Mes pensées se bousculent au portillon de la vie

Ma vue devient trouble à la lumière qui s'enfuit

Une ombre passe dans les airs qui l'emportent,

Un reste de vie glisse sous la porte,

Le silence pose sa main gelée et calleuse,

Tout devient froid à mon âme frileuse,

Une nappe de poussière envahit mon espace,

Une nappe brumeuse sur le sol s'amasse,

Je vois, ici bas, mon destin en finir,

Le désert qui avance et la mer se tarir,

Le matin a perdu son soleil éclatant,

Plus rien ne bouge, plus rien ne s'étend,

L'herbe devient rase et les arbres se couchent,

Le rose a quitté les contours de ma bouche,

Mon visage trop pâle de rides se creuse,

Un bruit, au lointain, la grande faucheuse,

Mes pensées qui se plaignent et qui fondent,

Sous la tourmente du temps qui m'inonde,

De son eau trouble et noire qui s'écoule,

Au fur et à mesure des douleurs qui s'enroulent,

Mes rêves se taisent au crépuscule muet,

Les images s'envolent à travers les nuées,

Les fenêtres de la vie sont fermées pour toujours,

Dehors les fleurs fanent chacune leur tour,

Les oiseaux ne sont plus que corbeaux ou vautours,

L'astre radieux ne fait plus le grand jour,

Et j'entends au lointain la machine infernale,

Comme l'orage tombant des nuages du mal,

Montant le tonnerre sur la campagnelivide,

Arrosant mon cerveau aux pensées trop arides,

Les souvenirs me reviennent en songe éphémère,

Le souffle du vent sur les vagues des mers,

Le bateau voguant toutes voiles ouvertes,

Les couleurs de l'océan et sa langue verte,

Je me souviens encore de ces moments d'extases,

Juste un peu, quelques mots, quelques phrases,

Je revois le monde et sa ronde qui s'emballe,

La valse du bonheur au milieu de son bal,

J'ai le goût de l'amour qui me revient par instants,

Et la belle du jour dans mon ciel couchant,

Je perds l'habitude de mes mots de mes gestes,

Je grimace ce dernier sourire, le sourire qui me reste,

Si j'avais un jour compris que l'homme est mortel,

J'aurais sans un doute prié pour vous l'éternel,

J'aurai mis mes genoux dans la terre sous les cieux,

Pour vous dire enfin je ne suis plus malheureux.