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N°41 Ten X Taeyong SUPER M PART 2


Ten n'avait pas acheté sa boisson énergisante au distributeur comme il le faisait chaque soir. Aujourd'hui, il n'avait pas le temps pour ça et honnêtement pas l'envie. Tout l'après-midi, il avait été maussade. Son esprit était ailleurs, bien loin des structures compliquées qu'essayaient de leur transmettre leur professeur d'anglais. Mais contrairement aux rêveurs, il n'avait pas passé son temps à contempler les terrains verts de l'extérieur, mais plutôt à détailler minutieusement la nuque frêle et les cheveux noirs de Taeyong, comme si, par son regard, il pouvait lui parler. Il était désormais sûr de pouvoir reproduire à la perfection la forme de son cou, les plis de sa capuche et chacune de ses mèches sombres. Sa mémoire l'avait photographié et stocké définitivement.

Ten avait espéré pouvoir le coincer à la cantine ou à la bibliothèque mais Taeyong était resté introuvable. Et maintenant qu'il l'avait à quelques mètres de lui, il ne pouvait pas lui parler. Il aurait aimé pouvoir l'aborder rien que pour retirer le poids de la culpabilité qui pesait sur sa poitrine, mais Taeyong ne lui rendait pas la tâche facile. S'il était entièrement honnête avec lui-même, Ten avait parfaitement pourquoi il s'était comporté ainsi et pourquoi il était aussi froid avec Taeyong. La vérité, c'est qu'il aimait l'embarrasser. Il aimait la couleur carmine que prenaient ses joues dès qu'il posait son regard sur lui, la façon mignonne qu'il avait de presser ses cuisses ensemble comme s'il était tout le temps pressé d'aller aux toilettes, la manière dont sa lèvre tremblait perpétuellement, cette habitude de détourner vivement le regard chaque fois qu'il l'attrapait en train de le fixer. Ten aimait ses petits doigts qui trituraient insatiablement son pull, cet air apeuré qui ne quittait jamais son visage et surtout l'expression d'adoration pure qu'il avait quand il le regardait par la fenêtre. Car Ten savait. Depuis le début, il savait et en jouait. La première fois qu'il s'en était rendu compte, ce n'était pas parce que Taeyong avait été indiscret, non. C'était parce qu'un sentiment de malaise étrange s'était emparé de lui. Il avait eu la sensation de ne pas être tout seul, dans sa propre chambre. Et en voyant les jumelles déposées sur le bord de la fenêtre de Taeyong, il avait tout compris. Ten avait d'abord été en colère. Vraiment en colère. Son intimité avait été délibérément violée. Puis, alors qu'il s'apprêtait à sonner chez Taeyong pour lui en coller une, il s'était subitement refreiné. Et il avait réfléchi. Qu'est-ce qu'un garçon gagnerait à espionner un autre garçon ? Ten n'avait pas vu d'autre réponse possible que celle-ci. Taeyong était probablement amoureux de lui. Alors, il avait abandonné ses ambitions de lui péter la gueule et petit à petit, malgré lui, s'était mis à passer plus de temps devant sa fenêtre, en espérant que de l'autre côté du jardin, Taeyong serait là pour observer ses moindres faits et gestes. Au bout de ses jumelles, Ten se sentait important. Il avait l'impression d'être une star qu'un paparazzi épierait. Mais Taeyong n'était pas un paparazzi, il était seulement amoureux. Enfin, c'était ce que Ten pensait.

Il avait très rapidement compris que ses doutes n'en étaient pas, en constatant que Taeyong était incapable de lui dire « bonjour » sans bégayer ou de le regarder pendant plus d'une seconde sans devenir écarlate. Si Ten prenait ça avec amusement lorsqu'il était seul, ce n'était pas le cas devant Taeyong. Il ne voulait pas lui faire croire, par ses sourires habituels et sa bonne humeur contagieuse, qu'il y avait une quelconque chance pour lui d'obtenir ce qu'il voulait. Ten n'était pas gay. Et pourtant, il se retrouvait à regretter amèrement son comportement, alors qu'il aurait dû être le plus heureux du monde. Avec ses paroles, il était très probable que Taeyong ne l'approche plus jamais, alors pourquoi se sentait-il aussi mal ? C'était son objectif, non ? Il avait réussi ce qu'il voulait mais il ne pouvait pas oublier l'expression blessée et effrayée du visage pâle de Taeyong.

Alors, au lieu de faire un détour par distributeur, Ten se rendit directement à la voiture de Madame Lee qui l'attendait sur le parking. Il se sentait anxieux, comme si Taeyong lui avait transmis son angoisse. S'il était complètement honnête, Ten savait que Taeyong était catalogué comme bizarre par les autres élèves et qu'il en effrayait plus d'un mais jamais il n'aurait cru que cette habitude étrange qu'il avait de toujours tout compter était une maladie dont il souffrait. Il comprenait alors mieux pourquoi Taeyong quittait parfois la classe, au beau milieu du cours, le visage écarlate. Chaque fois, les commentaires moqueurs fusaient, certains prétendaient qu'il avait la diarrhée, d'autre qu'il faisait semblant d'être malade pour pouvoir griller les cours, mais personne ne savait réellement que, quand la pression devenait trop forte, Taeyong s'isolait pour pouvoir pleurer sans craindre d'être vu. Ten se sentit con d'avoir ri aux blagues stupides de ses amis alors qu'il connaissait désormais la vérité. Il voulait s'excuser.

- Bonjour, mon p'tit Ten. Comment vas-tu ? l'accueillit madame Lee en lui claquant une grosse bise sur les joues.

Ten osa à peine la regarder dans les yeux. Si elle savait ce qu'il avait fait à son fils, elle lui en voudrait certainement et ne le verrait plus jamais de la même façon. Mais étrangement, il était prêt à parier que Taeyong n'était pas du genre à se confier et qu'il ne lui raconterait probablement pas la crise que Ten avait causée.

- Ça va. Taeyong n'est pas encore là ?

- Non, mais il ne va pas tarder.

Comme pour illustrer son propos, Taeyong émergea sur le parking, vêtu de sa capuche. Ses yeux se posèrent sur le visage souriant de sa mère mais il ne parvint pas à partager sa joie car à côté d'elle, se trouvait celui qu'il détestait autant qu'il l'aimait. Ten était là, et il le fixait. Ses yeux étaient si sombres que Taeyong se sentit obligé de baisser les siens. Il avait peur qu'en osant affronter son regard, il ne brûle sur place. Ten aurait pu tuer avec ses yeux. Alors Taeyong n'osait même pas imagine ce qu'il aurait pu faire avec ses mains. Un frisson parcourut son échine et il n'attendit pas plus longtemps pour se glisser sur la banquette arrière. Etrangement, Ten ne s'assit pas à l'avant comme il en avait l'habitude, mais pris place à côté de lui. Et comme si ça ne suffisait pas à le rendre fou, il passa tout le trajet à l'observer. Taeyong se sentait terriblement mal à l'aise comme si on l'avait déshabillé de tous ses vêtements. Il croisa discrètement les jambes et baissa les yeux sur son portable en espérant que ça suffirait à Ten pour le laisser tranquille. Malheureusement, Ten avait d'autres plans en tête et garda son regard braqué sur son visage flamboyant jusqu'à ce que Madame Lee le dépose devant son portail.

