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N°49 Sehun EXO PART 2


Mon compagnon m'avait guidée jusqu'à une table intimiste, près du bar. Il y avait trois chaises et en le voyant s'asseoir sur celle dos à la salle, j'avais décidé de me caler contre le mur. J'aimais avoir une vue d'ensemble, voir les serveurs circuler, les clients rentrer et sortir. S'il était suffisamment captivant, il parviendrait à retenir mon attention assez longtemps pour qu'elle ne dérive pas sur les conversations voisines. C'était mauvais mais que j'aimais écouter les ragots des anonymes. Ca me faisait toujours une petite histoire à répéter à ma sœur. Malheureusement, mon rendez-vous s'était avéré meilleur au téléphone qu'en face à face. Pendant une demi-heure, il m'avait parlé en long en large et en travers de sa passion pour la planche à voile. J'avais siroté mon verre en hochant la tête par politesse, alors que mes yeux fixaient furieusement ma montre. Le type était gentil, mais ennuyeux à crever. Si j'étais comme lui, je comprends mieux pourquoi mon connard d'ex, s'est tiré. Mais, sans prétention, je ne pense pas avoir été un jour aussi chiante que lui. Lorsque nos tapasses étaient arrivées, je m'étais jetée dessus comme une goinfre, sans retenue. J'avais faim et franchement plus besoin de jouer à la jeune femme proprette. La moindre distraction était comme une issue de secours. C'était définitif cet homme ne mettrait pas un pied dans mon appartement et certainement pas une fesse dans mon lit. Quoique. Peut-être qu'il était moins coincé en faisant l'amour. « Première femme que je vois avec un si gros appétit. » avait-il dit d'un air mi gêné, mi fasciné. Tu m'étonnes. J'avais englouti tout le plateau, en lui laissant deux pauvres morceaux de pains. Lui était tellement occupé à bavarder sur sa collection de cochons en porcelaine qu'il n'avait pas touché ni à son martini, ni aux tapas.

Pendant le reste de la soirée, j'avais laissé mon esprit divaguer, sans trop étaler ma vie personnelle. A quoi bon ? Je ne risquais pas de le revoir. A son sourire carnassier, je m'étais dit que lui croyais certainement qu'il avait remporté le jackpot. Il me voyait déjà à poil dans son lit. Malheureusement, je n'allais pas faire d'heureux ce soir. Pour être honnête, à partir du moment où la porte d'entrée a couiné, je n'ai plus jamais vérifié l'heure. Je ne pourrais pas être précise et vous dire à quel moment il est entré dans le café, ni à quel moment j'ai arrêté de prêter attention à ce que mon rendez-vous me racontait. La seule chose que je peux vous affirmer avec certitude c'est que nos regards se sont croisés. Et ça, je m'en souviens parfaitement car lorsque ses yeux noirs se sont posés sur mon visage, mon cœur s'est arrêté de battre.

Je ne connaissais pas son nom, son passé, son présent, sa vie. Pourtant, lorsqu'il avait poussé la porte en chancelant, sans dire bonjour, les yeux pleins de larmes et qu'il s'était avachi sur un tabouret, j'avais tout de suite su que je voulais en savoir plus. Ses épaules étaient voûtées comme s'il portait toute la misère du monde et ses mains tremblaient. Je l'avais vu essayer de les aplatir sur le bar pour qu'elles cessent de s'agiter, mais même là, ses doigts continuaient de convulser. Sans aucune honte, j'avais analysé minutieusement sa posture, son look, et j'en étais arrivé à la conclusion effrayante que j'avais besoin de tout connaître de lui. Ce n'était même pas de la curiosité malsaine. C'était un besoin imminent, violent qui, je le savais, m'hanterait pour les prochaines semaines tant que je ne l'aurais pas assouvi.

Complètement hypnotisée par cet inconnu j'avais détaillé sa nuque, la façon dont son dos se courbait et les mouvements saccadés de son genou. Il tenait à peine assis. Tout dans son corps criait tristesse et désespoir. Avec lui, mon sourire de façade s'était effacé. Je n'avais plus envie de sourire à mon monsieur Tinder, de faire semblant d'être intéressée. Comment pouvais-je prétendre être heureuse dans de telles circonstances ? Alors que lui souffrait le martyr à quelques mètres de moi ? Sans même le savoir, l'aura noire qui émanait de sa silhouette m'avait irrémédiablement affectée. J'avais été touchée en plein cœur. C'était pire qu'un coup de foudre. C'était un tourbillon de souffrance. Aucun mot n'aurait pu exprimer l'empathie que j'avais ressentie en le voyant. Pendant une minute, je m'étais imaginée quitter la table à laquelle j'étais assise et m'installer à côté de lui. Je lui aurais parlé, encore et encore jusqu'à ce qu'il me dévoile un aspect de sa vie. Et même s'il restait secret, j'aurais continué rien que pour le plaisir de savoir qu'il m'écoutait.

