Auteur : Sarah Cohen-Scali

Titre : Gingo

Catégorie : Roman d'anticipation, science-fiction

Édition : Gulf stream

Collection : Électrogène

Parution légale : Février 2018

Pour en savoir plus sur l'auteur (voir le lien externe en bas de page) :

https://www.wattpad.com/763927796-quand-losunivers-s%27en-m%C3%AAle-critiques-litt%C3%A9raires

Résumé

Le mur. Il sépare la Cité Bleue de la Cité Blanche, Smartcity à la pointe de la technologie. Jade vit du côté bleu, là où le travail manque, où la vie est rude. Là où ses ancêtres ont un jour décidé de se déconnecter pour échapper à l'œil inquisiteur du Net. Elle doit ainsi se soumettre aux lois imposées par la Cité Blanche. Lui accordera-t-on ce qu'elle désire par-dessus tout ? Le droit d'avoir un enfant ?

Accord refusé. Jade doit adopter. Or les Adoptés ne sont pas des enfants comme les autres. Ils sont difficiles à élever, à aimer. Ils servent avant tout d'objets d'étude pour les scientifiques de la Cité Blanche. Mais Jade parviendra à aimer Gingo comme son propre fils et de ce fait, elle conduira la Cité Bleue à la rébellion.

À travers le combat d'une mère pour son fils, se dessine le portrait angoissant d'une société hyper connectée, assujettie à la suprématie des algorithmes et de l'Intelligence artificielle.

Celle de demain ?

Un questionnement profond sur la part d'humanité de chaque être vivant.

(Quatrième de couverture)

Les plus de l'histoire

Ce qui attire le premier regard avant d'entamer toute lecture, c'est la première de couverture, le design du livre. Dans ce cas-ci, la couverture est sobre mais prenante et en relation directe avec l'histoire. Il est difficile au début de comprendre les références, puis petit à petit, tout se met en place et on voit cette première de couverture sous un angle différent. De plus, les bords de chaque page sont teintés de bleu (référence à la Cité Bleue). Le livre, étant fermé, est donc assez joli et impressionnant avec sa couverture sombre et ses pages bleues électriques. Mais rassurez-vous, le fond des pages est bien blanc ! C'est sûr que le bleu, c'est joli et original. Mais si les pages avaient été intégralement teintes en bleu, cela aurait bien compliqué la lecture. Pour ma part, je vois dans ce choix artistique un lien entre la Cité Blanche et la Cité Bleue. Les Bleus étant considéré comme moins important, ils ne sont représentés que sur les bords de chaque page tandis que les Blancs occupent la majorité de la place disponible. Je vais peut-être un peu trop loin dans cette analyse mais il y a clairement une référence de la part de l'auteure et de l'éditeur Gulf Stream.

Pour ce qui est de l'univers du livre en tant que tel, il n'y a pas de mots adéquats pour le décrire. L'auteure nous plonge directement dans un monde futuriste qui nous paraît si lointain mais pourtant totalement possible et probable. L'importance prise par les Intelligences artificielles et la technologie en général sur la vie humaine est considérable et nous amène à nous poser des questions sur notre futur : voulons-nous vraiment avoir nos vies régies à 100 % par des IA ? Dans ce monde, rien n'est laissé au hasard, tout est prévu à l'avance. L'Homme ne décide plus de rien et est soumis à la technologie. De plus, l'auteure pose également le problème du conditionnement, notamment dès l'enfance, et c'est choquant de voir la réaction de ces « bébés-adultes » (car oui, ils ont à peine cinq ans et se comportent déjà comme des adultes) face à certaines situations. Nous sommes clairement dans un monde d'obéissance, de subordination, de soumission et de dénonciation. Chapeau à l'auteure pour nous avoir fait entrer dans ce monde si différent mais pourtant si réel, avec des mots inventés pour désigner des choses qui existent pratiquement déjà.

Ensuite, il y a les personnages. Ceux-ci sont tellement attachants ! On est porté par le comportement rebelle de Jade et on se demande : « Jusqu'où va-t-elle aller ? Va-t-elle réellement faire changer les choses ? ». On la voit se battre pour son fils et mener la Cité Bleue jusqu'à la rébellion. On la voit semer le doute chez les Blancs, les faisant se questionner sur leurs méthodes et leur mode de vie. On la voit même corrompre une Intelligence artificielle qui refusera de dénoncer Jade aux Autorités ! En d'autres mots, elle met la pagaille dans ce monde dichotomique et injuste. Et ça, ça met de la vie dans ce monde froid et sans émotions.

Et puis, il y a Gingo, cet enfant qui a tout pour être détesté. Mais pourtant, on l'aime, on l'apprécie, on le trouve attachant et drôle. On a nous-mêmes envie de nous rebeller contre les Blancs pour leur injustice et leurs méthodes inhumaines. Gingo, c'est la touche d'humanité dans ce roman, c'est ce qui nous donne de l'espoir et qui nous montre que l'on peut encore réellement vivre.

De plus, l'auteure a adapté son écriture en fonction de la Cité dans laquelle ses personnages se trouvaient. Dans la Cité Blanche, avec Viv par exemple, l'écriture est plus froide, morne, impersonnelle. On ressent à travers les mots de l'auteure que la technologie a pris le dessus et que ce monde futuriste est dénué de sentiments, de passion, de contact humain et physique. Tout est une question de rang social, de niveau professionnel, d'argent et de beauté physique. Un passage qui m'a sidérée est le moment où Viv et Ben choisissent leur enfant. Quand je dis « choisissent », je veux dire qu'ils commandent leur enfant comme on fait des courses dans un supermarché. Ils peuvent décider du sexe, du futur métier, du caractère, etc. de leur enfant, et tout cela bien avant sa conception ! Ensuite, dès leur plus jeune âge, les enfants sont pris en charge par les IA qui adaptent leur planning, leur alimentation, leur temps libre, ... pour que ces enfants deviennent ce que les parents veulent qu'ils deviennent. La question du choix, du hasard, est complètement abolie dans cette Cité Blanche.

