Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

40. Duncan (Final - part. 2)

C'est avec une rage non dissimulée que je claque la porte de mon bureau. Mes iris brûlants se posent sur le portrait d'El Padre.

« Tu dois me jurer que tu feras tout pour honorer cette promesse. Je ne serai pas tranquille dans ma tombe tant que ma fille n'aura pas obtenu ce qui lui revient de droit. »

« Il doit se retourner dans sa tombe à cause de toi... »

« Tu es un homme bien, Duncan. Fais en sorte de le rester. »

— AAAAAAAAAAAAAAAAAARRRGHHHHH !

Dans une pulsion subite, je renverse tout ce qui se trouve sur mon bureau sur le tapis. Papiers, stylos, verres et cendriers s'écroulent à mes pieds alors que mes mains viennent enclaver ma tête où les voix intérieures ne cessent de se succéder.

— Duncan ?

Sylvia se tient dans l'embrasure de la porte, la mine effarée devant les objets éparpillés sur le sol. Elle pose ensuite son regard sur moi avant de s'approcher avec prudence.

— J'ai entendu du bruit je suis passée voir ce qui se passe...

— T'approche pas, Sylvia.

— Duncan...

— Je vais bien. Rassure-toi. Tu peux rentrer chez toi.

Ses épaules s'abaissent et je peux lire la déception dans ses prunelles. Mais très vite, elle l'efface pour adopter la mine fière qu'elle arbore à chaque fois qu'elle tente de me cacher ses émotions.

— Je ne rentrerai pas tant que tu es dans cet état-là !

— J'ai besoin d'être seul ! Tu comprends pas ça ?!

— Oh que si, je le comprends très bien ! Mais devine quoi... je n'ai aucune intention de te laisser gérer ça tout seul. Et tu sais pourquoi ?

Elle laisse sa phrase en suspens le temps d'enlacer ma nuque. Je me détends légèrement à son contact et amarre mes yeux aux siens.

— Parce que je sais exactement ce que tu ressens en ce moment même. Et il est hors de question que je te laisse seul avec tes démons.

Le temps d'un instant, je me perds dans les nuances d'or et de lumière qui habitent ses prunelles. Ses mots font écho en moi et font taire les voix sournoises de ma tête. Je ne vois plus qu'elle. Plus que par elle.

Pris d'un besoin vital, je fonce sur ses lèvres et les dévore, comme pour aspirer cette part d'humanité qui vit en elle, alors qu'elle me manque cruellement. Elle me rend mon baiser avec fougue, nos mains se baladant sur nos corps respectifs, nos cœurs battant à l'unisson.

Au moment où je la soulève et pour la plaquer contre la vitre de mon bureau, la porte s'ouvre.

— Wow, p'tain...

Je grogne en reconnaissant la voix d'Isaac et lâche Sylvia dont les joues se sont teintées d'une couleur rosée qui la rend d'autant plus désirable.

— Je suis occupé, Isaac. Reviens plus tard.

— Je pense que tu dois écouter ce qu'il a à te dire, intervient Sylvia en échangeant un regard grave avec lui.

Je fronce les sourcils et jette un coup d'œil en direction de mon pote. Comme nous tous, les vestiges du combat que nous avons mené sont visibles sur son visage. Mais plus encore, et pour la première fois de ma vie, je vois en Isaac l'ombre si caractéristiques des remords.

— Je vous laisse, poursuit-elle avant de sortir de mon bureau.

Isaac contemple distraitement le désordre qui règne sur le tapis.

— T'as intérêt à ce que ça soit urgent, mec, l'avertis-je en ramassant deux verres au sol.

— J'me casse.

Je stoppe mes mouvements tout en cogitant sur un éventuel sens caché derrière ces paroles.

— Tu te quoi ?

— J'me suis pris la tête avec Hernán. C'est pas bon pour l'gang, donc j'me barre.

— Et moi je suis quoi ici ? Une figurine ?

