Nuit noire (XX)
- Yoonie ?
La porte d'entrée venait de claquer. Hoseok entendit la clef tinter dans le vide-poche en étain, puis le bruit sourd du sac lâché sur le parquet suivi d'un soupir, mais pas de réponse.
Le jeune danseur laissa son livre et se leva du canapé pour tomber nez à nez avec -c'était forcément lui- Yoongi.
- Hé, tu rentres tard...
- On est resté prendre un verre.
Hoseok hocha vaguement la tête et Yoongi se traîna vers la cuisine. Il le vit ouvrir le réfrigérateur et plonger sa tête à l'intérieur.
- Même pas une putain de bière ! grogna Yoongi. ...c'est pas un comble, ça ? En plein mois d'août, chez moi, même pas une foutue bière ?
Ne rien dire. Laisser couler.
Hoseok jeta un œil à l'horloge du micro-ondes : 2 heures 38. Yoongi rentrait de plus en plus tard, de plus en plus souvent.
Le bistrot qui l'avait embauché pour l'été fermait aux alentours de minuit. Il fallait ensuite ranger, nettoyer la salle et vérifier la caisse, mais ils étaient cinq. Ça ne prenait pas deux heures.
Yoongi s'était redressé, un sourire détestable collé aux lèvres, et il le toisait.
- Evidemment qu'on n'a pas de bière.
Ne rien dire. Surtout, ne rien dire. Ne pas rester là.
Hoseok déguerpit aussitôt dans le salon et se mit à la fenêtre pour souffler. Après le coucher du soleil, la température chutait et l'air de l'extérieur devenait respirable.
- T'es fâché ?
Yoongi venait de le rejoindre avec un verre de grenadine. Il frotta son front contre le dos de son petit ami en susurrant.
- Allez, embrasse-moi...
Hoseok n'arrivait pas à desserrer les dents.
- Tu veux pas m'embrasser, hm ? Parce que je pue. Je pue l'alcool. Tu sens, d'ici ? Depuis que j'ai passé la porte, j'fais gaffe à pas trop ouvrir la bouche rien que pour toi. Je suis pas bourré, j'ai rien bu. Pas beaucoup, deux-trois verres, histoire de sentir que C'EST L'ÉTÉ !
- Dégage, prévint Hoseok en essayant de le virer d'un coup d'épaule.
- Amuse-toi un peu, merde ! Tu passes ton été enfermé parce que tu peux pas boire ? T'as plus besoin de ça maintenant. T'es sevré, tu vas pas te terrer là toute ta vie !
L'idée de lui coller une bonne droite lui traversa l'esprit, mais Hoseok savait qu'il ne lèverait jamais la main sur Yoongi. Il l'aimait trop pour ça.
- Je buvais parce que je suis alcoolique. Je serai alcoolique toute ma vie. Y'a pas de "sevrage" ou de "c'est fini" et tu le sais. Y'a que le compteur de jours sans boire. Si je ne rebois jamais, je suis un ancien alcoolique. Si je rebois un jour, j'aurais seulement... fait une pause.
- Et moi, j'suis un connard parce que j'ai envie d'une bière ?
Hoseok ferma les yeux quelques secondes et inspira lentement par le nez.
- Ne dis pas ça, s'il te plait.
Yoongi n'écoutait pas. Il l'avait lâché et marchait autour de la table basse, les bras écartés, le verre de grenadine en main. Finalement, il se laissa tomber sur le canapé.
- Canapé ? s'enquit-il pour savoir si son haleine et son attitude l'exilaient hors de la chambre.
- C'est encore chez toi, je vais pas te virer de ton lit.
- C'est pas chez moi quand t'accroches tes photos sur mes murs.
- C'est petit ça, Yoongi.
Hoseok s'assit sur le rebord de la fenêtre, écrasé de lassitude, les jambes à l'intérieur pour faire face à Yoongi. Dans ce genre de moments, il avait envie de laisser tomber et de rentrer chez lui. Mais la séparation ne leur réussissait pas non plus. Ils avaient besoin d'être ensemble, même si quand faisait mal.
- C'est toi qui prends ces photos. On les aime tous les deux.
