Chapitre deux
Je suis déboussolée. Complètement perdue. Je me relève et sors du bâtiment en courant puis tourne la tête dans tous les sens pour trouver la raison de ces bruits et tremblements. Je ne vois rien dans le premier temps puis j'aperçois une scène qui me pétrifie. Des Silencieux. Des avions capables de se déplacer à plusieurs centaines de kilomètres/heure sans émettre le moindre bruit. Les bombes qu'ils larguent, en revanche, ne sont pas aussi discrètes. Je vois les avions tracer le ciel, faisant pleuvoir les projectiles. La scène avait un effet hypnotique mais je reprends vite mes esprits. Il n'est pas difficile de comprendre qu'en restant ici, je signe mon arrêt de mort. Je ne suis pas la seule à avoir compris ça. Derrière moi, dans l'orphelinat, j'entends les cris des enfants terrifiés qui se bousculent pour sortir ainsi que ceux des habitants qui détalent. Je commence à courir vers la sortie de la ville. Je m'arrête brusquement au bout de quelques mètres comprenant l'inutilité de ce que je fais. Le sang bat dans mes tempes, étouffant les détonations autour de moi, ce qui me permet de me concentrer. La ville est bien trop grande. Je n'en sortirai pas en passant par là.
Une idée me vient à l'esprit. Une idée folle. C'est malheureusement la meilleure que j'aie. Je ne pourrai pas quitter la ville en étant pourchassée par les avions. Ils me rattraperont et je finirai sous le feu des bombes. C'est mon instinct animal qui me pousse à fuir dans la direction opposée aux Silencieux. Et tout le monde sait que c'est de cette manière que les animaux se font piéger. Alors je commence à courir vers les explosions, malgré mes jambes en coton. Ils ne bombarderont pas deux fois de suite la même zone, alors si j'arrive jusqu'aux immeubles brûlés et détruits je serai peut-être en sécurité. Je cours sur le sol en métal avec l'étrange impression de ne pas sentir mes jambes. J'entends vaguement le bruit des chocs réguliers de mes pieds qui foulent la route mais ils me paraissent étouffés. Je me faufile entre les habitants qui fuient dans l'autre sens, en tentant de ne pas me faire bousculer.
- Mais tu es folle ! Tu veux mourir ou quoi ! C'est de l'autre côté qu'il faut aller si tu tiens à la vie ! Me crie une femme en pleurs qui tente de quitter la ville.
J'essaie de lui expliquer qu'il n'y a aucune issue par là mais elle repart déjà en courant.
- Tant pis, je marmonne. J'aurai essayé au moins.
Je me fais bousculer, presque piétiner. Les gens ne m'accordent aucune attention. Trop occupés à se jeter dans la gueule du loup, j'imagine. Je me prends un coup de coude dans la figure en essayant de traverser la foule. Je cherche du regard la personne qui m'a frappée mais elle doit déjà être loin. Je secoue la tête pour me reprendre mes esprits. Je dois continuer. J'ai l'impression de faire du surplace ou plutôt de reculer, emportée par le torrent d'êtres humains. Je joue des coudes pour traverser ce flot et la foule finit par s'éclaircir. Je m'arrête en sueur, haletante. Toute la poussière qui flotte dans l'air ne m'aide pas à reprendre ma respiration. Je lève les yeux. J'ai presque atteint mon objectif. Je dois continuer en tâchant de ne pas me faire tuer par les explosions qui se rapprochent de plus en plus.
C'est de la folie, je n'y arriverai pas. Je continu pourtant en courant de plus en plus vite. Je traverse les allées et les rues que je connais comme ma poche. Elles ne sont pas encore détruites mais je peux voir d'ici des bâtiments d'où s'échappe de la fumée. Les rues sont désertes. Au moins je ne me ferai pas bousculer. Alors que je m'engage dans une ruelle étroite que j'emprunte régulièrement comme raccourci pour me rendre au centre-ville, il me semble apercevoir une petite silhouette humaine. J'hésite un instant, consciente que si je me trompe, je ferai un aller-retour inutile qui jouera contre moi. Mais en même temps, je ne peux pas laisser quelqu'un ici...
- Pourquoi il y a encore quelqu'un ici ? je marmonne avant de faire demi-tour.
Je reste encore plus perplexe lorsque je reviens sur mes pas. Quelques centaines de mètres devant moi, ce qui me semble être un enfant est agenouillé sur le sol en métal et fixe le ciel. Il est de dos. Je m'approche en courant et pose mes mains sur les épaules de l'enfant qui sursaute et se retourne vers moi. C'est une jeune fille d'environ sept ans. Elle a des cheveux roux poussiéreux qui tombent jusqu'aux épaules, des yeux d'un bleu cristallin, un petit nez légèrement retroussé et un visage parsemé de taches de rousseurs.
- Il faut partir, lui dis-je. Tu vas mourir si tu restes ici.
- Je sais, répond-elle d'une voix pas plus inquiète que ça.
Je la dévisage avant de la tirer par le bras.
- Suis-moi, on peut fuir par là.
- Non ! je dois rester là !
Je m'énerve : Mais dépêche-toi ! On n'a pas beaucoup de temps.
La jeune fille lève les yeux vers les Silencieux qui se rapprochent de plus en plus et se lève d'un bon. Elle essuie d'un revers de la main la poussière des explosions collée à son visage dont je dois également être recouverte. Mais l'heure n'est pas aux apparences, il faut partir. Plus le temps de rejoindre mon raccourci. J'attrape la main de la rousse et m'élance dans la rue principale. Dans le ciel, je vois les Silencieux tracer de grands cercles dans le ciel avant de revenir à l'assaut. Derrière moi, la rousse court du mieux qu'elle peut en s'accrochant fermement à ma main. Je me retourne sans m'arrêter de courir.
- Au fait, comment tu t'appelles ?
Quitte à mourir, autant connaitre un peu la personne qui est avec moi.
- Jine ! souffle-t-elle d'une petite voix.
- Ginny ? crois-je comprendre.
- Non ! Jine ! répète-t-elle un peu plus fort. Et toi ?
- Wyssle, mais tu peux m'appeler Wyss, si tu préfères. C'est plus simple à retenir.
Elle hoche la tête. Elle semble courageuse cette gamine. Ou alors elle ne se rend pas compte. Elle n'est absolument pas paniquée, du moins elle ne le montre pas. Durant toute ma course, j'ai vu tant d'adultes et d'enfants fuir en pleurant alors que cette petite tête rousse se contente d'ouvrir de grands yeux secs à la vue des avions.
Nous arrivons au niveau des premières maisons détruites. Nous sommes presque en sécurité mais Jine me lâche brusquement la main et s'arrête. Je freine également pour l'attendre.
- Que fais-tu ? Nous y sommes presque !
- Continue, me répond-elle. Je dois sauver cette ville.
Je hausse un sourcil.
- Ne dis pas de bêtises, tu n'es qu'une gamine de sept ans. Tu vas mourir !
- J'ai huit ans, pas sept !
- Quelle différence ? J'en ai bientôt treize et je ne peux rien faire ! Et tu restes une gamine.
- Pas une gamine, une miraculeuse.
Voilà, encore un chapitre ! J'espère qu'il vous a plu. Désolé si vous trouvez qu'il y a trop de suspense. Le prochain chapitre viendra dès que j'aurai un peu plus d'inspiration. Si vous avez des conseils ou des critiques constructives, je vous écoute. Bise mes poulpes !
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