— C'est à mon pote que j'cause là, pas à mon boss.

— Ouais, sauf que tu me parles de quitter le gang. Donc c'est bien à ton boss que tu t'adresses là. « Rapaces ou trépasse », t'as oublié ?

— Alors bute-moi.

— Ok, là tu commences à me les briser. Qu'est-ce qui s'est passé ?

Isaac soupire et s'installe sur le canapé. Je croise les bras, comme pour me forcer à maîtriser cet élan de colère qui vient s'ajouter à mes effervescences déjà présentes.

— J'ai pas assuré. J'ai mis Vera et Sylvia en danger en acceptant de les conduire à El Sereno.

— T'as fait ce qu'il fallait. Connaissant les deux furies, je pense qu'elles se seraient arrangées pour rentrer dans ce ghetto avec ou sans toi.

— Hernán est pas d'cet avis.

— Et ? Tu t'en tapes de ce qu'il pense, non ?

— Non, je m'en tape pas.

Je plisse les yeux et rallume mon habano déjà entamé quelques heures auparavant. Perdre Isaac n'est pas une option. Encore moins pour une raison aussi futile. Face à la vitre qui donne sur le jardin, je remarque la présence de Vera qui pleurniche derrière un buisson.

C'était à prévoir.

— Je suis pas convaincu. Y a autre chose. C'est à cause de la mioche ?

— Dunc'...

— T'es une Chemise Noire. On a déjà perdu Malik... tu veux nous mettre dans la merde pour ça ?

— J'te connais et je sais qu'tu trouveras toujours un truc.

— Je te laisserai pas partir tant que tu m'auras pas expliqué.

— Vera est incontrôlable. Depuis qu'on est rentrés au manoir elle s'est mise en tête de buter Laora.

— La musique en boucle, c'était elle ?

— Ouais, c'était son idée. Et j'ai exécuté.

— Impressionnant. Et ça a pas plu à Hernán.

— Non. Il m'tient responsable du comportement d'sa sœur à cause de l'influence que j'ai sur elle.

— Quelle influence ?

— Vera est amoureuse d'moi. Elle m'l'a avoué tout à l'heure. Son attitude de rebelle, c'est simplement pour m'prouver qu'elle est une femme forte. Sauf qu'elle s'met en danger pour ça et j'veux pas d'ça sur mes épaules.

— C'est ce que toi tu penses, ou ce qu'en pense Hernán ?

— Peu importe. C'qui compte, c'est qu'ça risque de finir en embrouille interne et foutre la merde dans les rangs. Hernán pète des câbles à chaque fois qu'il m'voit avec sa sœur. On est déjà fragilisés à cause de la mort de Malik, pas question d'créer en plus des conflits entre les Chemises Noires.

— Et donc, ta solution c'est de tout quitter pour préserver les clans. Sacré sens du sacrifice, mec !

— Tu sais qu'j'ai raison.

Je cogite sur ses paroles qui ne sont pas bien loin de la réalité. J'avais remarqué l'attitude un peu trop protectrice de Hernán vis-à-vis de sa demi-sœur qui ne demande qu'à se libérer de son emprise. D'un autre côté, je ne suis pas dupe de ce qui se tramait entre Vera et Isaac, et ce depuis un bon moment.

— Tu sais que si tu pars, elle va t'en vouloir à mort.

— Je sais.

— Et elle risque d'être encore plus ingérable qu'avant.

— Peut-être au départ, mais ça ira mieux quand elle m'oubliera. C'est pour le gang. 

C'est pour le gang.

Je lâche un rire sarcastique, plus encore quand je constate sa mine sérieuse et concernée.

Il est aussi dans le déni que moi.

— Admettons que j'accepte que tu te casses, finis-je par lâcher. Tu vas aller où ?

— J'en sais rien. Mais j'suis pas un gosse, j'vais m'débrouiller.