Une fois de plus, pas de réponse. Yoongi sirotait sa grenadine à la manière d'un whiskey. Il avait les yeux tristes.
- Je vais me coucher, annonça Hoseok avant de disparaître dans la chambre.
Que pouvait-il faire d'autre ? Une litanie de reproches et d'accusations ? Lui parler de son mutisme systématique, de son refus de communiquer et de se confronter aux difficultés ?
Inutile.
Il se brossa les dents, seul. Changea de t-shirt pour la nuit, seul. Il se mit au lit, seul.
Il attendit encore, comme il l'avait fait toute la soirée, incapable de trouver le sommeil.
Et la place à sa gauche finit par s'affaisser.
Une main aux doigts maigres s'aventura sur sa cuisse.
Non. Hoseok voulut bouger mais cette main, assurée, montait sans s'arrêter jusqu'à son ventre et son torse, et se mit à lui procurer des caresses en signe de réconciliation.
- Yoongi, c'est pas... laisse-moi.
La même main se faufilait déjà dans son short large et ses doigts saisirent délicatement son membre au repos. Les lèvres de Yoongi papillonnaient sur le haut de son bras, son épaule, vers son cou.
Hoseok se redressa sur les coudes, les yeux grands ouverts dans le noir de la chambre.
- Laisse-moi dormir s'il te plait. J'ai pas envie.
Refusant d'écouter, Yoongi se mit à souffler contre sa peau entre les baisers et remua son poignet sous le drap. Hoseok fut obligé de s'asseoir pour le pousser correctement, mais Yoongi résista. Il refusait d'abandonner, il essayait continuellement de l'atteindre, avec ses mains, ses lèvres, n'importe quoi.
Ils luttèrent plusieurs secondes, Hoseok avec des plaintes de protestation et Yoongi emmuré dans un silence résigné. Jusqu'à ce qu'une sorte de rage s'empare de l'aîné et prenne le pas sur tout ; malgré sa force, Hoseok fut plaqué sur le dos sans ménagement. Yoongi tira sur le short alors qu'Hoseok agitait les jambes pour le déséquilibrer sans vouloir le blesser. Comprenant qu'ils finiraient par déchirer le tissu, Yoongi ne chercha plus à le lui enlever mais simplement à le baisser. Il dut libérer ses bras pour maintenir les hanches d'Hoseok en place. Ce dernier en profita pour pousser ses épaules mais Yoongi, imperturbable, descendait vers son membre en s'humidifiant les lèvres.
Alors, Hoseok hurla. Bien plus violent qu'un mot précis, il poussa un cri de détresse, un non, un stop.
Yoongi s'arrêta sans comprendre. Il croisa le regard d'Hoseok et malgré la pénombre, il ne manqua pas d'y lire un état de choc.
- Est-ce que... tu allais me violer ?
- N-Non, balbutia-t-il piteusement.
Il n'en fallu pas plus à Hoseok pour laisser le champ libre à son pressant besoin de péter les plombs. Fini de prendre sur lui, Yoongi venait de dépasser les bornes.
- Mais tu vois pas que c'est malsain, merde ?! Qu'on peut pas baiser à chaque fois qu'il y a un problème ? Qu'il faut qu'on discute ?! Je. n'avais pas. ENVIE !
Yoongi s'immobilisa. Hoseok lui bloquait encore les épaules et tentait de l'éloigner le plus possible.
C'est là qu'il se mit à trembler.
Le danseur mit quelques secondes à comprendre ce qu'il se passait. Yoongi ne respirait plus, et soudain, il ouvrit la bouche en grand. Il happait l'air comme s'il se noyait et les tremblements ne tardèrent pas à s'intensifier.
Hoseok ralluma la lumière et Yoongi en profita pour se recroqueviller sur le lit.
De grosses larmes coulaient sur ses joues ternes.
- Calme-toi. Calme-toi ! Yoongi, hé... Je vais bien. Ça va, maintenant...
Yoongi se boucha les oreilles. Perdu, Hoseok vint à ses côtés et fit de son mieux pour endiguer la panique qui le gagnait à son tour. Il tenta une approche plus douce.
- Pardon... j'voulais pas crier... J'ai eu peur que tu t'arrêtes pas, tu comprends ? Pleure pas Yoonie, c'est fini.
