Au bord du fleuve (IX)
- Un jour j'ai remis ma vie entre les mains de deux inconnus. Je ne sais même pas pourquoi. C'était la nuit, il pleuvait. Je les suivais aveuglément et j'ai failli mourir.
- T'es sinistre, Kook. Je n'aime pas quand tu es comme ça.
Je regardais Yugyeom à l'envers. J'étais affalé sur son lit, sur le dos, les bras en croix.
Ca s'était produit le mois précédent. Il y avait un couple devant moi et je marchais dans leurs pas. Ils traversaient la rue alors que le bonhomme était rouge, et je ne l'avais pas vu parce que mon parapluie limitait mon champ de vision. J'aurais dû lever la tête et regarder le feu, ou regarder la route et vérifier que je pouvais m'avancer. Sauf que j'avais avancé sans regarder. Je m'étais mis en danger en suivant ces deux personnes étrangères qui n'avaient même pas conscience de ma présence derrière elles.
- Il y a eu un coup de klaxon, les phares luisaient sur la chaussée, ça faisait deux grandes traînées de lumière sur le bitume mouillé.
- Arrête ça putain ! jura Yuggie en arrachant un morceau du sandwich qu'il venait de se faire.
J'avais beaucoup vécu chez lui ces derniers temps. J'étais presque devenu son colocataire. Je participais aux courses et il y avait une brosse à dents pour moi dans sa salle de bain.
Il vint vers le lit en mâchant, une assiette sous ses deux tranches de pain pour éviter de semer des miettes.
- Ouvre la fenêtre, demandai-je. J'ai envie de laisser entrer la pluie.
- Il fait soleil, Jungkook.
Il me regarda en fronçant les sourcils et s'assit au bord du lit. Je roulai sur le ventre, me redressai en position assise et frottai ma main dans mes cheveux, les décoiffant encore plus.
- J'aimerais qu'il pleuve.
- On sort ce soir ? Joomi organise un truc.
Yugyeom avait fait la connaissance de la petite bande de la MDL et s'entendait avec tout le monde. Il aimait particulièrement taquiner Joomi, si bien que je me demandais ce qui pouvait peut-être se tramer entre eux.
Après l'anniversaire de Lisa, j'avais demandé à Yuggie de m'accompagner à plusieurs soirées. J'étais sorti avec ses amis de la promo quelques fois, mais nous allions surtout faire la fête avec mon groupe d'anglais.
Yoongi-hyung était toujours là. J'avais fini par adopter une double attitude à son égard.
De jour, il était le responsable suppléant de la Maison des Langues. Je le saluais poliment et m'adressais à lui avec respect.
La nuit, je n'hésitais pas à le remettre à sa place quand il allait trop loin avec Joomi ou Hayoung, il m'appelait "tête de con" et je répondais "ferme ta gueule". Nous rentrions ensemble parfois, et il se détendait pendant le trajet. Il arrivait qu'il teste ma patience, en chantant, en manquant de tomber, en faisant des blagues sexuelles à des inconnus dans le métro. Il arrivait aussi qu'il me parle d'une voix molle, les yeux vides. Qu'il s'excuse et qu'il répète "Je fais que merder. Je sais pas pourquoi." Dans ces moments-là, je l'écoutais en le couvant du regard pour essayer de le réconforter. J'avais voulu mettre ma main sur son épaule un soir. Il avait claqué mes doigts et s'était reculé. Il avait dit "J'ai crû que t'allais me faire un câlin, je t'aurais buté."
Je ne savais pas si je l'aimais bien ou pas. Il me faisait de la peine, j'avais l'impression de voir quelqu'un tout au fond d'un puits noir et profond, qui n'avait aucune accroche pour escalader les pierres glissantes et remonter à la surface. Et moi, je n'avais pas de corde pour l'aider non plus. Je n'étais pas vraiment son pote. Namjoon-hyung avait sûrement déjà essayé de le sortir du puits.
Je ne connaissais pas la vie de Yoongi. Je n'avais pas envie de la connaître. J'avais mes propres problèmes à gérer.
En soirée chez les autres, j'étais plutôt calme. En soirée dans les bars, à partir de vingt-trois heures trente, je m'agitais. Je me brûlais la gorge à la vodka-caramel et je dansais avec les filles, connues ou inconnues. Si j'étais assez bien, assez désinhibé mais encore en contrôle, j'embrassais le sommet de leur front, à la racine des cheveux, et mes lèvres prenaient généralement un goût de sueur en raison de la chaleur ambiante. Certaines fois, la fille posait sa main sur ma joue ou allongeait le cou et nous nous embrassions. Je n'allais jamais plus loin.
- La soirée sur les quais ?
- Ouais, c'est typique des soirs de printemps. Tous les étudiants le font ici. On se retrouve au bord du fleuve et on boit, on chahute, on profite de la vie ! Il faut que tu viennes.
- J'arrive pas à croire que tu te sois intégré à ce point. T'es même pas à la MDL et c'est toi qui m'entraîne à leurs soirées.
Yugyeom posa son sandwich dans l'assiette et s'essuya la bouche.
- On doit y aller.
Son ton était sans appel. Je détournai les yeux.
J'avais croisé Eunha pour la première fois depuis janvier en début de semaine. C'était par hasard, elle ne m'avait même pas vue. J'allais rejoindre Yugyeom au cinéma et elle était sortie avec une fille très jolie. Elles se tenaient le bras. Eunha riait. Elle ne portait plus mon bracelet.
J'étais resté sur le trottoir comme un abruti et je l'avais vu rire au ralenti. Mon cerveau prenait des milliers de photos à la seconde pour graver une image récente d'elle. Elle était vraiment belle.
J'avais attendu qu'elles disparaissent à l'angle pour entrer dans le cinéma. Yugyeom m'avait fait asseoir derrière sa caisse. Jusqu'à la fin de son service, je n'avais cessé de remplir et de vider un carton à pop-corn format XXL. Puis nous étions rentré, j'avais pris un médicament contre le mal de ventre et je n'avais plus fait de vrai repas pendant deux jours.
- Mec, tu replonges et c'est mauvais. T'as besoin de voir tes potes.
Yuggie me secouait comme pour me réveiller. Il avait raison, bien sûr. J'étais retourné voir son Instagram. J'avais stalké l'autre aussi, kth_95, mais surtout elle. Mon œil se concentrait sur son visage et floutait le reste. J'avais relu le fil de nos sms depuis le début. Il ne remontait pas loin : mon téléphone effaçait les messages au fur et à mesure et nous avions longtemps tenu le rythme d'une trentaine de sms par jour.
Mes potes. J'avais besoin de mes potes.
- C'est bon, soufflai-je en me levant.
Yugyeom parut satisfait.
- Tu veux un sandwich ?
- Non merci, ça va.
- Je t'en fais un quand même. Tu boiras pas le ventre vide !
Je soupirai et partis prendre une douche. Il n'en faisait qu'à sa tête, mais c'était le meilleur ami que je n'avais jamais eu. Celui que j'avais attendu toute mon enfance pour partager mes jeux dans la cour, toute mon adolescence pour traîner et faire les quatre cent coups. Il était là, il prenait soin de moi, il me supportait. J'étais plus que reconnaissant.
Nous sortîmes à la tombée du jour. J'aimais cette heure entre les deux, juste avant la nuit. J'enfonçai les mains dans les poches de mon blouson. L'air était plus frais. L'ambiance changeait doucement, le ciel devenait rose puis mauve. Les enseignes, les fenêtres, les phares des véhicules, les réverbères, tout s'allumait pour éclairer la ville. Elle devenait jaune et noire, ocre sur les façades et le vieux pont de pierres.