Cet homme était d'une beauté singulière. Il était fin, presque maigre, ravagé par la barbe et portait une veste en cuir. Ses phalanges étaient couvertes de bandages et ses paumes de cornes. Ses yeux eux, semblaient éteints, complètement assombris comme si quelqu'un avait absorbé toute la lumière qu'ils contenaient un jour. La vie l'avait certainement roué de coups, lui aussi. Il n'y avait qu'à observer sa démarche et le tremblement intarissable de ses lèvres pour voir qu'il avait usé son stock de larmes et que pourtant, elles restaient inépuisables. Beaucoup de gens ne se seraient même pas retourné sur son passage. Comme moi, il était insignifiant. Le peu qui se serait arrêté pour l'observer aurait éprouvé une pitié brutale, imminente, pour ce pauvre homme. Moi, je l'avais simplement trouvé époustouflant. J'avais été attirée par lui sans que je ne comprenne pourquoi, ni comment il avait réussi à m'ensorceler, sans rien faire. Je n'avais même pas entendu sa voix ! Pendant le reste de la soirée, je n'avais plus été capable que de me concentrer sur lui. Sur son profil ravagé par le chagrin. Lui, ne m'avait pas adressé un autre regard. Il ne s'était pas imprégné de l'ambiance joyeuse du café et était resté enfermé dans sa bulle, comme s'il était seul et que rien d'autre n'existait. Il n'avait d'ailleurs pas eu la force de noyer son affliction dans l'alcool. Je m'attendais à le voir enchaîner les verres et pourtant, il s'était contenté d'un café et d'un croissant qu'il avait émietté pendant de longues minutes en fixant le vide. Il n'en avait pas mangé une bouchée. A la fin, il avait posé une poignée de pièces sur le bar et était parti sans un mot pour personne. Au moment où il avait franchi la porte de sortie, mon rêve s'était brutalement arrêté.

« Léa, vous m'écoutez au moins ? »

Devant moi, le gus s'agitait avec un air agacé. Il ne fallait pas être aveugle pour comprendre que l'homme mystérieux du bar me plaisait bien plus que lui. Je pense qu'il l'avait senti car son sourire séducteur avait disparu. J'en avais assez d'être coincée avec lui. Comme je l'avais dit à ma sœur, ma présence ne m'engageait à rien.

« Non, pour être honnête avec vous, je n'ai pas entendu un traître mot de ce que vous m'avez dit pendant les trente dernières minutes. Je crois que je ferais mieux d'y aller. Merci pour le verre.»

Le type avait été suffisamment galant pour payer ma boisson mais je m'étais chargée de régler les tapas, après tout j'étais celle qui en avait mangées le plus. Si je m'étais enfui aussi vite, c'était parce qu'au fond de moi, j'espérais que l'homme soit encore dans la rue. J'aurais trouvé un prétexte pour l'aborder. La tension que je ressentais était insoutenable. Je ne pouvais pas laisser passer une chance pareille. Trop de fois j'avais hésité à aborder des inconnus, trop de fois j'avais regretté mes actes manqués. J'étais sortie du café, perchée sur mes talons. Un coup d'œil à gauche, il n'était pas là. La déception m'avait fait soupirer. La tête basse et les bras ballants, j'avais pris la direction de la bouche de métro la plus proche en surveillant où je m'étais les pieds. Avec des talons pareils, je pouvais facilement me faire une cheville. Il était tard et pourtant mon mode alerte était désactivé. Le mystérieux inconnu m'avait déshabillée de tous mes réflexes de citadine pour me laisser complètement vulnérable et à sa merci. Je ne pensais qu'à lui, qu'à son regard dans lequel j'aurais aimé me noyer. Il n'avait pas fallu plus de cinq cents mètres pour que je regrette mon manque de vigilance. Mon rendez-vous Tinder m'avait rattrapé à petites foulées. En le voyant arriver à ma hauteur, j'avais accéléré le pas. J'étais trop fatiguée et émotive pour lui faire une litanie d'excuses.

- Léa ! Attendez... Je ne comprends pas. On passait une bonne soirée, que se passe-t-il ?

