11. la belle et le dragon
Salut Abigaelle,
Je dois avouer que je ne m'attendais pas à un hibou de ta part, ni même comment tu sais que ma nouvelle copine travaille à la mairie de Quimper. Ma mère te raconte trop de choses sur ma vie, c'est limite gênant. Mais bon, j'y peux rien, tu connais ma mère. Et tu as toujours été une fouineuse aussi, sans vouloir te vexer.
Comme promis, j'ai demandé à Eugénie de me fournir les documents dont tu avais besoin. Elle est encore stagiaire, donc ça risque de prendre un peu de temps. Je ne savais pas que tu avais besoin des actes de naissance de tes parents pour ton inscription au conservatoire. Je ne suis pas expert en orientation, et même si tu joues remarquablement bien du violoncelle, je te vois plus dans une carrière au ministère. J'ai des contacts, si tu veux. Enfin bref, tu fais comme tu veux.
J'ai appris sinon pour le coup des deux champions. C'est pas très juste, ça jase pas mal au ministère: la plupart des ministres sont d'accord pour ouvrir une enquête mais Hansmann refuse, il veut pas céder à un caprice de son fils. Je sais pas, mon patron m'a dit que c'était parce qu'il ne voulait pas qu'on pense que Hansmann réponds oui aux caprices de son fils bref, c'est pas l'amour entre Hansmann et Carnot. Donc officiellement, Hansmann refuse parce qu'il préfère éviter des tensions avec les anglais, officieusement c'est à cause de son fils. Croupton est passé lundi au ministère pour calmer la situation, dire qu'il n'y avait aucune triche et que c'était trop tard dans tous les cas. Ils l'ont fait testé au veritaserum histoire d'être sûr sûr sûr. Le président Lahaye veut ouvrir l'enquête, même si Hansmann préfère éviter, il veut être plus rapide que Fudge. Tout le monde se sent humilié, en gros. Et ça pue un peu pour les anglais, même s'il n'y a eu aucune triche chez les anglais, Hogwarts à deux champions, Beauxbâtons et Durmstrang qu'un. Bref, c'est un peu le chaos et Fudge ne dit rien, on a eu aucun communiqué de presse. Petite tension diplomatique au bureau, ça ne fait de mal à personne. Le côté positif c'est que j'apprends la gestion de crise. Le côté négatif c'est que tout le monde et ultra tendu.
Mais on a aussi des tensions avec les autres pays, parce que c'est une française qui a été choisie. Je ne sais pas si tu sais, mais même si Beauxbâtons est international, on a tendance à associer l'école à la France et ça commence à en énerver quelques uns, surtout les italiens. Bref, tu l'as compris, c'est un peu la pagaille au ministère. Peut-être que tu fais bien de te concentrer que sur la musique.
Je te tiendrai au courant dès que Eugénie trouvera le papier de ta mère.
A bientôt,
Arthur Mouret,
Assistant personnel de Auguste Carnot , ministre de la Coopération Magique Internationale.
J'étais au moins sûre d'une chose: mon voisin m'avait pardonné pour la fois où je lui avais jeté une toupie sur la tête. Qui était toujours un accident (et j'avais accusé Romain mais il ne m'avait pas cru, ce qui relevait d'un acte de pure misogynie intériorisée).
Mais voilà, j'avais besoin de l'acte de naissance de ma mère. J'avais besoin de preuves. La tante d'Aristide lui avait dit qu'elle ne connaissait pas d'autre Alexandra et encore moins des Crirose. Les archives sorcières ne menaient nulle part, il fallait alors regarder vers les archives normales (enfin non-magiques quoi).
Et j'allais peut-être avoir des réponses.
J'avais survécu à une seconde semaine à Hogwarts et je commençais de plus en plus à m'y habituer. Je restais en grande majorité à traîner avec Oscar, Ariane et désormais Aristide qui avait pris part dans notre trio, mais aussi avec Ophélia et Jasmine. Le SEUL point négatif restait la température, et j'insistais sur ce point là.
Je ne voyais quasiment jamais Fleur la journée: elle était soit avec madame Maxime soit avec une sorte de mini cours qu'elle même avait du mal à se débarrasser. Mais elle venait décompresser avec Ariane et moi le soir, on lui proposait souvent de jouer à la bataille explosive dans le dortoir pendant que les autres filles trainaient on se sait où, dépassant et de loin le couvre feu imposé par madame Maxime. Parfois elle disait oui, mais le plus souvent elle secouait sa main et se réfugiait dans son lit en prétextant qu'elle était épuisée. Ce qui était sans doute le cas, madame Maxime lui mettait une pression folle. Et la délégation n'arrangeait pas du tout, notamment quand Gidéon et Louis lui avaient dit qu'ils avaient reçu une lettre de Lucien Chenôve et de toute leur petite bande pour lui dire qu'on comptait sur elle pour ramener la coupe à la maison sous peine de quoi ils la jettent dans la fontaine magique de Nicolas Flamel.
Une des rares fois où elle nous avait rejoint, elle avait passé son temps à se plaindre de l'article publié par le Daily Prophet où Harry Potter monopolisait tout. Fleur, Viktor Krum et Cédric Diggory n'avaient eu le droit qu'à une légère mention.
Le jeudi, j'avais mon après-midi de libre et j'avais pris la grande décision de répéter un peu mon violoncelle. J'étais à Hogwarts depuis deux semaines et je n'avais pas encore touché à mon instrument. Je voyais d'ores et déjà mon prof me réprimander en me disant que ce n'était pas sérieux et que j'avais un concours d'entrée en juillet. Le 13 juillet, précisément. J'avais entouré la date au stylo rouge de mon calendrier Spirou en septembre. Comme si j'allais oublier, c'était ridicule. La date était presque gravée dans ma mémoire avec du fer à repasser, c'est pour dire.
