait des erreurs que tu ne fais pas d'habitude quand tu es fasses à lui. Tu n'as rien fait de correct, il n'a même pas pris la peine de se concentrer pour te battre. Tu paniques beaucoup trop, ça t'aveugle, tu cherches à fuir les conséquences plus que d'obtenir un résultat. Ce n'est pas un adversaire contre qui tu peux faire de si grossières erreurs, et si lui ne t'a tué, d'autres le feront si tu te comportes comme ça.

Tuer... Parfois je me demande si je n'aurai pas mieux fait de me faire tirer dessus la première fois que je l'ai vu.

Avant de devoir tirer sur quelqu'un moi-même.

Complètement ensanglanté, je suis emmené par Hoseok dans ma chambre où il me laisse seul, avec du désinfectant.

C'est la règle, tu es puni, tu te soignes seul.

Lentement, j'attrape le désinfectant, et ne prends pas la peine de prendre un coton. Je suis à peine capable de bouger correctement mes bras, je ne pourrai pas appliquer correctement le liquide sur mes plaies.

Lentement, j'ouvre la bouteille et en verse en partie le contenu sur mon dos. La morsure du liquide sur mes plaies béantes me fait pousser un gémissement de souffrance, et je laisse les larmes coulées.

Je n'ai jamais voulu ça. Je voulais juste vivre. Je voulais juste fuir l'enfer de ma vie d'avant.

Mais j'ai sombré entre les mains de Lucifer en voulant échapper à ce qui lui ressemblait.

Mon corps vacille et je tombe sur le lit, tressautant légèrement de douleur, je ne peux rien faire d'autre qu'attendre désormais.

Attendre que le sommeil me fasse oublier.

Une brûlure dans mon dos me tire des bras de Morphée et je mets quelques secondes à sentir ce qu'il se passe.

Un coton humide glisse le long de mes plaies, et je me demande qui est assez fou pour braver les règles. Pas Hoseok et encore moins Chanyeol.

Je peine à bouger mes bras pour me redresser, mais une main me force à rester immobile.

-Qu-

Je suis coupé dans ma phrase par une pression forte sur une des plaies, et la voix chantante de Jooyeon vient me faire ouvrir les yeux en grand d'incompréhension.

-Pretty boy, veux-tu encore souffrir ~?

Que fait-il là ?!

Sa main glisse sur la chute de mes reins, nettoyant une des marques qui s'y est échouée, et je sens son poids changer de position sur le matelas.

-Quel dommage d'avoir dû t'abimer de la sorte ~ Ton joli dos.

Mes dents se serrent, encore et toujours son intérêt pour mon apparence, son pretty privilege qui m'a valu de finir ici au lieu d'être abattu sur le coup.

Comme si je n'étais qu'une apparence.

Enfin que suis-je d'autre pour lui ? Un visage, un corps, dont il se délecte de la vue et qu'il se plait à effleurer de temps à autre.

Le rire nerveux qui secoue mes épaules est atrocement douloureux, mais il est incontrôlable, prenant de l'ampleur dans mon thorax, devenant peu à peu hystérique, complètement fou.

Je ris ce que je ne peux pas pleurer, et c'est terrifiant mais je ne peux pas arrêter, la tête basculant en arrière dans cette hilarité pitoyable.

Mes cheveux sont soudain bloqués par une poigne de fer et je sens un liquide glacé être jeté sur mon visage, arrêtant brutalement mon rire alors que Jooyeon me garde immobile.

-Tu es bien plus fragile que je ne le pensais.

-Pourquoi ? demandé-je soudain, Pourquoi moi ? Pourquoi ce putain de "pretty privilege" ? Y a des dizaines de gars prêts à s'entretuer pour cette place.

C'est le rire du bras sanglant qui résonne dans la chambre cette fois, et je sens ses doigts caresser ma nuque.

-Si ce n'était qu'un pretty privilege Gunil, je t'aurai juste baisé à mort au fond de cet entrepôt.

