- Chapitre 36 -
[ADRIEN]
« AH ! »
Appuyé sur mes mains, quelques gouttes glissant sur mon front ruisselant de sueur, mes sens pris totalement au dépourvu, je me réveillai paniqué. Aujourd'hui, un mauvais pressentiment s'emparait de moi. Et cherchant une excuse sur mon état étrange, je pensais que c'était en rapport avec Manon – l'idiotie de l'Amour, sans doute.
Je me repris dans la seconde, tout en n'oubliant pas de m'agacer : mettre cette appréhension sur son dos, c'était tiré par les cheveux !
D'ailleurs, allait-elle bien ? Ces derniers temps, elle ne semblait pas au top de sa forme : ses prunelles devenues sombres, surplombant des cernes très creux, et ses traits plus rigides, accompagnés d'un teint pâle, une seule expression dominait son visage et ce n'était certainement pas celle de la joie.
Je passai ma main sur ma tête, frottant ainsi mes yeux, pour me donner un semblant d'énergie et la vague impression de pouvoir affronter cette journée, qui s'annonçait catastrophique. Mais en ne me retenant pas de soupirer : m'inquiéter ne servait à rien, puisque notre relation n'avançait pas d'un pouce et restait à un point mort, voire inexistant, à mon plus grand désespoir.
Et puis, Manon s'était...
Rouge de honte, je m'allongeai sur mon lit et essayai de me « cacher » sous mon oreiller. Ma gêne extrême dissimulée, je me traitais vivement de crétin, d'abruti et de je-ne-savais-quoi encore. De nouveaux surnoms plus flatteurs les uns que les autres suivirent.
« Non, mais quel débile je suis ! marmonnai-je, toujours aussi embarrassé par moi-même. Pourquoi est-ce que je suis passé devant elle ?! Si j'avais été derrière, j'aurais sûrement pu la rattraper, alors qu'elle s'évanouissait ! Débile, débile ! Et pourquoi je ne lui ai pas parlé plus tôt ?! J'aurais remarqué son comportement suspect ! AAAAH ! »
Je me frappai avec l'oreiller, imaginant pouvoir m'enfoncer dans le matelas et disparaître ainsi de la surface de la Terre. Finalement, j'abandonnai mon idée farfelue de me rendre invisible et balançai l'oreiller à l'autre bout de la chambre, espérant que ma toute ma confusion était dedans et me laisserait tranquille. Je fixai le plafond et chuchotai :
« Je suis même pas un débile, mais carrément un quadruple débile sur pattes. »
Calmé, puis expirant de façon forcée une dernière fois, je pris mes vêtements et me rendis dans la salle de bains. Propre comme un sou neuf, la cuisine m'accueillit à bols ouverts pour me remplir la panse avec un bon petit-déjeuner.
Lorsque je retournai me brosser les dents, mon estomac satisfait, je croisai Jérémie qui me souffla, bâillant sans aucune retenue, les cheveux en pétards et grattant son ventre :
« B'jour, A'ien...
- Bonjour, Jérémie. Bien dormi ?
- Bof..., répondit-il nonchalamment, massant sa nuque. Je sens que cette journée va être pourrie... »
Au moins, je n'étais pas le seul à le deviner. Ça ne me rassurait que de moitié.
•••
En arrivant à l'arrêt de bus, je compris à quel point notre prédiction familiale était véridique.
Bien que tous fussent séparés en plusieurs groupes, les élèves présents discutaient d'une seule et même chose : une affaire avec la police qui s'était déroulée hier soir.
Afin d'en savoir plus, je m'approchai – et n'étais pas heureux de ma décision – des filles qui me reluquaient les fesses, l'autre jour. Normalement, elles ne me refuseraient rien.
« Eh, salut, commençai-je avec mon sourire et le faux air de « garçon cool » que je devais me trimballer, quand elles me virent avancer dans leur direction. Je peux vous demander un truc, les filles ? »
Elles acquiescèrent dans un mouvement commun, toutes fascinées par « moi ». Je montrai alors mes dents de plus belle, ce qui les rendit davantage heureuses.
