6. surprises d'anniversaires
Abigaëlle,
Je viens tout juste d'apprendre que tu avais été sélectionné pour le tournoi ! Madame Mouret est passé ce matin pour me le dire, apparemment c'est une très bonne chose. Je suis très fier de toi, je savais que tu y allais arriver! Tu es une fille si brillante, tu ne pouvais que être selectionnée et avec Madame Mouret, on croise les doigts pour que ton nom sorte le 31 octobre (si j'ai bien compris). J'espère que ça donnera un exemple à ton frère, j'ai encore du signer un papier parce qu'il avait pris deux heures de retenu (n'essaie pas de le couvrir, votre école me prévient chaque heure de colle!).
Si je comprends bien ta dernière lettre, ça veut dire que tu pars en Ecosse pendant huit mois ? C'est une occasion formidable pour rencontrer des jeunes comme toi de ton âge et de parler anglais! C'est ta grand-mère qui sera contente de savoir que tu as fait un échange au Royaume-Uni. Peut-être que tu pourra faire un coucou à ta tante Ellen, si tu peux ? Si c'est impossible, je comprendrai. La dernière fois que je l'ai eu au téléphone, elle m'a dit que ce serait tout de même bien si je me remariai. Enfin voilà. Je suppose qu'on ne se verra pas ce Noël ou est-ce qu'ils vont vous laisser rentrer ? Tu me dira.
Je suis très fier de toi et tu peux être sûr que ta mère aurait tout aussi été fière de toi mon ange. Tu me racontera tout.
Je t'embrasse,
Ton papa qui t'aime très fort.
(ps: une prochaine lettre arrive dans la semaine avec ton cadeau d'anniversaire).
Je venais tout juste de recevoir la lettre de mon père. Nous étions lundi matin, 8 heures, et j'avais déjà envie d'être la fin de la semaine. Depuis vendredi soir je ne pouvais pas faire un pas dans l'académie sans me faire littéralement sauter dessus par des gens que je ne connaissais que de vues. Et peut-être qu'au fond, ça c'était le plus chelou. Des gens qui ne m'avaient jamais regardé commençaient à me reconnaître.
— Le côté positif, évaluai-je après avoir fini la lettre de mon père, c'est que je n'aurai plus études de runes ou botanique.
Nous étions dans la salle du petit déjeuner, j'étais avec mon éternel tasse d'earl gray, ma brioche et mon bol de riz au lait, avec Agnès, Henriette et Rosalie.
— J'aurai aimé être selectionnée, se lamenta Henriette en s'aggripant fermement à sa tasse d'expresso. Plus de botanique, le rêve.
— Mais j'ai défense contre les arts noirs toute la matinée, précisai-je. Et cet aprem c'est métamorphose. Mais le pire, c'est que j'ai des cours de sports. Juste après la métamorphose. Je veux crever.
— Oh non trop triste! s'exclama Henriette. Tu vas sécher comment ? Tu veux qu'on t'ouvre une cagnotte ?
— Jamais je mettrai un bézant sur cette cagnotte, déclara Rosalie. Ca pourrait te faire du bien un peu de sport en vrai.
En guise de réponse, je lui adressai mon majeur droit.
— Merci pour cet instant de poésie, fis Rosalie. Ca va me manquer quand tu partira.
— Je peux te cracher dessus tout les matins si tu veux, ajouta Henriette. Histoire que tu sois pas trop dépaysée.
— Ca ira Henriette, merci. J-14, j'ai calculé ce matin. Tu te sens comment ?
Je terminai la tasse de thé.
— Redemande moi ça ce soir, tu veux ?
— En vrai, ça peut être intéressant ces cours, lança Agnès pour la première fois du petit déjeuner. Tu pourra me prêter tes parchemins, à la fin ?
J'aquisai silencieusement.
A l'extérieur, il avait arrêté de pleuvoir pour de bon mais le ciel restait toujours aussi gris, le gris du mois d'octobre toujours pleins de soupir et de mélancolie. Autour de nous, les gens discutaient gaiement, ce qui était assez paradoxale parce qu'on était lundi et que tout le monde avait envie de crever.
— En vrai t'as de la chance, remarqua Henriette. Je te jure que je commence avoir ma claque des profs qui parle que du DEM. C'est bon, on a compris, est-ce qu'on peut passer à autre chose ?
— Tu dis ça parce que Maintenon veut nous voir en fin de semaine pour savoir ce qu'on veut faire l'année prochaine ? demanda Rosalie. J'avoue que faire ça si tôt c'est angoissant, mais on doit monter le dossier dès janvier.
J'avais gardé en tête mon rendez-vous avec Maintenon pour jeudi matin, le jour de mon anniversaire. Mais moi c'était très simple: le conservatoire de Paris. Je serai musicienne, je l'avais décidé.Une simple demande de candidature en janvier et je passe l'examen début juillet.
— On va y aller ? lançai-je. Je veux pas être à la bourre pour mon premier cours de tournoi...
— Excusez-nous mademoiselle, s'empressa de dire Henriette. Non, attends, comment il t'appelle Hansman ? Mistinguette. Promet moi que tu vas pas essayer de le tuer en Ecosse, tu es définitivement trop jeune pour avoir des problèmes avec la justice. Surtout que là, ma belle, tu sera majeure. D'ailleurs, on fait quoi pour ton anniversaire ?
Je détestais fêter mon anniversaire. Enfin, quand j'étais petite j'adorai ça. Mes parents l'organisaient dans notre petit appartement en invitant mes copains de classes. On faisait des chasses aux trésors, ma mère nous faisait des tours de magie bidon, on se gavait de bonbons et on s'amusait. Et puis, j'ai perdu ces amis en partant pour Beauxbâtons, maman n'était plus là, et j'étais seule pour mes anniversaires. On rentrait généralement chez nous pour les vacances d'Halloween et pour mes 11 ans, j'avais essayé de re-organiser un anniversaire avec ses copains là. C'était nul. Je ne savais pas organiser d'anniversaires, je n'étais pas assez importante pour les gens pour qu'ils viennent, il n'y avait pas d'ambiances. Donc j'ai arrêté de fêter mon anniversaire. Juste un petit gâteau avec les filles et Eugène, des petits cadeaux mais ça s'arrêtait là. Pas de grandes fêtes ou de grands évènements.
