Partie Deux
Le soleil commence à se lever quand Lucas bifurque vers un hôtel sur le bord de la route. Je me laisse glisser de la moto dès qu'il coupe le moteur et étire mes jambes, elles sont totalement rigides après tout ce temps passé sans bouger.
- Qu'est-ce qu'on a comme argent sur nous ?
Il ne répond pas tout de suite, enlevant son casque et descendant de la moto pour chercher dans le petit compartiment.
- 16 000 yuans, aucune devise étrangère, je n'ai rien d'autre que mon portable sur moi. De ton côté ?
- J'ai une de mes cartes, mon compte principal, l'autre est restée là-bas, il faut que j'en demande une nouvelle.
Je fais une moue frustrée, j'en ai marre, je dois toujours changer et à chaque fois avec un nouveau code.
- Je peux payer les nuits d'hôtel en billets, tu t'occuperas des pleins.
Il prend l'arme cachée au fond et la range sous sa veste, invisible. Il va nous falloir des vêtements, de quoi nous laver, de quoi traiter nos blessures, j'ai mon téléphone, il faut joindre Kun. Il va avoir besoin de notre aide pour se remettre de cette perte, c'était notre plus gros entrepôt, on va avoir du mal à honorer la demande de nos clients, ça va nous coûter très cher de récupérer un nouvel endroit comme celui-ci, peut-être que Kun aura quelques relations à faire jouer, Johnny lui doit une faveur je crois, et peut-être... Je suis sorti de mes pensées par deux mains qui viennent prendre mon visage en coupe et une douce voix grave.
- Tennie, arrête, tu es encore en train de te perdre dans tes pensées. Ne vois pas trop loin, pense déjà à maintenant. On s'en est sorti, Kun est sauf, tout le monde ou presque a pu sortir de la base, Winwin a emmené une bonne partie de ses affaires avec lui, on n'aura pas besoin de tout lui racheter. Tout va bien, ne t'inquiètes pas.
- Je n'avais même pas pensé à Winwin, ses caprices vont encore nous coûter un bras.
- Stop !, Je reçois une pichenette sur le front pour accompagner son ordre, Je viens de te dire d'arrêter, ce n'est pas pour que tu te plaignes un peu plus. Vois ça comme des vacances, tu n'as pas dit que tu voulais qu'on passe des moments tous les deux ? Les voilà.
- Nous sommes en cavale, loin du gang, une base vient d'être détruite et nous ne sommes même pas sûrs de pouvoir retrouver Kun à Shanghai. Ce n'est pas vraiment ce que j'imaginais en moment à deux.
- N'empêche que c'est ce qu'on a, alors profitons-en. Je vais aller payer pour la chambre, et ensuite j'irai faire les courses. Il ne vaut mieux pas que tu te montres à d'autres personnes tant qu'on ne s'est pas occupé d'effacer ces traces de sang.
J'acquiesce avec un soupir, me laissant me reposer contre son torse quelques secondes de faiblesse avant de rouvrir les yeux et de m'éloigner de lui.
- Vas-y, je t'attends ici.
Je lui fais un petit sourire, qu'il me rend inquiet et il disparaît. J'ai envie de dormir. Je me suis trop dépensé cette nuit à courir partout. Ce n'est plus de mon âge. Il revient quelques petites minutes plus tard.
- J'ai une chambre pour deux, un lit double, ça ne te gêne pas j'espère ?
Il demande avec un petit sourire en coin, auquel je réponds en levant les yeux au ciel. On dort ensemble le soir, même sans l'obligation d'être dans la même chambre, bien sûr que ça ne me gêne pas, c'est le contraire que j'aurais trouvé gênant. J'ai besoin de lui, pour me détendre, je me sens encore trop sur les nerfs. Ça n'aide pas d'être le bras droit de Kun, j'ai quasiment plus de travail que lui, tout ce dont je devrais m'occuper maintenant et que je ne peux pas...
- Yah ! Lucas, repose-moi !