Un frisson nerveux secoue mon dos douloureux alors qu'il continue ses touchés légers mais insistants. Il ne va pas me répondre je le sens.

-Qu'est-ce que c'est alors ? Un dealer sans autre expérience n'a rien à foutre ici.

Son silence, chose rare, me répond simplement, et ses doigts serrent ma nuque. Il a ma vie entre les mains, mais depuis la première fois que je l'ai vu, il l'a de toute manière. Je n'ai aucune moyen d'y échapper.

Je veux vivre mais ce n'est pas moi qui décide.

Le blanc dure quelques minutes, durant lesquelles ses doigts n'ont cesse de parcourir ma nuque, et finalement, il se lève.

-A partir de maintenant, une fois par semaine tu t'entraîneras avec moi. Je vais te les faire faire ces progrès.

Mon corps roule au sol alors que Jooyeon me surplombe, l'air exaspéré.

-Encore et toujours cette même erreur. Tu sais pourtant parfaitement analyser ton adversaire, et tu es capable de te concentrer sur plusieurs choses à la fois, mais dès que tu attaques tu baisses quelque chose, ta garde, ta concentration, ta force... Tu n'as même pas ce problème à la boxe ou à la lutte, tu perds tes moyens dès que tu te bats en ma présence.

Je me relève et garde la tête basse alors qu'il est clairement exaspéré. Je dois admettre que j'ai fait des progrès radicaux depuis qu'il a pris en partie en charge mon entrainement.

En même temps, les souvenirs des punitions cuisantes ne me donnent pas envie de faire des erreurs, encore moins depuis que j'ai découvert à quel point Jooyeon était doué pour humilier les gens quand il a descendu par la parole, sa langue est acérée, d'autres apprentis.

Tout ce qui fait souffrir, il le maitrise, et je n'ai pas envie de découvrir l'intégralité de son talent.

-Si tu perds tes moyens dès qu'un adversaire te fait peur ou a de l'autorité sur toi, tu vas mourir dès ta première vraie confrontation, lâche-t-il en me faisant signe de me remettre en position.

Je hoche la tête, conscient de ça, et il dit.

-Je n'investis pas mon temps en toi pour rien Gunil, je veux des résultats et je ne continuerai pas mon investissement à l'infini. Tu sais comment ça se finira pour toi si tu ne te prends pas en main.

Son corps se rapproche du mien, et il remet en place mes cheveux.

-Je suis patient avec toi pretty boy.

Habitué à ses gestes au semblant de douceur qu'il a après tout depuis notre première rencontre, je ne bronche plus, ne me raidissant plus à ce contact auquel on s'habitue finalement.

-Tu vaux plus que ce que tu me montres.

Je vacille, le sang maculant ma tempe et fort probablement le reste de mon visage, et je recharge mon revolver, le coeur battant douloureusement.

J'ai tué... J'ai pris une vie... Celle d'un parfait inconnu mais une vie quand même.

Mes doigts tremblent sur la gâchette alors que je fixe, horrifié de moi-même le cadavre gisant devant moi. Je ne suis qu'un monstre.

J'ai à jamais perdu mes dernières gouttes d'innocence, la dernière lumière en moi, je ne suis devenu qu'un monstre comme les autres de ce monde.

Le constat le plus amer, c'est qu'au fond, je suis plus horrifié des conséquences sur moi-même de mon acte que de celles pour celui que j'ai tué.

Il n'y a rien de plus égoïste que la culpabilité au fond.

Mes jambes me portent sans que je n'y fasse réellement attention, zombie dans ce dédale de mort, vers le point de rendez-vous où Chanyeol m'attend, et je m'arrête devant le géant qui éteint sa cigarette.

-Tu as été brouillon sur la fin. Tu aurais dû vérifier qu'il était bien mort de façon plus approfondie.