— Une soirée chill, proposai-je. J'aime pas mon anniversaire, les filles....
— On ne discute pas, me coupa Henriette. C'est tes dix-sept ans, évidemment que ça se fête. Et puis, on va pas te voir après pendant huit mois. C'est super long, je sais pas comment on va faire.
— Ca passera vite, répondis-je. Mais sinon, Agnès avait parlé de boire un coup samedi à Castego, on peut faire ça. Bon, je file, je vais être à la bourre. On se revoit à midi !
J'attrapai fermement mon vieux sac de cours composée sur le devant de badges que j'avais trouvé dans les vides greniers de Quimper et me hanta de sortir du manoir. Un petit vent léger caressa ma peau. J'appercevais au loin l'académie, toujours aussi belle que grandiose. Elle allait me manquer.
Sous un arbre, face à la porte d'entrée du manoir, Oscar Vanderbeck et Ariane Bellever m'attendaient. Oscar était si grand qu'il devait se pencher pour pouvoir entendre Ariane.
— Te voilà! s'exclama Ariane lorsque j'arrivai enfin à leur hauteur. J'avais peur qu'on arrive en retard...
Il ne fallut pas grand chose pour emprunter le petit sentier qui nous menait directement à l'académie. Pendant notre brève balade entre le manoir Ombrelune et l'académie, j'écoutais d'une oreille discrète la conversation d'Ariane et d'Oscar. Et je crois qu'Oscar racontait à Ariane comment il avait essayé de faire rentrer des goules dans le bureau de Maintenon.
— Et tu es encore étonné d'avoir redoublé ? lança Ariane.
— Etonné qu'ils aient accepté de me garder, corrigea Oscar. Ah, on est arrivé.
La salle qu'on nous avait donné était (Dieu merci) au rez-de-chaussé, et nous donnait une vue sur la fontaine Flamel. Je n'étais jamais entrée dans cette pièce. Elle était plutôt spacieuse, les bureaux avaient été mis de côté pour laisser place à un grand vide. A l'intérieur, presque tout les élèves étaient déjà arrivés. Madame Dufayet, fidèle à elle même, se tenait assise sur son bureau et relisait un bout de parchemin. Ses grosses lunettes rondes tombaient sur son petit nez en trompette et elle marmonnait sans doute des formules dans son coin. J'avais eu à peine le temps de franchir la salle que madame Dufayet releva le nez de son parchemin pour nous accueillir.
— Vous voilà ! s'exclama notre professeur de défense contre les arts noirs. On n'attendais plus que vous. Installez-vous!
Louis et ses compagnons étaient assis sur les bureaux vers les fenêtres et c'est donc de façon tout à fait naturelle que je me suis assise sur les bureaux (et non pas sur la chaise) côté mur. Je lui jetai un dernier regard tueur-sabre-laser mais il ne me calcula pas. A côté de moi s'était joint Ariane et Oscar. L'avantage, c'était que notre team de choc était déjà formée et que, selon mes calculs, toute la délégation allait nous envier d'ici trois/quatre jours. L'idéal était quand même pour jeudi, pour mon anniversaire.
Dufayet se redressa d'un seul coup, remonta ses grosses lunettes rondes, nous adressa son plus grand sourire et tapa deux fois dans ses mains.
— Bon et bien, déclara t-elle, maintenant que vous êtes tous présent, nous pouvons commencer. Tout d'abord, félicitations. Vous avez été selectionné pour faire parti de la délégation parce que nous, professeurs, pensons que vous avez les capacités de réussir.
— L'avantage avec Dufayet c'est qu'elle nous met pas trop al pression, me chuchota Oscar.
— Bien sûr, poursuivi Dufayet, il ne faut pas vous reposer sur vos lauriers. C'est pour cela que vos professeurs et moi même avions décidé de vous offrir des cours pour que vous puissiez arriver au meilleur de vos capacités dans deux semaines.Nous allons donc passer notre première heure de cours ensemble, puis je serai rejointe à 9h par un auror qui vous donnera, je l'espère, ses conseils pour affronter une épreuve. Pour vos exercices, que ce soit dans ma matière ou dans celles des autres, nous nous sommes basés sur les épreuves qu'il y a pu avoir dans les tournois précédents. Pour commencer cette première heure, nous allons revoir les bases. Il est important, voir fondamental, que vous puissez maîtriser les sorts de défenses fondamentaux. Pour commencer, j'ai apporté un épouventard. Tour à tour, vous allez l'affronter. Dans au moins dix épreuves des tournois précédents, les candidats ont du faire face à un épouventard. Il m'a semblé alors évident de vous préparer à ça. Qui veut commencer ? Miss Chevalier ? Parfait!
Dufayet sorti sa baguette, la pointa derrière nous en la secouant énergiquement. Un coffre apparu, comme sorti de nul part. La dernière fois que j'avais vu le coffre en question, c'était en troisième année. Une sorte de gros coffre qui ressemblait aux coffres à trésors des pirates à l'exception que celui-ci bougeait tout seul, comme s'il était épilétique. Juliette s'était placé en parallèle du coffre, en prenant soin de prendre deux voir trois mètres de distance. Elle avait attaché ses cheveux blonds en une queue de cheval et se tenait prête, la baguette levée prête à riposter contre n'importe quel attaque.
Dufayet se glissa à côté de notre petit groupe et il ne lui fallut que d'un seul mouvement de baguette pour ouvrir le coffre.
C'était peut être le cafard le plus laid, le plus immense, le plus terrifiant, le plus abominable que j'avais jamais vu de ma vie.
Même moi j'eu des frissons.
Juliette était terrorisée et cela se voyait rien qu'à son visage. Et honnêtement, même si je n'avais peur des cafards, celui-ci me foutait la trouille de malade.
Mais Juliette respira un coup, leva sa baguette avec détermination et prononça distinctement:
— Riddikulus!
J'étais très septique quant à la ridiculisation du cafard-géant. Peut-être que ce n'était pas si drôle que ça un cafard avec des patins à roulettes. Peut-être aussi que mes camarades n'avaient aucun sens de l'humour puisque presque tous (sauf Oscar et moi) riaient aux éclats. Même Ariane avait pouffé.
