Troubles à Suna
En lisant les quelques mots griffonnés à la hâte par Gaara, Hitomi se redressa d'un bond, effarée. Elle savait que cela arriverait, bien entendu, mais elle n'avait pas prévu que cela soit si tôt. Le cœur battant si fort qu'il lui faisait mal, elle saisit un stylo qui ne quittait jamais sa table de chevet et écrit une réponse avec hâte.
Va voir Temari et explique-lui. Elle t'aidera. Je vais demander de l'aide à Ensui immédiatement. Je t'aime, Gaara. Courage. Tiens bon.
Dès qu'elle eut imprégné la page de chakra, elle s'habilla, ses gestes rapides et secs. D'un mouvement maladroit, elle ouvrit grand sa fenêtre et, son carnet à la main, sauta dans le jardin. La chute aurait été douloureuse si elle n'avait pas travaillé si dur avec son chakra, des mois – une éternité – plus tôt. Sans perdre de temps, elle se mit à courir. La maison d'Ensui était de l'autre côté des terres du clan, mais elle y parvint en un temps record et se mit à tambouriner sur la porte, appelant le nom de son maître.
— Hitomi ? Qu'est-ce qu'il se passe ?
— C'est Gaara, shishou ! Il a été attaqué par son oncle et il m'a supplié de l'aider. Il... Il a besoin d'aide. Je vous en prie, allez à Suna et protégez-le, s'il vous plaît !
Le ninja se raidit de surprise, l'incrédulité clairement inscrite sur son visage, mais se ressaisit immédiatement. Il posa une main rassurante sur l'épaule d'Hitomi. Dans la semi-obscurité, il pouvait distinguer son affolement.
— Montre-moi son message. Calme-toi, respire profondément.
Les mains agitées de violents tremblements, elle s'exécuta, ouvrant son carnet pour Ensui. Le message de Gaara ne s'était pas encore effacé. Cela la rendait pratiquement malade de regarder les kanjis maladroits – le petit garçon avait toujours pris garde à la précision de ses traits, il devait vraiment être terrifié pour abandonner ce principe. L'impuissance d'Hitomi lui donnait l'impression de s'étouffer. Elle voulait aller aider Gaara, et elle voulait y aller maintenant, mais elle savait que c'était tout simplement impossible.
— Bon... Écoute-moi, Hitomi. Je vais aller me préparer et partir aussi vite que possible. Dis à Gaara que j'arrive dans trois jours. En attendant, qu'il reste toujours en compagnie de sa sœur. Si c'est son père qui est derrière tout ça, de potentiels agresseurs y réfléchiront à deux fois avant de s'en prendre à elle aussi. Avant de rentrer chez toi, va expliquer la situation à Shikaku et dis-lui que je rentrerai quand ton ami sera en sécurité. Je te tiendrai au courant via son carnet.
Son intonation calme et déterminée apaisa instantanément Hitomi. Oui... Ensui savait quoi faire, et elle pouvait lui faire confiance. Elle hocha la tête, son courage revenu devant son assurance, et ouvrit son carnet tandis qu'il s'éloignait déjà, disparaissant entre les maisons des terres du clan.
Gaara, tu es avec Temari ? Ne la quitte pas d'une semelle. Les hommes de ton père n'oseront pas s'en prendre à elle. Ensui arrivera dans trois jours, le temps de faire la route. Prends soin de toi et tiens-moi au courant. Hitomi.
Le message envoyé, elle tourna les talons et courut vers la maison de Shikaku. Le chef de clan avait sans doute été en train de se préparer à dormir quand elle frappa à sa porte : il était moitié en uniforme, moitié en pyjama. Pourtant, il écouta ce qu'elle avait à dire, sans doute interpellé par la détresse qu'il pouvait lire sur son visage.
— Je vois. Tiens-moi au courant, et fais de ton mieux pour ton ami.
Hitomi hocha la tête et reprit le chemin vers chez elle. La nuit avait beau être tiède et clémente, l'air calme de temps à autres agité d'une faible brise, elle se sentait glacée. À travers la fenêtre du salon, elle vit qu'une lampe était allumée, et devina la silhouette de sa mère, qui tournait en rond d'un air anxieux. Elle avait dû l'entendre sortir... Peu de choses trompaient la vigilance de Kurenai, et surtout pas une aspirante ninja en première année, aussi douée soit-elle sur les bancs de l'école. Elle n'avait tout simplement pas assez pratiqué le Pas du Chat, la technique de déplacement furtif utilisée par la plupart des ninjas, prétendument inventée par les Uchiha au tout début de l'ère shinobi.
— Où étais-tu partie ?