Je hoche la tête, et me dirige vers ma bibliothèque pour en sortir une petite enveloppe blanche. Je vérifie son contenu et souris.

— Et si je te dis exactement où tu peux aller, et qu'en échange, tu me rends un petit service ?

— Alors j'te dis, j'suis ton homme, boss.

Deux semaines se sont écoulées depuis que j'ai mis fin aux jours de Laora. Depuis qu'elle a implanté dans mon esprit une graine venimeuse, pernicieuse.

Mais ce n'est qu'une question de temps avant d'en avoir le cœur net.

Le soleil débute sa lente émergence dans le ciel alors que je peine à retrouver le sommeil, trop submergé par mes pensées. Sylvia dort à poings fermés à mes côtés. Les faibles lueurs aurorales éclairent le rebondi de son épaule alors qu'elle me tourne le dos. Son corps n'est recouvert que d'une fine étoffe bleu nuit et ses cheveux épousent les formes de son cou divin.

Aussi divin qu'elle...

Si d'habitude, cette proximité apaise mes tourments, ce matin, elle ne fait qu'accentuer mon mal-être. Ces deux dernières semaines ont été meilleures qu'un rêve éveillé. Laora, disparue, Sylvia à mes côtés, les affaires qui coulent... que demander de plus ?

Mais comme toutes les bonnes choses ont une fin, il est grand temps de quitter le monde utopique des songes et de retrouver lucidité.

Mon téléphone qui vibre sur la table de chevet de Sylvia ne fait que me confirmer ce fait :

[ J'y serai à 8h tapantes. MW ]

Je lis, relis et re-relis ces mots en maudissant ma misérable vie qui m'a conduit à faire ce choix. Mais je sais que c'est la meilleure solution qui s'offre à moi. Dans la vie, les meilleures décisions sont celles qui sont les plus dures à prendre.

Et celle-ci ne déroge pas à la règle.

Sylvia bouge dans son sommeil. Il faut que je la réveille si je ne veux pas qu'elle soit en retard. Je prends un instant pour caresser son bras endormi. Son grain de peau soyeux coule sous ma paume. Elle est si douce. Si belle.

Elle frissonne.

Pas de froid, il fait toujours aussi chaud.

J'ai besoin de la serrer contre moi. De fondre sa peau avec la mienne pour qu'on ne fasse plus qu'un. De mon corps, je viens envelopper le sien. Son dos est calé contre mon torse et son cul frotte contre mon entrejambe, accentuant mon érection matinale déjà bien présente.

J'ai envie de la croquer... de la lécher... de la bouffer...

Mes mains vagabondent sous le tissu bleu pour agripper la chair tendre de son ventre pendant que mes lèvres se perdent dans son cou. Sa peau est chaude et parfumée. Douce et délicieuse.

Elle glousse contre moi, sa voix rendue rauque par son éveil en cours.

— Mmmh... tu sais réveiller une femme, toi.

— Attends, t'as encore rien vu...

Alors que mes dents s'emparent du lobe de son oreille, ma main, elle, glisse sous sa lingerie pour s'emparer de son sexe humide.

— On est déjà trempée, docteur ?

— J'ai fait des rêves très chauds...

— Ah, vraiment ?

Elle me provoque, et j'en profite pour introduire deux doigts en elle. Elle geint et se colle davantage à moi. De ma main libre, je malaxe l'un de ses seins alors que ma langue trace une ligne invisible le long de sa clavicule.

— Est-ce qu'on te faisait ça dans ton rêve ?

J'accompagne mes chuchotements de coups de pression contre son clitoris. Ma queue se tend à l'extrême alors que je l'entends gémir. Les yeux fermés, la tête penchée en arrière, les ongles plantés dans mes avant-bras, abandonnée au plaisir que je lui procure.

Une tension sans paire se fait sentir au niveau de mon membre, plus tendu que jamais. D'une pression sur sa mâchoire je lui tourne le visage pour aspirer sa bouche.

