Chapitre 1
Vous est-il déjà arrivé de vous réveiller, dans un lit à une heure quelconque de la nuit ou du matin, sans que vous ne sachiez où vous vous trouvez ?
Vous avez ce mal de crâne atroce qui éveille une douleur profonde au milieu de votre tête, en plein cœur de votre cerveau, et dans toute la chair qui enveloppe l'intégralité de votre personne. La bouche pâteuse, les paupières à demi-ouvertes avec cette sensation insupportable d'avoir les yeux qui s'échappent de force de leur emplacement initial. Et vous souffrez de cette douleur brûlante au centre de ces lourdes sphères qui vous permettent de voir. Mais voir quoi ?
Vous tentez vainement de distinguer des formes, des couleurs, un lieu dont vous connaissez l'existence. Mais vous n'y parvenez pas. Dans cette obscurité déstabilisante, tout est flou. Vous ne réussissez même pas à définir la taille, la forme, ou même la hauteur de la pièce dans laquelle vous vous trouvez, et vous commencez à sentir des martellements dans votre boite crânienne, vous les entendez presque directement dans vos tympans. Et soudain, un frisson glacial suivi d'une fièvre maladive parcourt chaque partie de votre corps, et celui-ci se met à trembler violemment. Vous vous rendez compte maintenant que vous ne maîtrisez aucunement votre corps. A moitié conscient, vous réalisez que vous êtes comme enfermé dans celui d'un autre. Vous ne comprenez pas d'où vient toute cette douleur, vous êtes atteint d'une forme d'amnésie totale incontrôlée, accompagnée d'une douleur physique indéfinissable. Les tremblements deviennent de plus en plus violents, votre crâne bouillant ne cesse de se faire marteler, un sifflement, un cri perçant fait saigner vos oreilles. Vos yeux sont presque hors de votre tête, des rivières salées et irritantes ruissellent sur votre peau humide, vos cheveux trempés accentuent ce frisson insurmontable. Cette douleur insupportable se renforce et vous sombrez.
Vous ouvrez enfin vos paupières, et fixez le plafond, ignorant combien de temps vous avez passé là, inconscient, dans ce lit que vous ne reconnaissez pas. La douleur s'est atténuée, les martellements ont cessé, le cri s'est tu, vous avez un peu moins froid et votre tête s'est rafraichie. Votre corps s'est arrêté de trembler. Votre cœur a cessé de s'affoler. Le crâne toujours un peu douloureux, les yeux qui irritent, vous vous les frottez. Après quelques instants flous, vous parvenez à distinguer les objets, les formes de la pièce en vous relevant, la douleur crânienne assoupie se réveillant doucement. Votre corps, meurtri, traversé par une légère brise fraiche, éveille en vous la douleur des courbatures, de votre cou, de vos épaules, votre dos, votre bassin, de vos jambes jusque dans vos orteils. Chaque articulation, chaque muscle est soumis à un immense effort. Vous réalisez que vous avez retrouvé une partie de votre mémoire. Vous vous rappelez de votre nom, vous prenez conscience de la tranche d'âge que vous avez, et vous reconnaissez une forme de familiarité avec le lieu où vous vous trouvez.
D'où vient ce souffle léger et frais qui s'amuse avec votre souffrance physique ?
Toute sensation de sommeil a disparu mais une extrême fatigue physique et morale vous accapare. Frappé d'un mélange de curiosité et d'agacement, vous décidez de bouger et de vous diriger vers la source de la brise. vous tournez la tête, envahi par une sensation douloureuse au cou jusqu'aux tempes, et regardez en direction d'une fenêtre grande ouverte avec de légers rideaux s'échappant hors de la pièce. Vos oreilles vous font terriblement mal, les bourdonnements sourds se dissipent et vous retrouvez peu à peu l'usage de votre ouïe. Des sons lointains de véhicules vous parviennent dans la tête. Vous distinguez le faible bruit du vent qui passe sans doute dans un feuillage voisin. Alors, assis sur le matelas froid de la chambre dans laquelle vous vous êtes réveillée, vous écoutez.
Vous écoutez les sons, le mélange des bruits lointains de la vie nocturne qui constituent le silence de la nuit. Un silence imparfait et pourtant agréable, rassurant. Le silence de la ville. Le silence de la vie. Revenant à vos esprits, vous regardez l'ouverture. Vous êtes comme attiré vers l'extérieur, la curiosité vous démange. L'envie de respirer l'air frais de l'extérieur est plus forte que la fatigue. Vous ne supportez plus cette atmosphère étouffante que renferme la pièce dans laquelle vous êtes, alors vous tentez de mouvoir votre corps. Soudain, une douleur aigüe s'empare de la moitié de votre corps. Vous ressentez de terribles crampes dans les cuisses, les mollets, et des courbatures vous arrachent le bassin. Dominé par la curiosité et l'envie de respirer, vous surpassez la douleur avec difficulté, et déposez la pointe de vos pieds sur le sol glacé de la chambre, et, avec le peu de force qu'il vous reste, vous atteignez la fenêtre. Vous passez la tête par l'ouverture. Vous êtes sorti de cette cage qui vous emprisonne. Vous respirez. Alors vous ressentez un mélange d'émotions indéfinissable. Un sentiment de calme absolu s'est installé en vous, de liberté. L'idée de vous jeter du haut de cette fenêtre vous frappe en plein cœur. Que ressent-on quand on vole ? Et vous restez là, à contempler le paysage nocturne, alors que quelques filets d'eau salée s'échappent de vos yeux. Dans le paradoxe de votre détresse, vous vous sentez libre.
Cela ne vous est jamais arrivé ? Et bien moi si, c'est la situation que je ressens actuellement et je ne comprends pas. Je suis totalement perdue. Et puis j'ai cette sensation au coeur et dans tout mon corps. Cette sensation de légèreté presque dérangeante. Comme s'il me manquait quelque chose, comme si une partie de moi m'avait été retirée.
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