Et puis, je me suis rendue compte que ça allait être vraiment très chiant de faire chacun son tour l'épouvantard. Ca allait prendre du temps et on avait déjà cet aquis. Puis, notre plus grande peur, c'était hyper intime. Imaginer le fait que les autres membres de la délégation allait voir ma phobie limitait mon espace personnel.
C'est pour ça que je m'étais proposé au milieu. Être dans les cinq premiers, c'était intimidant et les autres allaient garder leur concentration. Les trois derniers, on les retenait aussi parce qu'ils étaient derniers. Je m'étais donc mise après Ariane, qui avait peur des araignées. Tout n'était que technique.
Et puis, après avoir transformé l'araignée avec le visage de madame Maxime, ce fut mon tour.
Le coffre était là, face à moi, et j'étais morte de trouille certes mais surtout morte de stress. Genre là, on allait voir de quoi j'avais peur. C'était de la violation gratuit de vie privée.
Et c'était spoiler, désastreux. Je me mis face à l'araignée -Olympe Maxime, et d'un seul coup, elle se transforma en Wallace (de Wallace et Gromit).
Un contexte était absolument nécessaire sur le coup. Wallace et Gromit c'était vraiment terrifiant. Je me souvenais encore de la première fois que j'avais vu ce dessin-animé. J'avais 7 ans, c'était un été chez mes grands-parents. J'étais avec mes cousins, dans le salon, pendant que les adultes discutaient dans la cuisine. Et ça m'avait fait super peur, sauf que mes cousins (plus âgés que moi) avait trouvé ça super drôle. Je détestais les images en pâte à modeler, le créateur de Wallace et Gromit par ailleurs devait très certainement détester les enfants.
Le bonhomme chauve en pâte à modeler s'avança vers moi, c'était HORRIBLE.
Je levai ma baguette, la secoua en pensant très fort a la formule.
Ridikulus.
Un de mes flex, c'était quand même les sortilèges informulés.
En une seule seconde, le visage de Wallace pris la forme de celui de Franck Dubosc mais avec des pâquerettes à la place des oreilles. C'était toujours un peu flippant mais la boutade avait vraisemblablement marché puisque mes camarades gloussèrent.
Mais bon, le plus ridicule dans tout ça c'était surtout avoir peur de Wallace et Groumit.
Je repris place aux côtés d'Ariane pour regarder mes autres camarades se battrent contre leur propre épouvantard. Un truc genre tout sauf passionnant.Mais madame Dufayet avait estimé qu'affronter un épouvantard était une sorte d'entraînement, d'échauffement. Sauf qu'au bout d'une vingtaine de minutes, c'était plié. Tout le monde avait réussi à ridiculiser l'épouvantard, sans vraiment de surprises.
Sauf que voilà, il nous restait 40 minutes à attendre dans le vide l'arrivée de l'auror qui allait tout nous apprendre ( je n'étais même pas sûre que c'était légal). Alors Dufayet nous inventa un exercice: on était devant des manequins de bois et on s'entraînait à lancer des expelliarmus jusqu'à l'arrivée de l'auror.
L'auror en question était Carloman Duarte.
Second d'Aliénor Faragonda, Carloman Duarte était un homme d'une quarantaine d'année, peut-être même cinquantaine (le problème avec les adultes, c'est que c'était très difficile de deviner leur âge exact), à la peau café au lait qui entrait en contraste avec ses cheveux et sa barbe poivres. Ses lunettes rondes noires agrandissait ses minuscules yeux bruns et lui donnait un air sérieux. On aurait pu dire tout et n'importe quoi, Carloman Duarte était imposant.
— Bon, commença Duarte après nous avoir salué et s'être présenté. Aujourd'hui, on va faire des duels. Je choisi les partenaires.
Evidemment, je me retrouvai avec Louis Hansman et j'avais une curieuse envie de me pendre pour la trentième fois depuis le début du mois.
❃❃
Après trois jours d'entraînements, de sueurs et de pression, je sentais déjà que je regrettai amèrement ce tournoi. Dans le sens où mercredi, après mon cours d'orchestre, j'étais allée voir Ariane en panique et je l'avais supplié de faire son truc de manifestation pour ne pas être selectionnée par la coupe. Elle m'avait répondu très clairement que ce n'était pas comme ça que ça marchait et j'étais retournée dans ma chambre avec un profond dégoût envers l'humanité toute entière.
Mais le jeudi, en me levant, j'étais remplie de détermination. Déjà parce que c'était mon anniversaire, j'étais enfin majeure dans le monde des sorciers, j'avais enfin 17 ans. Quand j'étais petite, ma mère me disait toujours que 17 ans, c'était un âge magique. Je crois qu'elle faisait reference à Dancing Queen de Abba (mes parents étaient dingues d'Abba) mais elle ne pouvait pas tomber plus juste.
Par flammel, j'aurai tellement aimé qu'elle soit encore là.
J'étais aussi remplie de motivation parce que j'avais eu une longue introspection sur moi-même avant de dormir. En fait, la longue introspection c'était Romain qui m'avait limite enguelé en me disant que j'allais y arriver. C'était sans doute la conversation la plus lunaire que j'aurai pu avoir avec mon frère.
Bref, nous étions le jeudi 20 octobre 1994 et j'avais 17 ans.
Cette journée était censé être magique.
Et puis, il y avait un côté cool à être une sorcière née le mois d'octobre. Je fêtais ma majorité sorcière à Beauxbâtons, et je fêterai ma vraie majorité avec mon père à Quimper l'an prochain.
C'était un jour d'automne gris, le vent frappait à notre petite fenêtre. Il manquait juste un peu de pluie et on avait mon temps préféré. J'adorai l'automne plus que tout, il y avait toujours quelque chose de réconfortant dedans.
Aristote, mon fidèle chat, était à mes pieds. Je me redressai pour pouvoir lui donner quelques caresses mais je fus rapidement dérangé par un poid qui venait de sauter sur moi.
— JOYEUX ANNIVERSAIRE, hurla Agnès en me prenant dans ses bras.
— Ca fait quoi d'être majeure ? me demanda Rosalie en s'installant sur le fond de mon lit à côté d'Aristote.