- Ecoutez-, lui avais-je dit en m'arrêtant, je crois que ce n'était pas une bonne idée. Je ne suis pas prête à m'engager dans quoique ce soit et-

- Mais moi non plus ! Ce n'était d'ailleurs pas ce qui était prévu. On avait dit qu'on flirtait sans attache. Juste pour s'envoyer en l'air.

- Je n'ai pas envie de m'envoyer en l'air avec vous.

- Je ne vous plais pas, c'est ça ?

- C'est ça. Vous êtes charmant mais... pas pour moi. C'est tout. Sur ce, bonne continuation.

Je n'avais pas eu le temps de me détourner que sa main avait agrippé brutalement mon poignet pour me plaquer contre le mur le plus proche.

- Pas si vite ma jolie... tu crois que tu peux m'exciter comme ça et te barrer après ? Qui faisait des allusions douteuses quand on parlait par message hein ? Qui me chauffait comme une pute ? avait-il grogné en s'approchant dangereusement de mon cou.

- Arrêtez-vous me faites mal.

C'était pathétique. Moi qui étais toujours sur mes gardes, il avait fallu que j'oublie une fois ma bombe lacrymogène pour qu'un taré me saute dessus. A ce moment-là, j'avais pensé à ma sœur et la tête qu'elle ferait en apprenant que j'avais été violée. J'avais pensé à Rick et à ce qu'il serait capable de faire à ce type. Il le tuerait probablement. Dans ses moments de fureur, rien ne pouvait l'arrêter. Les larmes m'étaient montées aux yeux alors que je me débattais faiblement. C'était vain. Il était bien plus fort que moi. Je n'arrivais pas à croire que ça allait m'arriver, à mon âge, dans ces circonstances. Je m'étais mise toute seule dans la merde. Le café n'était pas très loin mais je ne pouvais pas crier. Il avait sa main plaqué contre ma bouche. J'étais fébrile. Les quelques verres d'alcool que j'avais bu m'empêchait de réfléchir correctement. Au fond de moi, je savais que même si j'avais été parfaitement sobre, je n'aurais rien pu faire. La ruelle était déserte. Et dire que je n'étais qu'à une centaine de mètres du métro. L'homme avait commencé à promener sa langue dans mon cou en dégageant mes cheveux de sa main libre. L'autre tenait fermement mes poignets au-dessus de ma tête. Il m'avait fallu quelques secondes pour réaliser qu'il ne m'étouffait plus. Et alors, j'avais profité de sa maladresse pour hurler aussi fort que je le pouvais. Il me ferait probablement taire d'un coup de poing bien placé mais tant que j'en avais l'occasion, je ne pouvais pas rester muette. J'avais hurlé à plein poumon. Je n'avais pas eu le temps de dire grand-chose simplement « au-secours » puis sa main avait retrouvé mes lèvres. Son regard s'était fait plus menaçant et il avait cessé de m'embrasser.

- Ferme-là ! Ferme ta putain de gueule où je te bute ! Je m'en branle de baiser ton cadavre !

Consciente du danger, je lui avais fait comprendre d'un signe de tête que je ne tenterai plus rien contre lui. J'étais fichue, lui était content. Comment avais-je pu me tromper à ce point sur son compte ? Que m'avait-il pris de m'inscrire sur ce stupide site de rencontre ? Ses doigts avaient dégrafés mon soutien-gorge et alors, j'avais compris que c'était la fin. Qu'il allait me marquer pour le restant de mes jours. Lui allait profiter de vingt minutes de plaisir. Moi, c'était toute ma vie qu'il gâchait en faisant ça. Je ne faisais plus rien pour retenir mes larmes et les sanglots d'angoisse qui m'attaquaient la gorge. Mais alors que ses mains se faufilaient sous le tissu, l'inattendu s'était produit. Comme s'il était revenu à la raison, il avait subitement arrêté de me toucher. En entendant son cri de douleur j'avais compris que sa décision avait été forcée. Lorsque j'avais ouvert les yeux, je l'avais découvert allongé au sol et immobilisé par un autre homme qui le chevauchait. En découvrant le visage de celui qui venait de me sauver, l'air dans mes poumons s'était bloqué. Tétanisée, j'étais restée prostrée contre le mur, la main devant la bouche. Mes jambes tremblaient encore de l'intensité du choc.