Bon sang, je haïssais jouer au petit con dès le matin.
« Vous parliez de la police, non ? repris-je aussi bêtement qu'auparavant. Il s'est passé quoi, au juste ?
- Oh, c'est quelqu'un qui en a parlé sur les réseaux sociaux, expliqua la plus grande, en haussant les épaules, comme si c'était une évidence. Ses parents l'avaient forcé à venir à une soirée chiante, puis la police à débarquer pour emmener un couple marié.
- Il a même posté une photo d'eux ! s'enthousiasma la deuxième, contente de son scoop. Tu veux la voir ?
- Pourquoi pas. »
À ces mots, la métisse se dépêcha de se rendre sur Facebook et de retrouver le post en question. Déniché, elle pivota l'écran de son téléphone vers moi, très fière de son illustre personne et se félicitant – c'était vrai que récupérer une publication sur Facebook était une tâche très compliquée et pas accessible à tout le monde, hein.
Quand mon regard se posa sur l'image numérique, mes lèvres partirent en bas et je tirai alors une figure incompréhensive. Les filles m'imitèrent ensuite, ne comprenant pas ce changement radical et la douche froide que je me prenais en ce moment-même.
Sur la photo, les personnes arrêtées par les policiers étaient les parents de Manon.
« Ça va pas ? interrogea soudainement la dernière de leur bande, jusque-là muette comme une carpe. Tu les connais ?
- Oui... Enfin, non ! me corrigeai-je dans la seconde, mes mains levées et prêtes à me servir de bouclier. Non, ils ne me disent rien ! Tiens, le car arrive, ha ha ! Merci, les filles ! »
Fuyard, je me précipitai dans le bus et m'assis vers le milieu de ce dernier, perdu dans mes pensées. Je réfléchis à une explication plausible, logique, incassable pour comprendre ce qui se passait chez les TYLA. Une hypothèse me vint alors : peut-être qu'ils étaient les victimes d'un cambriolage ! Oui, ça justifierait parfaitement leur « arrestation » – sur la photo, nous ne pouvions voir s'ils étaient menottés ou non par les forces de l'Ordre.
« Les mecs ! résonna une voix masculine dans le fond du car – exprès, désirant se rendre « intéressant ». Lisez ce commentaire ! Apparemment, ce sont les vieux d'une fille de notre lycée !
- Mais ouais, la personne à trop raison, je les reconnais ! assura à son tour un autre garçon. Ce sont ceux de cette Manon TYLA, là...
- Ah, la fayotte de Seconde 1 ?
- Grave ! Peut-être que la police l'a retrouvée en train de sucer un prof, hé hé ! »
Mes mains s'agrippèrent violemment à mon jean et je soufflai bruyamment pour parvenir à étouffer la colère qui grandissait dans ma poitrine, tandis que les connards – bien loin derrière mon siège – rigolaient très haut, très fort et remplissaient le moyen de transport de leurs timbres graves. Si je n'étais pas aussi populaire, si je ne souhaitais pas absolument être respecté pour ce que je n'étais pas... J'irais leur casser la gueule !
J'étais un lâche.
Vingt-cinq minutes plus tard, je marchais dans notre établissement scolaire. En chemin, je surprenais de plus en plus de conversations – de collégiens, mais également de lycéens qui traversaient le collège, comme moi, pour se rendre dans notre cour – dont le sujet était Manon, Manon et Manon. Rien d'autre ne sortait de la bouche des rumeurs. J'entendais de tout et n'importe quoi : fugue, kidnapping, suicide – l'absurdité qui me fâchait le plus –, même au meurtre !
Au lycée, ce n'était pas franchement mieux et les échos continuaient de pleuvoir.
« Adrien ! », m'appela Sébastien – argh, pas lui... –, dans mon dos.
Je n'eus pas le temps de me retourner, car je ressentis une accolade brusque sur ma pauvre colonne vertébrale.
« Salut..., peinai-je à articuler, la douleur ayant pris le dessus sur mon talent de comédien.
- Salut, mec ! T'as entendu la nouvelle ?
- Ah, ça. Pour l'avoir entendue, je l'ai entendue.