— J'ai du perdre un decibel ou deux à l'audition à cause d'Agnès mais sinon ça va, répondis-je. Vous croyez que Norma m'a fait des gateaux ? Et où est Henriette ?
Norma était la nymphe gardienne d'Ombrelune. Immortelle, elle s'occupait du manoir depuis la création de Beauxbâtons et avait vu défilé sous ses yeux des générations et des générations d'élèves.
Rosalie et Agnès s'échangèrent un regard complice.
— Je crois qu'elle se prépare à un concours de prose contre Arsène Beaumont.
Brusquement, la porte de notre chambre s'ouvrit pour laisser apparaitre Henriette, qui tenait dans ses mains un plateau sur lequel reposait des muffins - sans doute à la pomme et à la cannelle. Et juste derrière elle, il y avait Eugène qui lui avati dans sa main des tasses de thé.
— Vous l'avez reveillé ! accusa directement Henriette en posant les muffins sur nos bureaux. J'avais dis quoi hier sur la surprise?
— Elle s'est reveillée toute seule! s'empressa de dire Agnès. On y est pour rien!
— Tu sais, genre, les gens parfois se reveillent comme ça, ajouta Rosalie.
Je me levai, me dirigeai d'un pas affirmé vers Henriette pour la prendre dans mes bras.
— C'est quand même parfait, chuchotai-je à Henriette. Vraiment. Merci beaucoup.
— Tu nous avais dit que tu voulais rien de gros pour ton anniversaire, mais 17 ans, ça se fête.
— Mon cadeau, c'est vous.
— Pitié, grommela Eugène. Tu parles comme ma grand-mère. Joyeux anniversaire, Abigaëlle ?
Je me détachai d'Henriette pour enlacer Eugène. Eugène, qui habituellement n'était pas vraiment tactile, accepta mon acolade.
Et puis, je posai mes fesses sur le bureau et regarda avec envie les muffins qui avait des petites bougies, pas encore allumée. Un petit coup de baguette de la part d'Agnès et les dix-sept bougies s'allumèrent d'un coup.
— Souffle! s'empressa de dire Henriette. Je meurs de faim et Norma m'a assuré que c'était les meilleurs muffins du monde.
— Il faut chanter, d'abord ! s'exclama Agnès en posant ses deux mains sur mes épaules.
Je vis Henriette lever les yeux au ciel, mais elle ne dit rien de plus. Elle s'installa sur le bout de son lit et, en choeur avec les autres, chanta "joyeux anniversaire". À ce moment là précis, j'étais heureuse d'être en vie en même temps qu'eux.
Je soufflai sur mes muffins. Il y en avait cinq, un chacun.
Ce moment était parfait.
— Les cadeaux! s'exclama Agnès.
Immédiatement, elle se leva et attrapa deux paquets qui étaient dans sa penderie. Elle me tendit le premier, un tout petit paquet.
— Celui ci est de notre part à toutes les trois! s'exclama Agnès.
Je deballai le paquet avec excitation. C'était un petit collier d'argent avec un pendentif en forme de lune.
— Dès qu'on l'a vu, on a pensé à toi, m'expliqua Rosalie.
Agnès me tendis alors le plus gros paquet. J'avais attrapé entre temps un des muffins, pomme-cannelle comme je l'avais deviné. C'était mes préférés. Le paquet était assez colossale, et en l'ouvrant, je découvris une boîte. A l'intérieur, Agnès avait mis plusieurs paquets de mes sucreries préférées, des petits produits de beauté sorcière, et un carnet.
— Celui là vient de moi, m'expliqua Agnès. Et de mes soeurs, et de ma mère. Le carnet, c'est pour noter ce qui te passe par la tête quand tu sera à Hogwarts.
Les parents d'Agnès tenait la boutique de bonbons sur la Place Cachée. Il y a deux ans, j'avais passé une semaine chez elle et on s'était gavé de bonbons tous les jours. J'avais peut être du choppé des carries ce jour-là.
On s'était tous assis sur le sol, grignottant les muffins et sirotant le thé qu'Eugène avait ramené. Je regardai l'horloge, il était seulement 8h04. On avait tout le temps du monde, on commençait à 9h.
Eugène s'était assis à côté de moi.
— J'ai moi aussi ton cadeau, me chuchota Eugène en sortant de son sac un paquet. Devine ce que c'est.
— Tu m'offres chaque année un livre, rétorquai-je. Je peux le deviner à la forme de l'emballage.
— Ouvre le.
Il y avait quelque chose de doux dans le reard d'Eugène. L'ambiance était soudainement devenue bizarre et je ne savais pas vraiment quoi en penser. Comme si on était plus que tout les deux dans la chambre et que, soudainement, les filles avaient disparu. C'était très désagréable comme moment, si vous voulez mon avis, parce que c'était Eugène, il était mon meilleur ami, et que je ne voulais pas de ça.
Eugène ne savait définitivement pas emballer des cadeaux. Il y avait beaucoup trop de stoch sur le papier kraft, et c'était affreux. On aurait dit qu'un enfant de 5 ans l'avait emballé. Et puis, après trois minutes de galère totale sous les gloussements de mes amis, j'ouvris enfin correctement le paquet.
Un livre de Stephen King.
Ca.
— Je l'ai trouvé dans la section non-magique, m'avoua Eugène. J'avais hésité dans un premier temps avec les Trois mousquetaires mais je me suis dit que ça, ça pouvait de plaire. La libraire a adoré. Tu connais?
— Tu me demandes serieusement si je connais Stephen King ? C'est comme si j'arrivai et je te demandais si tu connaissais Luc Millefeuille. Evidemment que je connais, c'est le roi des thrillers. Mon père adore. J'ai déjà lu Carrie, j'avais bien aimé.
Eugène leva les mains.
— Comme si c'était de ma faute ! J'ai aucune culture non-magique, c'est terrible.
— Si on part en vacances cet été, je vous ferai écouter Nirvana. Peut-être par Jhonny Halliday, mais aussi Renaud...Et Alain Bashung, pitié cet homme est un génie.
Eugène pouffa.
— Ok ok. J'irai me renseigner. Peut-être même qu'à ton retour, je connaîtrais même ces chansons.