Enfin, ce livre est addictif au possible : on voit les événements se mettre en place petit à petit et on essaie de savoir comment tout cela va se terminer. Et puis, il y a la fin... Je ne m'y attendais tellement pas qu'il m'a fallu quelques minutes pour reprendre mes esprits après la lecture de la dernière phrase. J'étais littéralement (excusez-moi pour l'expression) sur le cul ! Je ne m'attendais pas à cette révélation et la seule phrase qui résonnait dans ma tête, c'était : « Pas possible... ». Et pourtant, après cette dernière phrase révélatrice, tout devient tellement plus claire ! Je ne vous en dis pas plus mais c'était juste... incroyable. Je n'ai pas d'autres mots. Chapeau à l'auteure !

Les moins de l'histoire

Le livre est assez cher (du moins pour le grand format). Il compte approximativement 300 pages et coûte 17,50€. Toutefois, le prix est justifié au vu de la qualité des pages, de l'impression et du design du livre.

Pour en revenir au sujet de la plume de l'auteure que j'ai abordé ici plus haut, je dois admettre que le début n'est pas très accrocheur. Le ton est froid (car les premiers chapitres décrivent la Cité Blanche) et il faudra attendre l'arrivée de Jade (cinquante pages plus tard) pour avoir un peu de chaleur dans l'écriture. De plus, rien n'est expliqué : APR, CN, @toptés, @tolescents, ... Tous ces termes sont employés énormément dès les premiers pages et ne sont expliqués que bien plus tard dans le récit, voire pas du tout explicités ! Toutefois, une fois le cap des cinquante premières pages passé, on rentre très vite dans l'histoire et on n'arrive plus à s'arrêter !

Mon opinion

Pour conclure, cette lecture, qui m'a au début très peu emportée, m'a totalement fascinée. La plume de l'auteure est belle, précise. On se pose des milliers de questions sur notre civilisation, sur nos modes de fonctionnement, et on se dit : « Et si la société de demain ressemblait vraiment à ça... ». J'ai apprécié Jade et j'ai développé un amour inconditionnel pour Gingo, ce petit être si différent que personne d'autre, à part sa mère, sa mapan, ne comprend réellement. Bref, à lire absolument !

Je mettrais donc la note de 7,5/10 à ce roman. Je conseille toutefois ce livre aux jeunes adultes. Les plus jeunes risquent de ne pas tout comprendre car le vocabulaire qu'utilise l'auteure est plutôt élevé. Mais a contrario, les adultes risquent de trouver ce roman trop enfantin.

Extraits

! Attention, spoiler : vous êtes prévenus !

Extrait n°1 :

Son regard se durcit. Ainsi, malgré tout le soin qu'elle avait mis à choisir un compagnon digne de ce nom, malgré la raison qui avait présidé à son choix et les sacrifices consécutifs, (John ! Ce merveilleux amant qu'elle avait renoncé à épouser !), elle en arrivait à... Ca ! Car il lui paraissait évident que la faute incombait à Ben. C'était dans ses gènes que se trouvait la faille à l'origine de cette catastrophe.

Extrait n°2 :

Où la révolte les avait-elle menés ? (...) À la disparition de la classe moyenne dans une société qui n'en comptait désormais plus que deux : les riches et les pauvres qu'on avait parqués derrière le mur. Elle étouffa son sentiment de culpabilité. De quoi était-elle coupable ? De vouloir vivre décemment avec son mari ? De désirer un enfant et l'élever avec amour ? Elle avait besoin de ce travail dans la Blanche et si se connecter était indispensable à ce travail, elle l'accepterait. Elle se... brancherait !

Extrait n°3 :

Pour la deuxième – il fallait que ce fût une fille, le « choix du roi » comme on disait autrefois – Viv voulut rendre la pareille à son mari. On puisa dans une liste de donneuses potentielles issues d'un site d'artistes. Car ils voulaient s'offrir une petite fantaisie : ils souhaitaient une artiste. Une musicienne. Violoniste de préférence, quoiqu'une pianiste ferait tout aussi bien l'affaire. Cependant, lorsque Ben repéra sur l'écran l'embryon virtuel d'une future danseuse étoile, Viv devina tout de suite à quel point il en avait envie.

Extrait n°4 :

Mon Dieu ! Comme il était laid ! Elle le savait pourtant, qu'il serait laid, elle savait à quoi s'en tenir depuis le début. Même si elle s'était renfermée chez elle ces derniers temps, elle avait auparavant croisé plusieurs de ces enfants dans la tour et dans le quartier. Mais elle avait fini par se persuader (quelle naïveté !) que le sien n'aurait pas un physique aussi ingrat. À cet instant, tel un coup de couteau supplémentaire venant blesser son cœur, le souvenir précis des adorables visages de Tab et Hash se rappela à elle.

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Dites-moi dans les commentaires si vous avez déjà lu ce livre et n'hésitez pas à y faire votre petite critique aussi ! Je serais ravie de connaître votre ressenti et je me ferais un plaisir de lire votre opinion.

Pour ceux qui ne l'ont pas encore lu, j'espère que cette critique vous aidera à vous décider !

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Publié le 27 juillet 2019