Je sentais monter en moi l'excitation et inspirai longuement malgré la pollution. Yugyeom portait le pack de bières et les crackers au fromage. Je lui souris. Il me retourna un rictus enjoué qui dévoilait ses prémolaires et ses canines.
J'étais prêt à m'éclater.
Nous fûmes sur le quai un peu après vingt-et-une heures. Yuggie enjamba Jimin pour déposer les bières et les biscuits apéritifs au milieu des gens éparpillés. Nos amis formaient un oval plus qu'un cercle, certains assis contre le parapet au bord de l'eau, les autres assis en face. Yugyeom salua le groupe d'un "Bonsoir les gars" général et se trouva une place à côté de Lisa et de Jin-hyung.
Quant à moi, je fis le tour en serrant individuellement les mains, tendant la joue quand il s'agissait d'une fille. Je répétais "salut" à la chaîne, modifiant le ton à chaque fois et ponctuant de temps à autre d'un "ça va". J'étais devenu un pro des conventions sociales.
J'arrivai à Joomi qui me regardait d'un air gêné. Je compris rapidement pourquoi. A ses côtés, Yoongi-hyung me tournait le dos et je ne voyais que ses cheveux décolorés agrippés par une main bronzée. Il était assis entre les jambes d'un garçon en slim noir et leurs bouches ne voulaient pas se décoller. Joomi se racla la gorge et tapa la tête de la proie de Yoongi-hyung, dont je n'avais pas encore vu le visage.
- On veut vous dire bonsoir ! glapit-elle.
- Salut Yoongi.
Je ne l'appelais plus "hyung" en soirée.
Je l'entendis me répondre mais j'étais passé à autre chose, figé devant le visage de l'autre garçon. Je le connaissais. Je l'avais vu une fois chez Joomi. C'était son meilleur ami. Il faisait de la danse. Il nous avait aidé à travailler les verbes irréguliers. Ça faisait quatre ou cinq mois, il ne devait même pas se souvenir de mon nom. Moi, je m'en rappelais. Jung Hoseok.
Il m'adressa un sourire embarrassé et me tendit la main.
- C'est Hoseok, dit Joomi.
- On s'est déjà vu ?
- Oui, répondit-elle tandis que je prenais la main tendue. Une fois. Chez moi, on révisait l'anglais. Tu ne te souviens pas ? Jungkook, il fait de la danse !
- Ah si, peut-être !
Hoseok me fit un sourire solaire et m'invita à m'asseoir. Yoongi grogna quand il comprit qu'on l'obligeait à se décaler.
- Chut, Hyung, fit Hoseok, et Yoongi se tut aussitôt.
Trois minutes plus tard, nous avions trinqué avec les bières et mes deux voisins de droite avait repris leur baiser torride.
- C'est très perturbant, lança Jin-hyung. Depuis le début de la soirée, on voit juste vos cheveux.
Yoongi lui présenta son majeur sans retirer sa langue de la bouche d'Hoseok. Celui-ci avança la main, la posa sur celle de Yoongi et replia délicatement son doigt.
- Ils sont insupportables, commenta Mingyu en se rapprochant de moi. Depuis qu'ils se connaissent, c'est comme ça tous les soirs.
Je n'étais pas venu aux soirées récemment. J'en avais fait une avec les collègues de travail de Yugyeom mais pas avec les gens de la MDL. Apparemment, j'avais loupé des choses.
- Ils sont ensemble ? demandai-je.
- On sait pas.
- On n'est pas ensemble ! répliqua Yoongi en se tournant enfin.
Il s'installa dans les bras d'Hoseok, le dos collé contre son torse. J'évitais de les regarder. Premièrement, c'était très bizarre de voir Yoongi comme ça. Deuxièmement, le gars sur qui il avait jeté son dévolu me plaisait toujours énormément.
Hoseok paraissait tellement doux, tellement enjoué, tellement... rayonnant ! Comment était-il tombé sous le charme d'un déchet comme Yoongi ? Comment s'étaient-ils rencontrés ? Chez Joomi, c'était sûr, mais dans quel contexte ? J'avais du mal à croire que la technique habituelle du je-te-pelote-parce-que-je-suis-ivre-mort ait enfin porté ses fruits.
Le couple m'intriguait, et je n'étais pas le seul. Jimin les toisait avec ahurissement.
A présent, Hoseok buvait sa bière d'une main et caressait le bras de Yoongi de l'autre. Le plus vieux finit par pencher sa tête pour lui mordre les doigts. Hoseok lui prit vivement le menton avant que ses dents ne se ferment sur lui et lui tourna la tête pour l'obliger à le regarder.
- Hé, ho ! Tu ne mords pas !
Yoongi fronça le nez. Ils échangèrent un regard féroce, puis Hoseok le relâcha et l'embrassa du bout des lèvres. Yoongi se détendit immédiatement, et attrapa une autre bière.
C'était comme un dresseur et une bête sauvage. Yoongi-hyung se comportait encore plus bizarrement que d'habitude, mais il semblait conscient de tout et heureux. Hoseok s'adressait à lui avec une grande autorité et une tendresse indéniable. Il ne le lâchait pas du regard.
Je finis par me désintéresser d'eux pour participer aux conversations, mais je n'y parvins pas totalement. Il se dégageait de leur duo quelque chose de fort et d'incompréhensible qui nous perturbait tous. Joomi avait l'air d'une souris qui voulait disparaître dans un trou. La pauvre. Je la fis venir à côté de moi et lui parlait d'un artiste que j'avais découvert récemment. Je lui fis écouter un extrait avec mes écouteurs, elle hochait la tête en rythme et nota finalement le nom de l'artiste sur son téléphone. La discussion dériva sur la danse et Hoseok se joignit à nous. Tandis qu'il parlait, il nous regardait mais ne cessa jamais de caresser Yoongi, ses bras, ses cheveux, sa cuisse ou sa nuque, et il bougeait imperceptiblement dès que celui-ci changeait de position. C'était puissant, harmonieux et dérangeant.
- Vous rentrez ensemble ? demanda soudain Jin-hyung en parlant de Yoongi-hyung et moi.
- Il dort chez moi, répondit Hoseok.
- On habite à côté, expliqua Yoongi en me désignant.
- Oh, cool.
Hoseok me sourit et je répondis par une drôle de grimace. Une partie du groupe rassemblait ses affaires.
- Vous partez ? s'étonna Hayoung.
- Il est bientôt une heure du mat', on veut prendre les derniers métros, dit Jimin en vérifiant ses poches.
- Déjà ?
Je regardai l'heure sur mon téléphone. La soirée avait filé et surtout... Yoongi-hyung n'était pas bourré. Il y avait tout juste cinq bières le long du parapet, qu'ils avaient bu à deux avec Hoseok. Je n'en revenais pas. Je me levai à mon tour.
- J'y vais aussi, annonçai-je.
Je refis le tour du groupe pour dire au revoir.
- A bientôt Jungkook, dit Hoseok en tenant ma main dans la sienne un peu plus longtemps que nécessaire.
Je me sentais transpercé par son regard. Pourquoi fallait-il qu'on se soit revu dans des circonstances pareilles ? Si j'avais su, j'aurais fait le nécessaire pour l'avoir avant Yoongi ! Pourquoi avais-je manqué les récentes soirées chez Joomi ?!
- Tu restes ? demandai-je à Yugyeom qui jouait aux cartes avec trois autres personnes.
- Ouais, encore un peu. Tu veux les clefs ?
- Non, je vais rentrer chez moi.
- Comme tu veux. Rentre bien, mon pote.
- Merci. Bonne soirée, amuse-toi !
Nous fîmes notre check spécial et je ramassai mes bières vides pour les jeter en chemin. Je quittai Jimin et Lisa au métro, car nous prenions des lignes différentes, et fis le trajet dans le calme.
Yoongi dormait chez Hoseok.
Yoongi était avec Hoseok.
Ça durait depuis plusieurs soirs.
Ça arrivait peut-être même en dehors des soirées.
C'était une bonne question ; est-ce que ça arrivait en dehors des soirées ?
Il me fallut plusieurs stations pour comprendre ce que j'étais en train de faire. Ma vie était devenue inintéressante au point de vouloir fouiller celle des autres.
Cela faisait des mois que je voyais Yoongi-hyung batailler avec lui-même et je n'avais jamais rien voulu savoir de sa vie jusqu'à aujourd'hui.
J'étais sûrement jaloux. Hoseok était tellement beau, un dieu vivant, et son charme ! sa gentillesse ! Je ne l'avais vu que deux fois mais j'étais certain de ne pas me tromper. Enfin presque certain. Il devait quand même avoir un grain, pour craquer sur Yoongi.
Je le revoyais tenir mon hyung frêle et pâle qui, malgré ses airs de dur et son blouson en cuir, paraissait paisible dans les bras d'Hoseok. J'aurais aimé qu'on me tienne comme ça.
Je savais qu'il y avait quelqu'un capable de me tenir comme ça.
- Merde, lâchai-je en regagnant mon appartement.
J'avais les mains dans mes poches, une sur mes clefs, l'autre sur mon portable, et je serrais les deux de toutes mes forces. J'allais faire une connerie, mais je ne tenais plus.
A peine fus-je dans l'ascenseur que je pris mon téléphone.
"Hey. Je sais pas si tu dors. Tu me manques."
Elle devait dormir, peut-être dans son lit, peut-être dans les bras de ce foutu connard de Taehyung.
Il ne m'avait techniquement rien fait mais l'insulter me donnait une illusion de soulagement éphémère.
Je posai le téléphone et enlevai mes chaussures, suspendis mon blouson et vis l'écran s'allumer.
"Tu me manques aussi Kookie."
Qu'est-ce que je foutais ?
"C'est dur sans toi. Je voulais t'oublier mais j'arrive pas. Tu dors pas ?"
"Non. Et toi ? Tu jouais aux jeux vidéos ?"
"J'étais sur les quais avec des amis. On faisait une soirée."
"Tu as tellement grandi !"
"C'était plus simple avant non ? Quand j'étais petit et que j'habitais loin et que tu me menais par le bout du nez.
Je dis n'importe quoi. Tu me mènes toujours par le bout du nez."
"Je suis désolée."
"Tu as dit que je te manquais aussi ?"
"Oui. C'est la vérité."
Mon cœur s'emballait de nouveau. C'était les premiers messages que nous échangions depuis janvier.
"Je t'aime toujours. Dis-moi que tu vas bien. Dis-moi que tu es heureuse. Dis-moi que tu ne manques de rien. Dis-moi que tu as ce que tu voulais avec Taehyung et que tu n'as plus besoin de moi dans ta vie."
Elle n'aurait pas dû me répondre. Nous allions tout gâcher.
"Je vais bien. Je suis heureuse. J'ai ce que je voulais avec Taehyung.
Ca ne change rien au fait que tu me manques Jeon Jeongguk, et que je t'aime aussi."
Elle ne pouvait pas me faire ça. C'était trop cruel. J'aurais voulu qu'elle mente pour me délivrer de son emprise, qu'elle me rejette, et elle ne le faisait pas. Elle m'aimait toujours. Même après ces mois de silence, elle m'aimait toujours. L'écran s'éclaira. Elle venait de renvoyer un message.
"Qu'est-ce qu'on fait ?"
"?"
"On se manque et on s'aime alors qu'est-ce qu'on fait ?"
"A toi de me dire, je suis toujours à toi."