Il existe des moments dans la vie où soudainement, on pense être la personne la plus debile du monde. Peut importe la situation, vous vous trouverez juste bête. C'était mon cas à ce moment là. Parce que j'avais oublié notamment que dimanche prochain, je partais pour Hogwarts. Ou alors je venais de réaliser que je partais vraiment, que c'était réel. Je me sentais non seulement idiote mais aussi toute petite. Je n'allais jamais y arriver.
❃❃
C'était officiellement l'anniversaire le plus bizarre de toute ma vie. Tout le monde - littéralement tout le monde - m'avait demandé ce que ça faisait, d'avoir 17 ans, d'être enfin majeure. Honnêtement, pas grand chose. Peut-être que c'était lié au fait que dans ma tête, la majorité était à 18 ans et non 17. Peut-être parce que je n'avais plus le même engouement pour mon anniversaire que quand j'étais petite et que dès que j'avais une année de plus, je me rappelais que je n'aurai plus jamais 8 ans à jouer dans la cours de récréation de l'école primaire avec mes copines et rentrer goûter à la maison (des morceaux de chocolats dans du pain frais avec du sirop de violette).
En parlant d'enfance, Elodie m'avait envoyé son cadeau. Il s'agissait d'un simple sweat beige Nike et je me suis dis qu'il avait du lui coûter une fortune. Surtout que ici, personne ne savait ce que c'était Nike. Quant à mon père, j'avais reçu son colis en même temps que celui d'Elodie. C'était un petit bracelet en argent avec un pendentif étoile. Et puis bien sûr, il y avait Romain, qui s'était jetté sur moi à la fin de la première heure de cours en me donnant un dessin super moche et un collier de pâtes pour, je cite, "la vanne". Il m'avait, par la suite, sans doute pour montrer qu'il n'était pas si débile que ça, offert une boîte avec plusieurs sachets de thé.
Concernant les entrainements, c'était au final assez supportable. Il n'y avait pas de gros changements par rapport à d'habitude si ce n'est qu'on était plus que 12 dans la classe, qu'on avait des renforcements de cours. Mais j'avais toujours des devoirs parce que, bien sûr, on avait encore notre DEM. Les professeurs ne savaient pas si on passerai nos examens à distance ou si on allait avoir du contrôle continu. Et puis il y avait des élèves, qui me dévisageaient, chuchotaient quand je passais devant eux en pensant être discrets, et toute cette ambiance bizarre. On comptait les jours avant le top départ avec une forme d'excitation et c'était assez angoissant.
Mais, dans tout ça, il y avait un point positif: j'avais encore mes cours de violoncelle. Je visais toujours le conservatoire après tout, c'était important pour moi.
J'avais toujours eu cours le jeudi, après mes cours de métamorphose. Mon professeur, Riad Fadel, était un virtuose de la musique. Avec son visage rond, ses cheveux et sa barbe poivre et son sourire toujours pleins de douceurs, Fadel était sans doute l'humain le plus gentil de la galaxie.
La salle de musique se trouvait dans un couloir au dessus de l'auditorium. C'était une salle assez modeste, avec d'immenses fenêtres qui donnaient une magnifique vue d'abord sur les jardins du palais puis sur les montagnes environnantes, et un parquet impéc. Il y avait un piano droit sur la gauche collé au mur, des affiches de groupes de musiques sorciers que je ne connaissais que de noms, et une étagère où se reposait des cahiers de partition. En plein milieu, il y avait un pupitre argenté et deux chaises. Fadel occupait une des deux chaises et semblait m'attendre.
— Aucun retard! s'exclama mon professeur. Ca mérite d'être noté dans le livre d'Histoire de la salle 28.
(La salle 28, c'était le nom de notre salle).
— On nous a lâché plus tôt en métamorphose, expliquai-je à Fadel en posant la boîte de mon violoncelle sur le sol.
— Que Flamel bénisse ma collègue. Je n'ai pas pu e voir de la semaine, mais félicitations! J'étais sûr que tu allais être selectionnée, ça fait des années que je dis à Françoise de Maintenon que tu es brillante. Assis-toi, assis-toi.
Le archer dans une main, le manche dans l'autre, je m'installai sur la chaise libre. Je déposai mon archer à même le sol, sorti ma baguette de ma poche pour la pointer vers mon étui de violoncelle.
— Accio partitions.
— Tu peux aussi te lever et prendre tes partitions, souleva avec amusement Fadel.
— Je dois m'entraîner pour le tournoi, me defendi-je nullement.
La relation entre Riad Fadid et ses élèves étaient très différentes de celle qu'on pouvait retrouver chez d'autres professeurs. Déjà parce qu'il avait décidé de nous tutoyer alors que les autres professeurs (même de musiques) avaient opté pour le vouvoiement (madame Maxime le reprenait à chaque fin de semestre). Ensuite, parce qu'il était vraiment cool. Né de parents non-magiques, il avait passé son enfance entre Alger et Marseille avant d'apprendre qu'il était sorcier. Parfois, je le surprenait avec un t-shirt de Nirvana et je trouvais ça vraiment cool.
— Bien sûr, ria Fadid. Et les poules ont des pents, pardis!
Je collai le violoncelle contre moi, riant bêtement et surtout poliment à sa blague.
Soudain, le visage de Fadid pris un air beaucoup plus sérieux.
— Comme je disais, repris mon professeur, je n'ai pas eu le temps de te voir depuis les résultats de la délégation. Ce qui fait qu'on a pas eu le temps de parler de ce qui va se passer pour toi pour les cours. Alors oui, on a parlé des DEM, mais Montel a bien sûr méprisé les cours d'options qui sont pourtant fondamentale à Beauxbâtons. Ca ne m'étonne pas de lui, il était dans la même promo que moi quand j'ai fait mes études. Il était déjà insupportable, et trouvait que les options ne servaient à rien. Contrôle continu ou passer l'examen, pour nous la question est reglée. Il y a un examen obligatoire en fin d'année, on ne peut pas juger la musique en contrôle continu, c'est absurde. Ta convocation arrivera en décembre, mais ça va bien se passer. Je connais très bien le jury, ils sont très gentils, tu aura ton optimal en musique, c'est pas un soucis. Tu tentes toujours le conservatoire de Paris ?
J'hochai la tête.
C'était mon rêve depuis toujours.
