Chapitre 34 - « Que venait-il de se passer ? »
Cela faisait des heures que Max était à la recherche de son livre de maths, mais il n'arrivait pas à mettre la main dessus. Perdre ses affaires ne lui ressemblait pas, il était bien trop organisé pour faire preuve d'une telle inadvertance. À son humble avis, il était bien trop contrarié pour son propre bien.
Parcourant les couloirs au pas de course, il passa un pan de mur et se retrouva dans le hall où il aperçut les boucles blondes d'Alexia au premier coup d'oeil. Il se précipita vers elle, entrant en collision avec un autre élève par la même occasion, mais s'excusa rapidement et reprit sa route.
« Alex ! »
Ce n'est que lorsqu'elle se tourna vers lui qu'il remarqua qu'elle était en compagnie d'un élève de Terminale. Celui-ci était plus grand de quelques centimètre et était la personnification même du stéréotype du skateur. Sa chevelure sombre s'alignait parfaitement avec la couleur de ses iris et il abordait une position nonchalante, mais une expression intéressée qui venait contredire le message qu'il voulait transmettre.
Le visage de Max devait parler pour lui car Alexia sourit et fit les présentations. « Max, je te présente Clément, il fait parti du journal du lycée. Clément, voici Max, un ami. »
Ce dernier tourna brusquement la tête vers elle, son sourire s'effaçant en même temps. Elle sembla elle aussi réaliser ce qu'elle venait de dire puisqu'elle l'observa avec une appréhension évidente. Max n'était pas sûr d'avoir bien entendu et d'avoir compris ce que ça voulait dire.
Un ami ?
Il fronça les sourcils et se racla la gorge. « Euh, je crois que je vais y aller finalement. » Il regarda Clément avec un petit sourire. « Ravi de t'avoir rencontré. »
Juste avant qu'il ne parte en direction de la bibliothèque, son regard accrocha celui d'Alexia. Son expression n'affichait plus aucune trace d'un sourire quelconque, mais il avait plutôt laissé sa place à la culpabilité. Elle le regardait avec regret et fit un pas en sa direction, mais Max était déjà parti.
N'importe qui dirait qu'il avait exagéré, qu'il n'avait pas à réagir de cette façon uniquement parce qu'elle l'avait désigné comme son ami et que ça ne voulait absolument rien dire. Pourtant, il sentait au fond de lui que ce n'était pas anodin et que c'était bien plus qu'un simple mot. Il avait l'impression que, par cette présentation, elle lui faisait passer un message.
Cela faisait des mois qu'ils sortaient ensemble et jamais elle ne l'avait présenter autrement que comme son petit-ami, même auprès de sa famille. Or, cela faisait déjà quelques temps qu'il avait l'impression qu'elle s'éloignait de lui et ce volontairement. Il était en train de la perdre, mais il ne voulait pas la perdre pour de bon.
Alors oui, lorsqu'elle l'avait présenter comme son ami à un parfait inconnu, il l'avait très mal pris.
Au comble de la frustration, il se passa une main sur le visage en soupirant et entra dans la bibliothèque, se dirigeant directement vers la table qu'occupait Lucas et Lucie. Alors que celle-ci travaillait tranquillement tout en l'écoutant d'une oreille, Lucas était en plein récit et accompagnait ses paroles avec de grands gestes. De temps à autres, il arrivait à lui arracher des sourires jusqu'à finir par la faire directement rire.
Même s'ils sortaient ensemble depuis déjà une semaine et demi, personne ne semblait s'en être rendu compte et ce tout simplement parce que c'était comme si leur relation n'avait pas changé. Ils se comportaient toujours de la même façon l'un envers l'autre, même si Lucas était tout de même bien moins maladroit. Ils attendaient donc tous avec impatience que les autres élèves le remarquent et que les questions fusent de toutes parts.
Max posa brutalement son sac sur la table en les faisant sursauter par la même occasion et se laissa tomber sur la chaise avec une mine renfrognée. Ses amis échangèrent un regard interrogatif quand il n'ouvrit pas la bouche et se contenta de fusiller la table du regard.
Lucas se pencha en avant sur la table et observa prudemment son meilleur ami. « Max ? Qu'est-ce qu'il y a ? »
Mais la colère était désormais monté à la tête de ce dernier et il dirigea son regard vers lui alors qu'il n'avait rien fait pour. « Quoi qu'est-ce qu'il y a ? Vous pouvez pas me laisser tranquille sérieusement ? »
Et il se leva sans une parole de plus, s'enfonçant dans les rayons de la bibliothèque en trainant des pieds.