- Merci, bonne soirée, dit-il comme à chaque fois.

Taeyong ne prit même pas la peine de relever la tête mais sursauta en entendant Ten prononcer son nom.

- Au-revoir, Taeyong.

Aussitôt qu'il eut fermé la portière, Madame Lee, adressa un sourire à son fils.

- Quel charmant jeune homme, tu ne trouves pas ? Les filles doivent se l'arracher.

Si seulement tu savais maman... comme ça me fait mal de savoir que tu as raison.

Ce soir-là, Taeyong resta silencieux pendant tout le dîner. Lui qui était d'ordinaire bavard à la maison, ne décrocha pas un mot. Inquiète, sa sœur fit irruption dans sa chambre après le repas et compris que quelque chose n'allait pas lorsqu'elle ne le trouva pas à sa fenêtre.

- Tae, il est huit heures...

- Et alors ? répliqua-t-il sèchement sans décoller la tête de son oreiller.

- Tu ne vas pas espionner Ten ?

- J'en vois plus l'intérêt.

Si Taeyong avait réussi à cacher son amour à sa sœur pendant quelques temps, elle l'avait pris un matin, en flagrant délit alors qu'il épiait Ten derrière sa fenêtre et l'avait confronté. Faute d'excuse, Taeyong lui avait tout avoué et lui avait fait jurer de ne pas en parler à sa mère. Etrangement, elle ne l'avait pas blâmé pour son comportement indécent et avait laissé couler.

- Tu sais, j'ai été adolescente avant toi. Je sais ce que ça fait d'être amoureuse, lui avait-elle dit un soir alors qu'il planquait maladroitement les jumelles derrière son dos. Fais juste attention à ce qu'il ne t'attrape pas.

- J'y compte pas, avait répliqué Taeyong avec malice.

Sa sœur avait alors appris à ne jamais le déranger à huit heures car elle savait que c'était l'heure à laquelle il observait Ten. Seulement, elle avait eu le pressentiment étrange que ce soir, il ne serait pas à la fenêtre.

- Quelque chose s'est passé entre vous ? demanda-t-elle doucement en caressant ses cheveux.

- J'ai pas envie d'en parler, répondit Taeyong, la voix étouffée par son oreiller.

Sa sœur jeta un coup d'œil à la fenêtre puis se releva.

- C'est dommage, tu ne sais pas ce que tu loupes. Bon, je suis dans ma chambre, si tu as envie de te plaindre, je t'écouterai.

Elle lui lança un dernier regard et claqua la porte. Le silence reprit son droit, laissant les pensées de Taeyong envahir son esprit. Une envie irrépressible de regarder par la fenêtre le saisit mais la tristesse le poussa à rester coucher.

A quoi bon être amoureux, si celui qu'on aime nous déteste ?

Il essaya de fermer les yeux, pour retenir la pulsion qui lui chatouillait le ventre et finit par céder.

Bon, c'est la dernière fois. Après ça, plus jamais, se promit-il en attrapant ses jumelles. A peine eut-il jeté un coup d'œil dedans que son visage vira au cramoisi et qu'une bouffée de chaleur le paralysa. Ten était dans sa chambre, non pas en train d'étudier comme Taeyong s'y attendait. Il venait de sortir de la douche et portait pour seul vêtement une minuscule serviette qui dissimulait à peine ses hanches. D'où il était Taeyong voyait parfaitement la courbe de ses flancs, la précision de ses abdos, la carrure de ses épaules et le V suggestif qui descendait dans sa serviette. Le sentiment de culpabilité qui l'envahit fut avalé par l'immense désir qu'il ressentit lorsque Ten enfila un caleçon et abandonna sa serviette. Taeyong se sentait privilégié. Comme si cette image érotique de Ten lui avait été réservé, rien que pour lui, rien que pour ses deux yeux affamés. C'était mieux que n'importe quel film porno. Taeyong savait qu'après avoir vu une telle chose, il ne pourrait plus jamais se toucher en pensant à autre chose que ça. Il n'avait pas tout vu mais c'était déjà suffisant pour faire palpiter son cœur et trembler ses jambes.

Plus les secondes passaient, et plus il se sentait impuissant. La sensation de gonflement dans son caleçon s'intensifia lorsque Ten s'installa sur son lit, sans enfiler de pantalon. On aurait dit qu'il était parfaitement conscient des effets que son corps nu provoquait sur Taeyong et qu'il en profitait pour lui faire perdre la tête.

Taeyong serra ses cuisses en constatant qu'il n'était pas prêt d'enfiler un pantalon. Son érection devenait douloureuse mais pour rien au monde il n'aurait quitté sa fenêtre. Il était hors de question qu'il rate ce spectacle au profit de quelques caresses qui le feraient jouir en moins de trente secondes. L'endurance, c'était pas vraiment son truc. Ten s'allongea horizontalement sur son lit et Taeyong put presque s'imaginer à califourchon sur lui, lèvres contre lèvres. Sans qu'il ne s'en rende compte sa respiration s'était accélérée et sa bouche s'était ouverte comme un chien assoiffé qui halèterait.

Il devait probablement avoir l'air pitoyable. Lui qui n'avait jamais eu de rapport sexuel était encore un adolescent novice, le genre qui découvrait encore son corps et faisait des rêves érotiques. Alors que Ten devait déjà probablement tout connaître de ce domaine. Taeyong se sentit minable. Mais il fut incapable de décoller ses yeux de la fenêtre. Il observa Ten attraper son ordinateur et le poser sur ses genoux.

Qu'est-ce qu'il fait ?

Taeyong trouva bien vite la réponse à sa question quand, après avoir tapoté sur le clavier, Ten s'enfonça un peu plus dans ses oreillers et descendit doucement sa main dans son caleçon. Hypnotisé par les mouvements languides de sa main sous le tissu, Taeyong resta amorphe, incapable de bouger. Une petite partie de sa raison lui rappela qu'il n'avait le droit d'assister à une chose pareille et que s'il ne voulait pas croupir en enfer pour le restant de ses jours, il ferait tout aussi bien de poser ses jumelles et laisser à Ten son intimité. Mais autre partie de son cerveau, la plus gourmande, lui murmura qu'il en avait déjà trop vu pour rebrousser chemin et que c'était maintenant trop tard. Un combat mental entre sa sagesse et ses pulsions sexuelles éclata. Taeyong tenta de s'arracher à ses jumelles mais la tentation l'emporta. Lui qui avait imaginé cette scène des dizaines de fois sans jamais savoir réellement si elle se déroulerait ainsi, avait maintenant la réponse devant lui. Il sut, au moment où Ten sortit son sexe mouillé de son caleçon, qu'il était maintenant trop tard pour faire marche arrière. Il avait tout vu. Tout ce qu'il passait son temps à imaginer en sachant qu'il ne l'obtiendrait jamais, se trouvait juste devant lui, à seulement quelques mètres.