« T'as pas honte de toucher une femme sans son consentement ? Pauvre merde ! »

La veste en cuir avait confirmé mes incertitudes. Il ne s'agissait pas d'un passant qui aurait entendu mon cri de détresse par hasard mais bien de l'inconnu. Son expression était terrifiante. Elle n'avait plus rien à voir avec celle de l'homme dévasté du café. On aurait dit une bête féroce, un véritable lion. Son poing s'était élevé dans les airs mais, alors qu'il s'apprêtait à l'abattre violemment sur le visage de mon agresseur, quelque chose l'avait fait s'arrêter. Ses phalanges s'étaient stoppées à quelques millimètres de son nez, comme si une force invisible l'empêchait d'aller jusqu'au bout de son geste. Son corps tout entier tremblait de colère et pourtant, il semblait incapable d'expulser la rage qui l'animait. Sa mâchoire était contractée et ses yeux avaient perdu de leur vulnérabilité. Son être tout entier était en transe. Il ne faisait même plus attention à moi. Toute son attention était dirigée vers mon agresseur. Si ses yeux avaient pu brûler l'homme qui lui faisait face, il se serait embrasé sur le champ. Au lieu de le démolir comme il en avait l'intention, il l'avait simplement fusillé du regard puis avait relâché son col et s'était redressé.

- Ça va ?

C'était à moi qu'il parlait. Trop troublée par ce qu'il venait de m'arriver, je n'étais pas parvenue à prononcer le moindre mot. J'étais restée complètement interdite les bras contre ma poitrine pour me protéger. Je ne savais pas exactement de quoi puisque mon agresseur avait profité de cet instant pour prendre la fuite. Mais c'était une réaction naturelle, de pur instinct. Le traumatisme devait être évident sur mon visage car l'inconnu retira sa veste et la drapa sur mes épaules. Sa proximité ne me fit pas reculer. Bien au contraire, elle me rassurait. Pour une raison que j'ignorais, je lui faisais entièrement confiance. La probabilité qu'il s'agisse d'un scénario bien ficelé et qu'il profite à son tour de mon apathie pour profiter de moi ne m'avait même pas traversé l'esprit. Après tout, il venait de me sauver.

- Comment vous appelez-vous ? m'avait-il demandé.

Trop bouleversée, j'avais été incapable de parler. Je devais probablement avoir l'air stupide mais à la façon dont ses sourcils s'étaient froncés, j'avais compris qu'il ne me tiendrait pas rigueur de mon silence. Il était simplement inquiet.

- Avez-vous mal quelque part ?

J'avais secoué la tête comme une automate en fixant son torse. Je craignais qu'en regardant ses yeux, je m'écroule subitement. Il ne sentait pas particulièrement bon. Un mélange de cigarette et de cyprès. Pourtant je n'avais jamais eu autant envie d'embrasser quelqu'un.

- Je crois que je vais vous raccompagnez, c'est mieux.

Ses yeux étaient passés du scooter garé au loin que je supposais être le sien, à mon visage.

- Vous n'êtes clairement pas en état de monter là-dessus.

- Je ne serai pas montée de toute façon.

J'avais dit ça d'une voix à peine audible mais il m'avait quand même entendue. Lui m'écoutait au moins.

- Bon et bien... métro ce sera.

- Je peux rentrer seule, lui avais-je dit. Ne vous fatiguez pas pour moi, je vais bien.

L'idée de me retrouver plus longtemps en tête à tête avec cet inconnu m'effrayait. Il m'impressionnait autant qu'il m'attirait. J'étais capable de faire une grosse connerie simplement pour me retirer les dernières images de mon esprit mais aussi parce qu'il me plaisait.

- Vous êtes sûre ?

- Certaine.

J'avais perçu une hésitation dans son regard. Une part de lui souhaitait s'assurer que j'aille bien mais l'autre acceptait ma décision. Il ne pouvait pas me forcer de toute façon, il avait joué son rôle de super-héro et ça s'arrêtait là. Pour le convaincre, je lui avais offert le seul sourire dont j'étais capable.

- Bon hé bien... si c'est ce que vous voulez.

Il m'avait regardé partir sans bouger de son poste et je ne m'étais pas retournée pour savoir s'il était remonté sur son scooter ou s'il m'avait suivi jusqu'aux escaliers. Je n'avais pas eu le cœur à ça. J'étais partie bille en tête, en tentant désespérément d'oublier l'alliance à son doigt que j'avais aperçue pendant notre conversation. Rien à faire, les larmes avaient coulé.