Je tape son dos à plusieurs reprises, me débattant alors qu'il me soulève sur son épaule aussi simplement que si je pesais la moitié de mon poids.
- Hors de question, tu as besoin de repos, laisse-toi faire alors que je t'emmène gentiment.
- Tu trouves ça gentil ? Tu me kidnappes.
Je lui rétorque, mais mes coups manquent déjà de conviction et si les précédents ne le gênaient pas, je ne suis même pas sûr qu'il sente ceux-ci.
- Je t'empêche de te torturer l'esprit comme tu sais trop bien le faire. Ne prend pas tout sur tes épaules, c'est avec Kun, à trois qu'on réfléchira, en attendant, je refuse que tu perdes ton temps à te rendre malade d'inquiétude.
- Je ne me rends pas malade.
- Parce que je t'en empêche imbécile.
- Je trouve que tu es vraiment autoritaire ce matin. Où est passé le comportement de chiot que tu me montres d'habitude ?
- C'est de ta faute s'il n'est pas là, c'est l'inquiétude qui le fait disparaître.
- Tu cherches à me culpabiliser ?
- Un peu.
J'entends le sourire dans sa voix, qui me donne envie de lever les yeux au ciel et l'embrasser en même temps. C'est si difficile d'aimer cet imbécile. J'arrête de me débattre et me libère tout simplement de son emprise. A son exclamation, il ne s'y attendait pas.
- Tu as gagné, emmène-moi à la chambre et dormons.
- Voilà les clés, je dois aller faire des courses à la petite boutique, on n'a pas de quoi désinfecter ta blessure. Par contre on m'a dit qu'il y avait de quoi se laver. Prend ta douche, je serai là quand tu auras fini.
- Tu sais que je peux mettre deux minutes juste pour le plaisir de te prouver que tu as tort.
- Je pense que tu préfèreras rester dans la douche pour avoir la plaisante surprise de me trouver quand tu auras fini.
Il se penche pour poser un léger baiser sur mes lèvres avant de partir en me faisant un clin d'œil. C'est si difficile de ne pas l'aimer. Je regarde le numéro de la chambre sur la clé et la trouve rapidement. Cet hôtel n'est manifestement pas de la meilleure qualité, la chambre est petite pour deux personnes, et il n'y a pas de vraie séparation avec la salle de bain et les toilettes. Mais j'imagine qu'on a au moins de la chance que ce ne soit pas commun pour tout l'hôtel. Je commence à me débarrasser de mes vêtements et trouve effectivement deux serviettes et un gel douche qui sert aussi de shampooing sur le lavabo. Ça fera l'affaire. Je me glisse dans la douche et lâche un soupir de soulagement alors que le jet d'eau frappe ma peau. Comme Lucas l'imaginais, je prends mon temps et me détends comme je peux sous le jet d'eau chaude. Si longtemps que je sais qu'il est là depuis une dizaine de minutes quand je sors, des gouttes d'eau tombant de partout, la serviette simplement nouée autour de la taille.
-Tu n'étais donc bien que parole quand tu as dit pouvoir sortir avant que je ne revienne.
- Je suis sorti, mais tu n'étais pas là, alors j'y suis retourné, je ne voulais pas te rendre triste.
Je mens en fouillant dans le sac plastique qu'il a ramené pour trouver un sous-vêtement et un t-shirt. Je fronce le nez un peu dégoûté en pensant à l'allure que je vais avoir là-dedans mais ce n'est pas le moment de faire la fine bouche. Alors que j'allais retourner dans la salle de bain, Lucas vient m'enlacer, collant son torse contre mon dos. Il dépose des baisers papillon dans mon cou et je penche la tête, exposant ma peau à ses lèvres. J'adore quand il est affectueux comme ça, je sais que cette fois c'est à cause de l'inquiétude, et que je ne devrais pas autant apprécier n'être qu'avec lui, mais qu'y puis-je s'il est la seule personne avec laquelle je voudrais être bloquée dans ce genre de situation ?