— Bon. On en avait déjà parlé l'année dernière, et je maintiens toujours mes propos, tu devrais concourir au conservatoire sorcier et au conservatoire non-magique. Vraisemblablement, c'est les mêmes cours, et le prestige reste le même. Avec le diplome magique tu peux avoir aussi celui non-magique, cela dit. Les inscriptions sont en mars et les examens sont fin juin, début juillet. Et par chance, l'examen du conservatoire magique et non-magique se déroulent la même semaine. Et bien sûr, tu peux présenter les deux mêmes morceaux; celui obligatoire pour les magiques est le même que pour les non-magiques. Parfait, non?
— C'est noté. Comment les cours se passeront ?
— Tu as de la chance, j'ai eu la réponse ce matin ! Je vais te donner les partitions necessaires pour les examens, de DEM et du conservatoire, la semaine prochaine, et je vais te confier à mon collègue, et ami, Filius. C'est un excellent sorcier et un excellent magimusicien. Il était mon voisin d'orchestre en 1969. J'avais tout juste 20 ans. Une année mémorable, on avait gagné le grand prix magique de Tokyo.
Je souriai tendrement. J'avais hâte d'entrer au conservatoire, d'avoir à mon tour le prix de musique de Toyo, être nommée dans les révélations de l'année de la musique sorcière à New York ou juste de jouer de la musique toute ma vie. Pourquoi pas me mettre aussi dans la chanson, j'avais juste à apprendre le piano ou la guitare.
— Je suis sûr que tu sera prise, m'affirma Fadid. Tu as toute tes chances, j'ai rarement vu une élève aussi douée que toi. Mais.
Je détestais ce genre de phrase. Le genre de phrase où au climax, il y avait un "mais". Mon coeur commençait à tambouriner dans ma poitrine et mes mains devenaient moites. Je détestais ce genre de phrase.
— Mais? relevai-je avec le peu d'assurance qu'il me restait.
— Mais tu devrais faire d'autres candidatures. Au cas où. Madame de Maintenon m'a dit que tu étais très fermée à l'idée du conservatoire, et j'apprécie ta détermination, nous l'apprécions tous, mais tu devrais faire d'autres demandes. Au cas où, tu vois ? Même si je sais que tu sera prise, il faut juste que tu te fasses confiance le jour de l'examen d'entrée bien sûr. Tu as des idées ?
Pour être tout à fait honnête, pas vraiment. Dans ma tête, j'avais le conservatoire, une voie royale pour ce que je voulais faire plus tard. Les autres formations, essentiellement pour entrer au ministère, ne m'interessaient pas. Finir comme Montel ? Plutôt me faire mordre par un renard qui a la rage. J'avais bien sûr les capacités pour entrer au ministère sans problème, mais je n'avais pas envie.
— Oui, menti-je. Briseurs de sorts ou auror, quelque chose comme ça.
Fadid grimaça.
— Fais attention avec les aurors, la demande est énorme pour ce genre de formation. Tu connais l'IRIS?
— Le centre de recherches de sortilège à Oxford? Qui ne le connais pas...
Fadid m'adressa un petit sourire.
— Enfin bref, c'est tout ce que j'avais a dire. On commence le cours ? Fais-moi une gamme de sol mineur, tiens.
❃❃
Le village de Castego était un petit village, 100% magique, qui se trouvait à une dizaine de minutes à pieds de l'académie, juste en dessous. Avec ses petites maisons de pierre ancrée dans la montagne, Castego était un village pittoresque, mignon comme tout. Un samedi sur deux, une sortie était organisée histoire de sortir un peu respirer (rester coincée dans l'académie pendant six semaines, c'était déjà trop parfois).
C'était limite une chance d'avoir une sortie deux jours après mon anniversaire. Et j'étais vraiment contente parce que ça voulait surtout dire qu'on pouvait boire un coup pour fêter ma majorité. Ok, je détestais fêter mon anniversaire et ça allait être très certainement nul, voir un fiasco parce que je n'avais jamais été vraiment douée pour organiser des évènements, mais j'étais contente de me faire à l'idée que j'allais boire un verre avec les gens que j'aimais, c'est-à-dire mes colocs, Eugène, Ariane et Oscar. Le rendez-vous était à 16h au café Abringer. En attendant, on avait les quartiers libres et j'avais décidé de passer la journée avec Agnès et ses soeurs au village.
Agnès avait deux jeunes soeurs, de 11 et 13 ans. La plus jeune s'appelait Angèle, venait d'arriver à Beauxbâtons et ressemblait comme deux gouttes d'eau à Agnès. La deuxième, c'était Adélaïde. Dans la famille de Coulange avait du perdre un pari pour nommer leurs filles uniquement avec des prénoms qui commençaient par A. Ou alors, ils avaient des idées étranges volontairement.
— Raconte nous tes premières semaines à Beauxbâtons Angie! S'exclama Agnès en secouant ses boucles brunes alors que nous nous asseyons à côté de la fontaine sur la place du village.
Angèle se mit à rougir violemment. A titre personnel, je trouvais ça vraiment adorable.
— C'est bien, répondit Angèle timidement. Je me suis faite une copine pour le moment, elle est gentille.
— Nom, prénom, adresse, exigea Adélaide. Pas pour moi, pour Agnès. Comme ça elle peut espionner mieux.
Je vis ma meilleure amie lever les yeux au ciel.
— C'est pour vous protéger que je fais ça, rétorqua t-elle. Et je n'espionne pas, j'enquête ! C'est différent.
— Tu devrais être journaliste à ce stade, gloussai-je.
Un silence s'installa. Je me sentis alors stupide pour la deuxième fois de la semaine.
Les parents d'Agnès n'avaient pas beaucoup d'argent. Il tenait la boutique K. Rammelle, celle de confiserie, sur la Place Cachée. Ils avaient bien sûr des employés, mais la mère d'Agnès s'attendait à ce que sa fille aînée les rejoignent. C'était une histoire d'héritage, m'avait expliqué Agnès. La boutique avait été fondée par son arrière-arrière grand-mère, Katell Rammelle, et elle se transmettait d'aîné en aîné.
— Clemence Hausman, répondis Angèle. Elle est dans ma chambre. Abigaëlle, tu dois connaître son frère, il a été selectionné au tournoi.
