Chapitre cinq
J'ai les paupières lourdes comme du plomb. Je peine à ouvrir les yeux mais je finis pourtant par y arriver. Ma vue prend plusieurs secondes à se stabiliser. La première chose que je découvre est un plafond blanc. Je me redresse mollement. Je me trouve dans une petite salle carrée aux murs blancs. Je suis assise sur un banc de béton au fond de la pièce à l'opposé d'une porte en fer. Aucune fenêtre. J'ai l'affreuse impression d'étouffer lorsque je comprends. Je suis prisonnière. Je prends une grande inspiration pour dénouer la boule qui s'est formée dans ma gorge.
- Où suis-je ? hurlé-je.
Aucune réponse. Je m'approche de la porte, les jambes un peu engourdies. Mes articulations me font mal. Sans doute les conséquences d'avoir dormi sur une surface dure. Il n'y a ni poignée, ni serrure dans cette porte. Je pousse contre la surface plate dans l'espoir de l'ouvrir. Elle est fermée. Je donne alors un grand coup du plat de la main. J'ai les doigt en feu. La porte résonne mais ne bouge pas. Pourtant, une voix masculine retentit. Mon coup n'a pas été vain.
- Quoi ?!
- C'est quoi cet endroit ?
- Le centre d'entrainement des nouvelles recrues.
Cette déclaration me fait l'effet d'un coup en plein ventre. Le centre des nouvelles recrues. La guerre a commencé pour moi. Mon angoisse ne fait qu'augmenter lorsque je me souviens de Jine. Qu'est-elle en train de subir ? Je dois sortir et la retrouver. Je frappe plusieurs fois la porte.
- Mais j'ai encore douze ans ! Laissez-moi sortir ! Vous n'avez aucun droit de m'enfermer !
J'allais continuer à débiter toutes sortes d'arguments me permettant d'être libérée mais il m'interrompt.
- J'ai tous les droits... (il fait une courte pause avant de reprendre) Vyssle Odakdi. Tu as eu treize ans hier.
Je suis donc restée si longtemps inconsciente ? Je grimace.
- Premièrement, Je m'appelle Wyssle. Ça se prononce comme « oui ». Et deuxièmement, je n'ai rien à faire avec des idiots de la sorte dans une prison de... !
Je m'interromps. J'entends le bruit des bottes en métal de l'armée claquer sur le sol signifiant qu'il s'éloigne. Je soupire et vais m'assoir sur le banc au fond de la salle. Je serre les dents pour ne pas laisser couler des larmes de rage. Je refuse d'être transformée en bête de combat. Encore moins pour servir ce pays qui détruit des vies.
Dans un élan de colère, je m'élance de nouveau contre la porte. J'essaie d'enfoncer le métal avec mon épaule mais tous ce que j'obtiens, c'est une douleur fulgurante dans le bras. Des larmes de douleur se pointent aux coins des yeux, mais je réessaie.
- Arrête ! intervient soudain la voix d'un enfant qui semble avoir mon âge. Arrête tout de suite !
Sa voix semble bienveillante mais je doute que faire confiance à un inconnu soit une bonne idée.
- Et pourquoi ça, je te prie ? dis-je d'une voix méfiante.
Je frappe de nouveau la porte.
- Arrête immédiatement ! Tu veux perdre le peu de temps qu'il te reste avant l'entrainement où quoi ?
Je plisse les yeux et balaye la salle du regard.
- Qui es-tu ? Et où es-tu ?
- Je me nomme Luno. J'ai treize ans, les soldats sont venus me chercher il y a deux jours. Et où je suis ? Je dirais dans le même bâtiment que toi, la cellule d'à côté. (Petite pause) Et toi ?
Je m'approche du mur d'où provient la voix.
- Moi, c'est Wyssle. Les soldats sont venus me chercher il y a environ deux semaines.
- Deux semaines ?! s'étouffe-t-il.
- Oui, ma ville a été quasiment détruite par les Silencieux. On est venu nous chercher, une petite fille et moi. J'ai eu peur qu'ils nous emmènent alors j'ai assommé l'un des soldats avec une barre en métal mais finalement ça n'a servi à rien.
Il émet un long sifflement.
- Tu as assommé un garde ? Alors là, chapeau, je t'admire.
Je me décide enfin à poser la question qui me brûle les lèvres.
- Tu n'aurais pas vu une petite fille de huit ans, rousse, en venant ici ? Elle s'appelle Jine. Elle était avec moi...
- Non, désolé. Je ne suis pas sorti depuis deux jours...
- Il faut que je la retrouve, je murmure.
Je frappe la porte. Malgré l'avertissement du garçon. La porte ne bouge toujours pas. Je l'ai bien compris, d'ailleurs. Mais je refuse de rester là sans rien faire.
Désespérée, je me traine vers le banc et éclate en sanglots. Toutes les larmes que j'ai tenté de retenir depuis mon réveil m'échappent.
- Wyssle, tu pleures ? fait la voix de Luno. Tu sais, ce n'est pas si horrible ici. Ça pourrait être pire en tout cas.
- Ce n'est pas ça... Je m'inquiète pour Jine.
- Elle n'a que huit ans. Ils vont ramener chez elle, elle ne les intéresse pas pour l'instant.
« Si seulement... » me dis-je intérieurement.
- Tu as sans doute raison. Répondis-je, me mentant à moi-même.
Je veux sortir. Je ne resterai pas une seconde de plus ici. Je dois trouver Jine. C'est à cause de moi qu'elle est là. Si je l'avais écoutée lorsqu'elle me criait de partir, nous n'aurions pas été capturées. Je ferme les yeux pour retenir le torrent qui tente de dévaler mes joues. Je prends une grande inspiration. La porte doit bien avoir un point moins solide que le reste. Si je le trouve, je suis libre.
Je m'accroupis près de la porte et tapote contre la surface lisse et froide. Je ne trouve rien. Pas la moindre faiblesse. Vexée, je donne un coup de pied. Un élancement me parcourt la cuisse. C'est vrai que je me suis pris une balle. D'accord, c'est une balle réservoir. Une petite bille que l'on remplit d'un liquide. Une fois dans la peau, il n'y a plus qu'à activer un bouton pour que la bille s'ouvre, déversant son contenu dans le corps de la personne touchée. La mienne devait être remplie d'un puissant somnifère.
J'ignore la douleur et cogne contre la porte plusieurs fois. J'ai maintenant les coudes en sang. J'entends soudain un sifflement et l'air se fait brûlant. Je panique et plaque ma main contre ma bouche. Pas besoin d'être un génie pour comprendre ce qu'il se passe. Ils sont en train de gazer ma cellule.
J'ai l'impression d'avoir les poumons remplis de feu et je m'écrase au sol prise de tremblements.
J'entends vaguement Luno hurler « Je t'avais dit de ne pas le faire ! Je te l'avais dit ! » puis tout devient noir.
Voilà le cinquième chapitre ! Désolé pour le retard.
Bise mes animaux de mer.
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