Taeyong ne prit même pas le temps d'observer le visage de Ten, symbole d'extase. Sa tête était complètement renversée à l'arrière, ses yeux clos frétillaient de concentration, sa bouche était grande ouverte, comme s'il gémissait à pleine voix. Taeyong aurait été prêt à payer pour entendre les sons divins qu'il devait émettre, pour accéder à ses pensées et savoir réellement qui occupait son esprit en ce moment. Car il ne fallait pas se leurrer, ce n'était pas le film porno qu'il avait lancé qui l'excitait. Ten y prêtait à peine attention. C'était seulement une excuse pour se masquer la réalité. Il devait probablement penser à quelqu'un en ce moment. Quelqu'un qui n'était pas Taeyong. Face à ce constat, Taeyong sentit la déception s'emparer de lui. Jamais il ne serait celui qui provoquerait ses expressions sur le visage de Ten. Mais c'était pas grave, parce que pour l'instant, il était le seul à pouvoir profiter de cette vue érotique. Son regard se perdit dans la goutte de sueur qui dévala le torse de Ten et se perdit dans son nombril.

Taeyong s'attarda alors sur son pénis sans pouvoir retenir le grognement de frustration qui lui chatouillait la gorge. Il observa la façon dans sa main faisait apparaître son gland rouge puis rabattait son prépuce dessus et se sentit déglutir. Tout était beaucoup trop intense pour lui. Il appréciait tant cette vue que la culpabilité ne devint que passagère. Ses yeux se concentrèrent sur son entre-jambe et un sourire s'achemina sur ses lèvres.

Alors que Ten était brun, la couche de poil épaisse que caressait de temps à autre ses doigts se trouvait être noire. En le remarquant, Taeyong se mit à rigoler car chez lui c'était le contraire. Ses cheveux étaient relativement foncés et ses poils plutôt clairs, même s'il avait tendance à les raser. Tandis qu'il se perdait dans cette réflexion un coup de hanche particulièrement violent de Ten le ramena à la réalité. Son caleçon était maintenant au niveau de ses cuisses et son dos formait un arc majestueux, alors que sa main s'accélérait drastiquement. Un goût d'impatience envahit le palais de Taeyong qui colla son nez à la vitre en espérant ne rien louper de l'orgasme fulgurant de Ten. Seulement, il n'en vit rien, car au moment où la première giclée blanche recouvrit ses doigts, Taeyong s'écroula sur le sol, tremblant de la tête au pied. Ses yeux roulèrent à l'arrière de son crâne et un gémissement étranglé quitta ses lèvres. Ses jumelles lui avaient échappé dans sa chute mais il était bien trop absorbé par la sensation de chaleur qui irradiait son bassin pour s'en soucier. Ses yeux se fermèrent et, les cuisses pressées l'une contre l'autre, il grogna, la bouche couverte de ses deux mains.

Quelques minutes passèrent et il finit par se calmer. Lorsque sa respiration redevint à peu près normale, Taeyong glissa avec crainte sa main dans son pyjama et grimaça en la ressortant couverte d'humidité. C'était bien ce qu'il craignait. Il avait été tellement excité par l'orgasme de Ten qu'il avait lui-même joui sans aucun contact. C'était une première dans l'histoire de sa puberté.

Groggy, il se leva et récupéra un mouchoir pour se nettoyer. Un sentiment d'embarras l'envahit. Il avait été tellement gourmand qu'il n'avait même pas tenu jusqu'à la fin et maintenant qu'il jetait un coup d'œil à la fenêtre voisine, Ten était déjà rhabillé, et se dirigeait vers les carreaux pour fermer les volets.

Une fois l'euphorie du moment passé, Taeyong se rendit compte de sa stupidité. Ce mec venait juste de lui dire en pleine face qu'il ne supportait pas d'être assis dans la même voiture que lui, de respirer le même air que lui, et lui, que faisait-il ? Il continuait de l'aimer avec passion et excitation. Sans qu'il ne puisse contrôler quoique ce soit, les larmes lui montèrent aux yeux. Il s'échoua sur son matelas et étouffa son premier sanglot dans l'oreiller avant de s'emmitoufler dans sa couverture, comme si le tissu lui permettait de se sentir mieux. Mais il eut beau compter tous les moutons, il ne ferma pas les yeux de la nuit.

A quelques mètres de là, Ten était à sa fenêtre. Il fumait. Ce n'était pas dans ses habitudes mais il avait toujours un paquet caché dans sa chambre pour des jours comme celui-ci. Les yeux perdus sur la fenêtre de Taeyong, il cracha un nuage de fumée. Au fin fond de son esprit Ten était un peu déçu. C'était égoïste, mais il espérait apercevoir les jumelles que Taeyong oubliait chaque fois au bord de sa fenêtre, or, elles n'y étaient pas. Le poids de la culpabilité était toujours présent et l'absence des jumelles lui confirma que Taeyong avait été touché par ses mots. Il fallait qu'il s'excuse. Ten écrasa sa cigarette et rentra. Il ne ferma pas ses volets.

Le lendemain, lorsque Monsieur Chittaphon se gara devant la maison de ses voisins et qu'il attendit, Taeyong n'apparut jamais. Il avait pris une résolution. Ten ne voulait pas de lui ? Très bien. Il ne s'imposerait pas. Il s'était levé plus tôt dans l'espoir que sa mère ne décèle pas ses intentions. Cette fois-ci, il avait avalé quelque chose et même si son estomac avait protesté, il avait continué jusqu'à finir sa tartine. Il avait ensuite enfilé un gros sweat et prit livre pour être concentré sur quelque chose d'autre que les regards des gens car Taeyong allait prendre le bus. Ce n'était pas vraiment lui qui l'avait choisi. Il y était plutôt contraint. Le cœur lourd, il avait remonté l'allée jusqu'à l'arrêt de bus et s'était installé à côté du clochard qui puait la pisse. L'homme dormait mais Taeyong avait tout de même pris soin de lui laisser son déjeuner. De toute façon, il était tellement anxieux qu'il allait surement vomir sa tartine et ne pourrait plus rien avaler après.

- Madame Lee ne m'a prévenu qu'il était malade, c'est étrange quand même, murmura Monsieur Chittaphon en consultant sa montre.