La petite fille fut soulagée de ne pas entendre d'accusation dans la voix de sa mère, seulement une douce et sincère inquiétude. Au bord des larmes, elle alla se réfugier dans ses bras, sa tête cachée dans le creux entre son cou et son épaule, là où la peau était douce et les cheveux sentaient bon. Les kunoichi ne portaient pas de parfum, ou alors seulement extrêmement discret et basé sur des odeurs naturelles – bois de sapin, fleurs de sous-bois, épices – mais c'était l'odeur du chakra de Kurenai qu'Hitomi était capable de sentir. Pouvait-on vraiment parler d'odeur ? C'était presque une impression, la chaleur d'un feu sur sa peau, le calme de la mer après une tempête.
— J'étais allée voir Ensui-shishou. Il y a... Il y a des problèmes à Suna. Le père de Gaara a essayé de le faire assassiner. J'ai tellement peur, maman...
Elle n'eut pas besoin d'en dire plus. Les mains de sa mère se refermèrent sur elle, tendres, compréhensives, tentant d'adoucir sa peine et son angoisse en de douces frictions circulaires le long de sa colonne vertébrale. Cela fonctionnait, en quelque sorte : son corps se détendit au moins, tandis que son esprit était toujours parcouru d'un désarroi intense. Elle détestait se sentir si impuissante, si inutile.
— Il va te tenir au courant, pas vrai, ma puce ? Tu ne peux rien faire ici, alors concentre-toi sur ça. Tu as déjà fait quelque chose, et c'était un bon réflexe d'aller voir Ensui. J'imagine qu'il est déjà parti pour Suna ?
— Oui... Il m'a dit qu'il lui faudrait trois jours pour y arriver.
Elle avait beau connaître le temps nécessaire à un shinobi entraîné pour relier les Villages Cachés dans les Feuilles et dans le Sable, elle avait fait le trajet elle-même et cela avait pris des mois entiers. Cela lui semblait si rapide... Et si lent à la fois. En trois jours, Gaara avait le temps de mourir mille fois. C'était terrifiant pour elle de savoir qu'elle avait fait tout ce qu'elle pouvait et que, pourtant, il y avait toujours un risque que cela ne suffise pas.
Gaara n'aurait six ans que dans quelques semaines, ce qui signifiait que quelqu'un ou quelque chose avait poussé le Kazekage à agir plus tôt contre son fils. Et si... Et si c'était elle ? Et si en stabilisant l'enfant, en lui apportant de l'amitié et de la tendresse, elle l'avait détourné du but originel de son existence aux yeux de son père ? Un jinchûriki qui n'obéissait pas aux ordres ne servait pas à grand-chose, aux yeux d'un tel homme.
Pourtant, l'idée qu'elle ait eu, même involontairement, de l'influence sur le Kazekage lui semblait absurde. Elle n'était qu'une enfant ! Elle n'était même pas censée avoir de l'influence sur sa famille – et, bon, d'accord, elle en avait, mais c'était essentiellement parce qu'elle avait développé une arme injuste avec Les Yeux, pas parce qu'elle avait du pouvoir sur eux. Or, ce n'était assurément pas Les Yeux qui avaient influencé le Kazekage. L'idée même était ridicule.
— Tu devrais essayer de dormir, ma puce. Il est tard, et tu dois aller à l'Académie demain.
La petite fille hocha la tête, compréhensive. Elle n'aurait eu qu'à demander pour avoir la permission exceptionnelle de rester à la maison mais... Quel serait l'intérêt ? Elle serait, à terme, plus utile à Gaara en suivant assidûment les cours et en faisant de son mieux pour se surpasser chaque jour. Rester chez elle ne leur apporterait rien, ni à lui ni à elle.
Toutefois, le lendemain, elle ne put que réaliser à quel point il lui était difficile de se concentrer sur la leçon que donnait Iruka. Elle ne cessait de passer une main sur son carnet pour vérifier s'il refroidissait, dans l'expectative. Elle avait reçu un message de Gaara au milieu de la nuit, lui assurant qu'il avait trouvé Temari et qu'elle l'avait emmené en sécurité, dans un vieux poste de garde que plus personne n'utilisait car il se trouvait le long d'une ancienne frontière ; le pays s'était depuis étendu de plus d'une centaine de kilomètres dans cette direction. Toutefois, la cache avait l'avantage de se trouver à quelques heures à peine des portes de Suna, et Temari avait assuré à Gaara qu'elle irait y intercepter Ensui quand il serait prévu qu'il arrive.
La surprise, pour Hitomi, avait été d'apprendre que Kankurô avait été mis dans le secret, et les aidait également. D'un an moins âgé que Temari, il venait tout juste de sortir de l'Académie de Suna, tandis que sa sœur avait une année d'expérience sur le terrain. Ils avaient beau n'avoir que neuf et dix ans – d'après Gaara, Suna n'avait pas les mêmes règles concernant l'âge minimum des ninjas que Konoha et les aspirants sortaient Genin dès qu'ils étaient considérés prêts, psychologiquement et physiquement – ils avaient pris tous les deux la courageuse décision de s'opposer à leur père.