J'avais mangé assez rapidement mon poulet au curry, sans doute trop excitée à l'idée de reprendre le violoncelle après presque deux semaines de séparation. A table, un seul sujet tournait en boucle: la première tâche. Elle arrivait après non pas ce week-end là mais celui d'après et Juliette Chevalier et Gidéon Baert s'étaient dit que c'était sans doute une brillante idée de faire la liste non-exhaustive de ce que Fleur allait affronter le 24. Louis était plus silencieux et si je n'avais pas reçu quelques jours plus tôt la lettre d'Arthur, j'aurais pu interpréter sa gueule comme un acte de nonchalance. Je ne m'étais jamais posé la question sur le type de relation qu'entretenait Louis Hansmann avec son père. Pour moi, ce type était parfait mais je me rendais compte que je ne le connaissais pas vraiment. Voir pas du tout. Après, je n'étais pas vraiment stupide pour autant, je me doutais qu'avoir un père aussi bien placée n'était pas particulièrement fun. Je voyais mal Charles Hansmann proposer à sa colonie d'enfants (parce que au delà de trois enfants, c'était quand même beaucoup alors quatre) de se mettre sur le canapé pour regarder un film en mangeant des frites avec du cheddar, des gros burgers et du pop corn par exemple. J'avais du mal tout court à imaginer Charles Hansmann libérer du temps pour ses enfants à vrai dire. Je le voyais comme quelqu'un de carriériste, à louer la bureaucratie sans prendre le temps de penser à ses enfants. Hansmann qui refusait d'ouvrir une enquête pour ne pas répondre à une demande de son fils...Peut-être que l'ambiance chez les Hansmann n'était pas si folle que ça.
— Tu vas où ? m'avait lancé Oscar quand il me voyait me lever.
— Répéter, j'avais répondu simplement. Je dois aller voir le professeur de sortilège pour qu'il me donne accès à la salle de musique.
— Celui qui est atteint de nanisme ?
— Tu savais que le lancé de nain avait été interdit chez les non-magiques? lança Louis à Oscar quelques chaises plus loin. Mon père commente des fois les avancées des non-magiques à table.
— J'ai deux questions, lui répondit Oscar. Premièrement, dans quel contexte ? Deuxièmement, pourquoi c'était pas interdit avant ?
Ma question était plutôt pourquoi Louis Hansmann nous écoutait mais visiblement personne n'était prêt pour cette question.
— J'allais dire que tu peux en parler avec Mitterrand, répondis-je, mais pour le moment c'est un peu chaud de la night pour lui.
Il y a quelques mois, la France avait découvert que notre président menait une sorte de double vie et avait une autre fille: Mazarine. Toute la France n'avait que cette histoire à la bouche et j'avais passé la majorité de mon été à lire des extraits dans les magazines dans les petits squares (parce que je n'allais certainement pas payer pour lire ce genre de stupidité).
— C'est vrai que c'est interdit de nommer son cochon Napoléon ? me lança soudainement Oscar avec les yeux qui pétillaient.
— Je me ferai une joie de vous parler du monde non-magique chers amis mais malheureusement je dois rejoindre le prof de sortilège. On se voit au goûter?
Oscar leva son pouce, Ariane me lança un sourire et Aristide hocha la tête. Louis me répondit même "oui" mais je devais admettre que je m'en fichais pas mal si je le retrouvais ou non après ma pseudo répétition.
J'avais traversé la Grande Salle pour rejoindre Ophelia, qui se tenait à l'encadrure de la porte et bavardait joyeusement avec une fille qui lui ressemblait trop pour ne pas être sa petite sœur, Léanne. Ses cheveux étaient plus sombres certes, mais elle avait le même visage en coeur que sa sœur et les mêmes petits yeux bleus.
— Abigaëlle tu es là ! s'exclama Ophelia visiblement ravie en me voyant. Je te présente ma petite sœur, Leanne !
Leanne me lança un sourire timide. Elle venait de remplacer une de ses mèches derrière mon oreille et regardait sa sœur comme si elle avait besoin d'un accord ou non.
— On parlait du tournoi, m'expliqua Ophelia. Enfin de Potter.
— Oh ok, répondis-je.
La pilule n'était pas encore vraiment passée, et je crois bien qu'elle ne passera jamais. Je repensais à la lettre de Arthur, qui m'avait raconté le passage de Croupton au ministère et du veritaserum. Bien sûr, aucun journal ne citait cet événement. Mais j'avais eu la confirmation d'une chose: eux aussi étaient dépassés par les deux champions de Hogwarts.
— Potter est dans ma maison, m'expliqua Leanne. Je disais juste à Ophelia que tout le monde là-bas pense qu'il a mis son nom dans la coupe. Son meilleur ami ne lui parle même plus, il est toujours fourré avec Granger. J'ai une de mes meilleures amies qui essaie de lui montrer son soutien, comme ils sont dans la même équipe au Quidditch mais bon. Tu as lu l'article dans le Daily Prophet ? Horrible.
Peut-être qu'être un moulin à parole c'était génétique chez les Hardcastle. Nonobstant, Leanne semblait être sur sa réserve, de peur que je ne partage pas son avis sur Potter certainement.
— Mais c'est vrai ? demanda soudainement Ophélia. Potter et Granger, ils sont vraiment ensemble? Ils sont toujours fourré ensemble depuis leur arrivée, Lisa, la sœur de Jasmine, est avec eux en cours et elle voit rarement Granger sans Potter et vis-versa.
Leanne haussa les épaules.
— J'en sais trop rien, je ne pense pas. Mais apparemment, Granger aussi se prend des remarques pas ouf depuis l'article de Rita Skeeter. Mais elle s'en fiche, je ne sais pas comment elle fait. Lavender est dans son dortoir et elle m'a dit la dernière fois qu'elle passait au-dessus de tout ça. Si j'avais été elle, je me serais effondrée en vrai.
— Lavender est une fille de notre village, m'expliqua Ophélia. Je fais les sous-titres au cas où tu te perdes. C'est son frère qui sort avec notre sœur depuis qu'ils ont quatorze ans, je t'avais expliqué. Bref, comment va Fleur ?
— Je ne dirai rien de ma championne, répondis-je. Mais elle bosse pas mal.
— Ouais comme Potter, remarqua Leanne. Il passe son temps à la bibliothèque mais Krum aussi, avec ses groupies. Avec Katie on en peut plus, c'est devenu infernal.
— Genre Katie ne fait pas partie du fanclub de Krum, souleva Ophélia. On parle de Katie Bell, une des meilleures poursuiveuses de Hogwarts.
Leanne leva les yeux au ciel, presque agacée par la remarque de sa sœur.
