Quelque temps après, alors que midi approchait, la sonnerie retentit dans les grands couloirs de l'université d'Embursville.

Des d'étudiants sortirent de leurs classes en masse, se dirigeant en toute hâte vers la sortie, comme les eaux d'un fleuve se jetant dans la mer.

Roman et ses amis se retrouvèrent à l'entrée de l'édifice, puis se dirigèrent tous ensemble vers leur food-truck préféré: le Red-Wolf.

Comme d'habitude, il n'y avait presque personne. En voyant le groupe de jeunes approcher, le visage du chef Philippe s'étira dans un large sourire.

- Oh tiens tiens, mais qui avons-nous là aujourd'hui ? dit le cuistot.

- Salut Philippe ! saluèrent les jeunes.

- Hum, je sens qu'il y a du porc au four, ajouta Grégoire en reniflant l'air.

Roman et Ayla ricanèrent, tandis que Sandra le regarda d'un discret air amusé.

- Et bien tu n'as pas tord mon jeune ami, répondit Philippe. Aujourd'hui côtelettes de porc grillées avec sauce barbecue !

Les yeux du jeune homme s'agrandirent lentement. Puis, il leva la tête vers le ciel, comme s'il voulait prier.

- Je sens que je vais me régaler, chuchota-t-il le sourire aux lèvres.

Le jeune garçon pensait que personne ne l'aurait entendu, mais il ne remarqua pas la jeune louve lui sourire.

Philippe sortit les côtelettes et les plaça dans des sachets. Il en passa un à chacun de ses jeunes clients qui le remercièrent avant de partir s'asseoir sur les marches d'escaliers.

Le déjeuner se passa tranquillement. Le groupe d'amis profita de l'air frais et observa la place enneigé, quand tout à coup quelque chose attira leur attention.

Une jeune fille aux cheveux dorés, dont les yeux bleus saphirs brillaient au soleil, se faisait maltraiter par un groupe de jeunes.

Elle marchait la tête baissée, essayant de ne pas prêter grande attention à leurs moqueries. Malheureusement, une des filles du groupe de brutes la poussa violemment, la faisant trébucher sur le sol.

Tandis que les autres éclatèrent de rire, Roman se leva subitement, l'air énervé, et se dirigea vers la jeune fille.

Ses amis tentèrent de l'arrêter, mais en vain. Le jeune loup s'avança d'un pas ferme vers les brutes. Puis, il vit un garçon, d'un an plus jeune que lui aux courts cheveux blonds, se dresser contre la bande de brutes.

- C'est bon les gars, laissez-la tranquille ! cria-t-il.

- Oh allons Paul, tu sais bien que c'est juste pour rigoler, dit un des garçons du groupe.

- Faut vraiment que tu nous casses les pieds à chaque fois ! ajouta une des filles.

Malgré le fait qu'il était seul contre tous, Paul ne faiblit pas. Il posa un moment ses yeux sur la fille au sol, puis se retourna en lançant un regard aux membres du groupe.

- Oh regardez, le petit frère semble énervé, continua la jeune femme.

- Fermes-la Cassie ! répliqua Paul.

- Sinon quoi ?

Cassie s'avança et se dressa de toute sa hauteur pour faire face au jeune homme. Malgré cela, Paul ne flancha pas et continua de la dévisager.

La situation commençait à s'envenimer. Les deux deux ados semblaient être prêt à se sauter dessus. C'est alors qu'un des garçons du groupe s'interposa en éloignant Paul et Cassie l'un de l'autre.

- Ça va les gars, maintenant ça suffit ! dit-il d'un ton sévère.

Il regarda attentivement les deux ados, puis posa les yeux sur la jeune fille aux cheveux dorés, qui se relevait lentement.

Le chef du groupe tourna la tête à nouveau vers le jeune homme, qui continuait d'avoir un air sérieux et énervé.

- T'as de la chance aujourd'hui Paul, mais reste sur tes gardes, la chance finit toujours par tourner tôt ou tard ! dit-il en s'éloignant avec ses camarades.

Paul les vit quitter la place et disparaître dans une ruelle.

- Va te faire voir Kyle ! pensa-t-il.

Le jeune homme s'approcha de fille agenouillé dans la neige, alors qu'elle ramassait ses affaires.

- Ça va ? demanda-t-il.

- Quels cons ! répondit-elle sèchement.

Elle se releva d'un bond et s'éloigna.

- Attends ! l'interpella Paul. Dis-moi au moins comment tu t'appelles.

La jeune fille s'arrêta subitement mais ne se retourna pas. Son visage crispé pencher vers le bas, les yeux semi-clos, elle se retenait de pleurer.

- Tu veux que je te dise le mien d'abord ? persista le garçon. Je m'appelle Paul.

Toujours aucune réponse. Paul se résigna et commença à rejoindre l'édifice.