Elle me mord la lèvre... j'adore quand elle fait ça.

Je souris.

La douleur au fond de mon torse s'approfondit.

— Petite coquine...

— Viens en moi, Duncan. S'il te plaît.

Sa proposition, mêlée à sa voix sensuelle ensommeillée fait tomber le peu de self control qu'il me restait. J'ai tout juste la présence d'esprit d'enfiler un préservatif avant de la pénétrer doucement. J'ai envie de prendre mon temps, de savourer chaque instant.

Elle se cambre pour approfondir notre échange. Nos lèvres sont accrochées les unes aux autres, incapable de se séparer. Sa main se perd dans mes cheveux. Nos doigts s'entremêlent, tout comme le sont nos jambes. Mes bras encerclent sa taille. Et nos soupirs résonnent à l'unisson.

J'ai envie d'être partout à la fois : en elle, sur elle, sous elle... peu importe. Tant que je peux dessiner ses courbes du bout de mes doigts. Tant que je peux aspirer son souffle et la faire mienne.

Comment a-t-elle fait pour me rendre aussi dépendant ? Comment fait-elle pour me satisfaire sur tous les points, tout en me poussant à en vouloir toujours plus. Elle m'a rendu esclave de sa chair, prisonnier de sa luxure.

— Plus vite, Duncan !

— Toujours aussi impatiente...

Elle rit contre mes lèvres alors que redouble ma cadence. Mes à-coups sont plus secs, plus brutaux. Et avec eux, ses gémissements se font de plus en plus audibles.

Je m'allonge sur le dos et l'emporte avec moi. Elle se déhanche autour de moi tout en poursuivant sa délicieuse sérénade qui emplit l'atmosphère. Je ne la quitte pas des yeux, préférant mémoriser chaque mouvement de corps alors qu'elle nous soumet tous les deux à son propre plaisir.

Elle est belle. Bandante. Magnifique.

Je l'aime.

— Putain !

Je perds le contrôle.

Elle est au bord de l'orgasme, je le sens.

Je n'en suis pas trop loin non plus, d'ailleurs.

Mais il faut que je tienne. Je veux l'emmener plus loin que l'extase. Je veux marquer sa peau, son corps, son âme... à jamais.

— Duncan ! Oui ! Ne t'arrête surtout... surtout... paaaaas !

Loin de moi l'idée de m'arrêter en si bon chemin, je lui assène le coup de grâce en titillant son bouton gonflé, mon autre main accrochée à sa gorge.

Dans une dernière plainte de plaisir, Sylvia explose et convulse contre moi. Je la suis de très près et m'immobilise en elle le temps de nous remettre de nos émotions.

Un sourire distrait étire les lèvres tuméfiées de ma doctoresse alors que je sens son cœur cogner avec force contre ma peau. J'effleure son visage angélique. L'extase du moment progressivement remplacée par l'amertume des regrets.

— Tu vas me manquer.

Les mots m'ont échappés, mais qu'est-ce que je m'en tape.

J'ai plus rien à perdre de toute façon.

Elle se redresse pour mieux me surmonter avant de m'embrasser tendrement.

— Je ne m'en vais que pour trois jours. Une fois ma conférence à Toronto terminée, je prends le premier avion pour LA. Tu ne te rendras même pas compte de mon absence !

Mes doigts s'engouffrent dans sa chevelure en bataille. Si elle savait...

— Si un seul gars te mate, je le bute.

— Je me serais sentie touchée si je savais pas que tu étais réellement capable de faire une chose pareille.

— Bon, je le bute pas, je lui crève seulement les yeux, comme ça on est bon.

— Alors comme ça, ça veut dire qu'on est exclusifs... je n'ai pas le souvenir qu'on ait parlé de ça.

Moi non plus. Et pour cause.

— Prépare-toi si tu veux pas rater ton avion, lui lancé-je sèchement.

J'ai envie de cogner dans un truc !

