eyesmiles ; c.jin
[SKZ + CHANGJIN]
— FLUFF, 2018.
L'automne commençait à peine à s'estomper, le froid caressant les épaules et cheveux des jeunes gens qui s'aventuraient à l'extérieur. Les arbres étaient nus, leurs feuilles aux tons sombres parsemées à même le macadam imbibé d'eau, et eux aussi pliaient au gré du vent frais. Certains sortaient déjà leurs gros manteaux, prétextant que mieux valait avoir trop chaud que trop froid tandis qu'ils exposaient leurs belles doudounes bien chères et trop vibrantes.
Changbin, lui, se contentait de sa bête veste de cuir noir ; c'était pas comme si il passait le plus clair de son temps dehors de toute façon. Il allait au parc, parfois, quand le temps était clément ; s'asseyant sur l'un des bancs humides tout en joignant ses mains entre ses jambes écartées.
Le noiraud observait les nuages de sa respiration, les regardait s'élever vers le ciel gris comme la fumée qu'il expirait auparavant mais on l'avait fait arrêté et il n'en était pas mécontent. Maintenant il buvait du café ; peut être un peu trop, certes, cependant on disait que c'était mieux que de nourrir le quelconque cancer qui finirait bien par le ronger.
La plupart du temps, il regardait les autres marcher. Changbin observait les filles déambuler, grands sacs accrochés à leurs épaules et écharpes géantes dissimulant le bout de leurs nez rosés. Il les trouvait belles, joliment apprêtées, adorables au loin et les sourires qu'elles lui lançaient lui faisait un peu chaud au coeur.
Cependant, elles n'étaient pas sa seule source de chaleur, de réconfort au gré de la tristesse du début d'hiver. On n'était pas vraiment agréable, plutôt renfrogné et toujours impatient de rejoindre son chez soi puisque personne n'aimait geler sur les trottoirs de la ville. Les jeunes gens voulaient rentrer, s'affaler sur un fauteuil, s'emmitoufler sous un duvet tendrement tiède et boire des litres de chocolat fumants tout en lisant ou regardant simplement des émissions abrutissantes sur leurs petits écrans.
Avant, Changbin préférait dormir mais maintenant, il avait quelques petites autres choses à faire, voir et apprécier. Tout lui était étrangement précieux.
C'était probablement ce garçon et ces rires d'enfants. Les regarder courir au gré de l'herbe sur laquelle on ne pouvait pourtant pas poser le pied ; mais on ne disait rien, parce qu'ils étaient petits et que leurs éclats de voix rendaient tout un petit peu moins morose. Ils transpiraient d'insouciance, se criaient au visage, se taquinant avec tendresse avant de bien rapidement faire la paix.
Changbin avait toujours aimé les enfants.
Le fait qu'il n'était et ne serait jamais apte à en faire l'avait toujours fortement attristé.
Le noiraud avait appris à faire avec, jouant de la carte de l'indifférence qui était si facile à dégainer. Très peu de personnes connaissaient sa peine, seule une élite bien choisie avait le droit de déposer une paume contre son épaule et de lui murmurer des mots doux vides de sens. Oui, tout irait bien, c'était pas si grave, il n'allait pas en mourir et il aurait pu souffrir de bien pire.
Cependant, Changbin n'en restait pas moins effondré. En plus de n'aimer que la gent masculine, le jeune homme était stérile ; il cumulait vraiment, la chance n'était visiblement pas de son coté, tout comme sa famille, d'ailleurs.
Secouant la tête tout en renfonçant correctement son séant par dessus les planches de bois humides, le noiraud soupira. Lentement, il haussa les épaules, détendant par la même occasion, et avec douceur, les muscles du bas de son dos qui le tiraillaient légèrement.
Puis on rit à ses cotés, et Changbin ne put s'empêcher de sourire.
Sans trop se presser, il leva les yeux, les faisant passer de la terre battue marquée d'empreintes de pas à une figure couverte de joie. Le noiraud avait l'impression de rêver alors il se mordilla doucement la lèvre sans jamais perdre ce fin rictus qui ornait sa bouche rose.
Ses pupilles valsèrent d'un coté à l'autre, analysant des lippes pulpeuses à des sourcils tendrement relevés jusqu'à des yeux transformés en croissants de rire. C'était un beau jeune homme, aucun doute là dessus, mais c'était comme si, jour après jour, il s'embellissait. Changbin ne s'en plaignait pas, il adorait passer son temps à admirer la perfection qu'était la figure de l'autre.
Puis il aimait l'écouter parler, glousser, humer, murmurer, chantonner, bougonner, souffler. Le noiraud aimait tout au propos du brun mais jamais il n'aurait eu le cran de le dire de cette façon.
Accroupi non loin du jeune homme, Hyunjin s'esclaffait en regardant les petits s'amuser au fil des tas de feuilles qui avaient été assemblés plus tôt dans la journée. Il avait l'air si insouciant et bêtement heureux là, à sourire béatement, ses mains posées sur ses genoux et sa capuche violette mal rabattue par dessus ses cheveux sombres.
