"  Quel genre de monstre es-tu ? "

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  Alors que je pensais que ma remarque allait le faire réfléchir ou changer d'avis, j'eus l'effet contraire : il avait l'air amusé.

- Qu'est-ce qu'il y a d'amusant dans ce que je viens de dire ? demandai-je avec haine.

- Tu dis que notre île est une prison alors que tu vis dans un lycée, enfermée par des murs alors que nous, nous avons une île et c'est la mer qui nous entoure.

- Ça n'a rien à voir !

- En quoi ?

Je n'avais pas d'argument à donner sur le moment mais ce que je savais, c'était que je ne voulais plus de lui dans ma maison. Déjà qu'ils me gardaient sur cette île sans mon accord et qu'ils avaient tué tous mes amis, je voulais juste être seule et qu'on me laisse tranquille.

- Sors, ordonnai-je.

Il restait planté face à moi. N'avait-il pas honte de rester ainsi devant moi après tout le mal qu'il m'avait fait ? Le souvenir de ma mère et de mes amis ne cessaient de hanter mon esprit et la haine que j'éprouvais pour les Azyas ne cessait d'augmenter. 

Sans même m'en rendre compte, je sentis ma personne se mettre en retrait dans mon corps. Apollon prenait possession de mon corps. J'étais heureuse qu'il ne m'ait pas laissé tomber dans ces moments difficiles. Au moins, lui, ne me laisserait jamais tomber..

- Pourquoi tes yeux sont-ils devenus noir ? me demanda le chef de la tribu, étonné et inquiet.

Mes yeux étaient noirs ? Qu'est-ce qu'il se passait ? Quand Apollon venait, mes yeux étaient blancs et non pas noirs. D'un geste de la main, l'homme se retrouva par terre, en dehors de ma maison. Puis je repris possession de mon corps.

- Qu'est-ce que tu as fais ?! cria le chef.

Il était maintenant en colère. Il avait été projeté par terre, en dehors de chez moi et il était assis sur le sol. Il se releva et il se rua sur moi mais il resta bloqué sur le seuil de la porte. Il n'arrivait pas à entrer, comme si un mur invisible avait été placé à l'entrée de ma maison. Il me regarda droit dans les yeux avec haine.

- Quel genre de monstre es-tu ? me lança-t-il.

Il partit sans plus me regarder. J'étais fière de moi d'avoir réussi à faire un sortilège tel que celui-là mais il avait raison. Quel genre de monstre étais-je ? Mais la plus grande question restait toujours la même : Qui étais-je ? 

Dans tous les cas, je n'avais pas le temps d'y penser maintenant, je devais m'évader et au plus vite. Je voulais partir le soir même. 

Je ne pouvais pas rester vivre ici un jour de plus, d'une part parce que je n'étais pas chez moi, je n'avais rien à faire ici, d'une autre part parce que je n'aimais pas cette tribu aux traditions bizarres et enfin, je ne voulais pas être sacrifiée pour ressusciter je ne savais pas quel Dieu. 

Il fallait que je m'en aille maintenant, je ne supporterai pas de rester une journée de plus sur cette île.

Je pris ma fiche de note que j'avais faite avant d'aller manger à l'aide des documents de ma mère et je sortis de mon chez moi après avoir vérifié que la voie était libre. Je courrai et je pénétrai dans la forêt luxuriante. 

J'avais repéré sur ma fiche la sortie qui me donnait le plus de chance de m'en aller. Je courrai dans la forêt en ayant pour seul bruit que celui de mes pas.

Je traversai, comme j'avais vu sur la carte qu'avait dessiné ma mère, la petite rivière qui divisait la forêt en deux. Je sautai de roches en roches pour éviter de me mouillée ou d'être emportée par le courant. 

Je devais me dépêcher avant que quelqu'un remarque mon absence et qu'on lance des recherches pour me retrouver. Je n'avais que peu de temps.

Je voyais la plage et un élan d'espoir gonfla mon coeur. J'y étais presque. Encore un peu et je serais libre. Alors que j'allais poser mes pieds sur le sable, je fus stoppée sec. Je venais de rentrer dans quelque chose d'invisible. 

