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Part.1

              Justine, affublée d’un épais anorak et de gants en cuir, arpentait la rue Saint-Jean où roulait autrefois le tramway. Elle portait un sac à dos et progressait d’un pas vif.
                La jeune femme bravait le froid et fouillait des appartements pour nourrir sa famille. Elle se hâtait, effrayée à l’idée de prendre du retard et de croiser le chemin des chiens. Au crépuscule, ils quittaient les ruelles obscures et les souterrains de Nancy. La neige étouffait leurs pas et personne ne les percevait jusqu’à l’instant où leur haleine chaude et infecte chatouillait la peau. Ces bêtes rachitiques, au poil hirsute et au museau ensanglanté, traquaient les imprudents pour s’en repaître.
             Elle espérait dénicher de la nourriture car les denrées se raréfiaient avec le temps. L’armée, avec l’aide de la Croix-Rouge, organisait une distribution quotidienne de colis sur le parvis de la cathédrale mais les rations étaient insuffisantes. Les adultes devaient s’accommoder de portions adaptées à de jeunes enfants. Les violences entre malades croissaient. Justine ne sollicitait plus cette assistance et s’adonnait au pillage. Hélas, trouver des denrées s’avérait de plus en plus problématique car les escrocs du marché noir en profitaient pour s’enrichir. Armés de pieds de biches et accoutrés tels des cambrioleurs, ils étaient sans foi ni loi.
           D’épais flocons voletaient puis s’écrasaient sur les cadavres dévorés qui jonchaient l’asphalte blanchie. En ce vingt et un décembre deux mil douze, le ramassage sanitaire ne s’effectuait plus. Chacun gérait sa famille ou ses amis comme il le pouvait. Aucune saleuse ne dégageait les voies, aucune musique ne s’élevait des chalets clos du marché de Noël aux issues fracassées. Un silence pesant régnait. Les rideaux de fer des boutiques, aux vitrines pulvérisées, étaient détruits. Des voitures-bélier, abandonnées, givraient devant certains commerces.
              Justine leva les yeux et remarqua des corbeaux, perchés sur un câble électrique tendu entre deux façades. Elle frémit.
                   On se croirait dans Les Oiseaux, quelle horreur !
             Le câble supportait une guirlande à LED. Les ampoules, éteintes, reproduisaient une écriture manuscrite : « Joyeuses Fêtes ! » Les corbeaux croassèrent.
                 Une porte d’immeuble s’ouvrit dans un grincement. Justine tourna la tête et aperçut deux hommes qui évacuaient une femme inanimée. Ils l’étendirent délicatement sur le trottoir. Les volatiles atterrirent avec précipitation. Ils sautillèrent vers la disparue, avides de chair, puis la piétinèrent. Ils la défigurèrent à grands coups de becs sous les cris d’effroi des endeuillés qui les dispersèrent.
                Justine se détourna et consulta sa montre : seize heures quarante-cinq. Elle s’éloigna. Un jeune vendeur, vêtu de sombre, était adossé à un panneau de signalisation. Des mèches brunes dépassaient de son bonnet et frôlaient son blouson de cuir. Il tenait son pied de biche d’une seule main et surveillait les parages, il braqua sur elle ses prunelles ténébreuses.
                « Pssst ! »
              Justine hâta le pas. Elle sentit bientôt sa présence dans son dos, pila et se retourna. Il la détailla.
               « Je n’ai besoin de rien. »
               Il empoigna le sac à dos de Justine par son anse et le soupesa.
               « Hé ! » protesta-t-elle.
               Un léger sourire étira les lèvres de l’inconnu.
               « Dix euros la boîte de conserve. Sept pour un plat préparé. Prix d’ami.
               —    Pas intéressée. »
             Justine le contourna, il posa une main sur son épaule pour la retenir. Elle s’arrêta et il la fixa d’un air inquiet.
              « T’as l’air mal en point.
              — J’crois pas, non ! »
              Il poursuivit sur un ton amical :
            « J’ai du matériel, si jamais… Quinze euros le rasoir. Trente pour une corde, fournie avec une notice pour le nœud coulant… J’ai des chargeurs de revolver, cinquante euros pièce… Je suis raisonnable, contrairement à mes collègues », affirma-t-il avec un clin d’œil.
               Justine s’écarta.
               « J’ai pas d’argent. »
               Il jura et disparut. Justine soupira. Elle haïssait ce genre d’individu qui exploitait le malheur des autres !
            Elle s’intéressa à un amoncèlement de quotidiens gratuits qui prenait l’humidité au pied d’un immeuble. Elle se baissa puis saisit un exemplaire daté du huit décembre, gonflé par les cloques. Justine le rangea dans son sac et se releva.
            L’entrée entrebâillée, devant elle, dévoilait une fente obscure. Justine sortit une lampe torche de sa poche, l’enclencha et approcha prudemment de l’ouverture qu’elle poussa du bout du pied. Un grincement sinistre résonna. Une intense odeur de déjections s’échappa et Justine lutta contre la nausée. Elle risqua un œil dans le hall : des cadavres ensanglantés, méconnaissables, jonchaient le carrelage et les marches. Leurs plaies noires et boursouflées reluisaient. Des larves blanches remuaient sous les chairs, se tortillaient dans les gorges. Une sueur froide perla sur le front de Justine et ses jambes faiblirent. Elle se détourna et inspira profondément. Marc et Bastien apparurent dans son esprit, elle se ressaisit.
          Justine allait entrer lorsque quelqu’un l’agrippa et la fit virevolter. Elle n’eut pas le temps de s’étonner : deux prunelles bleues, à la fois menaçantes et désespérées, se dardèrent dans les siennes. L’homme, la face jaunie et ensanglantée, l’empoignait par le col de son anorak, il exhiba un couteau à cran d’arrêt. La lame jaillit avec un bruit sec. Justine la fixa, horrifiée.
            « File-moi c’que t’as ou j’te saigne comme une truie. »
          Elle voulut crier. Il ôta sa main et tira sur le sac, Justine résista sans réfléchir. L’agresseur pesta, s’agita de plus en plus violemment. Il resta sourd à ses protestations et lui entailla maladroitement la cuisse. Justine geignit. Il la dévisagea, ahuri, le couteau glissa de sa paume pour se ficher dans la neige. Il s’empara du sac puis la précipita tête la première contre la façade. Un éclair lumineux inonda le champ de vision de Justine, qui s’écroula.