Ses mots froids me parviennent sans être analysés dans le brouillard de mon esprit où tout se mêle, culpabilité, regret, souffrance, ironie, nervosité, haine, colère, tristesse, peur...

Un palmarès infernal d'émotions négatives qui n'engendre que folie en moi. Je suis complètement déconnecté, mes yeux fixant l'entraineur sans vraiment le voir.

J'aurai pu le tuer lui comme j'ai tué cet homme. Qu'est-ce qui arrête la main d'un tueur ? Qu'est-ce qui rend une vie plus précieuse qu'une autre ? Qu'est-ce qui m'empêche de ravir un autre souffle ?

Un son aigu qui n'existe que pour moi me vrille le crâne alors que je reste figé à écouter sans entendre les reproches de Chanyeol.

Qu'est-ce qui me différencie de Jooyeon désormais ? En quoi suis-je différent de ce monstre ? J'ai agit comme lui. J'ai levé mon arme, et j'ai tiré. Et je le referai, je le sais.

Je tuerai jusqu'à ce que cela devienne une habitude, un geste aussi simple qu'écraser un vulgaire insecte. Je réduirai la vie humaine à une pacotille que l'on peut à réduire à néant pour son bon plaisir ou simplement parce qu'on nous l'ordonne. C'est ce qu'ils font tous.

"Les quatre premiers sont les plus durs, après ce n'est qu'une formalité. "

C'est ce que m'a dit Hoseok, et je ne peux que le croire.

J'ai vu l'indifférence sur les traits des bourreaux lors des exécutions auxquelles j'ai été forcé d'assister, je sais à quelle vitesse ils avaient oublié leur acte, ce n'est qu'une routine comme une autre, quelque chose que l'on consigne dans un dossier et qu'on efface.

La seule vie qui nous importe réellement est la nôtre après cela. Peu importe le respect, l'amour, l'admiration que l'on porte à une personne, au fond si on tire une fois, ils ne deviendront qu'une cible comme les autres.

Je veux pleurer, je veux me sentir humain. Je veux sentir que je ne suis pas encore à ce stade là, mais tout n'est que brouillard, flou, et surtout automatisme.

Je ne peux pleurer que sous la douche, là où personne ne voit mes larmes.

Et qu'ai-je à pleurer ? Le deuil d'un inconnu ? Non... La perte de mes bribes de moral, l'abandon à la docilité, la mécanisation que je subis.

Le seul deuil que j'ai à faire, c'est le mien.

Je m'enterre tout seul, perdant Gunil pour me résumer à Pretty boy. Mais après tout, qui se soucie de cette perte ? Plus je suis la machine qu'ils veulent plus ils sont satisfaits. Gunil n'est rien après tout qu'un obstacle.

L'humain dérange, on le détruit sous toutes ses formes.

Que puis-je faire pour me raccrocher à moi-même ? Je n'ai plus de prise sur celui que je ne suis plus, il m'a échappé et n'a laissé derrière lui qu'une ombre à l'âme explosée, consumé par le diable qui se délecte de son amertume, du goût des larmes qui ne coulent plus.

La seule chose qui anime encore mon corps, c'est cette volonté égoïste, vide de sens désormais, de vivre.

Rien ne me rattache à la vie et pourtant je me raccroche à l'ombre d'un espoir qui n'existe plus.

Je veux vivre hurlait Gunil.

Jooyeon l'a tué.

Chanyeol l'a tué.

Hoseok l'a tué.

Je l'ai tué.

Chanyeol se met en mouvement, et tel un fantôme, errant, je suis ses pas assurés qui me mènent vers la sortie.

Le trajet du retour est perdu dans le brouillard, les paroles de mes mentors ne sont qu'un vent lointain qu'on entend sans percevoir, et quand enfin je me retrouve seul, dans ma chambre, je vérifie trois fois que Jooyeon n'y est pas.

Sa trace n'est nulle part. Heureusement.