- Tu es sûr de vouloir t'habiller, tu es vraiment bien comme ça. Il murmure entre ses baisers.
- Tu veux que je tombe malade ?
- Sous la couette et dans mes bras ? C'est impossible.
Je ris et me retourne dans son étreinte, scellant nos lèvres avant de me dégager de l'emprise de ses bras.
- Qu'est-ce qui te fait croire que je te laisserai dormir avec moi dans ce lit ? Tu sens la transpiration alors que je suis propre, je ne veux pas de toi avec moi.
Je commence à m'habiller, à nouveau dans la salle de bain.
- Je peux très bien me laver, ce n'est pas un problème. Et puis tu as dit oui au lit double.
- Pour que je puisse m'y étaler comme je veux bien sûr, tu dormiras sur le sol Wong Yukhei.
- N'utilise pas mon vrai prénom pour ce genre de phrases. Je préfère quand tu le fais pour m'attirer au lit, pas m'empêcher d'y aller.
- Qu'est-ce qui te fait croire que je ne cherche pas à t'y attirer ? Tu peux aller te laver.
Je ne lui laisse pas le temps de répondre et sort de la salle de bain avant de venir m'écrouler sur le lit, la serviette sur les cheveux maintenant. Je dois me les sécher, trop fatigué.
- Je veux m'occuper de ta blessure avant, j'ai pris ce qu'il faut. Montre-la moi s'il-te-plaît.
Je m'exécute, je sais qu'il n'aura pas l'esprit tranquille s'il ne le fait pas lui-même, et qu'il ne peut pas estimer la gravité de la blessure. Il murmure un petit remerciement et s'en occupe en moins de cinq minutes, la désinfectant avant de faire un pansement avec une compresse. Il m'embrasse tendrement une fois qu'il finit et me dit qu'il va se laver. Je me contente de hocher la tête et frotte rapidement mes cheveux avant d'abandonner et de me glisser sous la couette. J'ai envie de dormir. Pourtant, une quinzaine de minutes plus tard, je suis toujours somnolent mais pas endormi, attendant Lucas sans un mot. Je ne vais pas arriver à dormir si je ne l'ai pas contre moi. Je le sais, c'est toujours comme ça quand on frôle la mort comme ce soir, même avant que je ne me rende compte de mes sentiments pour lui. J'ai toujours été tellement attaché, je me demande comment lui n'a pas pu se rendre compte du traitement de faveur que je lui donnais inconsciemment. Je pense qu'il s'attendait à ce que je sois endormi quand il revient, parce qu'il semble étonné de me voir ouvrir les bras pour l'appeler silencieusement. Je le vois poser arme et portable sur la table de chevet avant de venir sous la couverture avec moi, m'attirant dans ses bras juste après.
- Tu dois dormir Tennie, tu as quand-même perdu pas mal de sang. Et tu as couru dans tous les sens, bien plus que moi.
- Tu as conduit, ce n'est pas mieux, toute la nuit en plus. Ne fais pas comme si tu n'avais pas besoin de repos non plus s'il-te-plaît. Je ne veux pas que tu essaies de jouer un rôle, soit honnête avec moi, j'en ai besoin.
Il reste silencieux pendant quelques secondes. Je me recroqueville un peu dans ses bras, me sentant rejeté derrière un mur qui m'empêche de me sentir détendu comme je le suis d'habitude contre lui.
- Je ne veux juste pas t'inquiéter. Il finit par murmurer.
-Je sais, et tu l'as bien fait jusqu'à maintenant, mais c'est fini, il n'y a plus que nous deux. Tu n'as pas à te cacher.