                                                                            *

             Une douleur fulgurante dans sa cuisse, semblable à une déchirure, la ramena à la réalité. Ses yeux croisèrent ceux d’un Labrador penché au-dessus de ses pieds. Il la regardait, les crocs enfoncés dans son jean imbibé de sang qui se mouillait encore, et la traînait en reculant. Il gronda, et la plainte de Justine mourut sur ses lèvres. La panique lui retourna les entrailles, elle se débattit et la souffrance, exacerbée par la peur, faillit l’assommer.
             Elle distingua, dans la pénombre, les silhouettes de chiens qui avançaient ventre à terre, attirés par sa vulnérabilité. Justine les entrevit dans la lueur de sa torche, qui avait roulé non loin de là : ils venaient la tuer. Mue par l’angoisse, Justine frappa le Labrador qui s’en prenait à la manche de son anorak.
                « À l’aide ! »
           Ils l’encerclaient et Justine sentit bientôt leur haleine méphitique. Une Jeep de l’armée passa à sa hauteur. Pleine d’espoir, elle la héla. Les militaires la toisèrent. Le véhicule s’éloigna vers le bas de la rue.
               Salauds !
              La rage balaya l’optimisme. Justine se redressa et voulut fuir. Des déflagrations retentirent, la peur la figea. Des jappements emplirent ses oreilles tandis que les bêtes s’effondraient dans une mare écarlate. Justine les considéra, incrédule, et s’attarda sur un Boxer saisi de spasmes.
               Elle scruta les édifices. Le tireur brandit son fusil pour se signaler.
               « Pars avant qu’il y en ait d’autres ! » clama-t-il.
            Justine récupéra sa torche, se releva et serra les dents pour ne pas crier. Elle rebroussa chemin en claudiquant.
                Accélère, tu te traînes ! Sois forte, pour Marc et Bastien !
              Justine s’empêtra les pieds dans le squelette rongé d’un homme au visage quasi intact et aux traits figés par l’horreur. Elle se rétablit de justesse. D’autres coups de feu explosèrent dans son dos et des chiens hurlèrent à la mort.
               Si j’pouvais lui dire merci…
               Sors-toi de ce merdier, ce sera le minimum !
            Elle gagna une intersection et vira à gauche. La porte de son immeuble, qu’elle avait laissée entrouverte, lui apparut. Justine, débordante d’adrénaline, en oublia sa blessure. Elle sinua entre les corps étendus, dépassa le cinéma vandalisé et son regard s’arrêta sur l’accès au parking souterrain. Une voiture flambait lentement, encastrée dans une rambarde, et le conducteur gisait à travers le pare-brise éclaté. Justine s’intéressa au sous-sol, méfiante, et tenta de déceler des bruits suspects au-delà du crépitement des flammes.
           Trois molosses quittèrent l’obscurité et approchèrent, tendus. Ils grognèrent. Justine se rua sur l’entrée avec l’énergie du désespoir. Ils la traquèrent et elle entendit leur souffle rauque se rapprocher dangereusement. Une détonation résonna, l’automobile s’embrasa. Ils sursautèrent et Justine bénit cette diversion. Elle entra dans le bâtiment, empoigna la porte et la poussa. L’un d’eux voulut se faufiler, elle pesa sur le battant. Il se retrouva coincé et la fixa en se tortillant, ses mâchoires se refermèrent sur le vide. Il gémit et remua faiblement.
              C’est ça, crève ! 
           Il s’immobilisa et le silence retomba dans la cage d’escalier. Justine demeura un instant dans la pénombre, les yeux clos, puis agrippa le cadavre par la peau du cou et l’attira à l’intérieur.

                                                                             

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