- Elyna ! s'écria la fille sans se retourner. C'est mon nom: Elyna.

À l'entente de son nom, Paul sentit une étrange sensation lui réchauffer le cœur. Malheureusement il n'eut pas le temps de répondre qu'Elyna s'éloigna en toute hâte.

Le jeune homme resta ainsi seul au milieu de la place, l'air quelque attristé. Puis, il rejoignit l'établissement, direction la salle de cours.

Roman et ses amis, qui furent témoins de ce spectacle, ne purent cacher leur étonnement.

- Oh bah ça ! s'exclama Ayla les yeux écarquillés.

- Ça m'a tout l'air d'être un déjà vu, ajouta Sandra.

- Comment ça ?

- Ça me rappelle le moment où Greg et moi on s'est rencontré.

Le jeune vampire, déjà étonné par ce qu'il venait de voir, fut doublement surprit par ce que venait de dire son amie.

- Pardon ? questionna-t-il intrigué.

- Bah oui. C'est exactement de la même façon qu'on s'est rencontré toi et moi, continua la louve.

- Alors là mais pas du tout !

- Bien sûr que si.

- Bon primo: le contexte était complètement différent. Et secondo: c'est toi qui m'a posé tout un tas de questions.

Le sourire sur le visage de Sandra s'élargit. Taquiner le jeune garçon était l'un de ses passe-temps préférés.

Depuis leur combat contre la Bête du Gévaudan, les deux jeunes s'étaient énormément rapprochés. Ils passaient la plupart du temps ensemble, mais toujours avec au moins un de leurs amis. Jusqu'ici, ils n'avaient pas eu un moment à eux tout seuls.

- Ah et avant que j'oublie: on ne l'a pas fait en publique, ajouta Grégoire.

Sandra ricana intérieurement.

Ayla cependant, observa son petit-Ali d'un air perplexe.

Ce dernier en effet, était droit comme un « i », le dos tourné à ses amis. Il continuait de regarder la place presque vide, comme si quelque chose attirait son attention.

La main d'Ayla, se posant délicatement sur son épaule, l'arracha à ses pensées.

- Roman ? Est-ce que ça va ? questionna-t-elle d'un ton préoccupé.

- Il y a quelque chose de bizarre, répondit-il. J'ai comme sentit une étrange odeur dans l'air.

- Eh oh ça va ! s'indigna Grégoire en se relevant. Pas besoin de me répéter que je sens mauvais.

- T'inquiètes Greg je ne parlais pas de toi, le rassura son ami.

Soudain, une expression d'incompréhension se dessina sur le visage du vampire. Certes, d'un côté il était heureux que personne ne critique son odeur particulière. De l'autre par contre, il sentait que quelque chose tracassait son ami. Et ça ne semblait pas rassurant.

- Qu'est-ce que tu veux dire ? demanda Grégoire en se rapprochant de Roman.

Ce dernier s'apprêtait à répondre, mais la sonnerie provenant de l'université l'interrompit.

Le groupe d'amis quitta alors les marches, où ils s'était installé, et partit rejoindre l'établissement pour les cours de l'après-midi.

En traversant la place où avait eu lieu l'altercation entre le jeune Paul et le groupe de brutes, Roman s'arrêta subitement. Il regarda autour de lui, mais ne vit rien d'anormal.

Pourtant, il sentit une étrange sensation lui parcourir tout le long du corps.

- Roman ? Roman ! l'interpella Grégoire. Qu'est-ce qu'il y a mon vieux ?

- Je n'en suis pas sûr, avoua le Pur Alpha.

***

Entre temps, au chaud dans sa villa, Sébastien était impatient et énervé.

Il s'était entraîné toute la matinée dans le gymnase de sa maison, sans jamais en sortir un seul instant. Alors qu'il battait fortement son mannequin avec ses battons, il n'avait qu'une seule pensée en tête: trouver le Pur Alpha et l'éliminer.

Cela faisait presque deux mois qu'il avait tenté de trouver des infos sur ce Roman Vicars, mais tous ses efforts résultèrent vains. Il ne savait toujours pas quelle apparence il avait, ni qui était ses alliés ou amis.

Cette pensée le mit encore plus en colère et, sans s'en apercevoir, il frappa encore plus fort le mannequin.

Tout à coup, il entendit la porte du gymnase s'ouvrir et il se retourna pour voir Victoria entrer dans la pièce.

- Bonjour chérie, dit-elle d'un ton apaisant.

- Salut Vic, répondit le chasseur essoufflé.

- Tu ne crois pas que tu devrais faire une pause ?

- Je ne peux pas. Désolé, mais j'ai beaucoup trop de pensées par la tête.

Sébastien se dirigea alors vers le banc et, grâce à une serviette posée dessus, s'essuya le visage humide.

Victoria s'approcha de lui d'un pas lent. Elle connaissait bien Sébastien pour savoir qu'il fallait être délicat avec lui, surtout lorsqu'il était nerveux.