Lucie qui avait assisté à l'échange avec stupéfaction s'apprêtait à prendre la parole, mais fut interrompue par l'arrivée en trombe d'Alexia qui regardait frénétiquement autour d'elle et qui avait la respiration courte après avoir couru pour venir jusqu'ici.
« Vous n'auriez pas vu Max ? »
« Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » Lui demanda Lucie alors que Lucas montrait du doigt la rangée de livres dans laquelle son meilleur ami avait disparu.
La blonde déglutit et baissa les yeux. « J'ai déconné. »
Elle ne leur laissa pas le temps de poser plus de questions et prit la direction que Lucas avait montré. Après avoir cherché dans plusieurs allées, elle trouva Max près des livres sur la Guerre Froide, mais qui ne semblait pas pour autant intéressé par ceux-ci.
« Max, » elle s'approcha rapidement de lui, « laisse-moi t'expliquer. »
Elle eut presque un mouvement de recul lorsqu'il se tourna vers elle. Ses yeux reflétaient un mélange de colère et de tristesse et les deux étaient dirigées à son encontre. Alexia sentit son coeur se serrer puisqu'elle savait pertinemment que c'était de sa faute.
« Te laisser expliquer ? » Son ton était dur et froid. « Je t'en pris, explique-moi pourquoi tu te comportes avec indifférence ces derniers temps et pourquoi je suis soudainement redevenu ton ami. »
« Avec indifférence ? » Elle fronça les sourcils sans comprendre. « Mais de quoi est-ce que tu parles ? Je ne me- »
« Oh allez Alex, » la coupa-t-il avec une grimace, « on sait tous les deux que c'est le cas. Dès que je propose de faire quelque chose tu dis non, tu passes de moins en moins de temps avec moi et c'est presque comme si tu m'évitais. Alors pourquoi ? »
Alexia était bouche-bée, elle ne savait vraiment pas quoi lui répondre. Elle ne comprenait pas pourquoi il s'imaginait de telles choses.
Il dut interpréter son silence de la mauvaise façon car il recula d'un pas, l'expression plus fermée que jamais. « En fait, tu n'en as absolument rien à faire de nous deux. »
Elle écarquilla les yeux avec choc. « Quoi ? Mais bien sûr que si ! »
Mais Max ne l'écoutait déjà plus, il n'arrivait plus à croire ce qui sortait de sa bouche. Dépité, il se passa une main dans les cheveux en la contournant, alla récupérer son sac et sortit de la bibliothèque sans un mot.
Alexia rejoignit Lucie et Lucas comme dans un état second et s'installa sur une chaise en ressassant ce qui venait de se passer. Elle n'arrivait pas à y croire.
« Très bien, pour la dernière fois, qu'est-ce qu'il s'est passé ? » Demanda Lucie qui était plus perdue que jamais.
L'émotion qui se reflétait dans les yeux noisettes de la blonde lui donnait envie de la prendre dans ses bras et de ne plus la lâcher. « J'ai dit à quelqu'un que Max était mon ami et il l'a mal pris. »
« On peut pas vraiment lui en vouloir, mais déjà pourquoi est-ce que tu as dit qu'il n'était que ton ami ? » S'enquit Lucie qui trouvait cette situation étrange.
« J'en sais rien, c'était un réflexe ! »
Alexia se prit la tête entre les mains. Lucie s'en voulait déjà de la réponse qu'elle allait lui sortir, mais son rôle était de lui dire la vérité. Elle n'aimait pas la voir dans cet état, ça pesait sur le moral exactement comme à la fin de l'hiver après avoir enchainer des jours et des jours de grisaille sans que le soleil ne pointe le bout de son nez une seule fois. Elle qui était d'habitude si joyeuse et si rayonnante.
« Ça ne peut pas être un réflexe Alex, pas après autant de temps. »
Elle se mordit la lèvre et ouvrit la bouche pour ajouter quelque chose, mais fronça les sourcils. Elle se tourna vers sa droite et regarda Lucas qui les observait toutes les deux avec les yeux plissés et hochant doucement la tête.
« Lucas ? » Il dirigea son regard sur elle. « T'as pas quelque chose à faire ? »
Mais il secoua la tête, n'ayant visiblement pas compris ce qu'elle sous-entendait réellement. « Pas dans l'immédiat non. »
Elle leva les yeux au ciel. « Je vais reformuler. On essaye d'avoir une conversation entre fille donc à moins que tu aies eu une prise de conscience dans la nuit et que tu t'identifies désormais au sexe féminin, va t'en. »
Il écarquilla les yeux. « Oh, tu veux que je parte en fait ? »
Lucie dut se faire violence pour ne pas souffler d'exaspération et se contenta d'hocher la tête. « Oui, c'est précisément ce que je veux. »
« Très bien, » il rassembla ses affaires tout en gardant la tête haute pour l'effet dramatique, « si c'est comma ça je vais aller jouer au Scrabble avec Matteo. »
Elle ouvrit plusieurs fois la bouche avec choc avant de cligner des yeux et de secouer la tête. « Attend, quoi ? Vous allez faire un... Scrabble ? »
Un sourire en coin apparut sur ses lèvres. « Nan je déconne, on va travailler sur un nouveau projet. »
Et avant que Lucie ne puisse lui poser plus de questions sur ce fameux projet, il tourna les talons et s'éloigna avec une expression témoignant de toute la fierté qu'il éprouvait.
Lucie, elle, resta figée pendant quelques secondes. Que venait-il de se passer ?
Cependant, elle revint rapidement à la réalité lorsqu'Alexia posa la tête sur ses bras avec un soupir. « Qu'est-ce que je vais faire ? Je ne comprends par pourquoi il dit que je m'éloigne de lui alors que c'est faux. »
« La question que je vais te poser ne va peut-être pas te plaire, » commença-t-elle en pinçant les lèvres, « mais est-ce que tu veux toujours être avec lui ? »
La blonde releva la tête avec de grands yeux, interpellée. « Bien sûr que oui, tu sors ça d'où ? »
« Et bien, je ne sais pas, mais s'il dit que tu t'es éloignée de lui c'est que c'est le cas. » Elle hésita une seconde puis se pencha en avant. « Tu l'aimes ? »
Cette question fit l'effet d'une bombe.
À vrai dire, Alexia n'y avait jamais vraiment pensé. Non pas parce que c'était impossible, mais parce qu'elle était tellement bien avec lui qu'elle prenait juste les choses comme elles venaient sans se poser plus de questions.
Mais maintenant que Lucie lui la posait, qu'est-ce qu'elle allait répondre ? Et surtout, qu'est-ce qu'elle ressentait pour lui ? Étrangement, elle n'eut pas besoin de réfléchir longtemps pour connaitre la réponse.
« Oui. »
Lucie posa les mains à plat sur la table et s'adossa à sa chaise. « Alors va lui dire. »
« Lui dire ? » Bégaya-t-elle en évitant son regard. « Je ne suis pas sûre que ce soit la bonne chose à faire. Non, ce n'est définitivement pas une bonne idée. »
« Oh je t'en prie Alex, » rétorqua Lucie en levant les yeux au ciel, « de quoi est-ce que tu as peur ? Ça fait des mois que vous sortez ensemble et des années que Max est dingue de toi. Tu ne risques rien à lui dire ce que tu ressens. »
« Mais aimer quelqu'un ce n'est pas la même chose que d'avoir un crush. » Murmura-t-elle en jouant avec ses doigts.
« Je sais, » acquiesça-t-elle en essayant de capter son regard, « mais je sais aussi qu'il n'aurait pas réagi comme ceci s'il ne t'aimait pas en retour. Il faut que tu lui parles. »
« Il ne m'écoute pas. »
« Alors force-le à le faire, sinon tu vas le perdre et ça m'étonnerait que ce soit ce que tu veux. »
Lucie observa sa réaction et comprit qu'elle avait touché un point lorsque sa meilleure amie hocha la tête. « Je vais aller lui parler. »
« Bien, mais pas tout de suite d'accord ? Laisse lui le temps de prendre du recul sur la situation. » Alexia acquiesça une nouvelle fois et se leva en reprenant son sac. « Tu vas où ? »
« Au journal, on a une réunion pour le prochain numéro. »
Et sur ces paroles, elle partit l'air toujours moins paniqué et morose que lorsqu'elle était arrivée.
Lucie, quant à elle, regarda autour d'elle avec sidération. « Et je fais quoi moi maintenant que je suis toute seule ? »
Ω
Un meurtre.
Voilà ce qui allait se passer, Lucie allait faire un meurtre. Et comme une fois n'était pas coutume, la victime allait être Lucas. Seulement, contrairement à d'habitude, ce n'était pas à cause d'une de ses blagues, c'était bien pire.
Par sa faute et uniquement par sa faute, elle avait été collée.
L'histoire était assez simple en réalité. Plus tôt dans la journée, ils étaient en cours de sciences à travailler en binôme sur la dissection d'un oeil. À défaut de l'habituel encadrement strict du cours, Lucas avait décidé de prendre un peu plus de libertés et s'amusait de tout et de rien. Lucie, n'étant déjà pas particulièrement fan de la leçon du jour, avait très moyennement apprécié lorsqu'il avait décidé d'approcher un peu trop près l'oeil de son visage.
S'étaient enchainés cris et rires sous le regard médusé du professeur qui n'avait pas tardé à devenir rouge de colère et à leur donner à chacun deux heures de retenue.