Sans un regard pour elle, c'est enragé contre moi-même que je quitte la chaleur de ses draps. Dans une autre vie, je lui aurais dit que je la voulais rien que pour moi. Et que jamais je n'en toucherai une autre. Mais je ne peux pas. Je ne peux pas. Je ne peux pas lui donner ce qu'elle veut.

Ni aujourd'hui, ni jamais d'ailleurs.

On s'habille. En vitesse et en silence.

On n'a même pas le temps de prendre un café avant de décoller. Le temps presse.

Sans aucun regard vers moi, elle traverse le pas de sa porte d'entrée et m'attends à l'extérieur. Je l'ai blessée comme je sais si bien le faire. Mais elle joue la fière comme elle le fait si bien.

Je parcours du regard son appartement pour la dernière fois quand je remarque son passeport qu'elle a oublié sur l'îlot de la cuisine. Je le prends et le feuillette distraitement.

— Ne regarde pas ma photo, je ne suis pas terrible dessus, maugrée Sylvia de là où elle se trouve.

— Comme si c'était possible, ricané-je en cherchant sa photo.

Comme je m'y attendais, elle est magnifique dessus. De quelques années plus jeune, les cheveux un peu plus courts mais tout aussi ondulés, elle fixe l'objectif avec cette détermination qui la caractérise.

— Ouais, vraiment pas terrible, ricané-je.

— Crétin.

Quelle humeur massacrante ! Amusé, je parcours d'un œil distrait les informations inscrites sur le document officiel quand un détail me fait tiquer.

— Je croyais que tu avais peur pour mon avion, soupire-t-elle.

— J'arrive.

C'est dans un lourd silence que le trajet vers l'aéroport international de Los Angeles se déroule. Je conduis, perdu dans mes pensées que je sais très différentes de celles de Sylvia.

Une fois sur place, j'éteins le moteur de ma bagnole et prend un instant pour retrouver mes esprits.

L'heure de vérité a sonné.

— Sylvia, faut que te dise un truc.

— Ne te fatigue pas, Duncan. Je sais très bien ce que tu vas me dire.

— Ah ouais ? Tu paries combien ?

Plus exaspérée que jamais, Sylvia sort de l'habitacle et contourne ma caisse pour récupérer sa valise dans le coffre. Je lâche un ricanement provocateur avant de la rejoindre.

On est pile à l'heure. Il est sept heures cinquante. Je récupère la valise de Sylvia malgré ses protestations et trace mon chemin vers le hall des départs.

— Duncan, tu marches dans la mauvaise direction. Je dois me rendre au terminal 7.

— Je suis dans la bonne direction, t'inquiète.

— Les panneaux indiquent que le terminal 7 est à droite. Or, tu vas à gauche.

— Aie confiance, au moins une fois dans ta vie.

— Je te jure que si tu me fais rater mon avion, je t'émascule !

— Mais bien sûr ! m'esclaffé-je en cherchant le terminal 2. Qui te fera rugir de plaisir si tu fais ça ?

— N'importe qui d'autre. On n'est pas exclusifs, non ? Tu pourras lui crever les yeux plus tard si ça te chante.

Je ris de plus belle, puis, incapable de lutter contre mes pulsions, je m'arrête au beau milieu des voyageurs pour lui voler un baiser langoureux. Elle tente de se détacher de mes bras, mais se résigne très vite pour s'abandonner à mes lèvres. Très vite, mon engouement factice s'efface alors qu'une sourde douleur prend possession de mon coeur.

Elle est la première à éloigner son visage du mien, une mince suspicieuse fichée au visage.

— Bon, et si tu me disais ce qui t'arrive ?

— Ce qui m'arrive ?

— Je te sens nerveux. Et distant. Alors que c'est à moi de l'être vu ta manière de réagir tout à l'heure, ajoute-t-elle en levant les yeux au ciel.