Yoongi ferma les yeux. Il respirait fort, mais il respirait. Hoseok voulait le prendre dans ses bras mais il n'osait pas, de peur de l'affoler. Il décida alors de se coucher derrière lui, dos contre dos, et d'attendre. Il aurait voulu dire des mots tendres mais rien ne lui venait. Il n'aurait pas dû employer le mot viol. Ce n'était pas du viol. Il aurait pu se défendre. Yoongi s'était seulement laissé... submerger ?
Le pire, c'était que Yoongi ignorait pourquoi il pleurait. Hoseok avait tout à fait le droit de le repousser, au contraire : c'était même courant de refuser les assauts d'un petit ami qui revenait tard et alcoolisé. Non, ce n'était pas ça... Le sexe, n'était rien qu'un moyen d'étouffer autre chose, de camoufler, de contenir.
Autre chose, mais quoi ?
Tout ce qu'il savait, c'est qu'il se sentait lourd en permanence. Enfin, peut-être un peu moins depuis Hoseok, mais la plupart du temps.
C'était difficile à exprimer en mots. Le poids qui lui pesait était diffus, sans être pour autant réparti. Ce n'était ni comme avoir un sac chargé sur ses épaules, ni comme avoir l'estomac trop plein. C'était impossible à localiser précisément.
A force de retourner le problème dans sa tête, il avait déterminé que ce n'était pas le poids qu'il sentait; c'était la fatigue liée à cette charge imaginaire. Comme s'il venait toujours de déposer un fardeau qu'il aurait porté durant plusieurs heures.
Un fardeau invisible, intangible et constant.
Et puis, il faisait souvent ce rêve : ça commençait par les pavés, des petits carrés de pierre grise inégaux et polis. Puis les chaussures, noires, vernies, de divers modèles, qui grouillaient par paire telles d'énormes cloportes. Ensuite, l'intérieur de l'église, gothique, immense, peut-être même une cathédrale. C'est là qu'il se rendait compte que les chaussures étaient reliées à des robes, des manteaux, des pantalons assortis et ces silhouettes avançaient en groupe pour prendre place dans les rangées de bancs.
Le cercueil était toujours ouvert devant l'autel. Quelques fois, une photo de lui trônait dans un cadre. C'était la composition florale qui lui plaisait le plus, blanche et rose, sur un lit de palmes vertes.
Enfin il y avait lui, Min Yoongi, couché dans sa boîte. Pâle et sec comme un clou. Un vrai cadavre. Un détail l'intriguait : ses bras en croix sur sa poitrine, à la manière des pharaons dans leur sarcophage.
C'était là que la dépouille ouvrait les yeux.
Le couvercle du cercueil claquait bruyamment et Yoongi ouvrait les paupières une seconde fois, réveillé en sursaut. Il paniquait quelques secondes avant de comprendre qu'il était dans sa chambre plutôt qu'enfermé vivant.
Au contraire d'Hoseok, Yoongi ne souffrait pas d'addiction. Il ne ressentait pas la soif que son petit ami avait décrite. Il cherchait simplement un moyen d'altérer ses sens et de perdre la tête.
Il admirait Hoseok de pouvoir parler si librement de ses souffrances, de sa famille, de ses histoires intimes.
Hoseok parlait tout le temps et lui disait tout. Yoongi s'en contentait : tant qu'il parlait, on ne lui demandait rien. Jusqu'à ce que l'anecdote s'achève et qu'Hoseok commence ses questions. Au début, il ne se formalisait pas de recevoir des réponses évasives, mais au fil des semaines, il devenait plus insistant. Lui qui partageait tout attendait les efforts de son petit ami.
Sauf que Yoongi... ne savait pas. Rien n'existait avant ses treize ans. Ses premiers souvenirs étaient des tranches de vie ordinaires dans l'appartement de son père, un trois-pièces qu'il avait pris pour vivre avec lui après son divorce et la vente de la maison familiale. Il avait passé une adolescence plutôt heureuse, sans histoire, avec une légère difficulté à se faire des amis de son âge. Les amis qu'il avait étaient ceux de son père, particulièrement ceux qui n'avaient pas d'enfants, et Yoongi gardait de bons souvenirs de dîners avec eux ou de séjours dans des maisons de vacances.