Une fois que je suis assuré de ma solitude, je m'effondre brutalement sur le sol et pousse un cri muet, ma bouche ouverte dans une complainte silencieuse, bruyante dans mon esprit, imperceptible dehors.

Mon agonie qui se débat encore.

Mes joues se couvrent de larmes, un torrent de larmes, et je donne un furieux coup de poing dans l'air, me battant avec mes propres démons.

Il n'y a que dans les films que le héros résiste à la corruption, il n'y a que dans les films qu'il est assez fort pour ça.

Je me relève finalement et me traine dans la salle de bains pour fixer ce reflet qui me dégoûte.

-Pretty privilege ? Où est-il ?

Mon visage est le même qu'avant, mais il a perdu la vie qui l'animait.

Je crois que c'est la différence entre moi et Jooyeon.

Lui est vivant et moi je suis mort.

Je retire furieusement mes vêtements et ouvre la douche pour y entrer, allumant directement l'eau sur ma carcasse vide.

Que suis-je désormais ? Qui suis-je ? Je ne suis pas Gunil, mais son corps vit encore n'est-ce pas ? Alors qui l'habite ? Quel démon suis-je ?

N'en suis-je qu'un ou le tout d'un million d'entre eux ?

Au fond cela importe-t-il ? Le résultat n'est-il pas le même ? Je suis un inconnu à moi-même, une ombre vide de sens qui court après un fantôme, répondant au nom d'un autre.

Il n'a fallu que quelques mois pour tuer Gunil, était-il si faible que ce que Jooyeon disait ?

Non. Jooyeon ne voyait que Pretty boy, Gunil n'a jamais existé pour lui. Je ne veux pas avoir existé à ses yeux.

J'aurai dû porter un masque ce soir là, à l'entrepôt. Peut-être aurais-je été tué, peut-être m'aurait-il simplement ignoré, mais j'aurais fini bien mieux qu'ici. Mais penser cela, ce n'est que du vent, on ne change le passé qu'en mensonges, ses conséquences restent.

Que me reste-t-il aujourd'hui ? Je n'ai plus ni valeurs, ni moral, je suis seul, totalement seul, je suis mort de l'intérieur, pourtant je suis encore là, vivant sans vie.

Tout ça n'a aucun sens, tout ce qui se passe dans ma tête n'a aucun sens. Tout va bien trop vite, tout se mélange, tout bourdonne, murmure, hurle, susurre, dans une cacophonie dont je ne peux extraire que des monceaux de pensées sombres sans réel rapport entre eux.

J'ai l'impression de me noyer dans mon cerveau, un cri en amenant un autre, une idée monstrueuse en faisant apparaitre mille, et surtout le rire fou de Jooyeon qui est gravé dans ma mémoire, raisonnant en musique de fond, comme un disque rayé qui tourne en boucle jusqu'à nous faire entrer sa mélodie de démence dans le crâne. Une mélodie dont on ne peut plus se débarasser.

Cette mélodie qui m'a empoisonné dès la première fois où je l'ai entendu.

-GUNIL !

Je suis soudain poussé hors de mes pensées quasiment littéralement et l'eau se coupe brutalement alors que je tombe, mes jambes cédant d'un coup.

La vue floutée par toute la condensation qui s'est accumulée sur mes cils et les larmes mêlées à l'eau trop chaude, je vois une silhouette me surplomber, familière.

Je prends peu à peu conscience de l'état dans lequel je suis, la peau cramoisie à cause de l'eau brûlante, la respiration tellement sifflante qu'elle ne m'apporte presque pas d'air, chaque muscle dans une tension intense et une difficulté à me reconnecter à ce qui m'entoure.

Je sens un bras passer sous les miens, me relevant malgré les spasmes de mes jambes, et je suis extirpé de la douche, découvrant la salle de bains inondée en partie. Combien de temps ai-je passé complètement ailleurs ?

-Sèche-toi.

