Cha Yoo-Ri était né dans le corps d'une fille.

Il n'avait jamais aimé porter des robes, jouer à la poupée, et toutes ces choses qui définissaient les petites filles de son âge. Il savait qu'il n'avait aucune envie d'être une fille.

Chaque fois qu'il se regardait dans un miroir, il voulait voir des cheveux courts, un corps masculin, des vêtements qu'il aimait. Mais au lieu de ça, il pleurait chaque matin face à sa poitrine, face à sa longue chevelure, face à ses débardeurs moulants.

Ce matin là, il aperçut à la télévision des informations maussades, allant de suicides de stars à des problèmes économiques futiles. Yoo-Ri songea un instant qu'un tas de gens étaient malheureux dans le monde et qu'on ne leur prêtait presque aucune attention. Son mal-être à lui passait aussi inaperçu. Alors pourquoi continuer à souffrir en attente d'un soutien qui ne viendra pas ?
Cela devait changer. Il voulait devenir un garçon, au delà de son âme. Alors il prit des ciseaux, et se rua dans la salle de bains. Il avait pour habitude de scarifier ce corps qu'il haïssait tant, ce corps qui n'était pas le sien. Mais désormais il ne comptait plus abîmer cette enveloppe charnelle, il allait en faire ce qu'il voulait.

Son frère aîné avait laissé un large sweat et un manteau trainer dans le salon. Yoo-Ri les avait ramassés et les avait essayés devant le miroir. Il avait l'impression d'avoir enfilé une nouvelle peau, il s'y sentait si bien.

« Yoo-Ri, ma grande ? Qu'est ce que tu fais ? Ça fait un moment que tu es dans la salle de bains... »

Yoo-Ri ignora la voix de son père. Il en avait assez de tout cela. D'un coup sec, il coupa une mèche de cheveux, puis une autre, et encore une autre. Les mèches brunes tombaient au sol par dizaines et se regroupaient en petits tas. Bientôt, ses pieds nus furent couverts de son ancienne chevelure, tandis que sa tête avait complètement changé.

En quelques instants, son père força la serrure. Il ne comprit pas immédiatement ce qui se passait. Il décrypta Yoo-Ri de la tête aux pieds, observant les vêtements de son grand frère, les cheveux, les cicatrices, les larmes. Lorsqu'il eut rassemblé ces éléments, ses yeux se noyèrent de larmes.

Doucement, il s'avança et écarta les bras pour l'y accueillir, un large sourire sur les lèvres.

« Je suis désolé de n'avoir rien remarqué... Mon cher fils... »