Chapitre 7
" C'est comment, en dehors de cette île ? "
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Les gardes nous balancèrent dans une cellule sans aucune douceur. C'était la même cellule que toutes les fois précédentes. Cette cellule allait me hanter jusqu'à la fin de mes jours, puisque j'allais mourir dans moins d'une semaine, si mes calculs avaient été bons.
Ce n'était pas simple de compter les jours lorsqu'on était enfermée dans une pièce sans fenêtre, donc en ayant aucun repère solaire ou lunaire. Si j'avais pu comprendre mes rêves, j'aurai sûrement pu être dans une autre situation plus confortable que d'être enfermée dans cette salle.
Kachi se jeta vers la sortie mais le mur invisible avait déjà été placé et c'était peine perdue, même avec le Dieu en moi j'avais eu du mal à détruire cette barrière invisible.
Il n'avait pas l'air de vouloir le comprendre puisque pendant plusieurs heures, il continuait de frapper sans s'arrêter contre cette parois transparente. Je le laissais se défouler sur le mur invisible sans tenter de l'arrêter.
Les gardes qui nous avaient jeté dans la pièce restaient en face de l'entrée pour nous surveiller, nullement inquiet de la violence dont faisait preuve Kachi.
Au bout d'un moment, épuisé, Kachi arrêta de marteler le mur invisible et vint s'asseoir à côté de moi. Plusieurs minutes s'écoulèrent avant qu'il ne se décide à parler.
- Merci de m'avoir sauvé. Mais il y a quelque chose que je ne comprends pas, pourquoi l'as tu fait ? Après tout, j'ai exterminé tes amis et je t'ai gardé enfermée ici. Alors pourquoi ?
Il se tourna vers moi pour me regarder dans les yeux. Son regard était d'une intensité qui me troublait. Mais je me contentai de hausser les épaules.
- Je n'avais pas envie de voir quelqu'un mourir sous mes yeux et je ne voulais pas vivre avec des remords en me disant "J'aurai pu le sauver".
- Qu'est-ce que ça change que je meurs ou non ? Personnellement, ne m'en veux pas, mais moi, je t'aurai laissé mourir, je n'aurai pas essayé de te sauver.
- C'est bien ça le problème chez vous. Vous tuez pour des raisons absurdes, lorsque vous en avez, et ce n'est pas toujours le cas. Nous, dans notre religion, si on tue, c'est que c'est la seule solution. On ne fait pas ça pour le plaisir. Et c'est pour ça que je vous déteste, vous, les Azyas.
- Tu es un Azya aussi, me fit-il remarquer.
- Je n'en ai pas la mentalité. Je suis bien contente que ma mère soit partie et que je ne sois pas née ici.
Il me regarda un instant, essayant sûrement de décrypter mon expression puis il demanda :
- C'est comment, en dehors de cette île ?
Je fus surprise par sa question. Je m'attendais à ce qu'il défende sa tribu, ses origines mais au lieu de ça, il voulait savoir comment c'était le monde extérieur.
- Dans mon école, à Preston, on était comme une famille. J'avais des amis sur qui je pouvais compter, je savais qu'ils seraient toujours là pour moi. La preuve, ils sont morts en essayant de me protéger. On passait nos soirées ensemble, juste à parler, à rigoler. On s'entraidait pour les devoirs.
... J'étais heureuse de ces petites choses simples. Dans le monde, il y a de la misère, certes, mais il y a aussi beaucoup de bonnes choses. Boire un chocolat chaud, aller au parc d'attraction, ce genre de chose nous comble de bonheur.
... Ici, tout ça, ça n'existe pas et je trouve ça dommage parce que c'est vraiment quelque chose à faire dans sa vie. Et on a l'impression que rien ne vous satisfait. Comme si vous ne pourriez jamais connaître ce qu'est le bonheur.
- Ici, c'est différent, tu as raison. Dès notre plus jeune âge, on est envoyé dans différentes catégories qui sont censées nous être destinées. Il y a la catégorie médecin, travailleur, guerrier et mage. Il existe aussi la catégorie prêtre mais rare sont ceux qui y ont accès. Ensuite, toute notre vie on est formé pour devenir ce à quoi nous sommes destinés.
- On dirait que vous êtes au Moyen-Âge ici.