Au moins, Gaara était mieux entouré qu'elle ne l'avait pensé. Certes, les membres de la fratrie n'étaient pas exactement aussi puissants qu'ils le seraient six ans plus tard, mais ils étaient capables de s'occuper d'eux-même. Ce dont l'enfant avait besoin maintenant, c'était de se sentir aimé, soutenu, et Hitomi ne pouvait lui offrir tout cela en quantités suffisantes, elle était tout simplement trop loin pour cela.
Et tant pis si son cœur lui hurlait de retourner à Suna. Tant pis si elle se sentait vide et froide à ne pas pouvoir l'aider, tant pis si elle avait l'impression d'être déchirée en deux. Elle pouvait au moins toujours lui parler, et elle lui serait plus utile en étant forte, diplômée, libre de se déplacer dans le monde entier sans être escortée. Elle avait besoin de penser plus loin, de penser au moment où sa vie serait réellement en danger, et être prête quand ce temps viendrait.
Elle ne pouvait que faire de son mieux, et c'était ce qu'elle allait faire. Pour la première fois au cours de Mizuki elle battit Sasuke lors des épreuves de vitesse, d'un cheveu. Ses jambes brûlaient après cela, mais elle était convaincue que le jeu en valait la chandelle. Elle avait beau devoir sa victoire à sa meilleure mémorisation du parcours, elle n'allait pas s'en plaindre ni le souligner ; un shinobi prenait toutes les armes qu'on lui allouait. Quant aux filles qui la fusillaient du regard parce qu'elle avait battu leur idole... Quand elles seraient vraiment une menace, peut-être s'en soucierait-elle.
Quand elle rentra chez elle, elle fut un peu surprise de voir sa mère habillée pour sortir, pas pour faire les courses ou aller chercher des papiers à la Tour du Hokage, mais... Sortir. Sa romance avec Asuma avait-elle commencé aussi tôt dans le canon, ou était-ce quelqu'un d'autre ? Elle mit cette pensée de côté : elle n'avait aucun moyen de le savoir, après tout.
— Ibiki te gardera ce soir, d'accord ma puce ? Ensui et ton oncle sont tous les deux hors du village, et Yoshino est en visite chez sa famille avec Shikamaru pour le week-end. Ibiki me devait un service alors... Tu seras sage ?
Cachant en hâte la vague d'angoisse qui lui dévorait soudain la gorge, elle répondit à Kurenai d'un sourire paisible, relevant à peine le regard du livre qu'elle devait terminer de lire avant lundi pour les cours d'Iruka-sensei. Elle devait encore expliquer les derniers chapitres à Naruto à voix haute.
— Pas de souci. Hum, avant que tu partes, est-ce que Naruto pourrait dormir ici ce soir ? On doit étudier pour l'Académie.
C'était une excuse parfaite pour ne pas passer la soirée et la nuit – sans doute – seule dans la même maison que le meilleur élément du Département Torture et Interrogatoire de Konoha. Si on ne comptait pas les Yamanaka. Mais quand même. Pour le plus grand soulagement d'Hitomi, sa mère accepta, la laissant s'élancer vers la sortie du territoire des Nara.
Naruto n'avait pas été difficile à convaincre et les deux enfants travaillaient déjà, penchés sur leurs livres de cours, quand Ibiki arriva. Hitomi dut dissimuler un sourire quand elle intercepta le très léger mouvement de recul de l'homme face au petit jinchûriki. C'était subtil, parce qu'on ne devenait pas membre du département Torture et Interrogatoire en jetant ses émotions à la figure des autres, mais elle avait vu sa surprise.
La petite fille rendit volontiers son étreinte à Kurenai, la regardant sortir et avaler de quelques pas impatients le petit chemin décoré de galets polis qui séparait leur maison de la route principale. Elle était belle, dans la robe qu'elle avait choisie, ses cheveux légèrement agités par le vent, glorieuse. Le manga ne lui avait pas du tout rendu justice. Quand elle eut disparu de son champ de vision, sans plus se soucier d'Ibiki qui les observait pensivement depuis que Naruto et elle l'avaient poliment salué, la petite fille tourna à nouveau son attention vers son ami :
— Donc, tu vois, les Nations Élémentaires sont appelées ainsi parce que chacun de leur nom fait référence à l'un des éléments primaires du chakra des ninjas. Nous vivons dans le Pays du Feu, et les autres sont le Pays du Vent, le Pays de l'Eau, le Pays de la Foudre et le Pays de la Terre. Ces cinq pays sont considérés comme les plus puissants sur plusieurs plans, notamment militaire et économique. Ils ont à leur disposition un Village Caché, comme Konoha, mais ce ne sont pas les seuls pays dans ce cas. Il existe beaucoup de plus petits Villages dans des pays de moindre envergure.