La dégringolade n'avait commencé qu'au début de la fac. Loin de son papa-poule et livré à lui-même, il s'était joint aux soirées pour "voir", pour s'intégrer, et s'était retrouvé sans s'en rendre compte dans une spirale d'auto-destruction.
Là encore, difficile de mettre des mots, à part le fameux "j'ai déconné".
Yoongi ne savait pas, il ne savait rien. Ni de son passé, ni de lui-même, et encore moins de ses besoins ou de ses émotions.
Lorsque, épuisé par ses réflexions muettes, par les pleurs, les tremblements, l'alcool et sa journée de travail, il finit par s'endormir, Hoseok passa un bras autour de lui et le serra pour les réconforter autant l'un que l'autre.
4h23. Yoongi quitta l'étreinte tiède de son petit ami et se leva lentement. Il se dirigea sans bruit vers son armoire, récupéra une tenue propre et l'enfila.
Il était en retard.
Vite, il chercha son plateau à tâtons, buta plusieurs fois contre le lit, finit par le trouver et s'en saisit. Ça coinçait. Yoongi tira une première fois. Ça coinçait encore.
Yoongi tira jusqu'à ce que la résistance cède. Il posa le plateau sur sa main et dû le repositionner plusieurs fois : impossible de le faire tenir en équilibre. Il trouva finalement une petite poignée en-dessous qui lui permettait de s'assurer une prise correcte.
Juste à temps pour s'occuper des clients. Les commandes s'enchaînaient.
- Bonjour monsieur, vous avez choisi ? ... Messieurs-dames bonjour, avez-vous choisi ? ... C'était la commande de la quatre.
La commande de la quatre. Non, la quatre est vide. La commande de la deux ? Pourquoi est-ce que le monsieur de la trois est parti ? Merde, Yoongi, merde...
Ok, ne panique pas, tu te retournes et tu vas en cuisine. Non, pas les cuisines.
- Yoongi ?
Merde, on l'appelle. Qui l'appelle ? Il regarde partout et il ne voit personne. L'instant d'après, tous les clients ont la tête tournée vers lui.
- Yoongi !
- J'arrive, j'arrive ! Monsieur, pour vous c'était... euh, non, madame. Le.. la cuisine !
Il tombe. On le tire en arrière, on l'aspire et il tombe. Il choit au ralenti. Noir.
Hoseok le regardait avec inquiétude, attendant qu'il ouvre un œil, puis l'autre. Il avait trouvé Yoongi en habit de travail complet, la lampe de chevet à la main, en train de bredouiller des phrases à des clients imaginaires. Le bruit de son corps cognant sur tous les meubles de la chambre l'avait tiré du sommeil.
- ...j'ai recommencé.
Hoseok hocha gravement la tête.
- C'est la deuxième fois.
- Shhh, c'est fini...
Encore étourdi de se trouver chez lui, la lampe entre les mains, Yoongi se laissa aller contre le torse du danseur. Hoseok songea brièvement à ce qui avait eu lieu entre eux un peu plus tôt mais n'eut pas le cœur de le repousser. Yoongi semblait trop... vulnérable.
- Je peux pas décider à ta place mais je crois que tu devrais arrêter de bosser là-bas. C'est mauvais pour toi.
- Je suis... stressé.
- Pire que ça.
- Mon contrat finit dans une semaine. Après, je retourne en cours. Je dois aller jusqu'au bout.
- Tu veux en parler ?
Hoseok se mordit les lèvres ; la question lui avait échappé. Il n'avait pas envie de relancer une dispute sur la communication dans leur couple. Il caressa les cheveux vert menthe et chercha comment formuler ses excuses.
- Il y a cette fille, Yeonhee, commença Yoongi. C'est l'une des cuistots et j'ai été l'aider une fois, on rangeait chacun sa partie, nous la salle eux les cuisines, et ils ont fait tomber des trucs, des casseroles ce genre de choses. Je suis venu pour ramasser. Jusque là c'était normal, mais les jours d'après, elle m'appelait pour trois fois rien, pour que je vienne, elle passait derrière moi ou à côté, toujours très près.
