Entre deux mondes (Solangelo)
Il me supplie de rester,
Encore un été,
Que j'ai besoins de repos,
De le rejoindre comme tantôt,
Moi qui pensais ne pas m'intégrer,
Pour aucune peine créée,
Les ombres m'appellent,
Mais je traîne,
Je vois ces cheveux blonds comme le soleil,
Ses yeux bleus, deux belles merveilles,
Son sourire remplacer par une grimace,
Je veux qu'il me menace,
Qu'il m'insulte, qu'il me frappe,
Pour avoir une excuse pour passer la trappe,
Celle qui relie mon monde mort et silencieux,
À son monde lumineux,
Je suis entre ma maison et lui,
C'est pour ça que je le fuis,
Pour ne pas le blesser,
Comme les autres du passé,
Au final, ce carnet me sert,
À inscrire des poèmes aussi moche que des vers de terre,
Je peux dire merci,
À ma chère psy,
De me l'avoir donner,
Pour écrire mes sombres pensées.
Je mets dans ma poche la feuille que j'ai trouvée au sol. Aucune signature mais je sais à qui ça appartient. Dans les rares cours où nous sommes ensemble, quand il s'assit à côté de moi, j'observe son écriture en pattes de mouche et tremblante. C'est la même, cependant je ne veux pas y croire. Je ne veux pas penser à la raison pour laquelle il ne vient plus depuis cinq jours. Mon jeune ami, à qui j'avais prêté mon livre sur les rêves, avait glissé ce mot dedans pour moi, pensant sûrement que je la verrai directement. Et bien non, cinq jours de peur, de tristesse, expliqués par un simple bout de papier.
Une cloche sonne, celle qui indique la fin des cours, mais je reste stoïque. Le professeur de chimie remballe ses affaires et me dit de partir mais je ne réponds pas. J'observe la chaise à côté de ma place, la sienne. Quelqu'un me prend le bras et me tire jusqu'à la porte. Je sens sa légère odeur de mer mélangée à celle du chlore, celui de la piscine. Il me tire jusqu'aux toilettes masculines. Je vois ces yeux bleu océan m'examiner me rappelant le jour où je l'avais dessiné. Il me tend un mouchoir. Je me demande pourquoi avant de sentir mes joues inondées. Ma main tremble mais arrive à le prendre.
- Will, calme-toi. C'est moi, Percy, et tout va bien, ne t'inquiète pas.
- "Ne t'inquiète pas" ? C'est une blague j'espère. Bien-sûr qu'il faut s'inquiéter ! Il n'est plus venu depuis cinq jours !
- Je sais pourquoi... Nico me l'a dit indirectement.
- Vous ne vous connaissez même pas ! C'est avec moi qu'il passe ses après-midi ! Pourquoi il ne me l'a pas dit alors ?
- C'est compliqué...
- Tellement compliqué que je vais le voir, je dois avoir le coeur net.
- Tu ne peux pas y aller dans cet état.
- Tu n'es pas mon père Jackson.
- Peut-être mais je protégerai toujours mes amis.
Percy me prend le poignet. Je tire pour me dégager de son emprise mais il tient bon, pour le sportif qu'il est, c'est normal. Je vois une lueur d'inquiétude inhabituelle chez lui dans son regard. Ses sourcils se froncent, ses muscles se tendent.
- Will. Écoute moi, n'y va pas.
- Lâche-moi. Tout de suite.
Je lui avait crié dessus, sur un ami. Je vois sa main se lever puis entamer une course folle jusqu'à ma joue. Sûrement grâce à l'adrénaline, je ne sens rien mais je me vois dans le grand miroir des toilettes. Un garçon aux cheveux blonds, peut-être cendrés, aux joues trempées, dont l'une est marquée d'une trace de main rouge, et au regard désespéré voire fou. J'avais mis quelques secondes à savoir que c'était moi. Dans un élan désespéré, je tire une fois pour toute et sa main se détache de mon poignet. Là aussi il y a une marque rougeâtre.
Mon corps agit tout seul, mes pensées occupées par un seul être. Grâce à des messages envoyés au cours de l'année, je sais où il habite. Rapidement, les belles rues se succèdent pour laisser place aux champs de blé. J'observe une maisonnette au loin, je continue de courir mais plus vite. Tellement vite que je ne vois pas la racine légèrement surélevée, celle qui me fait tombé la face la première sur la route pavé parcourue de nids-de-poule.