Je tourne, hagard, la tête vers Jooyeon qui s'est dessiné à côté de moi, mais je n'arrive pas à comprendre ce qu'il me demande, peinant déjà à savoir s'il est vraiment là ou non.

-Gunil, tu m'entends ?

Les sons repartent au second plan alors que je sens ma vue redevenir trouble, se focalisant sur un élément quelconque du décor.

La brûlure sourde qui se répand dans ma joue me ramène violemment à la réalité, me sortant de ma transe, et je tourne brutalement la tête en tout sens.

Une main serre fortement mon menton, immobilisant mon visage, et les yeux familiers de Jooyeon s'enfoncent dans les miens, plus sombres encore que d'habitude.

-Réveille-toi.

Le souffle court, la poitrine se soulevant irrégulièrement de façon bruyante, je sens la terreur m'envahir, sourde et incontrôlable, et je tente de fuir, complètement sonné.

La main de Jooyeon ne me relâche pourtant pas et il me fait reculé jusqu'à m'acculer au mur alors que je cris presque d'une peur irrationnelle, complètement folle.

-Gunil arrête ça. Gunil !

Ses lèvres bougent, sa voix me parvient dans un brouhaha énervé qui empire mon épouvante et je griffe frénétiquement ses bras pour sortir, incapable de réfléchir ou d'agir logiquement.

Mourir, je ne veux pas mourir ! Il veut me tuer !

Mon cri se coupe d'un coup, interrompu par une sensation humide contre mes lèvres déchiquetées, et cela me fait cette fois définitivement l'effet d'une douche froide.

Je pousse de toutes mes forces Jooyeon qui m'embrasse et m'essuie brutalement la bouche.

-C'est bon, tu es calmé ?

Je le fixe, découvrant que j'ai griffé à sang ses bras, complètement tiré ses longs cheveux sombres et clairement frappé ses jambes. Pourtant, en dehors de la morsure encore cuisante de sa gifle, je ne sens pas de représailles sur mon corps.

-Gunil réponds-moi.

-Oui.

Ma voix est cassée, ce n'est qu'un filet épuisé, et il me tend une serviette.

-Sèche-toi et va t'habiller.

Dans tous ça, je n'avais même pas vu que j'étais nu.

Silencieusement, j'attrape le tissu éponge et m'essuie rapidement alors qu'il quitte la pièce, avant de partir rapidement mettre un short et un t-shirt, m'effondrant sur mon lit sous le regard de Jooyeon, incapable d'adopter un autre comportement que celui-là.

Il se rapproche de ma couche et s'installe à côté.

-Tu as juste tiré une balle, comment cela peut-il te mettre dans un tel état ? grogne-t-il, sa main passant dans mes cheveux.

Il ne ressent pas ça, il ne ressent pas lui.

-Tu ne sauras jamais... Tu es trop fou pour ça.

Ma parole est libre, je suis bien trop épuisé et perturbé pour mettre le moindre filtre dans ma parole.

-Tu vas bientôt devenir plus cinglé que moi, répond simplement le plus jeune.

Le pire est qu'il a raison.

-T'es content pas vrai ? T'as testé une nouvelle manière de tuer.

Ses doigts s'arrêtent dans mes cheveux et il se penche sur moi, un air perturbé sur son visage malgré ses yeux impassibles.

-Tu penses que je n'ai jamais tué par balle ? Tu perds la tête à ce point ?

-Non, ce n'est pas ça.

Je ferme les yeux et souffle.

-C'est moi que tu as tué.

-Tu délires encore ?

Je me redresse lentement et plonge, pour la première fois de moi-même, mon regard dans le sien.

-Tu m'as tué Jooyeon, si tu tiens le compte de tes victimes, tu peux m'y inscrire.

Un rire secoue son corps, et je ne peux pas m'empêcher de frissonner, qu'importe combien le temps passe, ce son m'est toujours insupportable.

-Gunil. Tu ne peux pas fuir en te cachant au fond de toi. Je ne te laisserai pas faire.