Cette fois-ci, ce fut au tour d'Agnès de glousser.
— Crois-moi, elle le connaît su-per bien! s'exclama t-elle.
— Je le déteste, expliquai-je. Arrête, Duarte nous a mis en duo pour les duels, c'est horrible. Heureusement que je suis meilleure que lui, je n'aurai pas supporté cette humiliation plus longtemps.
Je ne savais même pas que Hansman avait une petite soeur.
En fait, je ne savais pas grande chose de lui. Juste que son meilleur ami c'était Lucien Chenôve, celui qui avait brisé le coeur d'Agnès, et que son père était premier ministre. D'ailleurs, je ne le détestais pas tant que ça. Je m'en fichais pas mal de lui. Il était juste insupportable. C'était une raison valable pour le mépriser.
A mon sens.
Aussi parce que je détestais tout le monde sans raison apparente.
On avait au moins pas de problème. Statistiquement, si peu de personne rentrait dans notre vie, on avait moins de chance de se faire abandonner.
Le reste de l'après-midi se passa assez bien. On était entré à la Baguette Sucrée, boutique concurante de K. Rammelle, qui avait ouvert l'année dernière. Dans le but de critiquer, bien sûr. Par exemple, les prix étaient beaucoup plus cher que la boutique des parents des filles. Ce qui nous a pas empêcher de prendre des kilos de larmes de phoénix sucrées, de pattes d'araignées gélifiantes ou des baies de licornes. Par la suite, les soeurs d'Agnès sont parties rejoindre leurs amis, en nous laissant devant le café Abringer.
La façade du café ressemblait à n'importe quel café parisien pour être honnête. L'intérieur, cependant, était chaleureux. Les vitres étaient entourés de bois et les murs étaient foncés, une teinte de verts. Sur un des murs, des photos d'anciens élèves y étaient accrochées. Plusieurs plantes étaient posées sur des étagères, et étaient utilisées comme des serres-livres. Il y avait également des lanternes ensorcelées qui flottaient dans les airs, éclairant les tables, les chaises et les fauteuils verts. Le propriétaire du café était un homme barbu et chauve qui acceuillait chaque client amicalement avec un grand sourire. Des serveurs vêtus d'un uniforme vert avec des boutons dorés circulaient entre les tables.
Mes amis étaient sur une table sur le côté, et aucun ne semblait discuter entre eux. Ce qui était bizarre, parce qu'on était quand même dans la même maison depuis cinq ans. Enfin, Eugène n'avait jamais su s'entendre avec Henriette, mais je m'étais attendue à ce qu'Ariane ou Oscar fassent la conversation tout de même. Ils étaient mes amis, mes compagnons de voyage.
— Hello, lançai-je en me glissant à côté d'Ariane. Vous avez commandé ?
— C'est que tu deviens presque anglaise! s'exclama malicieusement Eugène (personne ne ria).
— Non, répondit Ariane. On vous attendait.
J'hochai la tête. J'avais vraiment espéré pouvoir mélanger mes amis avec Oscar et Ariane, mais visiblement c'était un flop.
Oscar se tenait à côté d'Ariane, et était collé contre le mur, bras croisé, en nous donnant l'impression qu'il ne voulait surtout pas être là.
— C'est sympa! m'exclamai-je. Je vais prendre un brouillard enchantée, vous me suivez ?
C'était une des spécialités du café, et sans doute la meilleure boisson sorcière du monde. C'était une boisson chaude, sans doute à base chocolat chaud blanc, qui changeait de couleur en fonction de l'humeur du buveur. Je pouvais littéralement tuer pour cette boisson.
Après avoir commandé (j'avais aussi demandé des éclats de Lune, des tartelettes à la crème fouetté qui brillaient), le blanc qui s'était installé entre nous persitait. Et pour être tout à fait honnête, j'étais deçue. Mais déçue par rapport à moi. J'avais beau avoir été selectionnée pour la délégation, je n'avais même pas réussi à faire entendre mes amis.
Si on continuait dans cette voie là, mon mariage allait être un fiasco.
Super.
— Vous allez rencontrer Harry Potter ! s'exclama à un moment Agnès.
Parfait.
En fait, ce n'était pas tant Harry Potter qui était intéressant. C'était juste le fait qu'on allait enfin arrêter de dire des banalités et enfin avoir un vrai sujet de conversation.
— Le gamin doit avoir 12 ans, fit Oscar sous un ton méprisant(c'était la première fois qu'il parlait depuis le début). C'est pas une bête de foire, c'est juste un gosse.
— 14 ans, corrigeai-je automatiquement. Il a l'âge de mon frère. Mais ça doit déjà être une vraie célébrité à Hogwarts cela dit.
— Survivre au sortilège de la mort, souffla Ariane. C'est fascinant, en vrai. Personne n'a survécu à ça, même en portant des oeils de protection ou des labradorites.
— Est-ce qu'on est sûr que c'est pas du blabla surtout, souleva Henriette.
Tout le monde la regarda dubitatif.
Si Henriette commençait à devenir complotiste, on était fichu.
Elle leva les yeux au ciel.
— Non mais, reprit-elle. Juste, on peut pas survivre au sortilège de mort. C'est impossible. Peut-être que en effet, le mec a pu tué les parents d'Harry Potter, mais peut-être qu'il a fait une crise cardiaque avant de tué le gamin et c'est comme ça. Et boum, soft power de l'Angleterre.
— Ok et la cicatrice ? rétorqua Eugène. Tu l'expliques comment ?
Henriette haussa les épaules.
— Je sais pas, peut-être qu'il l'avait avant ? Je dis juste que, cette histoire de survivre au sortilège de mort, c'est un peu tiré par les baguettes.
❃❃
C'était officiel: je n'allais jamais me marier.
Je devais me rendre compte des faits: je ne savais pas organiser des évènements. Toujours un fiasco.
Peut-être que c'était un signe, que je devais arrêter de fêter mon anniversaire. Quoi que je fasse, ça allait toujours être nul.
Ou peut-être que c'était moi qui l'étais.
Je m'étais assise en tailleur sur mon lit, fixant avec mélancolie la carte d'anniversaire que m'avait envoyé mon père. J'aurai aimé être avec lui.