J'avais tapé mon message sans réfléchir, et je me sentis faible en le relisant. Je n'avais vraiment aucune fierté. Mais j'avais dit la vérité.
"Je suis tellement désolée. Je nous ai mis dans une situation terrible. Je ne voulais pas que ça se passe comme ça."
"Taehyung sait que tu m'aimes ?"
"Il croit que je ne t'aime plus. Je pensais que je ne t'aimais plus. Jusqu'à ce que je te croise l'autre jour en sortant du cinéma."
"Tu m'as vu ???!"
"Oui.
Toi aussi ??"
"Oui, tu étais avec une amie. C'est le cinéma où travaille Yugyeom."
"Je sais, je m'en souviens. C'est elle qui m'a emmené là, de moi-même j'aurais choisi un autre cinéma. Je suis désolée."
Elle n'arrêtait pas de s'excuser. Ça voulait dire qu'elle se sentait coupable de notre tristesse. Ça me faisait du bien.
"Tu m'as vu en sortant du cinéma et même sans me parler et en faisant de ton mieux pour m'ignorer tu as compris que tu m'aimais encore ?"
"Oui. Ça parait absurde je sais et pourtant c'est ce qui s'est passé. Je croyais que je t'avais oublié. Je me suis trompée."
"Je te crois. Ça m'a fait la même chose. On doit encore être liés, quelque part."
"Qu'est-ce qu'on fait ?"
"Je ne sais pas.
Parles-en à Taehyung ?"
"Non. Je veux rester avec lui. J'en ai besoin, tu comprends ? Je veux me prouver quelque chose. On est bien ensemble, je ne veux pas tout foutre en l'air. J'en ai marre d'être la fille qui brise le cœur des gens. Je veux devenir stable et construire un bonheur durable."
J'eus envie de lui souhaiter bonne chance ou bonne nuit et de couper court à la conversation, mais je savais que je la tenais. Il fallait que je tente quelque chose.
"Eunha-noona, je te manque et tu as ressenti la même chose que moi en sortant du cinéma. Notre bulle existe encore et on ne peut rien y faire. On n'avait rien en commun, tu ne trouves pas ça incroyable qu'on se soit rencontrés ? Qu'on se soit toujours compris et parfaitement accordés ? Je te connais mieux que personne, je te connais mieux que lui, ne le nie pas.
Il a suffit qu'on se recroise pour foutre nos mois de sevrage en l'air. On peut continuer à s'ignorer et à ne pas se parler, mais si ça ne marche pas ? Si on passe toute notre vie à manquer de l'autre ? Si on a toujours mal, si on se sent toujours incomplets, juste parce qu'on n'est pas ensemble ?
Laisse-moi te revoir. S'il-te-plait."
Son message tarda à arriver. Je tapotais nerveusement l'écran en me demandant si elle m'avait bloqué, si elle réfléchissait, si elle écrivait un pavé ou si elle s'était endormi. Peut-être que Taehyung lui avait pris son téléphone et lisait actuellement notre conversation. Bien fait.
"On ne s'embrassera pas. On ne couchera pas ensemble. Je ne peux pas me passer de toi, tu as raison sur ce point, mais on doit se poser des limites. Je suis la petite amie de Taehyung. Je ne le tromperai pas."
"Bien entendu."
"Je suis sérieuse Kookie !"
"Je sais."
"Tu veux venir chez moi demain après tes cours ? Je suis en congé.
On peut aussi se voir dans un café si tu préfères un lieu neutre."
"Chez toi c'est très bien. Ton appartement me manque aussi."
"T'es bête. A demain alors. Tu finis toujours à 15h30 le vendredi ?"
Elle s'en souvenait. Ou bien elle avait gardé mon emploi du temps.
"Bonne mémoire ! Je viens pour 16h du coup. A demain."
"Bonne nuit Kookie."
"Bonne nuit Noona."
J'allais la revoir.
Je me haïssais d'être fou de joie. Yugyeom allait me tuer.
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