— Peu importe. Isa m'a envoyé une lettre ce matin, apparemment Oliver veut venir pour une des tâches mais ce serait plus pour voir Krum que nous.
— Rappelles-moi cet été d'empoisonner sa part de quiche, rétorqua Ophélia dont les joues avaient tout de même légèrement rosie. En fait, j'y pense Abigaelle mais tu cherchais quelque chose?
— La salle de musique, répondis-je. On m'a dit que c'était au deuxième étage mais j'ai reçu trop d'indications concernant l'aile et je crois que je ne vais jamais m'y repérer.
— C'est pas de ta faute, Hogwarts est tellement grand...Dis-toi que je me perds encore.
— Ca c'est parce que tu as le sens d'orientation d'un scroutt à pétard, rétorqua sa petite sœur. C'est sur mon chemin, si tu veux, je peux t'accompagner. Tu joues d'un instrument ?
Je m'y suis alors mis à expliquer à la petite Leanne ma passion pour le violoncelle et les examens d'entrée au conservatoire pendant que cette dernière me conduisait jusqu'à la salle. Ophélia nous avait laissé sous prétexte qu'elle avait cours de potion (elle avait vraiment cours de potion).
— C'est là, minauda Leanne devant la porte de la salle de musique. Flitwick est cool, tu verras. Il m'a un peu appris la trompette mais dès que mes sœurs ont compris que j'allais en jouer tout l'été, elles me l'ont retiré en me disant que j'avais dans les mains une arme de destruction auditive massive. Le pire restait mes parents qui étaient d'accord avec elles. Parce que les clients du Bed and Breakfast n'auraient pas payé pour perdre des décibels apparemment.
— C'est...tragique, commentai-je.
J'avais l'impression que si je ne me faisais pas adopter par les Hardcastle j'allais passer à côté de ma vie ou quelque chose comme ça. Tout avait l'air plus cool avec eux, plus cozy.
— Je dois rejoindre mes amies, continua Leanne. C'était cool de te rencontrer, j'espère que tu te plais bien à Hogwarts. On se recroisera de toute façon, ma sœur n'est pas du genre à lâcher les gens, pire qu'une sangsue des fois. Enfin bref, avant que j'oublie, donne du courage à Delacour mais pas trop non plus.
❃❃
Des fois je me demandais comment fonctionnait le concept de temps. Quand j'étais petite, j'avais l'impression qu'il se passait au moins un siècle entre le premier décembre et le jour de Noël ou encore que les vacances scolaires étaient trop courtes (deux mois étaient trop courts factuellement). Au contraire, le mois de janvier et d'août avaient beau avoir le même nombre de jours, j'avais toujours l'impression que janvier durait une éternité. Le fait est que là, la première tâche était arrivée beaucoup plus vite que ce à quoi je m'attendais. On devait être à J-4, samedi, et la tâche était prévue pour le mardi.
Ce samedi était une sorte de dernière ligne droite, vu le teint livide de Fleur pendant le petit déjeuner (elle n'avait encore rien pris à manger à l'exception d'un thé ce qui était assez inquiétant). Il y avait une sortie qui était prévue à Hogsmeade, le village sorcier à côté de Hogwarts. On était à fond dans le jeu de rôle d'étudiant à Hogwarts, si on oubliait notre uniforme. Et le fait qu'on avait qu'un seul champion.
Il faisait toujours aussi froid, peut-être même plus froid qu'à notre arrivée, et je commençais sérieusement à douter de mes capacités de résistance à un climat aussi austère. Si cette baisse de température continuait, on allait retrouver mon cadavre d'ici janvier dans le Carrosse pour hypothermie.
Sur le chemin, Oscar s'était "amusé" (les guillemets avaient son importance) à réciter l'alphabet grec le plus rapidement possible avec Aristide. Cette nouvelle amitié restait tout de même surprenante: on avait d'un côté Oscar Vanderbeck qui était la plus grande diva excentrique que je connaissais et de l'autre Aristide qui était beaucoup trop calme pour lui. Et pourtant les deux avaient eu un véritable coup de foudre. Ariane était restée à côté de moi, fredonnant un vieil air de musique sorcière.
— Au fait, me lança Ariane, tu as vu Fleur après le petit déjeuner ? Je lui avais proposé de sortir avec nous mais elle a refusé. Je m'inquiète un peu.
Je secouai la tête, négativement.
— Elle est sans doute restée pour réviser la tâche ? suggérai-je. Mais la pauvre doit être morte de stress...
— Tu savais qu'elle avait reçu une lettre du président et du premier ministre ? poursuivit Ariane. Je crois qu'ils seront présents pour la première tâche, histoire de voir si ça se passe bien.
— Mon voisin m'a envoyé une lettre en début de semaine dernière, apparemment Croupton est passé au ministère et on lui a fait boire du veritaserum et les anglais n'ont pas remplacé la Coupe...C'est la vraie qui a fait sortir Harry Potter.
— Croupton disait peut-être la vérité mais peut-être que quelqu'un d'autre a remplacé cette coupe. Enfin bref, pauvre gamin quand même. 14 ans...A cet âge là, je crois que je ne maîtrisais même pas le sortilège pour transformer une dinde en cochon d'inde...
— Si je me souviens bien, ta dinde était tellement effrayée qu'elle avait fugué....
Ariane leva les yeux au ciel avant de me donner une petite tape sur l'épaule.
— Tu parles d'une fugue, c'est pas Eugène Hautcoeur qui l'avait retrouvé dans les écuries ? Un brave type ce gars n'empêche. Oh tiens ! Il y a tes amies de Hogwarts!
Nous venions à peine d'entrer dans le village pour ainsi dire. Un village que j'aurai tendance à qualifier de typiquement écossais si ce n'est qu'il était 100% magique et qu'il n'y avait pas que des sorciers de Hogwarts, Beauxbâtons ou Durmstrang mais des sorciers plus âgés. Il y avait par exemple cette sorcière blonde que Fleur avait désigné comme "la journaliste bizarre du Daily Prophet" et qui avait un problème concernant la notion de harcèlement mais aussi beaucoup d'autres sorciers. Il y avait aussi Ophelia Hardcastle et Jasmine Turpin qui venaient de sortir d'une boutique rouge où étaient écrit en doré "ZONKO".