Le lendemain, je m'étais retrouvée à nouveau assise à une des tables du café. Les yeux cachés par mes lunettes de soleil, je fixais avec anxiété la porte. J'avais commandé un déca noir. Le gérant m'avait reconnu et m'avait offert le croissant mais je n'avais pas faim. Je crois que mon déguisement n'était pas vraiment efficace.

Qu'est-ce que tu fais là putain ? Barre-toi pendant qu'il est encore temps.

Je pense que j'ai toujours eu une tendance un masochiste. En venant ici, je savais pertinemment qu'on allait me couper les ailes. Elles avaient subitement poussé la veille et pourtant, quelqu'un allait déjà me déplumer. Je me faisais du mal en surveillant cette porte, mais j'étais incapable de revenir à la raison. Au fond de moi, je savais que je devais prendre mes affaires et partir au boulot, mais mon cœur lui, se refusait à louper l'occasion de le revoir, lui. Je voulais vérifier si ce que j'avais vu la veille n'était pas une illusion d'optique. Être certaine qu'il était bien marié. Après ça, je ne reviendrai plus. C'était ce que je m'étais promis. L'homme n'était pas venu ce jour-là. Ni les jours d'après. Et comme une mule têtue, j'avais continué de patienter. J'avais remis les pieds dans ce maudit café toute la semaine. Le matin avant le boulot et le soir en rentrant. Je m'étais installée sur la table la plus éloignée avec mon ordinateur, histoire de m'occuper. En réalité, il me servait plus à dissimuler mon visage derrière l'écran qu'à réellement me divertir. Mon attention était de toute façon bien trop superficielle pour que je puisse m'intéresser à quoique ce soit que l'écran jouait. Chaque fois qu'une personne rentrait, mon cœur s'arrêtait de battre pendant une seconde puis, la déception m'envahissait. Ce n'était jamais lui. Ma sœur m'avait toujours dit manquer de persévérance. Je crois que si elle m'avait vue, elle aurait ravalé ses mots. Je devais faire pitié car le gérant m'offrait sans cesse des coups à boire. Ou bien alors, il avait compris mon petit manège, mais même lui ne voulait pas m'aider. A un moment donné, j'avais commencé à me demander si les Dieux ne s'étaient pas ligués contre moi. Maintenant que j'avais mis les pieds dans ce foutu café, ils se vengeaient de toutes les fois où j'étais passée devant sans m'arrêter. Le lundi soir de la semaine suivante, je m'étais juré de ne pas gaspiller ma soirée au café. Oui, ce n'était plus un café, c'était devenu le café, mon coin de repère. Emma m'avait invité à dîner. Elle voulait des nouvelles de mon boulot. C'était ce qu'elle prétendait. En réalité, je savais qu'elle voulait simplement s'assurer que je ne rechute pas. Je m'étais rendue à ce dîner la boule au ventre. Evidemment, elle ne savait rien de mes péripéties avec Monsieur Tinder. Je ne voulais pas l'inquiéter. Alors, dès que j'étais arrivée, les questions à son sujet avaient tout de suite fusé.

- Comment est-il au lit ? m'avait-elle demandé avec un clin d'œil.

Rouge de gêne, je l'avais fusillée du regard en m'assurant que les enfants n'avaient rien entendu.

- Il ne s'est rien passé. Le type était chiant comme la pluie.

- Mais qu'est-ce qu'on s'en fout ! Si ça se trouve, tu as raté le meilleur coup de ta vie, m'avait-elle sermonnée en me servant un verre de vin.

- Je crois que pour l'instant, je vais rester seule, c'est mieux.

Ce n'était qu'un demi-mensonge. En vérité, je voulais être avec cet homme dont je ne connaissais rien, seulement la voix. Peu importe les défauts qu'il avait, je voulais me perdre dans ses bras et découvrir chacun d'entre eux. Mais en même temps, je savais pertinemment que je demandais l'impossible. Les conseils d'Emma ne m'auraient été d'aucune utilité. Alors je m'étais tue.

En sortant de chez elle, mon désir de faire un tour au café m'avait titillée. J'étais faible. En poussant la porte, j'avais presque regretté d'être là. Je n'avais pas mon déguisement habituel et j'étais en robe de soirée. Le gérant m'avait salué.

- Vous venez plus tôt d'habitude, m'avait-il dit en me servant un verre d'eau.

- J'étais à un dîner.

- On ferme dans une heure.

- Je sais.

Je restais tous les jours jusqu'à la fermeture. La fatigue de mes nuits écourtées commençait à me peser mais rien à faire, je continuais de venir ici.

