mes questions.
26. mes questions.
Je prends l'assiette à dessert d'Ali et l'entasse avec les autres pendant que je la regarde sortir de table suivie de mon père. Je reste un instant immobile, les couverts sales entre les mains alors que je les entends parler :
— Cette leçon aurait dû être apprise le weekend dernier !
— Oui, papa...
— Tu m'as dit l'avoir fait, non ?
— Oui, souffle-t-elle, un peu honteuse.
— Donc tu m'as menti ?
— Mais je voulais jouer avec Hugo, moi.
— Ne mêle pas ton frère à cette histoire !
Leurs voix s'éteignent alors qu'ils entrent dans la chambre d'Ali pour travailler sur une leçon pour laquelle elle a une évaluation demain. Je me reprends alors et rejoins Noah qui est déjà dans la cuisine. En passant à côté d'elle, je lui embrasse la joue et lui dis :
— Merci pour ton aide ! Va te reposer, je m'occupe du reste.
Je pose ma charge sur le plan de travail au-dessus du lave-vaisselle, sous son regard interrogateur. Je lui souris et elle m'imite aussitôt. Elle me remercie tout bas et part à son tour.
— Votre dessert était délicieux ! s'exclame George dans mon dos alors que je suis penché, presque la tête dans le monstre pour mettre les assiettes au sale.
Faire ce cheesecake a été la meilleure idée que j'ai eue dans les dix dernières années. J'ai passé un moment vraiment agréable avec Noah à cuisiner et je ne parle même pas du bonheur d'Ali quand elle a su ce qu'on avait préparé. Tout le monde a eu l'air de se régaler et j'avais oublié la satisfaction et le bonheur que c'était de voir le plaisir de ceux qui mangent nos préparations. Je me redresse et nous nous faisons face.
— Et ce caramel maison... incroyable !
Je ricane au ton enthousiaste qu'il a utilisé.
— Ce n'est rien à faire, tu sais.
— Ne sous-estime pas ton travail ! C'était vraiment bon. Merci d'avoir pris le temps de nous préparer tout ça.
Je hausse les épaules. Je ne sais pas si je sous-estime quoique ce soit. Pour moi, ce n'était vraiment rien à faire. Tout le monde peut le faire. Ça n'a rien d'extraordinaire.
— Je suis content de voir que tu n'as rien perdu de tes talents de cuisinier.
Chacun de notre côté, nous rangeons la cuisine et quand nous arrivons à la fin, je regarde George mettre de l'eau dans la bouilloire.
— Tu t'es finalement mis au thé ? m'étonné-je en m'adossant au frigo.
— Oh non, toujours pas ! Jamais de la vie. C'est pour ton père.
Je l'observe préparer le mug, le thé, la cuiller... Tout ça avec précaution. Avec amour. Et je repense à ce que Wilson m'a dit. Au retour en Angleterre de mon père après ma naissance. A l'arrivée de George ici. Je ne sais rien d'eux, de leur histoire d'amour. Je ne sais rien de mon père quand il était à l'université...
— Vous vous êtes rencontrés comment avec mon père ? l'interrogé-je alors.
Il tourne sa tête vers moi, surpris que je lui pose cette question ;
— Ça dépend ce que tu entends par rencontre. J'étais dans la même promo que Nolan alors je l'avais croisé à plusieurs reprises mais lui ne m'a jamais remarqué.
— Et la première fois que vous vous êtes parlés ?
Il rit, en baissant les yeux sur la tasse qui n'attend plus que l'eau chaude.
— Sur un coup de chance, je crois. Sur une plage des Hamptons.
— Ça a été le coup de foudre ?
— Pour moi ? Oui. Pour lui ? Absolument pas.
— Pourquoi ?
Il souffle comme si je lui demandais la solution pour faire disparaître la faim dans le monde.
— Je suis un homme. J'ai toujours été un homme, me répondit-il sérieusement.
— Ça, c'est une évidence !
A nouveau, son rire résonne dans la cuisine.
— En effet, mais une évidence qui a été assez compliquée pour lui d'accepter.
J'ouvre grand les yeux, étonné par cette remarque. En voyant mon père avec George et sa famille, j'ai toujours pensé que ça avait toujours été simple pour lui.
— Pour résumer, c'était la première fois que ton père avait de l'attirance pour un homme. Et à ma connaissance, la dernière fois aussi, dit-il, souriant. Alors, il a dû... apprivoiser ces nouvelles sensations et nouveaux sentiments.
Le bouton de la bouilloire se déclenche, annonçant que l'eau est prête. Il l'attrape et commence à en verser tout en me demandant :
— Pourquoi ces questions ?
— Comme ça...
Je croise les bras et poursuis :
— Je me suis juste rendu compte que je ne savais rien de votre histoire. Des années que mon père a passé à New-York. De sa relation avec ma mère.
Il me jette un coup d'œil et je serais presque prêt à jurer que je vois de la méfiance mais aussi de la peur dans son regard.
— Je comprends.
Il remet la bouilloire à sa place avant de s'approcher de moi, à un mètre tout au plus. Il passe une main dans mes cheveux en me déclarant :
— Tout ce que je peux te dire, c'est que j'aime ton père de tout mon cœur et surtout que dès la première fois où il t'a vu, il t'a aimé de tout son cœur. C'est ça le plus important.
— Si tu le dis...
— Tu comprendras peut-être mieux quand tu seras plus vieux.
— Je l'espère...
Je me redresse et commence à m'éloigner pour rejoindre ma chambre quand il me retient par le bras. Sa prise n'est pas violente, elle est même douce, presque paternelle. Je me tourne un peu vers lui, sachant pertinemment qu'il veut me dire quelque chose.
— Tout au long de notre vie, on a essayé de faire les choses au mieux. Ça n'a pas toujours été facile ou possible. Mais je peux te jurer qu'on t'a toujours aimé. Tes parents plus que quiconque.
Tout en me mordillant l'intérieur de la joue, je lève les yeux au ciel. Le pire dans tout ça, c'est qu'il est sincère dans sa déclaration. Il le pense. Il pense réellement que mon père m'a toujours aimé, que ma mère m'aime toujours. Je me retire de sa poigne au même moment où il m'annonce :
— J'ai une salle à l'école qui vient de se libérer les vendredis après-midi, si ça t'intéresse.
— Pour faire quoi ?
— Tout ce que tu voudras.
— Je ne pense pas être capable de jouer comme avant.
— Rien ne t'oblige à jouer comme avant, affirme-t-il, sûr de lui. Il n'y aura que toi dans cette pièce.
Je déglutis tout en hochant la tête. Je me gratte l'arrière du crâne, ne sachant pas quoi penser de cette proposition. Depuis que je suis revenu à Barnard Castle, je n'ai pas réussi à toucher aux cordes de ma basse même si j'ai vraiment envie de m'y remettre mais une chose est sûre, je ne pourrais pas le faire ici alors qu'il y a toute la famille qui peut m'entendre.
— C'est combien ?
— Pour toi ? Rien du tout.
Je pince les lèvres, mécontent. Une salle dans l'école, c'est de l'argent pour George. S'il me la fait gratuitement, il perd de l'argent.
— Je ne peux pas accepter.
Mes pas m'éloignent rapidement de George quand celui-ci me crie :
— Du babysitting.
Alors que je suis déjà presque au couloir qui mène aux chambres, je me tourne vers lui. Il est dans l'entrée et me fixe avec espoir.
— Tu garderas les filles pour la Saint-Valentin en échange, OK ?
— OK...
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