— Tiens, ce sont nos français préférés ! s'exclama Ophelia qui était en train de nous rejoindre tous les quatre avec Jasmine à ses talons.
— Juste ciel des anglaises! s'écria Oscar. Je ne regrette en mourant que de n'avoir pas chassé tout à fait les Anglais du royaume comme le l'avais espéré ; Dieu en a réservé la gloire à quelque autre qui en sera plus digne que moi !
Je pouvais voir le regard que Jasmine et Ophelia lançaient à Oscar, un regard confus, comme si elles venaient de voir un spectacle expérimental des arts de rue dans le Périgord.
— Laissez tomber, expliquai-je sérieusement. Oscar est dans son era guerre de cent ans apparemment.
— C'était une citation de Bertrand Du Guesclin, un sorcier qui était aussi soldat pour le roi. On l'a vu en Histoire de la magie en quatrième année.
— Si fort en Histoire et tu me lâches avec le professeur fantôme ? m'écriai-je.
— Jette le dans le lac noir, en général ça marche plutôt bien, me souffla Ophélia. Oscar, tu rates les meilleurs cours de Hogwarts, peut-être même de ta vie. Pas vrai Abigaëlle?
D'un geste dramatique, Oscar rejeta ses boucles noires derrière son crâne.
— J'étais trop fort de toute manière, le prof aurait été jaloux de mon talent. Et aussi parce que ma mère aurait aimé que je garde des matières plutôt utiles pour augmenter mes chances d'entrer au ministère. Surtout après le redoublement. Non plus sérieusement, je trouve juste que l'Histoire entre non-magiques et sorciers est passionnante mais les cours se concentrent plus que sur l'Histoire sorcière. C'est dommage.
— Après si je peux ajouter mon commentaire, lança Jasmine, tu fais bien. Je n'ai jamais vu des cours aussi chiants de toute ma vie. En quatrième année je voulais porter plainte à Dumbledore pour incitation au suicide mais la soeur d'Ophélia l'avait appris et m'a passé un savon. Je maintiens que ça aurait du être Binns et non Quirrell qui aurait du être viré cette année-là.
— J'avoue que Gwen des fois est un peu anti-aurore du fun, admis Ophélia. Mais on l'aime quand même. On pensait aller aux Three Broomsticks, c'est un pub et la bièraubeurre est super bonne. On comptait rejoindre Cho, la cousine de Jasmine, et ses copines.
Et c'est un peu de cette manière qu'on avait passé la grande majorité de notre journée à Hogsmeade avec Jasmine et Ophélia qui nous racontaient les derniers ragots de Hogwarts et leurs différents souvenirs à Hogsmeade. En échange, nous leur avions raconté Beauxbâtons et Castego, notre village sorcier à nous. Peut-être que notre bièraubeurre avec Cho avait été très brève mais je m'étais concentrée sur l'essentiel: la bièraubeurre était en effet excellente. Moins sucrée que celle en France mais gustativement délicieuse. J'avais bien sûr fait le plein de sucrerie en me promettant de faire une comparaison avec ceux que les parents d'Agnès vendaient sur la Place Cachée et j'avais conclu que cette journée était une bonne journée en rentrant le soir au Carrosse. Pour la première fois depuis mon arrivée, je me sentais bien à Hogwarts, ce qui était plus ou moins étrange étant donné que j'étais à des milliers de kilomètres de Beauxbâtons ou de ma Bretagne natale. J'étais une étrangère à ce château mais pourtant, j'étais en train de construire une sorte de quotidien assez cool.
Alors pourquoi je n'arrivais jamais à m'endormir ?
J'étais montée dans la chambre vers 22 heures et j'avais beau avoir lu et tout le blablabla, passé minuit, j'étais encore réveillée alors que tout le monde dormait profondément. Je ne savais pas pourquoi j'avais autant de mal, j'avais rayé le mal du pays parce que je ne voyais pas vraiment de raison à cela, j'étais plutôt bien en Ecosse. Ce n'était pas à cause de la température non plus, je n'avais jamais eu accès à un lit aussi confortable et surtout automatiquement chauffé. Nos ingénieurs-sorciers avaient du talent.
Peut-être que j'avais besoin d'une cigarette ? Ma dernière remontait à celle que j'avais fumé avec Aristide, après notre arrivée à Hogwarts, c'était raisonnable. Je me suis glissé hors du lit pour aller chercher mon paquet mais je remarquai que je n'étais pas la seule de la délégation à ne pas dormir: le lit de Fleur était vide.
Je me mordis la lèvre. Est-ce que madame Maxime poussait Fleur à bout avant l'épreuve? Je n'étais pas certaine de la méthode pour être honnête.
Le silence du Carrosse était lourd. Tout le monde (ou presque) était endormi mais la tension d'avant épreuve était palpable. Je pouvais voir depuis le premier étage du Carrosse un filet de lumière qui s'échappait du bureau de madame Maxime. Il était presque une heure du matin et cette bonne femme était encore en train de travailler ? Bizarre.
J'avais pris alors toute la discrétion du monde pour m'échapper du Carrosse et fumer ma cigarette. J'essayais de me calmer à mesure que le tabac remplissait mes poumons. Je repensais à la dernière lettre d'Agnès. Apparemment, certains professeurs étaient furieux contre madame Maxime d'avoir laissé le tournoi avoir lieu malgré les deux champions de Hogwarts. Madame de Maintenon était la seule du côté de notre directrice, mais d'autres de mes professeurs étaient jusqu'à demander le renvoi de madame Maxime. C'était une humiliation pour notre école après tout. Mais j'avais été soulagé de voir que Maintenon soutenait madame Maxime; s'il y avait bien une personne sensée dans cette école, c'était elle.
Une fois ma cigarette terminée et rangée dans mon cendrier de poche, je pris soin de remonter le plus discrètement possible vers le dortoir. Le bureau de madame Maxime était cette fois-ci éteint, ce qui était plutôt une bonne nouvelle. Mais en montant les escaliers, je remarquai que je n'étais pas seule.
C'était la première fois que je voyais Fleur Delacour dans un moment de vulnérabilité. Elle qui se promenait toujours avec son air légèrement hautain et parfait, je ne m'attendais pas à voir Fleur pleurer. Pourtant être sélectionnée, elle le voulait coûte que coûte. Elle avait toujours montré cette détermination et c'était une des meilleures élèves de tout Beauxbâtons.
— Fleur, tout va bien ? chuchotai-je en m'approchant d'elle avec le plus de douceur possible.
Ce qui était évidemment une question con parce que la presque vélane était en train de pleurer à chaude larme dans la cage d'escalier du Carrosse.
— Fleur...commençai-je avec un peu plus d'hésitation. Qu'est-ce qui se passe?
On avait beau parler exclusivement de Harry Potter qui était trop jeune pour ce genre de tournoi mais moins des "vrais" champions. Avec du recul, nous aussi, on n'était que des gamins. Et peut-être que cette pression constante n'était pas spécialement saine pour un ado de 17 ans. Quand j'étais plus jeune, du genre 12/13 ans, je voyais les filles de 17 ans comme des filles trop cools, intelligentes, sûres d'elles et qui savaient où aller et comment. Aujourd'hui j'avais 17 ans et je n'étais plus sûre que ce que j'avais cru voir à 13 ans était vrai.
Fleur ne me répondait pas alors bêtement, je passais mon bras sur son épaule en improvisant des mots réconfortants.
— Hey, ça va aller Fleur. C'est promis.
Visiblement, Fleur avait arrêté de pleurer. Plus aucune larme ne coulait et elle s'était contentée de regarder les marches, sans un mot. Au bout de quelques secondes, elle finit par parler:
— J'ai honte que tu me vois comme ça.
Elle était en train de sécher ses larmes.
— Même Fleur Delacour a le droit de pleurer tu sais. Ça me rappelle une chanson de The Cure que mon père écoutait tout le temps avec ma mère quand j'étais petite dans la voiture. C'est de The Cure, tu connais ? Un groupe de musique non magique. Ils ont sorti un tube il y a quatorze ans je crois, ça s'appelle Boys Don't Cry. A un moment ça "I try to laugh about it, cover it all up with lies, i try to laugh about, hiding the tears in my eyes cause boys don't cry".
— Je ne connaissais pas cette chanson, m'avoua Fleur. J'ai une culture non-magique pas ouf.
— Je crois que la mienne ça va, répondis-je. A part Hit the road jack, il vous manque une cruelle culture musicale, heureusement que mes parents étaient là pour construire la mienne. Barbara a dû avoir un featuring dans mon éducation et franchement ces chansons sont super déprimantes. Dis-toi que ma mère me chantait du Barbara en berceuse pour m'endormir. Ou Une chanson douce.
J'étais vraiment en train de raconter les pires trucs randoms à Fleur dans l'espoir qu'elle oublie un peu qu'elle avait pleuré. Mais visiblement, ça marchait. Fleur avait pouffé avant de nicher sa tête sur mon épaule. Elle ne fit pas de remarque sur le fait que je sentais le tabac froid ni même que mes joues étaient sans doute glacées. Non, rien de tout ça.
— Dis Fleur ? je fini par demander. Pourquoi tu pleurais ? Tu veux en parler ?
Fleur hésita un bref instant.
— Des dragons. C'est ça la première tâche. C'est Madame Maxime qui m'a prévenu, je n'étais pas censée être au courant mais bon comme les anglais trichent déjà....
C'était comme si un énorme rocher venait de tomber dans mon estomac. Des dragons par Flamel. Moi qui adorait parler, j'admettais que là je ne pouvais rien dire. Et en même temps dire quoi?
— Tu aurais vu madame Maxime et son regard...Je te jure, il brillait comme si c'était génial mais...Oui, c'est une opportunité et je sais bien que j'ai de la chance, que beaucoup rêve d'être à ma place...
— Après la plupart des gens rêvent d'être toi pas que parce que tu es championne...
— Oui bon aussi. En tout cas, je suis consciente de ma chance mais ça devient trop...Réel ? Puis par Flamel qu'est ce qu'il caille dans ce château !
Sur ce dernier point, elle avait entièrement raison. Ca aurait dû être illégal ce genre de température et c'était fâcheux qu'il n'existait aucun sort pour contrer le vent.
Mais je voyais pour la première fois la vraie Fleur, celle qui doutait, celle qui n'était pas aussi parfaite qu'elle le prétendait depuis notre première année. C'était un masque qu'elle portait à longueur de journée mais factuellement, ce n'était pas possible de le garder tout le temps.
— Fleur, soufflai-je. C'est pas parce que tu es Fleur Delacour que tu n'as pas le droit d'avoir peur, j'espère que tu le sais. Des dragons ? Très bien, on trouvera une solution. Il n'y a pas de problèmes, jamais. Il n'y a que des solutions.
— Et si on est face à un problème sans solution? railla Fleur.
— Alors on a pas de problèmes.
❃❃
Par un heureux hasard qui n'en était pas vraiment un, madame Maxime avait été mise au courant que je savais pour les dragons. Elle m'avait d'abord regardé avec un air interdit qui devait sans doute dire "miss Richard mêlez-vous de vos affaires" ce qui aurait été compréhensif parce que j'avais quand même beaucoup d'affaires à gérer mais elle m'avait ensuite accepté. C'est ainsi que j'avais passé mon dimanche dans le bureau de madame Maxime, à chercher un angle d'attaque. On avait fait un inventaire de ce que les dragons pouvaient craindre mais il fallait se rendre à l'évidence: aucune de nous trois étaient des magizoolistes nées. Et pour être encore plus honnête, j'avais fait semblant de lire Les animaux fantastiques de Scamander et j'avais écouté Eugène à la place qui lui avait lu le livre. Quoiqu'il en soit, ce jour-là, j'avais un manque de sommeil qui se faisait ressentir et madame Maxime l'avait remarqué. Elle m'avait alors dit qu'il fallait dormir, ce à quoi j'avais répondu que j'avais du mal mais que je passerai sans doute à l'infirmerie de Hogwarts pour voir s'ils n'avaient pas de potions pour le sommeil pour dormir comme un gros bébé. Et là, je ne sais pas pourquoi, Fleur s'était levé et m'avait sauté au cou en répétant que j'étais un génie au même niveau que Nicolas Flamel et je m'étais dis que c'était un peu exagéré mais que dans tous les cas elle avait enfin trouvé la solution pour sa première tâche.
Le problème restait de savoir comment endormir un dragon d'un simple sort alors qu'en temps normal il fallait au moins douze sorciers et qu'on ne savait pas exactement en quoi consistait la tâche. On savait juste qu'il y avait des dragons.
Lundi était passé super vite mais vraiment super vite. Même le cours d'Histoire de la magie était passé à l'allure moyenne d'un éclair de feu mais Ophélia avait énormément contribué puisque nous avions joué au morpion toutes les deux puis bavardé. Elle m'avait aussi raconté comment Draco Malfoy, un élève de Slytherin insupportable, s'était transformé en fouine. La rumeur avait fait le tour de l'école et vu comment Ophélia décrivait ce garçon, il aurait peut-être dû rester en état de rongeur. Le mardi matin était aussi passé vite, je n'avais même pas vu mon heure de métamorphose passé. Après le cours, Fleur nous avait quittés pour rejoindre madame Maxime. Et visiblement, c'était pour une réunion entre les champions puisqu'en entrant dans la Grande Salle, Diggory et Krum avaient disparu et le professeur de métamorphose dont j'oubliais systématiquement le nom était en train de discuter avec Harry Potter. Je reconnaissais une personne qui n'avait pas envie d'être là et Potter affichait cette mine là. C'était bête comme comparaison mais comme il avait le même âge que Romain, j'imaginais mon petit frère face à un dragon et j'avais sincèrement froid dans le dos.
Le repas du midi avait une saveur étrange, que je n'arrivais pas à définir pleinement. Tout le monde parlait en même temps, leurs phrases se chevauchaient les unes les autres sans prendre le temps de s'écouter. Ils allaient à l'épreuve comme s'ils allaient voir les Jeux Olympiques. Bien sûr, aucun ne savait que d'ici quelques heures on allait voir des adolescents affronter un dragon.
— Tout va bien mistinguette? me lança Louis Hansmann en attrapant une pomme.
Je levai les yeux au ciel.
— Si c'est pour te moquer de moins, tu peux aller te faire cuire un œuf, répliquai-je fermement.
Non, aujourd'hui je n'avais définitivement pas besoin des railleries de Louis Hansmann. Ma priorité allait ailleurs. Je jetai un coup d'œil à la table des professeurs et remarquai quelques nouveaux arrivants. Hormis Croupton qui, de toute manière, était souvent là, je remarquai l'arrivée de Lahaye, notre président, Charles Hansmann et d'un autre homme que j'identifiais comme le chef d'Etat magique Bulgare. Si je devais être honnête, aucun des trois n'avait pas l'air ravi et je crois que Harry Potter avait quelque chose à voir là dedans. Soudain, Dumbledore se leva et la salle devint silencieuse. On se tenait tous presque agrippé aux lèvres de Dumbledore.
— Bon et bien, déclara avec douceur le directeur de l'école, je crois qu'il est temps de se diriger vers la première tâche.
La bulle de silence éclata et tout le monde se mit à parler en se dirigeant vers l'endroit où allait avoir lieu la première tâche. Lahaye et Hansmann nous avaient royalement ignorés en passant à côté de nous et je ne pu m'empêcher de jeter un coup d'œil à Louis mais ce dernier n'affichait aucune émotion.
Apparemment, les délégations de Durmstrang et Beauxbâtons avaient leur propre loge, juste au-dessus de celle des jurés. Ce qui signifiait qu'on était dans la même loge que les ministres. C'était comme si j'étais dans un colisée. Au centre, il y avait un nid avec plusieurs œufs dont un en or.
Pas besoin d'un bac + 10 pour savoir la nature de l'épreuve: Fleur (et les autres parce qu'ils existaient) allait devoir choper l'œuf doré...en évitant de choper une brûlure au 3e degré.
— Par Flamel ne me dites pas que...commença Oscar alors que nous nous asseyons.
— Des dragons, compléta Louis un peu plus pâle. Ça va pas de main morte en tout cas.
— Tu veux que je te jette dans la fosse pour savoir si les dragons vont de main morte avec toi ? lachai-je.
Sans surprise, je n'avais jamais vraiment appris le tact, j'avais sans doute dû sécher les cours de bonne séance à l'école. Je voyais le visage interdit de Oscar, Ariane qui venait de jeter un coup d'œil peu discret vers Charles Hansmann quelques sièges plus loin et Louis qui était...Plutôt souriant ?
— Pour combien tu répètes ça devant mon père ? me lança Louis.
C'était un mélange de provocation et d'arrogance. Je sentais mon sang devenir plus chaud et je m'en voulais à mort. Pourquoi fallait-il que je perde tous mes moyens quand il s'agit de Louis Hansmann ? A chaque fois?
Je n'avais pas eu le temps de répondre: Louis venait de m'attraper le poignet et me tira jusqu'à son père.
La dernière fois que j'avais vu le président Lahaye et Charles Hansmann datait du mois dernier et je n'étais même pas sûre qu'ils se souviennent réellement de moi. Ce jour-là était le jour de ma sélection et ils s'étaient simplement contenté de me serrer la main pour me féliciter.
A peu de chose près, Louis était le portrait craché de son père. La barbe et les cheveux poivrés en moins, cela allait de soi. Le mec nez fin, les mêmes yeux bruns et le même sourire. Peut-être que Hansmann était un peu plus fort que son fils mais c'était qu'un détail microscopique.
— Père ! s'exclama Louis. Mon amie Abigaelle aimerait te parler.
— Mon garçon, salua monsieur Hansmann.
— Monsieur le président, monsieur le premier ministre, fis-je timidement.
— Ton amie est très polie, souleva Hansmann avec un ton qui était limite accusateur. Mademoiselle ?
Forcément, Hansmann n'allait pas s'intéresser à retenir le nom d'une fille de la délégation. Surtout que je n'étais pas une "fille de" comme Fleur, Louis ou même Oscar ou Gidéon. J'étais la seule née de parents non-magiques de ma délégation.
— Richard, répondis-je.
Hansmann et Lahaye semblèrent chercher au fond de leur mémoire s'ils ne connaissaient sans doute par un sorcier du même nom que moi mais c'était peine perdue. J'aurai pu les laisser des heures chercher mais j'avais décidé d'avoir un bon cœur aujourd'hui.
— Mes parents sont des non-magiques, expliquai-je timidement.
— Intéressant, murmura Charles Hansmann pour lui-même avant de reprendre un peu plus fort: L'épreuve va bientôt commencer, vous souhaitiez me voir mademoiselle Richard? Je suis sûr que nous aurons tout notre temps après l'épreuve, si vous voulez bien. Est-ce urgent ?
— Elle m'a menacé de me jeter dans la fosse à dragon, coupa Louis fier de lui.
Lahaye et Hanmann échangèrent un regard surpris, comme si cette situation (qui était ridicule) était à la fois drôle mais agaçante. Sans doute avaient-ils mieux à faire comme regarder Fleur Delacour et les autres se faire brûler plutôt que d'assister à mes tentatives de meurtres sur Louis.
— Je suppose que c'était mérité, s'exclama Hansmann avec un petit rire avant de se pencher vers Lahaye. Vous savez, les enfants....Je doute que madame Maxime apprécierait qu'un de ses élèves sabote une épreuve, un peu de sérieux mon garçon. Louis, ce n'est pas le moment pour se faire remarquer.
— Père...
Est-ce que c'était de la déception dans le regard de Louis ? Il voulait simplement faire une petite blague, sans doute chercher un peu d'attention à son père, et ce dernier l'envoyait littéralement chier.
— Je pense que même si j'avais vraiment voulu le jeter dans la fosse, lançai-je, je crois que je n'aurai pas réussi. Louis m'aurait stupefixié avant que j'ai le temps de prendre ma baguette.
Et puis j'ajoutai plus bas à l'intention de Louis.
— Et peut-être que les dragons n'auraient pas voulu de toi.
— Tant mieux c'est pas mon style, je préfère les filles qui me jettent à eux.
La réponse de Louis me déconcerta. Etait-ce une tentative de flirt ?
Non. Je mettais mon véto sur ça. Jamais un mec comme Louis pourrait s'intéresser à une fille comme moi. Et pas après ce qui c'était passé avec Agnès. C'était à ce moment-là précis que je remarquai qu'il tenait encore mon poignet. Je me détachais de lui, les joues rosies et mon coeur se battait un peu plus.
— C'est tout ? lança Charles Hansmann. Louis mon garçon, on se verra après l'épreuve veux-tu ? Vous pouvez rejoindre votre place, un dragon vient d'arriver, l'épreuve va commencer.
Sans le moindre mot, nous quittâmes Charles Hansmann et Félix Lahaye. Louis avait quitté son air arrogant et faisait clairement la gueule. J'étais loin d'être une experte en relation père-fils, peut-être parce que j'avais la chance d'avoir un père vraiment cool, mais je pouvais affirmer que les relations entre Louis et son père ne devaient pas être super fun. Malik, le meilleur ami non magique de Romain à Quimper, aurait sans doute dit quelque chose comme "miskina" et avant j'aurai été d'accord avec lui mais quelque chose avait un peu changé en moi. C'était limite de la pitié pour Louis. J'avais toujours cru que sa vie était parfaite, c'était l'image que lui et son petit groupe d'amis d'aristocrates sorciers laissait paraître, mais c'était évident que c'était faux. Pourtant pendant les quelques semaines que j'avais passé en cinquième année à traîner avec eux, quand Agnès "sortait" avec Lucien Chenôve, j'avais été mal à l'aise face à leur richesse et leurs coutumes, j'avais l'impression que j'aurai beau faire tous les efforts du monde, je ne venais juste pas du même monde qu'eux. Que j'étais la troubadour de service, celle qui était née de parents non-magiques et j'avais fait de mon sang une fatalité.
Une fois assis (parce que oui nous nous étions retrouvés assis l'un à côté de l'autre), Louis avait repris le même air qu'avant et commença une énumération de blague sur le tournoi à Gidéon. A ma toute droite, il y avait la délégation de Durmstrang qui semblait être surexcitée par ce qui était en train de passer. J'avais ensuite promené mes yeux autour de moi, croisant le regard d'Ophélia qui était avec Jasmine et leurs amies. Cette dernière me fit un petit coucou avant de reprendre sa conversation avec ses amies. Elles aussi avaient l'air d'être surexcitées. Forcément. Elles n'avaient pas de proches qui allaient se battre avec un dragon.
— Bonjour et bienvenue à tous et à toutes ! s'exclama une voix
Les cris se faisaient de plus en plus fort et pour la première fois depuis mon arrivée, je commençais à avoir sérieusement chaud. Peut-être parce qu'un dragon venait d'arriver dans la fosse.
— C'est un Sudéois à museau court, nous lança Aristide qui était juste en dessous de moi.
— Pourquoi il est pas norvégien ? rétorqua Louis.
Mais ce n'était pas le vrai ton du Louis sarcastique que je connaissais. J'avais presque royalement ignoré le discours du présentateur pour observer les traits légèrement plus crispés de Louis. En temps normal, je n'aurai absolument rien remarqué et il affichait sa mine habituelle à vrai dire. Mais certains détails sautaient aux yeux quand on observait de plus près: ses yeux n'étaient plus aussi pétillant, sa main s'était agrippée autour de baguette (j'étais arrivée à un stade où je m'attendais à voir sa baguette de fissurer tellement) et sa mâchoire était trop serrée.
— Mistinguette je sais que je suis beau jusqu'à te faire vomir mais tu peux arrêter de m'observer ? me lança Louis au bout d'un moment alors que le premier champion, Cédric Diggory, venait d'arriver dans l'arène. Je t'enverrai une photo dédicacée si tu insistes, il me faut juste ton adresse postale.
— J'en ai pas besoin, rétorquai-je les joues brûlantes. Mais merci de la proposition, tu devrais plutôt proposer à tes groupies qui sont restées à Beauxbâtons, je suis sûre qu'elles seront ravies. Du genre Anouk Martina ?
— Tu connais la liste entière de mes prétendantes ? Tu veux te lancer dans la concurrence ? C'est plutôt rude, tu feras gaffe.
Je grimaçai pendant que Diggory était sans doute en train de se faire carboniser.
— Je préfère qu'on m'enterre vivante pour être tout à fait honnête.
— Et quand tu es vraiment honnête ça donne quoi ?
Je ne répondis rien essentiellement parce que je ne m'étais pas préparée psychologiquement à avoir cette réplique. C'était lâche de la part de Louis mais c'était peut-être encore plus lâche de ma part de le traîner de lâche et de ne pas répondre. Je me contentai de lever les yeux au ciel et de me concentrer sur l'arène. Il y avait à présent un chien, sans doute pour faire diversion au dragon. Bien jouer Diggory.
Celui qui commentait avait l'air plutôt enthousiaste mais après quelques minutes d'attentes, après avoir risqué la mort sept ou huit fois, Cédric Diggory avait finalement réussi à attraper l'oeuf et j'avais enfin la vision sur Cédric Diggory: ce mec était vraiment beau.
Et peut-être qu'à part la délégation de Durmstrang, tout le monde dans les gradins au moins avait l'air moins...enthousiaste? Personne ne s'était vraiment attendu à voir un tel danger. Ce n'était pas normal qu'un adolescent de 17 ans (ou 14 ans) affronte un dragon alors qu'en temps normal il fallait des diplômes et de longues années d'expertise dans la matière avant d'en affronter un.
Diggory parti vers la tente le teint fatigué mais sous les acclamations et les sorciers de tout à l'heure profitèrent de cette sorte d'entracte pour faire sortir le dragon et sans doute amener un autre. A chaque champion son dragon.
Et puis le petit sorcier présentateur venait d'annoncer le nom de Fleur et tout de suite les choses commencèrent à devenir plus sérieuses. Le dragon de Fleur était vert et je trouvais l'ironie du sort parfois parfaite puisque la couleur de Bellefeuille, la maison de Fleur à Beauxbâtons, était représentée par le vert. A mesure que Fleur progressait, esquivait le dragon, j'applaudissais sincèrement. J'étais fière d'elle. Elle avait couru pour se cacher derrière un rocher et sans doute aussi pour se calmer parce que le commentateur venait de dire que ce qu'elle venait de faire n'avait pas été prudent. Le sortilège qu'elle s'apprêtait à lancer demandait beaucoup de concentration, surtout sur un objet aussi volumineux et vivant. Et puis, au bout de quelques secondes qui m'avaient semblé des heures, elle avait bondi, pointé sa baguette en direction du ventre du dragon -leur point le plus sensible. D'un seul coup, le dragon tomba dans une sorte de transe. Fleur semblait alors plus sereine et s'approcha du nid.
Un truc à savoir sur les dragons (je venais de l'apprendre à l'instant) mais quand il ronflait, ils ronflaient des braises et la robe de Fleur paya le prix. Je ne savais pas par quel miracle Fleur n'avait pas hurlé. Elle s'était contentée de pointer sa baguette sur le minuscule feu sans doute en train de brûler sa jambe, lança un sort et de l'eau sorti de sa baguette pour atténuer le feu.
Et puis c'était tout. Fleur venait d'attraper l'œuf d'or, toute l'arène semblait exploser sans penser à la fragilité potentielle de leurs cordes vocales (au nombre de deux). Et moi, comme une andouille, je m'étais levée d'un bond sous les regards surpris de la délégation, j'avais dévalé les escaliers que j'avais pris à l'arrivée pour courir vers la tente où se dirigeait Fleur.
Il y avait déjà Cedric Diggory, accompagné d'une de ses amis ou sa petite amie, et quelques professeurs. Le professeur Moody, le type chelou mais hyper respecté car ancien auror super fort qui nous enseignait les défenses contre les forces du mal, me jeta un drôle d'air.
— Pas de visiteurs! aboya t-il.
En terme d'hospitalité, j'avais vu mieux.
Fleur arriva à ce moment-là, toute seule et visiblement encore terrorisée. Madame Maxime était restée là-haut pour regarder la performance de Krum qui venait d'arriver dans la fosse. Lorsqu'elle me vit, son visage s'illumina.
— Abigaelle ! s'exclama Fleur.
Je trottinai jusqu'à elle, ignorant parfaitement le professeur Moody.
— Fleur par Flamel tu n'as rien ! soupirai-je en la prenant dans ses bras.
— Il en faut plus pour abattre Fleur Isabelle Delacour, ria ma championne.
— Tu as été incroyable ! Vraiment.
Fleur me lança un sourire, mais elle était fatiguée. L'infirmière de Hogwarts venait d'apparaître dans mon champ de vision en traînant Fleur vers un lit pour l'examiner. Curieusement, alors que je n'étais pas si proche de Fleur que ça mise à part le fait que j'avais un peu aidé la préparation de la tâche, je m'installai à côté d'elle. L'infirmière annonça avec soulagement qu'elle n'avait rien à l'exception de quelques égratignures et des brûlures assez superficielles. Elle s'était aussi plainte de la présence des dragons et traitait les ministères d'avoir complètement perdu la boule.
— Merci de m'avoir aidé, chuchota Fleur une fois que l'infirmière fut partie.
— C'est normal Fleur, répondis-je. Si tu as besoin de quoique ce soit, je suis là.
— Moi aussi, Abigaelle. Moi aussi.
Ce tournoi prenait soudainement une tournure des plus louches. Et je ne mentionnais pas le fait qu'il y avait deux champions pour Hogwarts au lieu d'un, ni les tensions politiques qu'il y avait derrière ce tournoi. Dans le sens où oui, c'était louche aussi, tout était louche de toute manière, mais il y avait autre chose. J'étais en train de devenir amie avec Fleur Delacour et je défiais la pyramide de la popularité. Je n'étais pas censée traîner avec Fleur, j'appartenais au Tiers-Etats scolaire et elle était aristocrate, voir monarque. Et pourtant, elle me tenait la main, essayait tant bien que de mal de cacher le fait qu'elle était terrifiée.
A vrai dire, on l'était tous.
.•*:。✩
nda
J'ai jamais été aussi productive pour RDC que là cest terrible mais en même temps trop cool ? Je sais pas, j'essaie de faire avancer le plot parce qu'on est au chapitre 11/22 (j'ai prévu 22 ou 23 chapitres mais à VOIR j'ai encore eu une idée dans mon lit hier soir lol)
Enfin voilà hiihih j'espère que le chapitre vous a plu! J'admets que j'aurai du peut-être + développer la scène de l'épreuve de Fleur mais le truc c'est que j'étais déjà à 7000 mots et que j'avais peur d'en faire trop et que ce soit trop lourd pour le lecteur #lol.
A la prochaine!
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