Je lui caresse machinalement la joue, pas étonné de voir qu'elle arrive à lire en moi avec autant de transparence, malgré mon expertise en matière de camouflage de sentiments.

La vie est injuste. Je l'ai toujours su et accepté. Mais là, tout de suite, j'ai envie de tout balayer d'un coup de pied.

— C'est vrai, confirmé-je sans la quitter du regard. Et tu vas m'en vouloir pour ce que je vais faire, mais c'est pour toi que je le fais.

— Je ne comprends rien...

— Tu vois les bornes d'enregistrement là-bas ?

— Là où il y a marqué vol en direction du Lagos, oui. Pourquoi ?

Je lui lance un regard lourd de sens qu'elle soutient un instant avant de cligner plusieurs fois des yeux. Sa bouche s'ouvre pour former un O parfait. Elle vient de comprendre ce qu'il se trame. Mon cœur bat avec frénésie. Mon moi intérieur me hurle de contredire ses pensées, de l'embarquer en courant au terminal 7, ou mieux, dans ma caisse pour l'enfermer chez moi.

Mais j'ai déjà pris mes engagements.

— J'ai contacté Mike Wilson. Je lui ai dit que t'as changé d'avis pour la mission en Afrique et que tu allais y aller. Ton avion décolle dans deux heures. T'as tout juste le temps de t'enregistrer et de passer le contrôle des frontières. Ton prof référent à l'hôpital est prévenu. Wilson est normalement déjà à l'intérieur. Tout est près pour que tu réalises ton rêve, Sylvia.

Confuse, elle esquisse un mouvement de recul. Ses lèvres s'ouvrent et se referment sans qu'un seul son n'en sorte. Ses paupières papillonnent, elle a l'air totalement perdue, presque à bout de souffle.

Je me déteste de lui infliger ça. Mais c'est pour son bien.

C'est pour son bien.

— C'est... c'est une blague ? réussit-elle à articuler.

— Non. J'ai jamais été aussi sérieux.

— Tu te rends compte que ce n'est pas à toi de prendre cette décision à ma place ?!

— T'as fait le mauvais choix en décidant de rester, Sylvia. T'as pas à mettre tes ambitions entre parenthèses pour un type comme moi.

— Qu'est-ce que tu connais de mes ambitions ?! Qu'est-ce qui te fait croire que tu as le droit de décider pour moi. Merde, Duncan ! Tu continues de faire ce que j'ai toujours détesté que tu fasses !

Les iris de la doctoresse me fusillent. Je peux sentir son cœur se briser en même temps que le mien. Mais je sais que sa détresse aujourd'hui formera sa fierté de demain.

C'est pour son bien !

— Je veux t'empêcher de foutre ta vie en l'air, rétorqué-je en maintenant un ton neutre et une attitude détachée.

Si j'avais eu la possibilité de tout quitter, de me racheter après avoir commis mes premiers meurtres, je n'aurais jamais hésité. Elle en a l'occasion aujourd'hui. Gâcher ça, c'est s'enterrer à une vie de remords.

— Je ne la fous pas en l'air ! proteste-elle, les joues d'un rouge rageux.

— Sylvia, regarde-moi.

Je la prends par la taille et l'immobilise. Elle déglutit, ses prunelles profondément ancrées dans les miennes. Elle attend d'entendre ce que je vais lui dire, luttant sans doute contre le flot de larmes qu'elle s'empêche de déverser.

— T'es entrée dans ma vie à une époque où la lassitude m'accablait. Tu m'as rappelé ce que c'était d'être humain. Tu m'as donné sans compter. Bien plus que je le mérite. Tu m'as sauvé la vie plusieurs fois. T'as soigné mes blessures les plus profondes, même celles que personne pouvait voir. Maintenant, c'est à moi de te rendre la pareille. Mais te garder près de moi, même si j'en crève d'envie, ça serait trop égoïste. Je peux pas faire ça.