Elle s'assit sur le banc à côté de lui. Elle le laissa reprendre son souffle, puis reprit la parole.

- Tu penses au « Pur Alpha » c'est ça ? Ce n'est rien de plus qu'un mythe.

Sébastien leva les yeux au ciel, d'un air peu convaincu.

Les voix couraient vite dans le MythWorld et il le savait. Si la nouvelle d'un Pur Alpha venait à se répandre au quatre coins du monde, les risques d'une rébellion des Occultés serait imminente.

Sébastien ne pouvait absolument pas le permettre. Cela faisait longtemps qu'il planifiait la guerre contre les créatures mythiques et aucun loup-garou, qu'il soit jeune ou vieux, ne l'arrêterait.

- J'ai demandé à des amis chasseurs, fidèles à notre plan, de rechercher la moindre petite trace concernant ce Roman Vicars, dit-il le regard perdu dans la salle. Ils n'ont rien trouvé.

- Tu ne crois pas qu'il a pu quitter la région ? spécula Victoria, toujours d'une voix douce.

- Non je ne crois pas. Je sens qu'il est encore ici.

Le jeune homme se releva lentement et se replaça devant le mannequin.

Victoria aurait voulu le retenir, mais elle savait que c'était peine perdue. D'un air résigné, elle quitta la salle de sport, tout en refermant la porte derrière elle.

Sébastien de son côté, reprit l'entraînement en frappant le mannequin de toutes ses forces.

- Et je te jure que je le trouverai et je ferai un tapis avec sa peau ! pensa-t-il en portant des coups de plus en plus forts.

***

Plus tard, quand le soleil commença sa descente annonçant que la journée s'achevait, les étudiants de l'université d'Embursville quittèrent l'établissement, se dirigeant vers l'arrêt du bus ou le parking.

Roman et ses amis étaient à peine sortis lorsque les mégaphones s'activèrent.

« Chers étudiants et étudiantes bonsoir,

Nous vous informons que le Bal d'Hiver se tiendra comme prévu demain soir. Nous vous souhaitons une agréable journée et, pour ceux qui ne seront pas présents, passés d'agréables vacances.

Merci pour votre attention ».

- Oh cool ! s'exclama Grégoire enthousiaste.

- Pourquoi ça ? questionna Sandra étonnée.

- Parce que... et bien, parce que...

Le voyant bégayer, la jeune fille ne pouvait s'empêcher de rire intérieurement.

- Greg aime beaucoup danser, expliqua Roman. C'est la seule activité sportive qu'il pratiquait avec plaisir.

La jeune louve posa à nouveau son regard sur le jeune vampire. Elle l'observait de haut en bas, l'air surprise et amusé.

- Tiens donc, dit-elle.

- Enfin, il préférait surtout la danse classique, comme La Valse, continua Roman le sourire au lèvres.

- Eh oh ! Sache que La Valse est particulièrement relaxante, s'empressa d'ajouter Grégoire. Et puis, c'est le seul rythme que j'arrive à suivre.

- Donc tu as l'intention d'aller au Bal d'Hiver ? demanda Ayla.

- Oui. Même si je crois que j'irais seul.

- Ah bon, pourquoi ?

- Et bien, j'ai reçu un message de Coralie hier soir.

À l'entente du nom de sa congénère, le sourire de Sandra s'estompa.

Après deux mois d'absence de cette fille, elle pensait au plus profond d'elle même, que Grégoire aurait fini par l'oublier. À priori, ce n'était pas le cas.

- Oh et qu'est-ce qu'elle a dit ? questionna la jeune louve.

- Qu'elle ne viendra pas, parce qu'elle n'a toujours pas trouvé les Fils du Gévaudan, répondit-il. Enfin, ceux qui sont restés fidèles à Henry.

- Ça doit être difficile de ne pas avoir quelqu'un pour t'accompagner, ajouta Ayla d'un air légèrement triste.

- T'inquiète, j'ai l'habitude d'y aller seul à ce genre de chose.

- Tu n'as jamais eu une fille pour t'accompagner ? demanda Sandra curieuse.

- Disons seulement que ce n'est pas encore arrivé.

Sandra écarquilla les yeux étonnée.

Le silence s'installa dans le groupe. Mais il fut de courte durée.

- Bon et bien, maintenant excusez-moi mes amis, mais je vais devoir vous laisser, dit Ayla.

- Ah bon pourquoi ? demanda Roman.

La chasseuse se tourna vers lui et lui répondit en lui lançant un sourire narquois.

- Question familiale.

Sur ces mots Ayla, d'un geste vif, déposa ses lèvres sur celles de Roman puis commença à se diriger vers l'arrêt du bus.

Le jeune homme se retrouva donc seul avec ses deux amis Occultés, qui le regardait d'un air amusé.

- Ne dites rien ! dit le jeune loup.