Kachi allait me répondre lorsque des bruits se firent entendre à l'extérieur. On s'approcha de la porte et on essaya de discerner ce qu'il se passait. Des gardes arrivèrent et tuèrent les gardes qui étaient en train de nous surveiller. Je poussai un cri en voyant la lame d'un garde transpercer le corps d'un autre.
- Pourquoi faites vous ça ? demanda un des gardes qui essayait de sauver sa peau.
- La reine a dit que vous saviez trop de choses et nous a ordonné de vous tuer.
Le soldat trancha la gorge de l'homme à qui il venait de répondre et les deux gardes qui nous surveillaient étaient étendus sur le sol, se vidant doucement de leur sang.
Je restai paralysée devant la scène. La gorge tranchée de l'homme me rappelait la scène de la mort de ma mère. Je ne pouvais plus bouger, je n'arrivais plus à réfléchir correctement ni à prononcer le moindre mot.
Les deux gardes qui étaient arrivés pour tuer les deux précédents se placèrent au même endroit pour nous surveiller, avec les cadavres à leurs pieds, comme s'ils n'existaient pas, comme si la scène qui venait de se dérouler ne s'était jamais passée.
Kachi me prit par les épaules pour me faire reculer. Il me fit asseoir contre le mur en face de la scène puis se mit devant moi pour me cacher la scène d'horreur qui se trouvait devant notre cellule. Je le voyais sans vraiment le voir.
- Comment peuvent-ils faire ça ? S'entretuer dans une même tribu, tuer ses propres compagnons. Et comment cette Koya pouvait-elle ordonner ça simplement parce qu'ils étaient au courant pour son escroquerie ? demandai-je à voix basse, n'ayant pas la force de parler plus fort.
- Je ne sais pas. Moi non plus je ne comprends pas.
- Tu as toujours aveuglément confiance en elle ?
- Non. Je sais qu'elle n'a fait que mentir sur ses soi-disants pouvoirs et grâce à ce qui vient de se passer, je sais aussi qu'elle tue sans hésitation. Et dire que tu avais raison depuis le début.
Je ne répondis pas. Je n'arrivais toujours pas à croire ce qu'il venait de se passer. Le chef et elle étaient exactement les mêmes. Je ne savais pas ce qu'était devenu le chef d'ailleurs. Je détestais leur façon de penser, de faire, de parler de façon hautaine. Je détestais tout en eux.
Comment pouvaient-ils avoir aussi peu de compassion envers autrui ? Quand je sortirai de cette cellule, je tuerai ces deux horribles personnes.
Il fallait que je trouve un plan pour m'évader. Je ne pouvais pas être sacrifiée. Je savais que dès que je serai morte, Kachi sera exécuté.
Je ne pouvais pas leur laisser le plaisir de me tuer pour ressusciter leur Dieu. Je devais retourner à l'école pour essayer de réparer les dégâts que j'avais causé. Je devais encore faire énormément de choses, je ne pouvais pas mourir ici, ce serait la solution la plus facile.
Je me levai sous le regard surpris de Kachi et je partis, à mon tour, tambouriner cette fichue parois invisible.
Je savais que comme je n'avais pas de Dieu en moi, je n'arriverai pas à la détruire mais je frappai encore et encore. Je sentais un peu de mon énergie s'évaporer à chaque coup que je donnais.
Il y avait un nouveau sortilège sur ce mur qui n'avait l'air de fonctionner que sur moi, puisque Kachi n'avait pas ressenti ça.
Le mur invisible prenait de mon énergie à chaque fois que j'entrai en contact avec lui et il l'utilisait contre moi. Il devenait plus solide. Il utilisait ma propre énergie pour augmenter sa puissance.
Le mage qui avait construit ça était réellement puissant. Je n'avais jamais vu ce genre de sortilège avant.
Je continuais tout de même de frapper ce mur qui nous tenait prisonniers. Je tapai jusqu'à l'épuisement. Je m'évanouis de fatigue, mon corps était trop faible.
La dernière chose que je vis fut Kachi se jeter vers moi pour essayer de me rattraper alors que je tombais au sol et les gardes à l'extérieur qui, eux, ne bougeaient pas d'un pouce.
Ma tête frappa sur le sol et mon regard était tourné et à la même hauteur que les cadavres des soldats qui en savaient trop, baignant dans leur sang.
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