Une goutte perle des yeux de Sylvia et arrache à mon cœur une nouvelle contraction. Je m'étais promis de plus jamais la faire pleurer. Encore une promesse ratée. Je l'efface avant de prendre son visage en coupe.

— Tu t'épanouies dans ton travail, Sylvia, t'as pas idée à quel point. Ces enfants là-bas, ils n'attendent que toi. Vas-y. Épanouis-toi. Fais ce que tu aimes. T'as pas à sacrifier ça. Ni pour moi, ni pour personne. Tu le dois à toi-même.

Je crispe la mâchoire pour reprendre contenance. Chacune de ses larmes qui coulent sur mes mains agit comme un poignard tranchant sur mes entrailles. Jamais une douleur physique n'égalera ce que je ressens en ce moment.

— T'es un Rapace, Sylvia. Le plus grand de tous... mais tes ailes sont pas faites pour que tu les gardes enfermées dans une cage. Tu dois les déployer et prendre ton envol. Sinon, tu seras pas heureuse, même si tu es à mes côtés.

Livide et désespérée, Sylvia tente le tout pour le tout pour me faire changer d'avis.

— Je suis prête à prendre le risque.

— Pas moi.

— C'est toi qui m'a appris qu'une vie sans risque ne vaut pas la peine d'être vécue. Qu'est-ce qui a changé ?

— Ce qui a changé...

C'est que je t'aime comme un dingue.

— C'est que je suis pas un risque qui vaut le coup d'être pris.

— Si, tu l'es !

— Sylvia, je te connais. Et je sais que cette mission, t'as envie de la faire. T'étais prête à accepter y a même pas un mois. T'as changé d'avis pour les mauvaises raisons. Si t'y vas pas, tu vas le regretter toute ta vie. Et j'en serais responsable.

— La mission dure deux ans...

— Je sais. Mais tu seras tellement occupée que tu verras même pas le temps passer.

Elle pouffe d'un rire sans joie alors que je reprends les mots qu'elle a prononcé il y a moins d'une heure.

— Viens avec moi, m'implore-t-elle.

J'esquisse un sourire sans joie avant de prendre ses lèvres à nouveau. Sa langue chaude rencontre la mienne et s'y accrocher, comme pour me tenter d'accepter.

Et ça l'est, tentant.

— Je peux pas. El Padre m'a confié une mission. Je le dois à sa mémoire de pas me défiler. J'ai trop laissé traîné.

Sylvia hoche la tête pour me signifier qu'elle comprend. Je lui vole un dernier baiser salé. Je préférerais crever que de faire couler ses larmes. Je préfèrerais brûler sous Terre plutôt que de lui infliger autant de peine.

Mais c'est pour son bien.

Pour son putain de bien !

— Prends soin de toi, murmure-t-elle en reniflant. Je ne pourrai pas venir à ta rescousse alors que je serai à l'autre bout de la planète...

— T'inquiète pas pour moi. Wilson doit s'impatienter. Il m'a donné rendez-vous à huit heures.

— Comment tu as fait pour le convaincre ? J'avais refusé son offre.

— On dirait que tu me connais pas assez bien après tout. Je suis Duncan Reed, chérie. J'ai toujours ce que je veux.

Elle sourit alors que j'enfile à nouveau mon masque d'arrogance. Elle remet le sien à son tour, un sourire léger flottant au bord de ses lèvres.

— Adieu, Duncan Reed.

Elle prend sa valise et se dirige vers la borne la plus proche sans se détourner. Mon regard ne la lâche pas jusqu'à ce qu'elle disparaisse derrière les guichets de contrôle. Je lutte contre l'envie de la suivre, de l'empêcher de partir, de lui crier toute la puissance de mes sentiments. Mais mes membres refusent de bouger.

Mon âme, quant à elle, quitte mon enveloppe de chair pour s'envoler à jamais, emportant avec elle les dernières bribes d'humanité qui me restaient. 

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro