
Chapitre 4 : Lyanna
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Lyanna
— Tends tes bras.
Il m'affiche sans vergogne son statut de dominant. Et moi, docile, je m'exécute sans le quitter du regard. Il déroule sa cravate de son poignet et l'enroule autour de mes poignets me privant de ma liberté de mouvement. Ses gestes sont brusques et dépourvus de douceur ce qui me fait grimacer.
Une fois attachée, il me pousse vers l'un des pieds du lit contre lequel je bute. Là, il relève la main et enserre un de mes seins qu'il presse fortement sans me quitter des yeux. Il attend peut-être un petit gémissement de plaisir de ma part, mais il ne vient pas. Et cela n'a rien de plaisant, c'est douloureux. Je l'observe avec autant de curiosité que de répugnance. Il relâche la pression et de son doigt caresse presque tendrement mes pointes dressées. Je dis presque, car il en griffe un de son ongle et c'est douloureux. Il redessine du bout de son index mes auréoles très lentement, presque au ralenti sans ciller. Je n'oublie pas que je suis en colère. Son regard se fait incisif. Je sais ce qu'il cherche à faire.
Attiser mon désir.
Je souffle calmement pour ne pas me laisser emporter par ce qu'il éveille en moi bien que je frémisse sous ses doigts. Mon souffle s'affole lorsqu'il colle son corps au mien. Mon désir de lui grandit et le sien reste inerte, je ne le sens pas, car mes poignets sont entre nous, créant un espace entre nos deux corps. Il s'écarte subitement de moi et remonte mes bras au-dessus de ma tête et avec le reste de la cravate, il m'attache à l'un des pieds du lit comme s'il craignait que je ne m'échappe. Il recolle son corps au mien. Au contact de son torse nu, je me mets à trembler aussi bien de l'intérieur que de l'extérieur. Je ne sais pas ce qui l'anime réellement, mais la colère qui le guide m'angoisse un peu, pourtant je lui fais confiance. C'est la meilleure et la seule façon que j'ai trouvée pour lui dire, mais surtout pour qu'il comprenne que je l'aime lui et personne d'autre. Je m'offre à lui, je suis à sa merci. Il peut faire ce qu'il veut de moi.
Ses muscles saillants m'enveloppent, je le sens partout autour de moi et sur moi. Il me retourne et se positionne derrière moi. Son impressionnante turgescence à plat tout contre mes fesses. C'est au moins une bonne chose, je lui fais encore de l'effet, tout espoir n'est pas perdu. J'entends le bruit singulier de sa braguette qu'il fait descendre.
— Écarte les jambes, me somme-t-il d'une voix sourde et chuchotée.
Je m'exécute dans le plus grand silence. Il pose ses mains sur mes hanches et les faits râper plus que glisser le long de mes jambes, entraînant avec elles, ma culotte. Je retiens mon souffle de cette caresse qu'il consent à me donner. Elle sera la seule. Dans un geste pour me contraindre, de sa main, il fait rentrer ma tête en mes bras surélevés pour que je ne cherche pas à m'adosser contre lui. Sa main glisse le long de mon dos m'arrachant des frissons, puis s'égare sur mes fesses avant de la faire glisser entre mes cuisses. Il rapproche sa bouche de mon oreille. Je peux sentir son souffle chaud caresser mon lobe. Je ferme les yeux et retiens mon souffle. Il me chuchote alors :
— Tu es déjà toute mouillée pour quelqu'un qui ne voulait pas baiser, me fait-il remarquer.
Il se décolle de mon corps. Le froid me recouvre. Je l'entends se mouvoir derrière moi. Je n'ose ni bouger ni me retourner pour voir ce qu'il fait. Le bruit caractéristique d'un emballage de préservatif que l'on déchire se fait entendre. Je l'entends l'enfiler. Mon cœur tambourine fortement. Il me pénètre d'un geste brusque m'extirpant un cri de surprise qui se transforme très vite en petit gémissement de gorge. Un plaisir intense se diffuse en moi me faisant oublier la douleur de mes poignets, mais aussi la situation inconfortable dans laquelle je me trouve.
— Tu mouilles pour lui ou pour moi ? Est-ce qu'il t'a déjà prise comme ça ? me demande-t-il d'un ton menaçant en se retirant pour que je ne jouisse pas.
— Gabriel...
C'est donc ainsi qu'il va me punir, me frustrer sexuellement jusqu'à ce que je l'implore.
— Tais-toi, je ne veux pas t'entendre.
Il me bâillonne de sa main. Je veux sentir sa peau tout contre moi, j'ai besoin de ce contact. Je recule d'un pas pour être en communion avec son corps, mais ses mains puissantes, fermes, et ses doigts imposants s'enfoncent dans ma peau m'arrachant un vrai cri de douleur. Il me fait me cambrer pour ne pas me toucher plus que nécessaire. J'ai conscience de jouer un jeu dangereux, le jeu de l'attraction-répulsion en ayant mit ma pudeur de côté, mais j'ai besoin de ressentir à nouveau sa paisible chaleur pour pouvoir le ramener vers moi. Cette chambre se transforme en salle et instrument de torture. Tous ses gestes sont dépourvus de douceur et de tendresse, et ses caresses amères.
— Ne bouge pas ! me glisse-t-il à l'oreille en serrant les dents et en s'invitant à nouveau en moi.
J'en veux plus. Plus que ces coups de boutoir qui me remplissent, mais qui ne me satisfont pas. Je veux ses lèvres sur les miennes, sa langue dans ma bouche, je veux ses mains enfiévrées partout sur mon corps, je veux sentir son souffle se perdre dans le mien, je veux me noyer dans ses yeux sans fond. Je le veux, je l'attends, sur moi et en moi. Je suis avide, affamée et excitée.
Avide de lui.
Affamée de lui.
Excitée par lui.
Je suis moite de désir, et victime de mon propre désir pour lui. Il ne me donnera pas ce que je veux, lui. Il accentue la cadence, nos peaux claquent. Mon souffle devient plus lourd, plus rauque, erratique. Mes cheveux me collent à la peau, les siens me chatouillent le cou. Je frissonne malgré tout de ce qui m'attend.
— Pour une femme mariée, tu mouilles sacrément vite pour un autre que ton mari. Il t'a déjà léchée ? Tu l'as lui aussi déjà pris en bouche ? Dieu sait que tu es douée avec ta bouche, une suceuse née. Une vraie petite virtuose de la queue !
Ses propos obscènes me font mal et me tétanisent. J'ai le droit au côté obscur de Gabriel dans toute sa splendeur. Il a soif de vengeance et de destruction. Je sais qu'il ne peut rien m'arriver de mal entre ses bras même s'il me juge. Je lui fais confiance, même si à cet instant, il ne le mérite pas. Pourquoi je lui accorde cette confiance aveugle ? Parce que je l'aime. Parce qu'il est mon tout, mon monde et mon univers. Peut-être parce que Gabriel Casta est tout pour moi. Je suis prête à subir tous ses châtiments. Il se retire à nouveau.
— Merde, Gabriel !
Je halète en colère, face à ses mots, mais surtout de n'être réduite qu'à ça, ce réceptacle, même si mon traître de corps ne veut rien d'autre. Je ne sais pas si je suis plus en colère à cause de ses propos et de la façon dont il me traite ou parce qu'il refuse de me donner cette jouissance que tout mon corps lui réclame. J'en profite pour reprendre mes esprits.
— Ça ne mérite pas tant de tergiversations, car nous ne sommes pas mariés ! je m'écrie à bout de souffle de devoir le persuader encore et encore d'une chose qui pour moi n'existait pas et n'a pas lieu d'être.
— Sa petite queue t'a comblée autant que la mienne... ?
Je sens sa virilité caresser mes fesses. C'est une réelle torture que je subis. Son souffle balaie mon cou et aussi un côté de mon visage.
— Nan, sans ça, tu ne serais pas allé chercher la jouissance auprès d'une autre queue. Tu étais si insignifiante pour lui, pour aller voir ailleurs ?
Je connaissais son côté pervers, mais là, je découvre son côté sadique ce qui déploie des alertes dans mon cerveau rendant désormais cette réalité vraiment effrayante. Je tourne la tête sur le côté afin de croiser son regard et je lui dis :
— Va te faire foutre !