- Dites-moi, le café était pratiquement vide alors Joe avait pris le temps de s'asseoir avec moi, vous cherchez quoi au juste, en venant ici ?

Mes doutes s'étaient confirmés. Il avait bien remarqué.

- C'est une bonne question. Je ne sais pas.

Lui mentir en disant que je venais là uniquement parce que j'aimais l'atmosphère n'aurait servi à rien.

- Vous me ferez signe quand vous l'aurez trouvé.

Si je le trouve un jour...

La porte s'était ouverte mais, trop blasée, j'avais continué de contempler le reflet de la lumière dans mon verre d'eau.

- Bonsoir qu'est-ce que je vous sers ?

- Un café. Noir. Et... un croissant.

Cette voix.

Par peur de m'être méprise, j'avais doucement relevé les yeux. Et je l'avais vu. Il était enfin là. Assis sur le même tabouret que la dernière fois. Cette fois, ses yeux ne brillaient pas de chagrin, mais il avait toujours l'air exténué, comme s'il n'avait pas dormi depuis des jours. Sa barbe avait encore poussé. Elle était désormais épaisse et recouvrait toute la partie inférieure de son visage. Il portait toujours sa veste en cuir. Son scooter était probablement garé dans la rue. En le voyant, mon cœur s'était emballé comme il ne l'avait jamais fait pour mon ex-fiancé. Je ne souvenais pas d'avoir ressenti une sensation aussi puissante un jour. Mes mains tremblaient et mes joues étaient rouges d'amour, d'admiration, de désir. Il fallait que je trouve quelque chose à lui dire. Le remercier pour la dernière fois ? Oui c'était certainement la meilleure chose à faire. Je m'étais levée, déterminée à aller lui parler mais son aura m'avait cloué au sol. Il dégageait quelque chose de dangereux, d'inaccessible, comme si en m'approchant je risquais de me heurter à sa carapace. Alors, penaude, je n'avais pas réussi à faire un pas de plus et m'étais rassise à ma place. C'était ridicule. Je venais tous les jours ici pour le voir et la seule fois qu'il se montrait, j'étais incapable d'aller lui parler. Je devais probablement ressembler à une collégienne. Mais à mon âge, ce n'était plus à l'homme de faire le premier pas. Pour lui, j'étais certainement insignifiante. Il ne se souvenait déjà plus de mon visage. Mais pour moi, il était tout ce à quoi je me raccrochais depuis que je l'avais rencontré. Ce n'était même pas son geste pour me sauver qui m'avait fait tomber folle amoureuse de lui, non. Cupidon m'avait déjà transpercé lorsque nos regards s'étaient croisés la première fois.

Je le voulais. C'était une obsession mais j'étais lâche et la peur m'empêchait d'aller lui parler. Alors, j'avais continué de l'observer comme une adolescente l'aurait fait. J'avais cru halluciné lorsqu'à son doigt, l'alliance n'était plus là. J'ai eu beau cligner des yeux, elle n'est pas réapparue. J'étais pourtant certaine de ne pas m'être trompée la première fois. Mais je devais bien me rendre à l'évidence, s'il avait été marié à un moment, il ne l'était plus maintenant. Sa vie semblait tellement complexe. La mienne l'était. Mais jamais je ne l'aurais trouvée aussi intéressante que les secrets qu'il cachait. Cet homme était un trésor qui m'obnubilait. Pendant toute la soirée, il avait été le centre de mon attention, celui vers qui toutes mes pensées convergeaient. Et puis à la fermeture du café, il était parti, sans un regard pour moi. Je m'étais effondrée comme une madeleine. Je ne comprenais pas pourquoi il me plaisait tant. Pourquoi lui et pas Monsieur Tinder ? Et surtout je ne comprenais pas pourquoi mon corps avait désespérément de son réconfort sans être capable de l'aborder. J'étais sortie quelques minutes après lui. La peur qu'il me croise et me reconnaisse me terrifiait. Il me prendrait certainement pour une folle. Mon maquillage avait coulé et mes yeux pleuraient sans que je ne puisse m'en empêcher.

J'étais rentrée chez moi en titubant, pas à cause du vin mais de la plaie ouverte sur laquelle quelqu'un s'amusait à verser de l'alcool. Je pleurais pour un homme que je ne connaissais pas. Ironique. Je n'avais même pas pris le temps de me déshabiller et m'étais couchée toute habillée sur mes draps. Pour une fois, le sommeil m'était venu tout de suite. J'avais pensé à lui et mes paupières lourdes s'étaient fermées toutes seules.

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