J'essayai une nouvelle fois mais rien à faire, il y avait comme un mur invisible, comme celui que j'avais créé pour empêcher le chef de la tribu de m'atteindre. Si j'avais réussi à le créer, je devrais réussir à l'enlever.

Je formais une boule sur chacun de mes poings. Maintenant, je connaissais ce sortilège à la perfection grâce à Mia. Je frappai de mes deux mains le mur mais une charge électrique se dissipa dans mon corps. 

La puissance était tellement forte que je m'évanouis sur le coup sans avoir rien pu essayer d'autre.

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Je me réveillai dans cette cellule. La cellule dont j'avais tant rêvé. La cellule qui me hantait depuis mon arrivée à Preston. Je réussis à m'asseoir et un mal de tête me donna l'impression que mon cerveau était compressé. 

Je portai mes doigts sur mes tempes et j'essayais d'utiliser un des sorts de guérison que Mia m'avait appris pour essayer de faire passer la douleur mais rien ne se passa, j'avais toujours aussi mal. 

C'était à ce moment que je remarquai que quelqu'un était assis sur une chaise au milieu de la pièce et que la personne me fixait. Je stoppai immédiatement tout mouvement.

- Pourquoi suis-je ici ?

- Tu t'es enfuie donc le chef a décidé de t'enfermer dans cette cellule car c'est plus prudent. Tu dois être en vie et ici pour la prochaine pleine lune.

Je me levai avec rage. Ils voulaient me garder enfermée dans cette cellule pendant trois semaines ! Je me jetai sur la personne mais mon corps ne me répondait plus. Je compris immédiatement que la personne assise sur la chaise était la personne qui avait assassiné mes amis.

- J'ai pour ordre de ne pas te faire de mal alors reste sage et facilite moi la tâche. Moi aussi je ne veux pas de cette situation, tu crois que ça me plait de surveiller une gamine ?

- Pourquoi tu obéis alors ? Laisse moi partir et tu seras tranquille.

Son rire résonna dans la petite pièce.

- Si je te laisse t'enfuir, on me fera la peau.

- C'est ironique, vous avez peur de mourir mais pas de vous sacrifier. Vous êtes bizarres.

- Personnellement, je n'y crois pas à ce mythe de résurrection. Il faudrait être fou pour croire que deux personnes "humaines" suffisent pour ressusciter un Dieu. Si c'était possible, depuis longtemps que ça aurait été fait.

- Pourquoi les laisses-tu faire alors ? Ils vont tuer ton camarade.

- Je n'y peux rien, personne ne me croira et puis la parole du chef est beaucoup plus précieuse que la mienne. Tu crois vraiment que je peux avoir une quelconque influence sur la tribu Azya alors que mon pouvoir est le pouvoir de la manipulation des corps ?

- Le pouvoir de la manipulation est puissant, ou en tout cas tu sais très bien l'utiliser, donc tu peux très bien réussir à les convaincre ! Tu peux développer ta magie afin qu'elle s'étende à plus que les corps !

- Je suis une mutation du Dieu Xochipilli, dieu de l'amour et de la beauté, comment veux-tu que j'ai une quelconque influence ?

Je me retins de rire. Lui ? Le gros dur qui avait décimé toute l'armée de Nicolas et qui arrivait à plier mon corps sous ses volontés, descendait du pouvoir de l'amour. Si ce n'était pas ironique.

Je pensais qu'à cause du fait qu'il soit la représentation du Dieu de l'amour, il avait subi durant son enfance des moqueries. 

En tout cas, c'était ce que je comprenais lorsqu'il parlait, dans ses propos, dans son intonation. Je sentais qu'il n'aimait pas cette tribu. Peut-être est-ce qu'il la détestait autant que moi ? 

Si c'était le cas, je pourrai m'en faire un allié. J'allais devoir y travailler. J'allais devoir surmonter ma colère contre lui, celui qui avait tué mes amis parce que je devais m'en sortir. Je devais retourner sur ma terre natale.