Voilà pourquoi Lucie restait silencieuse tout en planifiant mentalement l'homicide parfait alors qu'ils attendaient en salle de retenue que le surveillant arrive. Lucas, qui était parfaitement à l'aise et qui faisait comme s'il était chez lui à force d'habitude, essayait désespérément de lui arracher les mots de la bouche.
Mais en vain.
« Je suis sûr que si le prof de littérature se chargeait des colles, il en profiterait pour monter une pièce de théâtre. » Commenta-t-il en se balançant sur sa chaise.
Cependant, il s'arrêta rapidement, frustré par l'absence de réponse que recevaient ses remarques. Au lieu de quoi, il retourna sa chaise et s'assit face à elle, les avant-bras posés sur le dossier.
« Tu sais, le traitement du silence ne résout jamais rien. » Il pencha la tête sur le côté avant d'ajouter, « Et puis c'est trop silencieux à mon goût. »
Lucie haussa un sourcil, mais n'ouvrit pas la bouche pour autant même si de nombreuses remarques lui venaient en tête.
« Tu vois, c'est le moment où tu me dis que c'est parce que je suis incapable de fermer ma bouche plus de deux secondes. » Répliqua-t-il en se renfrognant.
Ce serait mentir que de dire qu'elle ne prenait pas un malin plaisir à le voir batailler de cette façon. Elle lui en voulait, certes, mais elle avait aussi beaucoup envie de rire. Son comportement était tellement ridicule et désespéré.
« Allez Lucie ! Arrête de m'ignorer et parle-moi. » Il soupira une nouvelle fois. « D'ailleurs cette retenue n'apparaitra même pas sur ton dossier et tes parents n'auront même pas à le savoir. »
Cette fois-ci, elle ne put s'empêcher de le fusiller du regard. Même si c'est retenue n'était là que pour la forme, le principe était le même. Elle était collée alors qu'elle aurait pu être à son cours de danse et ce uniquement par sa faute.
Lucas déglutit et se redressa. « Je suis désolé, d'accord ? Ce n'était pas mon objectif. »
Malheureusement, son air peureux laissa rapidement sa place à un sourire malveillant et Lucie eut tout juste le temps de se protéger avec ses mains qu'il se jetait sur elle.
« Ah non hein, » cria-t-elle en le repoussant, mais il était plus fort qu'elle, « lâche-moi. Tes excuses sont bidons. »
Mais Lucas n'était pas décidé à la lâcher. S'il n'arrivait pas à la faire craquer en lui parlant, alors il pouvait au moins essayer de la faire rire. Et ce fut le cas, plus les secondes passaient et plus les protestations de Lucie manquaient de convictions. À vrai dire, elle avait le sourire aux lèvres.
« Sérieusement, lâche-moi Lucas. »
Mais il secoua la tête.
« Ça va comme on veut les amoureux ? »
Ils relevèrent la tête d'un même geste et aperçurent Matteo qui entrait dans la pièce, comme si c'était la chose la plus naturelle à faire en fin de journée. D'autres élèves de plusieurs niveaux prirent eux aussi place dans la salle.
« Qu'est-ce que tu fais là ? » Lui demanda Lucas en s'installant à nouveau sur sa chaise.
Il haussa les épaules, jeta son sac sur une table et s'avachit à sa place. « Le prof de sport m'a collé. »
Lucie fronça les sourcils. « Pourquoi ? »
Il se tourna vers elle avec un air mystérieux qui ferait peur à plus d'un. « Crois-moi, tu ne veux pas le savoir. C'est toi qui nous surveille ? »
« Non. » Elle jeta un regard glacial à Lucas qui ne put réprimer un frisson. « Je t'en veux toujours. »
La porte s'ouvrit à nouveau, mais cette fois-ci sur le professeur de littérature qui entra dans la pièce en sifflotant. Il s'arrêta devant son bureau et se tourna vers les élèves en écartant les bras. « Que diriez-vous que de recréer la fameuse pièce de Molière, Le Malade Imaginaire ? »
Un grognement collectif se fit entendre dans la pièce alors que Lucie ouvrait la bouche avec choc.
« Tu vois, je te l'avais dit. » Commenta Lucas avec un grand sourire.
Nombre de mots : 2887
Je suis vraiment désolée pour cette attente de quasiment deux mois, mais j'ai un gros problème de gestion du temps et de page blanche. D'ailleurs, voilà pourquoi ce chapitre est plus court.
Sachez que les chapitres se feront plus rare jusqu'à septembre, mais reprendront leur cours normal après. Nous finirons donc ce tome et après on enchainera sur les autres projets.
6 chapitres.
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