C'était un des rares matins, sans doute le seul, où Ten n'avait pas ses écouteurs. Il attendait avec impatience l'arrivée de Taeyong. Au fond de son sac se trouvait une lettre qu'il avait rédigée entre deux insomnies. C'était ridicule mais Ten ne voyait pas comment il aurait pu s'excuser autrement. Taeyong refusait de le regarder alors lui adresser la parole s'avérait impossible. Au moindre contact, il fuyait.

- Dad, tu veux que j'aille sonner ?

Monsieur Chittaphon eut un sourire sarcastique. Il ne savait pas si c'était sa dispute de la veille avec son fils ou si sa conscience le travaillait mais Ten était passé du noir au blanc.

- Vas-y. Et comporte-toi bien.

Ten ne perdit pas une seconde, sauta de la voiture et toqua à la porte. Madame Lee lui ouvrit, en robe de chambre. C'était son jour de repos.

- Oui mon chat, un problème ?

- Taeyong est malade ?

- Non. Je ne crois pas. Pourquoi ?

- Je ne sais pas... ça fait quelques minutes qu'on l'attend et il ne descend pas.

Furieuse, Madame Lee fronça les sourcils et hurla à pleins poumons :

- Taeyong, le voisin t'attend ! Dépêche-toi !

En entendant des bruits de pas précipités dans l'escalier, Ten se mit à sourire. Seulement son sourire s'effaça lorsqu'il aperçut la silhouette fine et emmaillotée dans une serviette de bain, de sa sœur.

- Pourquoi tu gueules maman ?! Tae est déjà parti depuis vingt minutes !

- Comment ça ? Parti où ?

- Prendre le bus ! Je croyais qu'il te l'avait dit !

- Quoi ?! hurlèrent en cœur Ten et Madame Lee.

- Mais qu'est-ce qu'il lui a pris ?! s'affola Madame Lee.

- Il a dit qu'il se sentait bien et qu'il voulait essayer de prendre le bus pour ne pas embêter Monsieur Chittaphon.

- Oui bah c'est justement en ne prévenant pas qu'il embête tout le monde ! Et ses anxiolytiques ?!

En voyant le visage de sa fille se décomposer, Madame Lee sut qu'elle avait dit une bêtise.

- Maman !

Elle jeta un coup d'œil à Ten qui les observait et se couvrit la bouche.

- C'est trop tard maintenant, soupira sa fille. Oui, il les a pris.

Confuse, Madame Lee resserra sa robe, se tourna vers Ten et lui offrit un sourire désolé.

- Je ne savais pas sinon j'aurais prévenu ton père. Taeyong est un vrai chenapan, elle se pencha et lui chuchota à l'oreille, s'il te plaît envoie moi un message si tu le croises dans les couloirs pour me dire comment il va.

Si Ten n'avait pas été au courant de sa maladie, il aurait trouvé cette requête bizarre mais puisqu'il savait, il ne s'en étonna pas. En s'installant dans la voiture, Ten eut mal au cœur.

- Taeyong a pris le bus, murmura-t-il d'une voix attristée.

- Fais pas cette tête-là, c'est toi qui l'a chassé. Tu ne récoltes que ce que tu sèmes.

- Je voulais pas-

- C'est pourtant le message qu'il a reçu.

Ten ne chercha pas à argumenter et posa sa tête contre la vitre. Il ne tiendrait pas la matinée sans parler à Taeyong. En fermant les yeux, l'image de son visage rouge lui apparut et un frisson dévala son échine.

Qu'est-ce qui me prend ?

Ten savait, au fond de lui, que si chaque petit détail l'attirait chez Taeyong c'était uniquement parce que son être entier lui plaisait. Alors qu'attendait-il ? Taeyong lui avait offert la possibilité de profiter de son innocence un nombre incalculable de fois et Ten n'en avait rien fait. Il lui avait envoyé des signaux, en bafouillant, en rougissant, en étant aussi affecté par ses actions et Ten avait préféré sa fierté à la possibilité d'entrevoir quelque chose avec son voisin. Ten ne savait pas s'il était gay ou pas. En réalité, même si les apparences étaient trompeuses, Ten était encore vierge. Il avait essayé une fois de coucher avec une fille mais ça ne s'était pas passé comme prévu. Elle était repartie chez elle et ne l'avait plus jamais rappelé. Il avait toujours pensé que c'était la panne du débutant mais maintenant qu'il savait qu'aucun autre visage que celui de Taeyong ne pouvait le faire bander, Ten commençait à douter de ses préférences. Même s'il se mentait à lui-même et niait tout en bloc, les moments où il était le plus vulnérable le trahissaient. Car devant un film porno hétérosexuel, ce n'était pas les gémissements de l'actrice qui l'excitaient, non. C'était les images qui défilaient derrière ses paupières closes. Les images qui prenaient la forme d'un corps courbé, d'un visage paniqué et d'un regard somptueusement sombre. C'était le visage de Taeyong, occupant son esprit, qui le faisait se sentir aussi dépendant et agité.

Ten eut envie d'ouvrir la fenêtre et d'hurler à pleins poumons. Il commença à avoir chaud et mal au cœur. Il ferma les yeux pour faire disparaître cette sensation mais elle persista comme-ci elle n'attendait qu'une seule chose : qu'il l'accepte.

***

Taeyong savait qu'il y aurait trop de monde. Il savait, en survolant les quelques marches du bus, qu'il aurait dû rebrousser chemin. Il savait en s'installant à côté d'un homme qui avait une odeur de sudation alliacée qu'il aurait dû appuyer sur le bouton stop et sortir immédiatement du bus. Mais il ne l'avait pas fait car pour une fois, il avait envie de se sentir normal. Même si les picotements qui hérissaient ses poils lui rappelaient qu'il ne l'était pas, il avait envie d'essayer. Taeyong savait que c'était une mauvaise idée mais comme les gens qui savaient que, fumer une cigarette était dangereux, il en avait allumé le bout. Comme pour chaque passager embarquant, personne ne lui accorda le moindre regard et il eut pourtant l'impression d'être observé par des dizaines de paires d'yeux. En s'installant sur le seul siège libre, Taeyong sentit son rythme cardiaque monter en flèche. Le bus était bondé et il avait à peine la place de bouger les bras. A côté de lui deux femmes, grandes comme des autruches s'agrippaient aux poignées de sécurité en consultant leur portable. Devant lui, un collégien de deux mètres s'appuyait le dossier du siège pour ne pas tomber à chaque vacillement du bus. Taeyong se sentait minuscule au milieu de tous ces géants. Sa tête ne dépassait même pas leurs hanches. Il observa avec dégoût les ongles noirs de l'adolescent de rapprocher de lui comme les pattes d'une araignée gluante et retint son souffle. L'homme à côté de lui venait de tousser. Taeyong se sentit frémir lorsque ses postillons atteignirent sa joue. Il songea à se lever et quitter son siège mais il n'avait même pas la place de faire le moindre pas. Les gens étaient agglutinés les uns aux autres sans le moindre espace vital pour respirer. Taeyong tenta de s'imaginer pris en sandwich entre deux inconnus et sentit la panique l'envahir. Il plongea ses mains tremblantes dans son sac et extirpa son livre qu'il ouvrit à la hâte. Ses yeux parcoururent dix-huit fois la même ligne avant qu'il ne se rende compte qu'il n'arrivait pas à lire le moindre mot. Au lieu de quoi, il comptait le nombre de fois que ses yeux balayaient la page de gauche à droite. Au bout de la dix-neuvième fois, Taeyong fut interrompu par l'inconnu assis à sa gauche qui voulait descendre.