Il attrape mon visage et sourit encore plus.

-Je n'ai jamais rien voulu autant que je te veux toi. Mais je ne peux pas t'avoir comme ça, je veux que tu viennes toi, que tu sois à moi. Jamais je ne te laisserai disparaitre.

Ses yeux sont déments, allumés comme je ne les ai jamais vu, et la sueur froide revient dans mon dos. Jamais il n'a paru si fou que là.

-Je n'ai jamais eu un humain pour moi, aucun d'entre vous n'a voulu rester avec moi. Bande de vermines insignifiantes. Je les ai tué.

Il rit encore et caresse mon visage encore.

-Mais toi je te veux, et tu es venu. Tu ne voulais pas mais tu es venu. Tu m'étais destiné, tu ne dois être qu'à moi. Tu n'es pas une de ces misérables choses pretty boy. Tu es faible, tu es fragile, mais tu n'es pas comme eux.

Il arbore encore cet air de folie.

-Gunil, tu n'as pas idée de combien j'ai cherché avant de te trouver.

-Tu es complètement cinglé, murmuré-je, essayant de reculer contre le matelas pour disparaitre à ses yeux étincelants.

-Je suis plus que fou, répond-t-il, Mais qu'importe, la folie régit le monde.

Quelque chose a disjoncté dans sa tête, c'est pas possible.

Je tâtonne à la recherche de ma bouteille d'eau, et j'attrape le récipient tremblant alors qu'il rit encore, déconnecté comme jamais de son environnement.

Je ne l'ai jamais vu déconnecter.

Je ne veux jamais revoir ça.

Le liquide part violemment sur son visage, et il semble s'arrêter d'un coup, comme une réinitialisation du programme.

Une seconde plus tard, et son visage est redevenu comme avant, mais sa langue tique.

-Putain...

Il se recule légèrement et m'observe.

-C'est un miracle que tu sois en vie.

Il tourne légèrement la tête et soupire.

-Tu me fais basculer si facilement Gunil, tu n'as pas idée.

Ses doigts frôlent ma joue et il sourit, il sourit toujours trop.

-Je ne pourrai même pas appuyer sur la gâchette. Ce n'est même pas ce que vous appelez amour, je suis juste obsédé. Mais qu'importe bien ce que c'est, le résultat est le même.

-Jooyeon, laisse-moi partir. Laisse-moi vivre.

Il secoue la tête et rit, toujours rire.

-Pretty boy, do you think i can be nice ?

Sa main presse ma joue, et il souffle finalement d'une voix plus sérieuse.

-Je ne te laisserai pas partir. Je ne peux pas. Je te veux plus que je n'ai jamais rien voulu je t'ai dit, et je ne suis pas comme vous. Je te garderai en oiseau dans sa cage même si tu resteras hors de ma portée.

Il secoue de nouveau la tête et recule pour revenir.

-Je n'ai que deux obsessions Gunil. La mort et toi. Sans obsession je ne suis rien, tu es mon centre de gravité désormais, et je te garderai.

Je sens un rire mourir dans mon thorax.

Deux égoïstes chacun à leur manière.

Au fond, ce qui me flanque la gerbe, c'est qu'il finira par m'être indispensable, que je vais me raccrocher à lui, à cette attention obsessionnelle, à sa folie et à son assentiment.

Mais encore une fois, je n'ai pas le choix. Je n'ai que l'illusion de pouvoir choisir de le repousser indéfiniment, alors qu'au fond, je suis déjà au creux de sa paume.

Un rire nerveux secoue ma carcasse, un rire de dépit, et le sien s'y mêle, créant une mélodie discordante.


Alors, je considère ça (pour le moment) comme un de mes meilleurs textes. C'est extrêmement violent, je l'entends, j'ai rarement écrit quelque chose d'une telle agressivité avant mais ça a niqué la gueule à ma page blanche. 

J'espère que l'os vous a plu.

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