Changbin ne pouvait détourner le regard. C'était comme si l'autre était un aimant et que le noiraud était inexorablement attiré à lui ; rien ni personne ne pouvait le distraire de la personne qu'était Hyunjin.
Le sourire du plus vieux s'étira maigrement tandis qu'un petit garçon accourait dans la direction du brun, les bras écartés alors qu'il chantonnait "papa" à tue tête. Hyunjin ouvrit les bras à son tour, accueillant son fils dans une accolade finement chaude mais surtout affreusement réconfortante.
Le jeunot habillé de jaune passa ses poignets dans la nuque de son père, riant aux éclats tandis qu'on lui chatouillait doucement les côtes.
Les yeux du brun souriaient encore plus et Changbin aurait pu mourir là maintenant que ça ne l'aurait pas plus dérangé que ça finalement.
L'enfant se tortillait sur place, rendant l'équilibre du jeune père plus qu'instable mais il ne semblait pas trop s'en faire. Son fils n'émanait que bonheur pur et insouciance alors lui aussi il était heureux, lui aussi riait un peu plus fort qu'importe les regards étranges qu'on lui adressait.
Après tout, ces derniers n'étaient rien par rapport à ceux qu'il se devait d'affronter au quotidien.
Quelques longues secondes s'écoulèrent, animées de gloussements, fins cris et amusement débordant. Le petit garçon ayant bien trop ri se retrouvait presque éreinté, pantelant dans les bras de son papa auquel il était fermement accroché. Sa tête délicatement logée dans la nuque de son géniteur, ses cheveux de jais chatouillant doucement sa mâchoire et sa respiration rapide percutant la peau de son cou, il tentait tant bien que mal de retrouver son souffle.
Hyunjin, une de ses mains logée dans le dos de son fils et l'autre enfouie dans les cheveux de ce dernier, tourna doucement la tête. Il se sentait probablement observé et c'était alors sans grande surprise qu'il croisa le regard d'un noiraud qui souriait probablement bêtement.
Ce dernier ne pu s'empêcher de rougir finement quand le brun lui sourit grandement, exposant alors ses yeux rieurs et ses dents parfaitement alignées. Changbin voulait se souvenir de cette image, de ce Hyunjin rayonnant qui rendait ses aujourd'huis et demains toujours un peu plus beaux.
Soudain privé de douces caresses sur la peau sèche de son crâne, le petit garçon entrouvrit lentement les yeux. Il chercha du regard, suivant celui de son père avant de finalement tomber sur le noiraud vêtu de cuir. Lui aussi il sourit, se détachant vivement de l'étreinte dans laquelle il était réchauffé avant d'accourir vers l'autre qui, lui, était toujours assis sur le banc toujours aussi humide.
« Papa ! »
S'écria-t-il avant de poser ses petites mains sur les genoux du noiraud.
« Tu joues avec moi et les autres ? »
Changbin sourit et, incapable de refuser, il acquiesça avant de se laisser emporter par le benjamin. Hyunjin gloussa en l'observant débattre avec sa progéniture. Le plus vieux maintenait qu'il ne trichait pas, dissimulant son visage derrière ses mains rêches bien qu'il ne pouvait s'empêcher d'écarter les doigts et voler l'un ou l'autre regard de temps à autres.
Les enfants recommençaient à courir, se cachant derrière un arbre ou une vieille dame assise non loin et Changbin parlait fort, comptant lentement alors que, pas à pas, Hyunjin s'approchait de lui.
Avec tendresse, le plus grand se saisit des mains du noiraud, tirant délicatement dessus afin qu'il puisse avoir accès à la figure mordue de froid de son aîné. Il lui sourit tendrement et Changbin baissa faiblement la voix, probablement toujours aussi surpris par la beauté presqu'irréelle de son compagnon.
Ils se regardèrent quelques instants, leur fils et ses amis s'impatientant probablement ; puis Hyunjin déposa un doux baiser sur les lèvres entrouvertes de l'autre qui se sentit fondre instantanément. Le brun lâcha les mains de son amant, déposant les siennes contre ses joues rosées tandis que celles de l'autre s'accrochaient aux mailles de son pull noir. Leurs lippes se murent avec une infinie lenteur, goûtant précautionneusement ces saveurs de café latte et chocolat amer qu'elles portaient.
Changbin aurait pu s'y perdre, plus rien ne faisait sens. Il ne voyait que Hyunjin, ne sentait que Hyunjin, n'écoutait que Hyunjin, ne voulait que Hyunjin.
Puis le susnommé s'écarta, lui offrit un énième regard rieur et murmura tendrement, son souffle brûlant s'échouant sur ses lèvres désormais finement mordues.
« Va les chercher, Binnie. »
Un frisson indescriptible lui parcouru l'échine, si fulgurant qu'il ne put qu'opiner du chef avant de voler un second baiser à son cher et tendre et de s'aventurer sur les pelouses interdites du parc ; non pas sans que Hyunjin l'observe de loin, ses yeux tirés en un sourire qui ne le quittait plus.
[. . .]
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro