Jeudi :

Lorsque j'ouvre les yeux, je suis seule dans le lit. Je fronce les sourcils et cherche Alia du regard dans toute la pièce. Mais elle est vide, il n'y a personne. Je m'habille mais impossible de trouver ma chemise. Je descends donc prudemment en jean et en soutif. On ne sait jamais, ses parents sont peut-être rentrés pendant la nuit. Personne dans le salon mais j'entends de la musique au niveau de la cuisine. Lorsque j'arrive, j'ai la surprise de voir Alia en train de préparer le petit-déjeuner vêtue de ma chemise. Je reste plusieurs secondes à la regarder danser, sans bouger. C'est fou ce qu'elle me fait comme effet. Quand je suis avec elle je ne me pose aucune question. C'est la première fois qu'une femme m'attire vraiment comme ça.

Moi qui ne suis pas du matin, j'avoue que là je suis de très bonne humeur. En même temps, il fait beau, chaud et une jolie fille me fait à manger. Que demander de plus ? Si vous sentiez la merveilleuse odeur qui chatouille mes narines. J'entends mon ventre gargouiller et me surprends à le regarder comme pour lui dire de se taire. En relevant la tête, j'aperçois Alia qui me fixe.

- Tu es là depuis longtemps? Demande t-elle toute gênée.
- Quelques minutes.

Je m'approche et l'embrasse tendrement.

- J'ai un petit problème de chemise, on me l'a volé.
- Oh mince c'est bête ça. Dommage, tu vas devoir rester en sous-vêtements et je ne vais pas arrêter de mater, dit-elle d'un air malicieux.

Je souris puis m'installe sur l'un des tabourets.

- J'ai fait des œufs et du bacon, je ne sais pas si ça te va?
- Ça me va très bien.

Nous mangeons tranquillement quand nous entendons le bruit d'une clé dans une serrure. Je lève brusquement la tête et regarde Alia qui est aussi paniquée que moi. En deux temps trois mouvements, je me retrouve au milieu des balais dans le placard de la cuisine. Avant de refermer la porte, elle me fait comprendre de ne surtout pas faire de bruit. Je reste donc silencieuse et écoute ce qu'il se passe.

- Coucou ma chérie ! Bien dormi?
- Coucou maman, oui oui très bien.
- Mais dis moi, c'est une nouvelle chemise?
- Ah oui Léna me l'a prêté hier.
- Ah je vois, la fameuse Léna. Dis moi elle n'est pas lesbienne ta copine?

Alia s'étouffe en riant.

- Non je ne pense pas. Pourquoi tu dis ça?
- Bah disons qu'il y a plus féminine qu'elle et puis vous avez l'air très proches. Fais attention qu'elle ne tombe pas amoureuse de toi.

Non mais j'hallucine, je suis catégorisée lesbienne ! Depuis quand un physique fait l'orientation sexuelle ? Certes ça donne des pistes mais ça ne veut pas tout dire.

Alia rigole alors que moi je suis là, en soutif, dans un placard à balai. J'espère vraiment que sa mère n'a pas remarqué mes chaussures dans l'entrée ainsi que mon assiette posée sur le comptoir de la cuisine. Visiblement non puisqu'elle sort de la pièce sans rien ajouter. Quelques secondes plus tard, je l'entends monter les escaliers.

Alia ouvre la porte d'un coup et je comprends que je vais devoir filer. Je cours vers la sortie, récupère ma chemise puis sors à moitié habillée. Elle m'embrasse furtivement avant de me jeter mes chaussures et de claquer la porte.

Résumé de la situation: je suis actuellement dehors, en chaussettes, ma chemise à moitié mise. Bon bah ça, ça ne m'était jamais arrivé. Je regarde autour de moi, espérant que personne ne m'ait vu.

Je m'éloigne un peu de la maison, boutonne ma chemise puis mets mes chaussures.

Message d'Alia:
Je suis désolée mon cœur.

Message pour Alia:
Décidément avec toi c'est que des première fois ! On ne m'avait jamais fait sortir comme ça.

Sur le chemin je suis clairement dans un sale état : les cheveux en bataille, habillée n'importe comment. On dirait que je rentre d'une soirée bien arrosée. Et je ne vous parle même pas de mon haleine de chacal.

Quand j'arrive devant chez moi, mon frère joue dans le jardin.

- Salut le nain.
- Alors toi, t'as vraiment une de ces têtes. C'est chaud.
- Oh ça va y a pire.
- Tu as de la chance, les parents sont partis faire des courses.

Oh génial pas besoin de m'expliquer pour cette tête effroyable. Je rentre et pars me laver directement. Sous la douche, je pense à la nuit que j'ai passé avec Alia. Elle était incroyable. Pour la première fois de ma vie, j'ai couché avec une femme. Si on m'avait dit ça il y a 2 semaines, je n'y aurais jamais cru. Et pourtant c'est bien ce qui s'est passé, et j'ai adoré. Je ne sais pas si je suis bi, lesbienne ou autre chose mais je suis heureuse et pour rien au monde je voudrais que ça change. À force de rêvasser, je finis sous l'eau froide. Je sors frigorifiée puis me sèche.

Message d'Alia:
Pour me faire pardonner je te paye un mcdo?

Message pour Alia:
Comment pourrais-je refuser?

Message d'Alia:
Rejoins moi à 12h.

Je regarde l'heure: 11h 03. Je vais me préparer et trois quart d'heure plus tard, je préviens mon frère que je ne mangerais pas avec eux. Sur le chemin, j'écoute de la musique et j'ai le sourire jusqu'au bout des lèvres. J'oublie tout ce qui m'entoure et ne pense qu'à une sublime fille. Lorsque j'arrive, je suis surprise de voir qu'Alia n'est pas en retard. C'est assez inhabituel. À vrai dire j'ai extrêmement envie de l'embrasser mais ma timidité reviens vite au galop et je me vois mal le faire devant tout ce monde. Par peur je suppose. Le regard des autres m'a toujours effrayé. Ce que pense les autres de moi est très important à mes yeux.

Lorsque j'arrive à sa hauteur, mes lèvres se posent sur sa joue, chose qu'elle n'avait pas prévu d'après son regard surpris. Je suppose qu'elle s'attendait à ce que je l'embrasse étant donné la nuit que nous avions passé, mais moi je ne peux pas, je ne suis pas prête. À mon plus grand bonheur, elle ne fait aucune réflexion et me souris, m'invitant à entrer dans le fast food.

Nous commandons puis à table, Alia décide de lancer un sujet que je redoutais.

- On en est où nous deux? Je veux dire, pour toi je suis quoi? Une expérience?
- Dis pas n'importe quoi. J'ai vraiment de l'attachement pour toi.
- Mais tu ressens quelque chose?
- Des sentiments un petit peu. Tu sais je prends énormément de temps en terme d'amour. Je déteste m'engager alors je ne sais pas ce que je ressens pour toi. C'est tout nouveau. Je ne savais même pas que je pouvais ressentir ça pour une fille alors je suis complètement perdue.
- C'est compréhensible.
- Je n'ai pas envie qu'on se caractérise en couple... je veux juste qu'on fasse ce qu'on a envie. Actuellement je veux seulement passer du temps avec toi, apprendre à te connaitre et voir où ça nous mènera.
- Bon au moins c'est clair et on est d'accord.

Finalement pour une discussion que je redoutais, elle s'est plutôt bien passée.

« Vibreur de téléphone »

Je regarde mon téléphone mais ce n'est pas le mien. Alia décroche.

- Allô?
- ...
- Quoi? Attends je comprends rien.
- ...
- Bah on est au Mcdo là.
- ...
- Ok on vous attend.

Elle raccroche puis me regarde, inquiète.

- C'était Evan. Il était en panique, je n'ai pas compris pourquoi. Il vient nous chercher, me dit-elle.

Généralement quand Evan appelle comme ça, ça ne sent pas bon. Décidément on ne peut jamais être tranquille toutes les deux. Quelques minutes plus tard, il débarque complètement paniqué.

- Écoutez les filles, on a un gros problème. Tony a trouvé des preuves sur l'implication d'un de nous six. Il ne veut pas nous dire qui c'est. Il veut qu'on le rejoigne sur la plage où ça s'est passé.

Je regarde Alia qui est aussi inquiète que moi. Nous nous levons rapidement puis nous dirigeons vers la plage. Et si c'était moi qu'on allait accuser ? Mon cœur commence vraiment à s'emballer mais cette fois, ce n'est pas pour ma jolie brune.

Nous mettons de longues minutes avant d'arriver car la plage est assez loin et isolée.

Lorsque nous arrivons, Emily, Arthur et Tony sont assis dans le sable. Revenir ici me fait vraiment bizarre. Je n'y suis pas retournée depuis que nous avons enterré le corps. Ce sentiment de honte remonte tout d'un coup.

Nous les rejoignons et nous nous asseyons dans le sable. Pendant quelques minutes, personne ne dit quelque chose. C'est habituel, on prend toujours du temps à se lancer dans les sujets fâcheux.

Tony se décide enfin à tout nous expliquer.

- Comme vous le savez, j'étais amoureux d'elle et j'arrive toujours pas à croire qu'elle soit partie. Ça fait des jours que je cherche toutes les infos sur vous pour savoir qui aurait pu faire ça. J'ai commencé par toi Léna.
- Super, je suis le suspect numéro 1, comme d'habitude.
- Tu étais la nouvelle et tes antécédents avec Arthur n'ont pas aidé. Et j'ai trouvé des choses très intéressantes mais rien de concret. Alors j'ai continué pour vous tous sauf Alia que je n'avais pas encore faite, quand j'ai trouvé la preuve ultime.

Nous nous regardons tous perplexes.

- J'étais vraiment désespéré et nostalgique alors je suis allé voir mes photos avec Emma. C'est là que j'ai vu qu'en fait, j'avais fais énormément de vidéo durant cette soirée. Voilà ce que j'ai trouvé.

Tony nous donne son téléphone. Sur la vidéo nous y voyons d'abord Tony qui danse puis en arrière plan Alia et Emma qui se dispute. Celui ou celle qui filmais s'est alors concentré sur la dispute. On y voit les deux filles qui se crie dessus.

« - Tu devrais mourir sale pute ! Crie Alia. »

On la voit alors se jeter sur Emma et la vidéo se coupe.

Nous somme tous sous le choc. Je regarde Alia, elle a les yeux remplis de larmes.

- C'est pas possible, je n'ai rien fait. J'ai pas pu tuer quelqu'un c'est impossible. On voit rien sur cette vidéo.
- Écoute Alia, moi j'en ai marre de ne pas savoir ce qu'il s'est passé. De ne pas savoir qui l'a tué. Ça me rend dingue ! Alors maintenant je vais m'en remettre à la police. Demain j'irais les voir et je leur donnerais la vidéo et leur dirais tout.

Alia éclate en sanglot et je suis clairement perdue. Je ne sais pas quoi dire ni comment réagir.

- Tu ne peux pas faire ça. Tu vas tous nous mettre dans la merde, dit Arthur
- Je m'en fous ! Elle ne méritait pas ça. Je peux plus garder ça pour moi. J'ai besoin de savoir.
- Tu te rends compte qu'on risque tous d'avoir de sacrés ennuis. Et encore plus Alia tu peux pas faire ça. On s'était tous mis d'accord au début. Tu n'as pas le droit de nous lâcher comme ça !
- Eh bien profitez des heures qu'il vous reste. Demain matin, j'irais au poste.

Non mais il ne peut pas faire ça ! Il va tous nous impliquer. En plus pour ma part, je n'arrive pas à croire qu'Alia aurait pu faire ça. J'ai limite plus de facilité à penser que c'était moi. Surtout qu'en preuve ultime, on fait mieux. On ne voit rien de concret sur la vidéo. Nous avons beau essayer de le faire changer d'avis, c'est peine perdue. Tony s'en va, nous laissant tous les cinqs. Arthur se lève très énervé.

- Bon bah autant profiter ! Je vais boire et baiser. Quelqu'un pour m'accompagner?
- Je te suis, dis Evan complètement abattu.

Les deux garçons s'en vont. Quelques minutes plus tard c'est moi qui me lève et prends la main d'Alia. Nous rentrons, laissant Emily seule sur la plage.

Sur le chemin Alia, n'a pas arrêté de pleurer. Nous sommes toutes les deux dans un piteux état et après réflexion, je pense qu'Arthur a raison sur un point : boire. Si on peut oublier le temps de quelques heures, alors autant le faire non? De toute façon, il n'y a aucune solution : Tony va tous nous balancer et on va tous aller pourrir en prison.

Nous partons acheter plusieurs boissons, passons chez Alia prendre une enceinte puis nous allons à notre petit coin caché.

- J'ai tellement peur, me dit Alia complètement désespérée.
- Ne t'en fais pas ça va aller, je serais là. T'es pas toute seule.
- Tu crois que je l'ai tué?
- Je ne sais pas Alia. Je ne sais pas qui l'a fait. Je ne sais pas quoi en penser.

Toutes les deux assises sur le rocher, nous commençons à boire et à manger la pizza qu'on a été chercher. La musique est à fond, les gorgées s'enchaînent et peu à peu je sombre dans un état second. De toute façon tant pis, je suis foutue. À partir de demain, je passerais ma vie enfermée, donc bon, autant se prendre une bonne grosse cuite.