Il posa ses yeux sur lui et lorsqu'il remarqua que l'homme lui parlait, la peur lui tordit le ventre.

- J'aimerais descendre.

- Qu... Qu-Quoi ? bégaya Taeyong bien trop focalisé sur les doigts gras et poilus de l'homme qui lui serraient l'épaule.

- Est-ce que tu pourrais te lever pour que je puisse descendre ? s'impatienta l'homme en apercevant son arrêt.

Taeyong n'arrivait pas à comprendre ce que l'homme voulait. Tout ce qu'il voyait était la présence de ses doigts sur son épaule. Il n'aimait pas qu'on le touche. Non, plus que ça, il ne supportait pas le contact humain. Même sa sœur ou sa mère avait parfois du mal à le toucher. Alors qu'un inconnu franchisse son bouclier aussi facilement, s'en était trop pour son corps sensible. Son visage devint aussi pâle qu'un cadavre lorsqu'il se rendit compte que l'homme ne le quittait pas du regard et sa respiration se hacha.

- Hey, ça va ?

- Ne me touchez pas, murmura-t-il, complètement terrifié.

- Quoi ?

- Ne me touchez pas ! répéta-t-il bien plus fort.

Sa voix explosa dans le bus et tout le monde se tourna vers lui. Inquiet d'être incriminé alors qu'il n'avait rien fait, l'homme le libéra et l'enjamba rapidement pour accéder à la porte de sortie. Derrière lui, Taeyong se recroquevilla instantanément sur lui-même. Il encercla ses genoux de ses bras et tenta de se calmer. Cette position lui apportait généralement un certain apaisement mais là, il y avait trop de monde, trop d'agitation et trop de regards braqués sur lui. Il savait qu'il n'aurait jamais dû prendre le bus.

Tandis qu'il haletait comme un forcené en essayant de faire parvenir l'air à ses poumons, les larmes lui montèrent aux yeux.

- Hey, ce ne serait pas le mec bizarre qui fait des crises de panique ? murmura soudainement une fille dans son dos.

Taeyong se figea. Il n'osa pas tourner la tête mais devina sans difficulté qu'elle était probablement dans son lycée voire dans sa classe. Il ne manquait plus que ça. Avec un peu de chance elle allait raconter à tout le monde que le mec bizarre avait hurlé sur un inconnu et s'était mis à pleurer comme une madeleine pour rien. Ca donnerait une raison supplémentaire aux autres pour le ridiculiser jusqu'à ce qu'il s'effondre. Il fallait qu'il appelle Mark car s'il n'était pas là à la sortie du bus, Taeyong risquait de succomber. Ses pieds se figeraient sur place. Il n'était même pas sûr de pouvoir avancer jusqu'au bâtiment sans s'écrouler.

- Tu ne penses pas qu'on devrait l'aider ? demanda une voix fluette dans son dos.

- Non, ce mec est taré, ne t'approche pas, viens, répondit une voix masculine.

Taeyong aperçut le couple passer à côté de lui pour se poster le plus loin possible de son siège. C'était un cauchemar.

Il garda les yeux fermés le reste du trajet et essayant d'ignorer la chaleur insoutenable qui le faisait transpirer. L'anxiété et le chauffage avaient probablement maculé son front de goutte de sueur qu'il essuya du revers de la main. Sans s'arrêter de pleurer, il saisit son téléphone et tapa : « Mark j'ai poris lez buus beesdoiin deetoiu » Ses mains tremblaient tant qu'il ne parvint à faire mieux et pria pour que Mark comprenne l'urgence de la situation. Evidemment, il n'était pas son meilleur ami pour rien. Une seconde plus tard son téléphone sonna. Taeyong le plaça contre son oreille et en entendant sa respiration erratique, Mark se mit à paniquer.

- Tae ? Ça va ? Qu'est-ce qui se passe ?! Pourquoi t'as pris le bus ?!

- Je... Je... C'est que...

- Okay calm down. Respire. Je suis déjà arrivé. Je t'attends. Tu veux que je reste au téléphone ?

- N-Non... O-Oui... Enfin... je... Mark...

- Chut, détends-toi. Je vois ton bus. Attends que les autres descendent et rejoins-moi.

Taeyong raccrocha précipitamment et essuya ses mains moites sur son jean tout en attendant que les gens quittent le bus. Un manteau frôla son bras et deux yeux bleus l'observèrent un peu trop longtemps. Sa panique franchit le stade de l'insupportable. Dès que le bus fut entièrement vide, Taeyong récupéra son sac et le quitta. Mark l'attendait comme convenu au bas des escaliers. En voyant son ami aussi faible, Mark s'approcha de lui et le prit dans ses bras. Taeyong tremblait tant qu'il tenait à peine sur ses jambes. Mark ne l'avait jamais vu dans un état de choc aussi avancé. Une multitude de questions envahirent son esprit mais il sut, en croisant le regard de Taeyong qu'il n'était pas en mesure d'y répondre.

- L'h-homme m'a touché, murmura-t-il en claquant des dents.

- Quoi ? Un homme t'a touché ? Attends où ça ?! s'emporta Mark en saisissant son visage dans ses mains pour vérifier qu'il n'avait pas de bleus.

- Ep-paule...

En entendant Taeyong chuchoter, Mark se sentit instantanément rassuré. Vu la panique qui l'animait, il aurait pu parier que Taeyong s'était fait agresser mais une fois de plus son anxiété déformait la réalité.

- Tae, respire, tu vas t'étouffer, lui demanda Mark en mimant une inspiration exagérée.

- Je... Je...

Taeyong essaya de reproduire ses gestes mais n'y parvint pas. La foule d'étudiants qui déboulait du parking l'empêchait de se concentrer. Il essaya de compter les tâches de gras sur la façade du bus pour se raccrocher à quelque chose de concret mais n'y parvint pas. Sa vision se troubla et avant qu'il ne puisse s'en rendre compte, ses yeux roulèrent à l'arrière de son crâne. Mark vit son corps se raidirent et chuter vers l'arrière. S'il n'avait pas d'aussi bon réflexes Taeyong se serait certainement ouvert le crâne sur le bitume.