L'éclat de contrariété dans son regard ne m'échappe pas. Sous l'insulte, ses yeux deviennent plus noirs que l'ébène. Je ne dois attendre aucune bienveillance de sa part. Les représailles ne se font pas attendre. D'un violent coup de reins, il se lie de nouveau à moi et me pénètre jusqu'à la garde, m'arrachant un râle aussi douloureux que délicieux, puis il me charge presque avec bestialité. C'est si intense, si différent de tout ce que nous avons connu jusqu'à présent. Aussi déroutant que grisant. Je suis partagée entre la honte de le laisser me malmener de la sorte et le bonheur de ressentir ce plaisir qui monte par grosses bouffées et qui irradie au creux de mon ventre. Il n'est pas doux, pas tendre, pas attentionné. Ses gestes ne sont ni affectueux ni amoureux, et pourtant, jamais il ne m'a fait ressentir ça. C'est si intense, si profond, si puissant. J'ai l'impression que mes pieds ne touchent plus terre et que rien si ce n'est lui ne me rattache au monde.
Je brûle pour lui. Je fonds pour lui.
— Avec toi, chérie, quand tu veux. Tu aimes toujours baiser, non, alors je ne vois pas où est le problème ! Ah, ton mari... Tu voulais que je te fasse du bien non ? Je sais être reconnaissant quand il le faut.
Il mêle promesse et insultes habilement déguisées comme personne.
— Tu crois réellement me faire une faveur là, je parviens à dire.
— On est sur la même longueur d'onde après tout, du sexe pour du sexe. C'est ce que recherche une femme mariée mal baisée de son mari, non ? Il a un certain charme vertueux, je peux comprendre pourquoi tu lui as dit oui.
Il a beau être sec, intransigeant, indélicat, brutalement froid et franc, je n'éprouve qu'un désir incandescent et torride pour cet homme qui me malmène, me rabaisse et me manque de respect. Il me marque au fer rouge, s'approprie mon corps et mon esprit pour que plus jamais je n'appartienne à un autre que lui.
À cet instant, je le hais de me soumettre par le sexe. Je le hais de faire de moi sa chienne. Je me hais de me laisser faire, mais c'est le seul moyen que j'ai trouvé pour de nouveau établir le contact avec lui afin d'avoir une chance réelle d'arranger les choses entre nous. Je ne veux pas que notre histoire d'amour se termine sur ce malentendu.
Notre histoire d'amour... il s'agit bel et bien d'amour. C'est ce dont je me persuade pour me soustraire de cette ambiance malsaine. Je me résonne et chasse cette peur viscérale qui me tenaille. L'amour, c'est ce qui nous unit. L'amour, c'est ce qui nous sauvera.
C'est mon avenir qui se joue, notre avenir. Une angoisse irrépressible me saisit. Face à ses assauts et à cette déferlante qui prennent possession de moi, ma raison et ma fierté s'envolent. Je ferme à demi les yeux et me laisse emporter par cette fougue aussi destructrice qu'enivrante. Je tente de maintenir cette boule dans mon ventre pour le garder en moi le plus longtemps possible, mais je commence à perdre la maîtrise de mes tremblements capricieux qui eux veulent tout, tout de suite. Il s'attelle à explorer les profondeurs de mon intimité de façon ardente, mais presque automatique, sans passion et sans réel plaisir. Je ne suis pas dupe de son petit jeu. Il veut m'avilir et m'humilier. Je serre les dents et le laisse mener la danse. Il ne me fait pas l'amour, il prend juste ce dont il a besoin pour satisfaire son besoin primaire, rendant vil, abject presque méprisable notre étreinte qui n'en est pas vraiment une.
Il me baise.
Du sexe pour du sexe, ni plus, ni moins.
Un coup d'un soir.
Me réduire à une sorte d'objet sexuel, juste bonne à le satisfaire.
Pas de geste sensuel, ardent, rassurant, doux, chaud... comme s'il n'en tirait aucune délicieuse contrepartie, tout est mécanique et calculé. Il fait tout ça pour me mettre les nerfs à fleurs de peau et ça fonctionne. Je gémis à un rythme de plus en plus saccadé. Je m'attends à ce qu'il se retire d'un instant à l'autre me privant de la délivrance. Nos peaux claquent, et dans la chaleur moite de nos corps, il me remplit tout entière, me comble de sa ravageuse hystérie qui me tire avec une force irrésistible vers l'orgasme. Mon cri explose dans le silence de cette chambre où seul son souffle bruyant se fait entendre. Lui n'a pas joui. L'harmonie n'a pas opéré. Mon cœur se serre à ce constat. Mes jambes cèdent, je suis à bout de force, mon esprit se ferme alors. Je ne suis plus que cette peau à vif et ce corps de braise sensible qui n'aspirent qu'au repos, mais qui est de courte durée.
Je sens ses mains s'activer sur mes poignets, il me soulève en me gardant tout contre lui et m'entraîne sur le lit où il m'allonge. Ma respiration se calme légèrement. Lorsque j'ouvre les yeux, Gabriel est au-dessus de moi. Je n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche, qu'il s'est déjà glissé en moi me faisant me cambrer. Je ne me suis pas encore remise de cet orgasme qu'il me chevauche déjà. J'ai les poignets toujours attachés. Je les soulève pour le toucher, mais il m'en empêche. Il attrape mes mains et les relève au-dessus de ma tête emmêlant ses doigts aux miens. Il semble si froid et si calme. Si je ne le connaissais pas aussi bien, je dirais que je ne le touche pas, mais je sais que derrière son masque de froideur se cache un cœur tendre. J'imagine et je devine la tempête qui grandit et souffle en lui. Tempête que je me dois de calmer avant qu'elle ne devienne tornade.
— Laisse-moi te toucher, je le supplie.
Il s'immobilise, il ne bronche pas. Un silence s'abat sur la chambre, tel un couperet, il me répond :
— Non !
Sa voix claque tellement fort que tout mon corps tremble. Elle est le reflet de son état d'esprit. L'éclat métallique au fond de son regard me signifie que je n'ai pas encore retrouvé mon Gabriel. Son visage ne trahit aucune émotion. À nouveau le silence, lourd et pesant.
— Embrasse-moi alors.
Je veux transformer cette dépravation, même si nous sommes l'un comme l'autre déjà en terrain conquis en quelque chose de plus intime, de plus vrai, de plus sentimental, de plus charnel et passionné ou nos cœurs et nos corps communieraient, mais il ne me laisse pas faire. Sa bouche, ses lèvres, sa langue me manquent. Il le refuse. Il me sourit. Son sourire est aussi faux qu'insolent. Il ne s'efface pas de ses lèvres, comme si le désespoir lui-même s'invitait sur ce sourire pour s'y cacher.
— Non, tonne sa voix cassante. Tu ne le mérites pas.
La férocité se lit sur ses traits. J'ai beau prendre sur moi pour le comprendre et accepter sa réaction, mais là, Gabriel dépasse les limites. Son sourire s'accentue, il n'a plus rien d'humain, il est oppressant et angoissant pour moi qui m'y perds. Ses pupilles n'expriment rien, juste du vide. Elles ne reflètent plus la douceur et l'effronterie qui le caractérisait, ni même sa sensibilité. Ses prunelles noires sont aussi insondables qu'imperméables à toutes mes demandes. Je détourne la tête, mais il pince mon menton entre son pouce et son index pour ramener mon regard vers lui.
— Pas d'amour Lyanna, juste du sexe. Tu n'es qu'un plan cul ce soir, m'assène-t-il le visage empreint d'une froideur mortelle.
Son intonation est rude et sans équivoque. Je suis bouleversée par ses propos crus et déstabilisants qu'il m'assène avec une jubilation évidente. Il pense chaque mot de ce qu'il vient de dire. Mon cœur cogne contre ma poitrine à toute allure. En entendant ça, la digue cède et une larme coule le long de ma joue. Une grosse boule se forme au fond de ma gorge et mes nerfs craquent. Une larme que je ne parviens pas à réfréner, évacuant toute la pression accumulée.
Il sait me faire mal. Je me sens envahie par ce sentiment de nullité qui m'accable et qui me dit que j'ai finalement fait tout ça pour rien. Il doit ressentir ma détresse, car il ralentit la cadence, mais ne s'arrête pas pour autant. Il paraît inquiet et perdu, voire déstabilisé par mon unique larme, et m'enveloppe de son regard perplexe. Il me suffirait d'un non, pour tout arrêter. De lui dire que je ne veux plus, mais rien ne franchit mes lèvres. L'espoir subsiste encore en moi.
— Ne me regarde pas, ferme les yeux.
Il ne supporte pas de voir le reflet de son âme dans mon regard dévasté. Je me dis que j'ai peut-être encore une chance et que tout n'est finalement pas encore perdu. Un frisson parcourt ma peau moite.
— Les choses ne peuvent pas toujours se passer comme tu le voudrais, Gabriel. Je t'aime et tu pourras être aussi brutal que tu le veux, ne pas me caresser, ne pas vouloir m'embrasser, je ne te lâcherai pas, parce que je t'aime, toi, juste toi. Tu veux me punir pour une chose qui n'a pas lieu d'être, vas-y, mais autant te prévenir, je ne partirai pas, jamais, tu m'entends. Alors, laisse parler tes pulsions, car je ne te laisserai pas réduire à néant tout ce qu'on a construit ces derniers mois. Et pour te prouver mes dires, que j'ai confiance et foi en toi, en nous, je te donne tous les droits sur mon corps. Je ne vois pas meilleure façon pour que tu comprennes enfin que je suis à toi et à personne d'autre.
Je suis folle !
C'est un fait. Je me jette ni plus ni moins en pâture au fauve qu'est Gabriel. Non, cet homme n'est pas mon Gabriel. Mon Gabriel me manque. Mon Gabriel, taquin, gamin, insolant, au sourire charmeur, ses petites attentions, sa douceur, sa chaleur, ses gestes d'une tendresse infinie, son étreinte douce et passionnée. Je veux retrouver tout ça de lui et avec lui. Quoi de plus logique que de le laisser me bafouer pour lui prouver mon amour ! J'espère vraiment faire revenir Mon Gaby ainsi ? Il me manque terriblement. Il semble encore plus en colère. Pour toute réponse, il grogne et se retire. La lueur brillante et froide que j'entraperçois au fond de son regard est dépourvue de promesse. C'est comme s'il ne croyait plus en rien. En l'espace d'une fraction de seconde, il m'apparaît épuisé, même anesthésié de tout. Il me donne vraiment l'impression de ne plus rien ressentir et de ne plus rien attendre de moi et de la vie.
J'ai peur. La peur me tord le ventre.
Ma gorge serrée et sèche retient mon cri d'effroi. Et si je fais tout ça pour rien. Et si je ne parviens pas à le ramener vers moi ? La question s'invite dans mon esprit, s'y déploie pour ne plus me quitter. Je retiens mon souffle face à sa brutalité et mesure l'invraisemblance de ma situation. J'ai envie de fuir, mais dès que la tiédeur de ses doigts entre en contact avec ma peau les souvenirs si vivaces des instants de bonheur que nous avons connus me forcent à rester et à subir son châtiment. Je ne suis plus que le réceptacle de ses désirs immoraux. Il me baise, ça me fait mal et ça me fait du bien.
Je ne le lâche pas des yeux. Je ne veux pas rompre cet ultime lien qui me rattache à lui. Son regard ne laisse rien transparaître d'autre que le vide et la froideur. Oui, il ne trahit pas la moindre émotion. Il a cette mine funeste sur le visage qui ne le quitte plus.
Il me retourne sur le ventre avec empressement. Mon regard s'affole en comprenant ce qui va suivre. Il pose ses mains sur mes hanches avec autorité et me soulève le bassin pour que je me retrouve à quatre pattes sur le matelas le cul offert. Mon cœur panique de ce qu'il va faire. Ses mains enserrent ma taille avec fermeté m'intimant l'abandon que tout dominant réclame à sa partenaire soumise avant de me posséder de la façon la plus primitive qui soit, chose qui aurait été encore impensable pour moi quelques heures plus tôt. Nos corps s'emboîtent étroitement par l'attrait puissant qui nous porte l'un vers l'autre. Ma raison se tait à moins qu'elle ne soit morte.
Vicieux. Immoral. Fourbe. Tordu. Fou. Brutal. Et plus encore.
Je suis terrorisée et étrangement aussi terriblement vivante. Mes doigts tétanisés s'agrippent au drap. Une allégresse m'inonde. Mon sexe s'humidifie des réjouissances à venir. Mon cœur saute et tressaute dans ma poitrine de cette douce appréhension et de ce doux émoi qui me saisissent au ventre et au creux de ma féminité. Je tente d'apaiser mon âme chancelante face à ce qui va suivre en refoulant les relents de ma moralité sur les parties de mon anatomie jusque là encore vierge de toute exploration.
Gabriel s'offre un colibri.
Un colibri d'une lenteur qui me rend folle de désir, mais surtout, qui me laisse sans voix. Je me laisse guider, me surprends de la facilité avec laquelle cela se fait, ainsi que de l'absence d'embarras ou de gêne de ma part. L'impatience me gagne. J'ai la peau moite, le corps lourd et inélégant du fait de ma position. Et pourtant, cela semble presque naturel. Un acte de confiance ultime voila ce que c'est. Je ressens une émotivité particulière face à cette union qui dans mon cœur fait de lui mon époux. Un tremblement d'excitation me gagne, un frisson d'envie grandissant se déploie à tout mon corps, mais aussi la peur.