Yoongi cligna des yeux plusieurs fois, nerveux, et poursuivit :
- J'en parle pas aux autres tu vois, ils vont trouver ça bien qu'une fille me tourne autour, ils vont charrier un peu et rire, sauf que le truc, c'est que... j'la sens pas.
- C'est-à-dire ? s'enquit Hoseok du bout des lèvres.
Il marchait sur des œufs. Un seul mot de travers et Yoongi se refermerait comme une huître.
- On s'est retrouvé seuls dans la cuisine hier et j'étais mal à l'aise. Elle m'avait encore appelé sans raison, y'avait pas besoin de moi. Elle dit des trucs à double sens, des sous-entendus, sauf que j'peux rien dire tu vois ? Y'a rien de vraiment concret. Ça me plait pas. J'aime pas ça.
- Tu n'as pas une collègue avec qui tu peux en parler ?
- Pas vraiment. Seungmin peut-être, j'l'ai mentionné, elle m'a dit que Yeonhee était spé' et que j'avais qu'à éviter d'aller dans la cuisine.
- Personne n'a à te toucher si tu n'es pas d'accord.
Yoongi le regarda, essayant de déceler le moindre reproche dans les yeux d'Hoseok. Il n'y trouva qu'une inquiétude sincère. Son mec était une perle, et il se sentit encore plus misérable qu'avant.
- Quand on rangeait hier, elle m'a fait passer un chiffon sur un plan de travail et je l'ai senti me... elle m'a touché le cul, je suis sûr qu'elle l'a fait ! piailla-t-il. J'ai ouvert ma gueule évidemment, mais elle a répliqué qu'elle avait dû me pousser sans faire exprès, qu'on était à l'étroit... Et c'est même pas une question que je sois gay ou pas ! Je suis pas gay, j'ai pas de problème avec les filles, c'est juste cette fille, elle est vraiment chelou Hobi !
- Hé, doucement, tu mélanges tout.
- Quoi ?
- Tu n'es pas obligé de te sentir à l'aise parce qu'une fille te touche. Quelle que soit ton orientation, c'est pas parce que c'est une fille et qu'elle s'imagine que tu vas aimer ça qu'elle peut faire ce qu'elle veut. Ton corps, Yoonie. Tes limites.
Yoongi se tut. Hoseok l'observa un moment pour voir s'il l'avait contrarié, mais son petit ami semblait plus pensif qu'anxieux.
- Je peux aller lui parler, proposa-t-il.
- Non. ...merci. Il ne reste qu'une semaine, de toute façon.
Avec quelqu'un d'autre, il aurait certainement insisté. Il aurait même fait le parallèle avec le fait que lui, en tant qu'homme gay, n'avait pas forcément envie d'une fellation à toute heure du jour et de la nuit. Mais Yoongi venait de se confier ; c'était déjà énorme. Hoseok n'avait pas envie de le braquer.
- Dis-le moi si ça recommence. Reste éloigné d'elle autant que possible, et essaye de rester près de la collègue que tu aimes bien.
- Seungmin.
- Seungmin, approuva Hoseok.
Il fallut remettre Yoongi en pyjama, rebrancher la lampe et retourner au lit. Les deux garçons s'endormirent l'un contre l'autre sans un mot de plus, non sans avoir échangé un long baiser -initié par Yoongi.
La dernière semaine de travail saisonnier se déroula tant bien que mal, avec quelques remarques de Yeonhee que Yoongi ignora de son mieux. Il refit une crise de somnambulisme la veille de son départ et Hoseok s'affola au plus haut point.
Les autres soirs, Yoongi trouva difficilement le sommeil. La formule : "Ton corps, tes limites" lui restait à l'esprit. Il avait beau se creuser la tête, il sentait que le sens véritable de cette phrase lui échappait, comme une énigme. Les limites, n'était-ce pas celles de son corps ? Le point qu'il n'était pas capable de dépasser ? En alcool comme dans le sexe : le point où il perdait conscience ? Et la limite de ses souvenirs, n'était-ce pas aussi ce rien, ce vide, cette absence, ce trou noir ?
Quand il s'endormait finalement, il n'avait toujours pas la moindre réponse.
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