Élémentaire... Mon cher Hippocrate
À première vue, le lien entre Hippocrate et les quatres éléments n'est pas des plus évidents, à moins qu'on ait fait grec au lycée, ou une première année de médecine. Quoi qu'il en soit, Hippocrate pensait que l'homme était constitué de 4 éléments et que c'était leur déséquilibre qui déclenchait les maladies.
Je suis partie de cette idée pour écrire le petit texte suivant, où il n'est pas question de maladie mais plutôt de la vie en général.
Au tout début, j'étais l'air. Insaisissable, se fichant des barrières et des contraintes. Je tourbillonnais, filais entre les branches des arbres, m'engouffrais dans les plus petits interstices pour disparaître, échapper aux curieux. Je parcourais les plaines, les mers que je roulais en vagues, me gorgeais tantôt de soleil ou d'hiver, faisant voller les parachutes des pissenlits ou les feuilles rousses. J'agitais les cervolants, mon rire était le carillon. Et rien ni personne ne pouvait m'arrêter.
J'ai charié des nuages, dansé avec eux, mais je me suis alourdie, chargée d'humidité à leur contact. Et les limites de mon monde sont soudain devenues bien plus concrètes.
Alors je suis devenue l'eau. J'étais maintenant le nuage, voguant à la dérive dans la troposphère, trop haut pour être attrapé. J'étais ballottée par les Zephirs, éparpillée par les Tramontanes, mais toujours je me reconstituais, coton de vapeur qui bientôt devint noir, chargé de pluie.
Alors je tombais au sol, en gouttes, espérant être avalée par la terre, mais je n'eus pas cette chance. Je recouvris le sol craquelé et dur, gisant dans les fissures de la terre qui refusait toujours de m'engloutir.
Avant que je ne le sache, l'hiver fut là et je gelais si fort que les failles s'aggrandirent, faisant place à la glace que j'étais devenue. J'étais battue par les vents du Nord qui chariaient grêle et flocons, mais ne cillais jamais, ni n'y n'accordais d'importance. L'hiver semblait sans fin, autant que la carapace en laquelle je m'étais changée.
Ma propre froideur me brûlait.
L'été arriva sans crier gare et les rayons du Soleil me sublimerent en vapeur d'eau, me libérant de mes entraves et je goûtais à nouveau à la liberté, redevenue brise estivale.
Mais l'été se fit ardent et embrassa tout ce qu'il lui était donné d'atteindre. De vent brûlant venu du désert je devins moi-même flamme, et me gorgeais de ce que je trouvais. Arbres, pairies, bosquets n'étaient jamais assez pour moi. Plus je dévorais et plus je brillais, puissante et vivante comme je ne l'avais jamais été, aveuglant et repoussant ceux qui auraient pu m'entraver. Ma conquête fulgurante fut cependant stoppée, et je fus domptée.
De la frénésie de mes festions interminables je fus privée, mais devint le feu du foyer. Celui qui doit être manipulé avec précaution, mais réchauffe les cœurs et les esprits quand le froid est là. Je brulais calmement, bûche après bûche, contente de ce que l'on me donnait. À d'autres moments j'étais la flamme vacillante de la bougie, qui guidait et tenait bon malgré les raffales de vent. Je dansais et ondulait au rythme des courants aériens, parfois m'éteignait avant de briller d'une lueur nouvelle, ravivée par l'air qui m'était donné.
Passé un temps, je mourrus et il ne resta de feu mon être comme seule trace que les cendres de ce que j'avais consumé.
On me rendit à la terre, qui cette fois-ci m'accepta, et puisa en moi pour nourrir ce qui poussait sur elle. Les saisons passèrent et je me confondis tout à fait avec elle, matrice de vie d'où s'élançaient les plantes après s'être abritées de l'hiver, où grouillaient incessamment insectes et êtres. Battues par les vents, par la pluie ou même sous un déluge de feu, je resta
is solidement ancrée, oscillant entre meuble et craquelée au rythme des saisons, mais supportant toujours ce qui avait pris racine en moi.
Le soleil et la lune m'éclairèrent longtemps, jusqu'à ce que je ne porte plus rien et me réduise irrémédiablement en poussière, épuisée par les années.
Alors, éparpillée pour de bon, je me dispersai au quatres vents.
Qui sait, le voyage est peut-être sur le point de recommencer ?
Ça faisait à peu près deux ans que j'avais l'idée en tête, et je suis contente de l'en avoir sortie : il y a bien assez des vers d'oreilles pour que j'ai en plus un vers d'écriture cérébral... J'espère que ça vous a plus! Si vous repérez des fautes, ou avez des critiques à faire, n'hésitez pas!
À la prochaine... Même si je n'ai aucune idée de quand ce sera.
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