En voyant ses paupières se fermer et ses muscles se détendre, Mark passa un bras dans son dos et ralentit sa chute sans pour autant la stopper.

- Merde, jura-t-il les dents serrées en constatant que Taeyong était inconscient.

Même s'il ne mangeait pratiquement rien, Mark n'avait pas la force suffisante pour le transporter jusqu'à l'infirmerie. Il songea a appeler les pompiers mais fut interrompu par une voix familière qui fendit le cercle d'élèves, formé autour du corps inerte de Taeyong.

***

- Pourquoi est-ce qu'il y a autant de monde ? demanda Monsieur Chittaphon en questionnant son fils du regard.

Ten quitta sa fenêtre et jeta un coup d'œil à l'attroupement qui bloquait le passage des voitures. Certaines klaxonnaient pour que le flot évacue la route tandis que d'autres s'étaient rendues à l'évidence et rebroussaient chemin.

- Je sais pas, sans doute une bagarre répondit-il étonné.

Il envoya un message à Baekhyun et Taemin pour savoir s'ils faisaient partie du troupeau mais aucun d'eux ne répondit.

- Bon, je crois que je vais devoir te poser ici. Vas y à pied, ça te fera faire un peu d'exercice. Et ne te mêle pas à cette bagarre.

Ten ignora le pique de son père et sauta de la voiture, curieux. Il s'approcha des élèves ameutés, prêt à se jeter dans le tas si l'un de ses amis était impliqué, mais déchanta vite lorsqu'il aperçut le corps immobile qui attirait tant de monde. Ce n'était pas un spectacle ou bien cette distraction était sordide et pourtant, Ten le trouva simplement sublime, là, allongé, avec son teint pâle ses cheveux sombres et sa capuche qui pour une fois ne couvrait aucun centimètre de son visage. Il avait l'air tellement pur, tellement vulnérable. Mais aussi terriblement mal en point. Sa poitrine se soulevait à peine et ses traits d'ordinaire toujours crispés étaient atrocement détendus. En aurait dû se ravir de le voir aussi calme mais il avait qu'un Taeyong détendu était un Taeyong en danger.

Tous l'observaient mais personne n'agissait. Cette constatation le mit hors de lui. Ten sentit une montée d'inquiétude dans la moindre de ses terminaisons. Pourquoi Taeyong ne bougeait-il pas ? Et pourquoi les claques que lui mettaient Mark ne le réveillaient-elles pas ? Que s'était-il passé ? Quelqu'un était-il responsable de son état ? Si c'était le cas, Ten se fit la promesse de retrouver cette personne et de la torturer jusqu'à ce qu'elle ne réponde plus de rien.

Tout en criant aux gens de se pousser, Ten fendit le cercle sans ménagement. Il joua des coudes jusqu'à en atteindre le centre et s'accroupit à la hauteur de Mark qui lui adressa un drôle de regard. Comme si à la fois, il ne voulait pas de son aide mais qu'il était sur le point de le supplier. Ten prit les devant et saisit les poignets minuscules de Taeyong.

- Prends les chevilles, ordonna-t-il à Mark. A trois.

- Un, deux, trois, compta Mark en le soulevant avec une grimace d'effort.

Ten de par sa prestance n'eut pas besoin d'hurler. Tous s'écartèrent de son passage et le regardèrent avec admiration transporter le corps de Taeyong jusqu'à l'infirmerie. Ils le voyaient comme un bon samaritain prêt à aider n'importe qui, mais Ten n'agissait pas par simple gentillesse. Au contraire. Il utilisait la faiblesse de Taeyong pour s'immiscer là où il ne l'attendait pas. Si c'était la seule façon pour lui de lui transmettre sa lettre, Ten était prêt à tout. Et puis, il voyait là aussi un moyen de veiller sur Taeyong. Le voir souffrir lui était insupportable. Il était hors de question qu'il le laisse tout seul avant de le savoir éveillé et en forme. Alors, lorsqu'après avoir allongé Taeyong sur un matelas, l'infirmière leur indiqua qu'il pouvait disposer, Ten refusa catégoriquement d'obtempérer.

- Vous risquez d'avoir une absence injustifiée, expliqua-t-elle d'une voix douce.

- C'est pas grave. Je retournerai quand il sera réveillé.

Mark fixa Ten avec une moue septique.

- Je pense que ça va prendre un moment. Son corps est épuisé. Il est bien trop maigre pour sa taille et son âge. L'anxiété y est pour très peu là-dedans. Certes c'est elle qui a provoqué sa crise et son malaise mais je pense qu'il ne serait pas tombé dans les pommes s'il n'était pas aussi fatigué et fragile. Ce garçon a beaucoup de carences en fer et magnésium. Son corps a simplement lâché. Et là, il récupère.

Mark hocha la tête puis planta ses lèvres sur le front de Taeyong.

- A plus buddy.

Ten le regarda faire avec une pointe de jalousie et prit place au bord du lit de Taeyong. Il n'y avait pas grand-chose à faire dans cette pièce sombre. L'infirmière avait fermé le rideau pour pouvoir travailler tranquillement et à part Taeyong, personne d'autre n'occupait de lit. Sa santé n'était plus en danger. Il s'était brièvement réveillé le temps d'apercevoir l'infirmière en arrivant et s'était aussitôt rendormi. A présent, il somnolait simplement. Ten essaya de faire le moins de bruit possible lorsqu'il s'allongea sur le lit voisin. Il tenta vainement de se distraire en posant à autre chose que le jeune homme endormi à ses côtés mais échoua lamentablement. Au bout de trente secondes son regard dévia vers le visage endormi de Taeyong qu'il admira jusqu'à ne plus supporter la distance. Ten se releva d'un bon, attrapa une chaise et se plaça à ses côtés. Même dans son sommeil, Taeyong avait l'air de souffrir. Ses poings serraient si fort le bout de ses manches que ses phalanges en devenaient blanches, ses sourcils étaient froncés et de petits gémissements aigus s'échappaient de temps à autre de ses lèvres.

Ten se sentit impuissant. Il aurait aimé pouvoir faire quelque chose parce qu'au fond, son père avait raison : Taeyong ne méritait pas de souffrir. Toute sa vie il avait répandu le bien autour de lui et aujourd'hui, plus que d'habitude, il avait envie d'arracher un sourire à Taeyong. Pas le sourire pincé et terriblement mal à l'aise qu'il lui offrait chaque matin en montant dans la voiture mais un vrai sourire. Un de ces sourires qu'on ne calcule pas qui nous viennent naturellement et restent même quand on n'en veut plus. Ten voulait le rendre heureux, alléger sa poitrine de tous les tourments qu'il affrontait quotidiennement. Il ne voulait plus se fatiguer à masquer les papillons qui boxaient dans son estomac par des regards froids et des sourires hautains.