- Je ne sais pas pourquoi, mais te voir blessé particulièrment... Je n'aime pas ça Ten. Je ne supporte pas l'idée de devoir continuer sans toi. Entendre parler des dangers dans lesquels tu t'es mis, ça va, je n'arrive pas à me les imaginer, et je sais toujours que tu t'en es remis au moment où on me le raconte. Mais là... dans mes bras, ça aurait pu se passer dans mes bras. Si tu ne m'avais pas crié dessus dans le parking, j'aurais juste pu rester là à te fixer sans rien dire. Et ça aurait été la fin.
Il se lâche au fur et à mesure, sa voix tremble de plus en plus alors que je sais qu'il commence à pleurer. Je ressens les petits soubresauts qu'il essaie de retenir. Je relève la tête et prend son visage entre mes mains, essuyant de mes pouces celles qui ont déjà coulé.
- J'oublie à chaque fois à quel point tu es un enfant quand tu relâches ton masque. Tu ne sais exprimer les émotions fortes qu'en pleurant, tu l'as fait aussi quand je t'ai dit que je t'aimais.
- Tu pourrais arrêter de le mentionner, j'ai honte un peu plus à chaque fois que tu me le rappelles.
- Tu ne devrais pas, c'est une des choses que j'aime chez toi. Sur le moment, bien sûr que j'ai paniqué mais maintenant... Je ne sais pas si tu te rends compte, mais tu as quand-même pleuré de joie parce que je t'ai dit que je t'aimais. Tu penses que beaucoup de personnes peuvent se vanter d'avoir quelqu'un qui les aime à ce point ?
- Moi je peux, si tu réagissais de la même manière que moi, je suis sûr que tu aurais pleuré aussi.
- Tu as raison, et c'est pour ça que tu sais que je tiendrai ma promesse, toujours. Je ne mourrai pas avant de t'avoir demandé en mariage, d'avoir organisé pour nous deux le plus beau mariage que le monde n'a jamais vu, puis nous aurons cette maison en Thaïlande, loin du gang, avec nos quatre enfants et les deux chiens. Je pense qu'on devrait rajouter qu'il nous faut un jardin aussi grand qu'un terrain de foot, et un piscine olympique.
- C'est impossible, tu le sais bien. Il pouffe, un vrai sourire se traçant sur ses lèvres que j'embrasse tendrement.
- Alors j'imagine que nous sommes immortels.
Je lui offre un grand sourire qui finit de le détendre et il se penche pour sceller nos lèvres, nous entraînant dans un baiser passionné, dans lequel nous partageons tout l'amour que nous ressentons l'un pour l'autre. Quand il finit par rompre le baiser pour poser son front contre le mien et reprendre sa respiration, je viens emmêler nos jambes et trace des cercles imaginaires dans son dos.
- Tu es impossible Ten, je t'aime à un point que je ne pensais pas possible. Comment fais-tu ? Je finis toujours par tomber un peu plus pour toi.
- Je suis moi, Je fais une pause pendant quelques secondes, Et je t'aime en retour, ça fait beaucoup aussi.
- Maintenant que tu le dis, c'est vrai, juste parce qu'il s'agit de toi.
Je croise son regard, j'y décèle une telle admiration, que je finis par détourner les yeux en rougissant.
- Ne dis pas ça aussi sérieusement, maintenant je me sens arrogant d'avoir répondu ça. Je boude.
- Mais si je dis que c'est vrai ?
- Peu importe, je dois dormir.
Je cache ma tête dans son cou et ferme les yeux, voulant juste profiter des quelques heures que nous pouvons nous offrir. Je le sens rire doucement et me serrer en retour avant de poser un bisou sur le haut de ma tête.
- Moi aussi, je suis fatigué.
Il chuchote et je souris contre sa peau, posant un petit baiser sur sa clavicule avant de me laisser sombrer dans les bras de Morphée.
Heya, je sais que j'ai mis beaucoup plus de temps que prévu, mais je me suis retrouvée avec une charge de travail toute aussi imprévue. Me voilà de retour, et avec quatre chapitres au lieu de trois. Les deux restant arriveront bientôt, j'espère qu'ils vous plairont autant, et même plus encore que les premiers ^^
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