N'ai-je pas dit que cet homme pourrait tout me faire faire, jusqu'à exprimer l'impudence de mes désirs cachés pour m'y abandonner sans commune mesure.
Il a ce pouvoir sur moi. Je le sais.
Je suis certaine qu'il en a d'autres, et pour lui, je commettrais toute sorte de folie bien plus pernicieuse pourvu qu'elles m'arrachent une débandade d'émotions aussi intenses que démesurées, un lâcher-prise et une jouissance extrême. Je suis prête à le suivre partout où il voudra bien m'emmener. Pour preuve, il vient de faire de moi sa catin d'un soir. Sa chienne. Son esclave. Une pauvre petite chose assujettie à son bon vouloir et à ses ordres auxquelles je me plie sans masque, ni faux semblant, me soustrayant à ma propre volonté et à ma propre fierté.
Pourquoi je m'inflige tout ça ? Parce que l'amour est à ce prix.
Une soumission totale. Plus de repères. Plus de désillusions. Plus de rêves d'adolescente transie d'amour. Juste un espoir. Juste un lien qui lie son cœur au mien, celui de l'amour. Pour une miette de son attention, je pourrais ramper à ses pieds, tant que j'ai une chance aussi infime soit-elle de le ramener vers moi et de lui faire entendre raison. Jusqu'au lever du jour, je suis prête à me soumettre, alors autant faire d'une pierre deux coups.
Le plaisir.
Laisser le plaisir me toucher, me gagner et m'ensevelir jusqu'à m'oublier.
Je ferme les yeux et me concentre sur les sensations que cet acte sexuel éveille en moi pour y puiser la force de ne pas abandonner affermissant ainsi ma volonté. Je relâche lentement mon souffle et me déleste de toutes ces tensions parasites qui pourraient freiner ma victoire. Je savoure cette délicieuse envie, reléguant tout le reste dans un coin de ma tête.
Je ne ressens aucune honte, juste cette montée progressive de plaisir qui me fait crier de plus en plus fort et cette émotion vibrante qui me lie à lui de la plus primitive des façons qui soit. Je le laisse me dompter, mon tour viendra... plus tard. De tout cela, je ne veux retenir que ce bien qu'il me procure. Je ferme mon esprit et m'accroche uniquement au ressenti. Je ne veux me rappeler que de nos peaux claquant l'une contre l'autre, de la force de sa poigne, de sa vigueur et de ses coups de reins impérieux que j'accueille avec avidité, me faisant ressentir des fourmillements jusqu'au creux de mon intimité. Jamais je n'aurais cru possible de prendre du plaisir en me soumettant de la sorte à la perversité d'un homme. Pas de n'importe quel homme, de mon homme. L'adrénaline monte en moi et une vague de chaleur aussi puissante que spontanée déferle sur moi.
Comment je peux me laisser aller de la sorte alors qu'il ne me respecte pas ? Il me met à nue, c'est bien plus intime que tout ce qu'on a pu partager jusqu'à aujourd'hui. Bien plus que ce fameux jour sous le lit de ses parents. Oui, comment ? Parce que je l'aime, c'est aussi simple que ça, même si l'amour n'excuse pas tout. Je suis aussi confuse que curieuse de ce qu'il parvient à éveiller en moi. Ma pudeur est en exil. Mon abandon se fait total face à cette folie insensée. Je me laisse aller à cette douce torture trop longtemps espérée. Mon corps s'enfièvre, s'étarque et se raidit contre lui en signe de soumission de ce plaisir sournois et indécent qu'il parvient à me faire ressentir. Des perles de sueurs coulent entre les omoplates. Le souffle court, le corps tremblant de désir et d'envie, je laisse cette puissante bouffée de chaleur inonder mon ventre et traverser mon sexe de vibrations inédites et merveilleuses. Je vacille sur mes genoux ankylosés, mais je ne lâche rien. Je frémis. Je gémis. Je ne me retiens plus rien pour ne pas me perdre dans les méandres de notre folie à tous deux.
Il s'écarte alors. Il s'éloigne. Je ne veux pas. Je tente de le retenir par la pensée. Je l'implore de suppliques muettes pour qu'il ne m'abandonne pas. Je ne veux pas qu'il me quitte.
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