Normalement, j'aurai du partir aujourd'hui pour les vacances d'Halloween, mais pour des raisons assez évidentes, je ne pouvais pas. Je n'allais même pas le voir le jour du départ, même si les parents étaient invités, parce que mon père était non-magique et qu'il ne pouvait pas voir l'académie à cause des sortilèges de repousse moldus. Pour être honnête, je me sentais comme une princesse enfermée dans son château sauf que dans mon histoire, aucun beau prince charmant n'allait me libérer et j'étais seule.
— Salle de bain libre! hurla Rosalie.
— C'est mon tour! hurlai-je à mon tour.
Je sautai de mon lit - manquant de me tordre la cheville - pour débarquer dans notre salle de bain. Une douche, un grand miroir et deux robinets, c'étaient largement suffisant. Ma brosse à dent était posé dans un petit globet en argent où mon prénom était gravée. D'après Norma, on avait le droit de garder le goblet après notre diplôme, comme une sorte de souvenir de l'école.
Je me regardai un instant dans le miroir. On avait accroché sur les coins du miroir des cartes postales de Paris dans le but de le rendre esthetic mais c'était surtout très moche. J'essayai ensuite de regarder mon visage dans le miroir. Je voyais surtout quelqu'un de vraiment très fatiguée, et, avec horreur, j'avais le teint grisé. Il n'y avait actuellement aucune différence entre le ciel breton l'été et mon visage, j'étais dépitée. C'était officiellement une semaine de merde.
D'un geste dramatique, j'attrapai ma brosse à dent puis mon dentifrice.
En soit, je savais que je n'étais pas Barbapapa, j'avais juste deux bras, deux mains, dix doigts, mais parfois j'oubliais. C'est sans doute pour ça que j'avais espéré ouvrir le bouchon du tube de mon dentifrice avec une troisième main imaginaire - ou la main dans lequelle je tenais déjà ma brosse à dent. Mais, encore une fois, je n'étais pas Barbapapa. Ce qui expliquait pourquoi ce bouchon de tube de dentifrice venait de tomber sur le sol.
C'était officiellement la pire semaine de ma vie.
— Putain.
Le pire n'était peut-être pas que le bouchon était désormais sur le sol. Non. Le pire, c'était que le bouchon avait continué de rouler jusqu'à se glisser sous le lavabo. Le mur avait arrêté sa course et je lui étais entièrement reconnaissante.
Le truc, c'était qu'il y avait un petit meuble sous le lavabo, dans l'idée de ranger nos affaires, et même s'il était sur-élevé, je devais quand même me baisser, mettre ma main à l'aveugle sous le meuble pour espérer avoir mon bouchon.
Personne n'allait sous le meuble, tout simplement parce que personne ne faisait tomber son bouchon de dentifrice. Mais, contre toute attente, je ne trouvai pas de tresors cachés sous ce meuble. Sans doute parce que les filles avaient utilisée le sortilège d'attraction pour récupérer leur affaire. Une chose que j'aurai pu faire moi aussi, mais primo je n'y avais pas pensé et deuxio, ma baguette était sur mon lit.
Alors il n'y avait rien sous ce lavabo, à l'exception du bouchon du tube de mon dentifrice et une lettre.
Une lettre.
Qu'est qu'une lettre foutait sous ce lavabo ?
Après m'être assurée que j'avais bien mon bouchon et la lettre, je me redressai. Je m'asseyai en tailleur, le dos collé contre la porte histoire d'avoir non seulement le plus de confort possible mais aussi de la tranquillité.
J'étais excité à l'idée de lire une lettre qui ne m'appartenais pas. Enfin, curieuse, c'était le terme.
Puis j'avais cruellement envie de me changer les idées, après la semaine catastrophique que j'avais eu.
14 novembre 1973
Chère Alexandra,
Le soleil brille fort ici à l'université, mais il n'égale en rien l'éclat de ton sourire qui hante mes pensées jour et nuit. Chaque lettre que je reçois de toi devient un trésor que je chéris, et je ne fais rien à par attendre la prochaine.
Ma vie ici à la fac d'histoire se déroule entre des piles de livres poussiéreux et des discussions enflammées sur les mystères du passé. Les cours peuvent sembler parfois fastidieux, mais même les érudits ont besoin d'une pause pour respirer et rêver, n'est-ce pas ?
Je me suis aventuré dans les ruelles de Rouen hier soir, avec des amis, où les ombres des bâtiments anciens semblent murmurer des secrets d'époques révolues. L'histoire est vivante dans chaque coin de rue, mais je ne peux m'empêcher de penser à ce que tu pourrais ressentir en marchant à mes côtés.
J'espère que ton séjour dans cet internat strict ne t'accable pas trop. Imaginer ton quotidien derrière ces murs m'inspire des histoires fantastiques de résistance et de bravoure. Je ne peux m'empêcher de me demander ce que tu dissimules derrière ton sourire enjoué. Ton mystère me captive autant que la plus envoûtante des légendes.
Alexandra, chaque lettre que tu m'envoies est comme un doux sortilège qui me lie à toi. Ton nom est une mélodie dans mon esprit, et ta présence, bien que lointaine, se fait ressentir dans chacun de mes pas. Si seulement tu étais ici, nous pourrions déambuler main dans la main dans ces ruelles pittoresques, découvrant ensemble les secrets que l'histoire a à offrir.
Je languis de la prochaine lettre qui me fera revivre ton quotidien et m'emportera une fois de plus dans un enchantement dont je ne souhaite pas me libérer. Alexandra, je te laisse avec ces mots sincères qui portent les battements de mon cœur et les étoiles dans mes yeux.
Avec tout mon amour,
Nicolas
Le plus choquant n'était peut-être pas le prénom de mes parents. C'était une coincidance, sans doute. Mais non.
Parce que j'avais reconnu l'écriture, pour l'avoir lu des millions et des millions de fois.
C'était l'écriture de mon père.
.•*:。✩
nda
cc la team!!
Bon, je me rends compte que j'ai pas du tout aimé le chpt5 mais j'espère que ça vous a pas trop dégoûté et que vous aimez le chpt 6 !!
Wsh 3 chapitres en moins de deux mois ???? svp prenez pas l'habitude !!
gros bisous et profitez de l'été !!:;;:
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