— Ah, je vois ! Mais ils font tout comme nous là-bas ?
— Ah... non, pas exactement. Par exemple, à Konoha, une fois diplômés, les Genin sont organisés en équipes de trois, dirigés par un Jônin qui leur sert de professeur. À Kumogakure, le village du Pays de la Foudre, les ninjas sont le plus souvent organisés en équipes de deux. À Sunagakure, le village du Pays du Vent, les ninjas étaient jusqu'à récemment organisés par escadrons en fonction de leurs compétences, mais, au moins pour les Genin, ils commencent à copier le système de Konoha, parce qu'ils ont vu que ça fonctionnait bien pour nous aux examens Chûnin, qui sont publics.
— Sunagakure, c'est le village où tu es allée avec ton shishou, pas vrai ?
— Oui, c'est ça. Gaara, l'ami que je me suis fait là-bas, s'entendrait très bien avec toi, je pense. Il est incroyablement gentil, comme toi.
Sans tenter de faire preuve de la moindre subtilité – parfois, manipuler dans l'ombre était moins efficace que de jeter ses manigances à la figure de la cible – elle envoya un regard très appuyé dans la direction d'Ibiki, dont la posture se raidit légèrement dans le fauteuil où il s'était assis. Il avait écouté avec soin les explications d'Hitomi, hochant parfois la tête avec approbation. Elle n'allait pas se gêner pour profiter de son attention et lui mettre le nez dans les travers du village.
Plus tard, il s'occupa de leur cuisiner le dîner tandis qu'elle entraînait Naruto à la calligraphie. Il était toujours plutôt mauvais en écriture, et n'avait pas encore réussi un seul des contrôles d'Iruka sur ce sujet. Naruto avait des problèmes d'apprentissage auxquels on n'avait jamais accordé la moindre attention dans le monde ninja, où il fallait suivre la cadence ou accepter d'être laissé derrière. Comme si Naruto avait été capable de se soumettre à une telle idée.
Après le repas – plutôt bon, elle devait l'admettre – Hitomi entraîna Naruto dans le jardin. Elle perçut derrière elle le chakra d'Ibiki, bien décidé manifestement à jouer son rôle de gardien. Peut-être avait-il peur de la réaction de Kurenai si quelque chose leur arrivait. La petit fille avait compris à force de laisser ses oreilles errer dans le village que sa mère avait une réputation plutôt intimidante auprès de ses pairs. Elle avait, entre autres, gagné le tournoi de l'examen Chûnin pour lequel elle avait été promue sans utiliser quoi que ce soit d'autre sur ses adversaires que de genjutsu, de la première à la dernière épreuve. Cela voulait dire quelque chose, à Konoha.
L'obscurité qui tombait lentement sur le village ne gênait pas la petite fille. Elle pouvait percevoir Naruto à son chakra ; avant son voyage avec Ensui, sa proximité l'aurait sans doute consumée, mais maintenant... Maintenant elle parvenait à étouffer ses perceptions de façon à ne ressentir qu'une douce chaleur quand elle était proche de lui. La voix paisible et assurée, elle apprit le kata d'ouverture qu'Ensui lui avait enseigné à Naruto, corrigeant encore et encore sa position. Elle le félicitait à chaque progrès, à chaque réussite, et la motivation infinie dans ses yeux bleus était une récompense bien suffisante pour elle.
Plus tard, quand Naruto fut en train de se laver à l'étage, elle se dirigea vers Ibiki, l'air décidée.
— Vous jouez au shôgi ?
Il eut un petit rire en entendant cette question, un son rauque et profond qui rappelait Shikaku à Hitomi.
— Tu es bien une Nara, hm ? Oui, je joue. Tu veux faire une partie ?
Elle répondit d'un hochement de tête et alla chercher son plateau, le préparant en quelques gestes précis, rendus fluides par l'habitude et la répétition. Quand Naruto sortit de la salle de bain, s'essuyant toujours les cheveux, il les trouva tous les deux penchés sur le plateau, les sourcils froncés de concentration. Bien entendu, Hitomi perdit cette partie, mais après cela, Ibiki la regarda d'un air visiblement intéressé.
— Tu as un style particulier, tu le sais ?
— Forger sa manière de jouer auprès d'Ensui, Shikaku et Shikamaru Nara a tendance à faire cet effet aux gens, pas vrai ?
Il rit à nouveau, secouant légèrement la tête, puis retourna à sa garde vigilante, tandis que les enfants se remettaient à étudier pour le contrôle qui ne manquerait pas de tomber après le week-end.
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