Ce choc me fait revenir à la réalité. Bon sang que je suis stupide ! Je devais avoir l'air d'un fou en courant dans les rues jusqu'aux champs. Percy avait raison de m'empêcher d'y aller. C'était juste déraisonnable de ma part. Et la baffe qu'il m'a mise. J'en sens seulement la douleur, l'adrénaline devant arrêter de me stimuler. Ma joue est en feu, mes pieds et mes jambes en compote. Je me retourne pour voir la racine qui m'avait fait tomber. Une racine de ce qu'il y a de plus commun avec une partie blanche et rectangulaire en dessous. Une partie qui ressemble à s'y méprendre à une... feuille ? Je m'empresse de la prendre, encore une folie de ma part pensant que ça venait de lui. Il n'y a aucune chance pourtant je retourne la feuille. Elle est parcourue d'écriture en pattes de mouches et tremblante. La sienne, j'en suis certain.
Ce rêve m'obsède,
Jusqu'à mes rêves,
Ses lèvres tièdes,
Douces comme de la sève,
Mes pulsions envers lui,
Que les chrétiens condamnent,
Mais je veux continuer le drame,
D'être fou amoureux d'un ami,
Homme qui plus est,
Beau comme Apollon,
Devant sa splendeur je me tait,
Je suis sûrement juste con,
Il doit être hétérosexuel,
Il attire les filles avec ses cheveux miel,
Il est le soleil et moi une ombre,
Un bon vivant et un gars restant dans sa tombe,
Les mots ne me viennent plus,
Tout est foutu,
Un amour à un seul sens,
En même temps, à quoi je pense.
Encore lui, depuis quand il fait des poèmes ? J'en avais fait pour lui, pour ses beaux yeux. Je rougis à cette pensée, est-ce vraiment juste pour ses beaux yeux que j'écris ? Secrètement, je jalouse ce garçon qu'il aime. Je ne savais pas qu'il était homosexuel, encore un secret de sa part.
Après avoir repris mon souffle, je me relève et mets la feuille pliée dans la même poche que l'autre. Il ne me reste même pas cinq cent mètres que je parcoure en marchant rapidement. Je frappe à sa porte plusieurs fois de suite, ne répondant pas à la première tentative, je perds patience. Mais la porte s'ouvre. Une petite tête de noiraud apparaît dans mon champ de vision.
-Will ! Que fais-tu ici ? Tu es tout crade et tu es blessé. Que t'est-il arrivé ?
-Ne t'inquiète pas. Je voulais venir pour... pour...
Au fait, je ne savais même pas pourquoi je voulais venir. Je voulais juste voir son visage, savoir que son premier poème n'était pas ce que je pensais, de voir qu'il n'était pas avec un autre garçon.
-Pour ?
-Juste, tiens. Je l'ai trouvé dans le livre que je t'ai prêté, tu as dû l'oublier. L'autre était sous une racine, là-bas.
Je lui tends les deux feuilles de papier chiffonnées.
-Tu les as lues ? Je l'avais oublié, c'est vrai. Rentre, je t'en prie. Tu as marché depuis la ville jusqu'à chez moi juste pour ses deux pauvres feuilles.
Je le suis dans le salon. Contrairement à mes attentes, tout est lumineux. C'est même un peu luxurieux. Seul une partie de la pièce était dans l'ombre, une cheminée sur laquelle est posée deux cadre photo, celui d'une femme et d'une jeune fille se ressemblant énormément mais aussi un peu à Nico. Une rose et une chandelle les entourent.
-Assis toi, je vais te chercher un pack de glaces.
Je m'assois et Nico arrive quelques minutes après, une pochette de glaçons entouré d'un essui dans la main. Il la pose sur ma joue, me procurant le plus grand bien.
-Je ne savais pas que tu écrivais des poèmes...
-Je me suis inspiré de toi, enfin, je suis bien moins doué que toi.
-Tes poèmes m'ont fait comprendre que tu es amoureux d'un garçon.
-Au fait... T... Oui.
-Tu n'es plus venu pourquoi ?
-Je dois te dire quelque chose... Depuis quelques mois, je suis amoureux de toi. Mais, je sais que tu n'es pas intéressé par les garçons. Je t'ai vu avec cette fille, Drew. Elle t'a embrassée...
-Elle a essayé mais je suis amoureux de quelqu'un d'autre.
-Qui ?
Je m'approche de lui et l'embrasse. Moi aussi je l'aime, mon roi obscur.
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