- Qu'est-ce que j'ai pu être con...C'est ma faute... Si j'avais pas dit ça... jamais tu n'aurais pris le bus et jamais tu ne te serais évanoui, soupira-t-il en prenant son visage dans ses mains.

Taeyong ne bougea pas d'un millimètre et Ten céda à la tentation de replacer délicatement une mèche de cheveux qui tombait sur son front.

- Pourquoi tu me fais ça, hein ? murmura-t-il en traçant du bout de l'index les contours de son visage.

Lorsque Taeyong fronça le nez, Ten arrêta aussitôt ce qu'il faisait et fourra honteusement sa main dans sa veste. Il passa le reste de la matinée à détailler le moindre grain de peau de Taeyong. En temps normal, il s'en serait voulu de se montrer si indiscret et de profiter de sa vulnérabilité mais Taeyong ne s'était pas gêné pour l'espionner toutes ces années, alors Ten ne se priva pas.

- Ten, je dois aller déjeuner. Je compte sur toi pour veiller sur Taeyong. S'il se réveille, il y a une banane et une bouteille d'eau sur mon bureau. Ne partez pas tant que je ne suis pas revenue même s'il se sent mieux, indiqua l'infirmière en attrapant son manteau.

Ten hocha la tête en consultant sa montre. Il n'avait pas très faim alors il décida de sauter le déjeuner pour rester auprès de Taeyong. Au bout de quelques minutes de silence profond, ses paupières s'alourdirent et sans qu'il ne puisse s'en empêcher, il s'endormit.

Lorsque Taeyong se réveilla, il voulut grogner mais sa voix resta coincée dans sa gorge. Il avait mal à la tête et l'envie pressante d'uriner. Ses yeux mirent quelques secondes à s'habituer à la lumière du jour qui l'aveugla. Aussitôt qu'il aperçut les rideaux en tissu, il sut où il se trouvait. Lorsqu'il ne pouvait pas se réfugier aux toilettes, Taeyong avait pour habitude de s'échouer à l'infirmerie où il pleurait jusqu'à ne plus en pouvoir. Ce n'était pas une surprise de se retrouver là. Il se demanda si Mark l'avait porté avec ses petits bras, et trouva la réponse en baissant les yeux sur sa couverture.

Son cœur rata un battement. Là, posé sur sa cuisse, le visage endormi de Ten lui faisait face. Taeyong eut envie de hurler tant il était dérouté et paniqué mais seul un croassement grave quitta ses lèvres.

Qu'est-ce qu'il fait là ?! Est-ce qu'il a vu la scène de ce matin ? Oh non... Pitié c'était déjà assez difficile comme ça...

Taeyong sentit sa gorge se nouer. Il fallait qu'il profite de son manque de vigilance pour s'enfuir. Il n'était vraiment pas prêt à discuter avec Ten. Son cœur lui faisait terriblement mal car chaque fois qu'il l'apercevait ou pensait à lui, il se remémorait les mots douloureux qu'il lui avait balancés sans pincette et se rendait compte une fois de plus que celui qu'il aimait le détestait profondément. La pression lui tordit l'estomac tandis qu'il dégageait délicatement la couverture sur le côté. Il était pied nu mais s'en moquait. Il préférait courir sans chaussure dans les couloirs plutôt que de rester une seconde de plus dans la même pièce que Ten. Seulement son regard s'accrocha au visage paisible de Ten et il s'y perdit quelques minutes de trop. Même si sa raison lui hurlait que Ten était mauvais et qu'il n'avait fait que le blesser jusqu'à présent Taeyong était faible et face à ses sentiments, il avait du mal à lutter. Alors, il s'arrêta une fois debout et admira le profil parfait de Ten. Taeyong l'avait vu dans des centaines de situations différentes mais il ne l'avait jamais vu aussi ébranlable, chétif. Il eut presque envie de promener sa main dans ses cheveux, de poser ses lèvres au coin de sa bouche, pas exactement dessus parce que c'aurait été trop facile.

Il eut envie de profiter de lui. De lui raviver tout ce qu'il ne lui offrirait jamais. De lui arracher tout ce qu'il désirait. Mais il ne le fit pas. Peut-être la peur l'en empêcha-t-elle. Ou peut-être sa conscience se sentait déjà bien trop coupable pour commettre une erreur supplémentaire qui donnerait à Ten une raison de le détester. Taeyong étouffa sa respiration dans sa main. Il l'aimait tellement, Ten ne l'aimait pas. Et en même temps il ne pouvait pas lui en vouloir. C'aurait été trop égoïste de sa part, il n'avait pas le droit d'attendre de lui qu'il éprouve une attirance pour quelqu'un d'aussi dérangé que lui. C'était peut-être pire qu'un chagrin d'amour.

Taeyong traîna les pieds jusqu'au côté où Ten dormait et se pencha à quelques millimètres de son visage, pour avoir un aperçu de la longueur de ses cils. Même d'aussi près, il était sublime. Ten sentit son souffle chaud s'abattre sur son visage et ouvrit doucement les yeux pour découvrir le visage horrifié de Taeyong qui bondit à l'arrière.

- Pardon, je voulais pas te faire peur, murmura-t-il en s'étirant, un sourire aux lèvres.

- N-Non... C'est m-moi, bégaya Taeyong en se dirigeant vers la porte.

- Attends ! Reste !

Sans savoir pourquoi, Taeyong obéit. La pointe de désespoir dans la voix de Ten le figea sur place. Taeyong se retrouva incapable de faire le moindre pas. Il croyait halluciner. Peut-être qu'i était si amoureux qu'il projetait sur la réalité ce qu'il avait toujours espéré.

Ten avait une voix douce et bienveillante, rien à voir avec le ton moqueur qu'il lui étalait au visage depuis qu'ils se connaissaient. Taeyong eut l'impression d'être confronté à une personne totalement différente. Il se sentit un peu plus rassuré et osa tourner la tête vers Ten qui avait encore la trace du matelas sur la joue.

- Tu ne peux pas partir tant que l'infirmière n'est pas revenue.

Dire que Taeyong se sentit déçu serait un euphémisme. Sans savoir pourquoi, il s'était attendu à ce que Ten lui pose des questions plus... personnelles. Qu'il s'intéresse à lui, qu'il entame une conversation. Mais il ne fallait pas rêver.

Alors sans un mot, Taeyong s'installa sur une chaise dans un coin de la pièce et évita avec application le regard fougueux de Ten.

- Comment te sens-tu ?

- Qu-Quoi ?

- Tu t'es évanoui ce matin...

- Je... je...

Taeyong ne pouvait pas parler lorsque Ten le regardait avec autant d'attention. Son cœur battait bien trop vite.

- Tu veux un peu d'eau ?

Il hocha la tête et attrapa la bouteille que lui lança Ten à la volée. Ten profita du fait qu'il ne puisse pas parler pour aborder le sujet qui le perturbait depuis que Taeyong s'était réveillé.

- Je... Je t'ai écrit une lettre. Parce que tu ne voulais pas me parler... Mais je ne l'ai pas ici... Alors... je vais te dire oralement ce que je t'avais écrit.

Taeyong manqua de s'étouffer. Il retira le goulot de ses lèvres et fixa Ten avec incompréhension.

- Ce sera moins bien mais... Ten se frotta la nuque, je voulais m'excuser pour ce que je t'ai dit dans la voiture.

A l'évocation de cet incident, Taeyong sentit son cœur se serrer et baissa la tête pour masquer ses larmes.

- C'est p-pas grave, c'est déjà oublié-

- Si c'est grave ! Et non, tu n'as rien oublié puisque tu as pris ma remarque au pied de la lettre alors que c'était simplement stupide et immature de ma part. Je m'en veux vraiment. Je suis désolé...

- N-Non je comprends... Je suis tellement bizarre, tu dois être mal à l'aise en ma compagnie...

- Taeyong, soupira Ten en se levant de sa chaise.

Face à toute sa hauteur, Taeyong se rétrécit instinctivement dans son siège.

- Je ne vais pas te faire de mal n'aies pas peur... dit-il en levant les mains en l'air en signe de défense.

- Tu m'en as déjà fait, répliqua Taeyong sans se rendre compte de ce qu'il disait.

Gêné, il porta la main à sa bouche et se mit à rougir furieusement.

- Je... Je ne sais pas quoi faire pour me rattraper... Si ce n'est m'excuser à nouveau. Tu n'es pas bizarre et au lieu de me moquer comme je l'ai fait bêtement, j'aurais dû t'aider.

Taeyong resta muet. Il était submergé par des dizaines d'émotions qu'il avait du mal à ne pas laisser exploser. Il avait peur qu'en ouvrant la bouche, il ne puisse pas s'empêcher d'avouer à Ten qu'il l'aimait. Ses excuses ne lui firent pas plaisir, non. Elles déclenchèrent en lui une vague de joie indescriptible qu'il ne masqua pas longtemps. Il se mit à sourire timidement et lorsque Ten s'en rendit compte, il ne put se retenir de le prendre dans ses bras. Tout se passa si vite que Taeyong n'eut pas le temps de réaliser qu'il était pressé contre sa poitrine musclée. Il voulut hurler, étranger à tout ce contact mais se rendit compte que Ten ne lui provoquait pas la même appréhension que n'importe quel autre contact humain. Avec lui, la peur s'évanouissait et un sentiment de sécurité la remplaçait. Taeyong se sentit rassuré, presque à l'abri de son anxiété, et enroula ses bras autour du dos de Ten qui le serra encore plus fort.

- Ceux qui se moquent de toi n'ont rien compris... Tu n'es pas bizarre. Seulement spécial, à ta manière et moi... ça me plaît.

A ces mots, Taeyong sentit une vague de chaleur apaisante irradier sa poitrine subjuguée d'amour. Il ne répondit pas, ne voulant pas tout ruiner et enfonça un peu plus son visage pâle dans le pull de Ten.

- Taeyong... demanda Ten au bout d'une longue minute.

Taeyong releva son regard voilé de larmes et observa Ten qui était bien trop proche de lui.

- Est-ce que... tu m'aimes ?

Il avait posé cette question si simplement comme si elle n'impliquait rien. Comme si elle n'avait pas provoqué une flopée de larmes sur les joues rougies de Taeyong qui l'avait violemment repoussé, complètement effrayé d'avoir été percé à jour. La honte s'abattit sur lui et il fondit sur le sol dans une explosion de sanglots douloureux qui laissèrent Ten bouche bée. Il ne parvint même pas à mentir. C'était juste trop dur de faire semblant. Il pleurait parce qu'il était terrifié d'être rejeté, parce qu'il se sentait humilié, parce qu'il avait l'impression qu'en tombant amoureux de Ten, il avait fait quelque chose d'interdit. Et parce que par-dessus tout, il ne voulait pas perdre ce qu'ils venaient de nouer. Maintenant qu'il avait goûté à la chaleur de ses bras Taeyong ne se sentait plus en mesure d'y renoncer. Ten allait l'abandonner et lui... lui que ferait-il alors? Il était perdu.

Ten s'accroupit à sa hauteur et écarta délicatement les mains qui cachaient son visage. Taeyong essaya de baisser la tête mais Ten l'en empêcha en saisissant son menton de sa main libre.

- Réponds-moi, ordonna-t-il d'une voix autoritaire mais qui restait très calme.

Taeyong crut que sa vessie allait lâcher. C'était de la torture. Il pleurait tellement qu'il avait du mal à respirer. La prise de Ten sur ses poignets était douce mais l'effroi qui agitait son corps l'empêchait d'en profiter. Il se mit à prier intérieurement pour disparaître et, en ouvrant ses yeux humides, constata avec terreur que Ten était toujours là et qu'il voulait sa réponse. Taeyong se mit alors à trembler comme une feuille.

- Je... Je suis désolé... J-Je voulais p-pas, bafouilla-t-il en sanglotant.

Ten n'attendit pas une seconde pour le prendre dans ses bras et caresser ses cheveux.

- Chut... Tout va bien.

- J'ai p-pas f-fait exprès... Ne me haïs p-pas...

Frappé de stupeur, Ten observa le petit être qui pleurait dans ses bras. Il ne s'attendait vraiment pas à ce que Taeyong dise une telle chose et sentit une peine immense l'envahir en voyant à quel point il avait peur de son amour.

- Il n'y a pas de faire exprès ou pas. Ces choses-là ne se contrôlent pas.

Il posa ses deux mains brûlantes sur les joues encore plus chaudes de Taeyong et plongea dans son regard. Un jour, il le taquinerait et lui dirait qu'il savait pour ses séances d'espionnage. Mais là n'était pas vraiment le bon moment. Ten eut honte, mais ne put s'empêcher de trouver Taeyong adorable avec ses joues rouges et couvertes de larmes et ses grands yeux apeurés.

Il ne voulait pas lui faire plus de mal. Taeyong souffrait déjà trop, il fallait qu'il cesse cette mascarade à laquelle il prenait plaisir. Quelques secondes lui suffirent pour décider de mettre fin à cette souffrance. Dans un sourire doux et passionné, Ten se pencha et posa ses lèvres sur celles de Taeyong qui arrêta instantanément de pleurer. Et lorsqu'il s'écarta pour caresser doucement ses joues avec une mine euphorique, il se rendit compte que son cœur n'avait pas émis le moindre sursaut de dégoût. Bien au contraire. Il en demandait encore et toujours plus. Tout comme Taeyong qui, du bout des lèvres, supplia : « Encore un... »

Et Ten réalisa son souhait sans se faire prier.

Quels ships voulez vous pour mon prochain OS? Un ship hétéro gay? Dites-moi!

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