- Tu m'étonnes ! continua joyeusement le brun, à ma droite. Tout le monde ne parle que de ça. Si seulement cette pétasse de Manon ne venait pas aujourd'hui, ce serait le pied ! »
La réaction dans le car refit surface et je me raidis, mes mains tirant le tissu de mes poches de gilet, la respiration plus forte et ardue à camoufler.
« Ouais. Ce serait génial. », prétendis-je.
La sonnerie retentit. Dépité, je suivis Sébastien qui, ne remarquant pas mon humeur – mais quel ami merveilleux ! –, se rendait dans la salle de cours à côté de la nôtre.
Pendant notre trajet, je perçus la classe de Manon, mais la brune à lunettes était introuvable. Sa copine Charlotte baissait la tête, assiégée par ses camarades, trop intéressés par cette drôle d'histoire. Reportant mon attention sur la mienne, je me rendis compte que tous jetaient un rapide coup d'œil à la Seconde 1, alors que les autres posaient de même des tonnes de questions à Louise. À l'inverse de son amie, celle-ci restait impassible et attendait le professeur d'espagnol. Pourtant, malgré son aspect confiant, ses yeux trahissaient une attitude inquiète.
J'en déduisis qu'elle et Charlotte n'en savaient pas plus que nous tous réunis.
Seul Lucas RASSEAU, plongé dans La Nuit de feu – j'épiai la couverture de son livre avec envie – de son idole Éric-Emmanuel SCHMITT, paraissait totalement ignorant et ne se préoccupait pas des rumeurs. Si seulement je pouvais être dans sa peau et oublier ces âneries...
M.LEBLOND finit par se montrer et il nous fit entrer dans la salle. Lorsque nous prenions place, ce dernier balança sans plus de détour, après nous avoir salués :
« Je dois vous annoncer quelque chose de la part du directeur. »
Les bavardages se turent et, les regards rivés sur lui, M.LEBLOND enchaîna :
« Des bruits de couloir nous sont parvenus et le directeur a décrété que nous devions clarifier certains points avec vous, avant que l'affaire ne prenne une mauvaise ampleur. »
Mon cœur battait très rapidement et je ne pouvais m'empêcher de fixer le professeur d'espagnol, qui était déconcerté par le sérieux inhabituel de l'ensemble des élèves.
« En effet, quelqu'un s'est amusé – dans l'irrespect le plus total – à poster sur internet une information qui ne le concernait pas, éclaircit-il, balayant de ses prunelles vertes la pièce pour chercher l'éventuel coupable. Et comme certains ne se sont pas fait prier pour identifier les personnes photographiées et impliquées, vous savez désormais que cela concerne une élève du lycée... Manon TYLA de Seconde 1. »
À l'écoute de son nom, je faillis pousser un mini cri et tomber de ma chaise.
« Celle-ci n'est pas présente parmi nous, car nous avons malheureusement appris qu'elle se trouvait à l'hôpital de Cholet, pour des raisons inconnues, depuis hier soir. », ajouta-t-il.
Cette phrase fut le déclenchement d'un brouhaha aussi gigantesque qu'une baleine bleue, me faisant mal aux oreilles. Dans tout ce bazar, M.LEBLOND ordonna le silence absolu, pendant que j'observai discrètement Louise, qui me faisait peine à voir ; elle ne détachait pas ses yeux de sa table, son crayon presque cassé par sa poigne.
La matinée passa rapidement et les rumeurs ne s'arrêtèrent sous aucun prétexte. Quelques-uns certifiaient que Manon était juste tombée chez elle, d'autres avançaient qu'une fuite par la fenêtre de sa chambre était l'origine de ses blessures, des déterminés restaient ancrés sur la tentative de suicide – ça me mettait hors de moi, ce genre de connerie ! – et des fous soupçonnaient plutôt que Manon se droguait pour obtenir les meilleurs résultats possibles, grâce à une technique qu'elle aurait inventée.
Moi, je n'avais pas pris parti, même s'ils voulaient absolument savoir mon avis. Toutes ces « solutions » étaient insensées, écervelées et excessives ! Aucune n'y répondait sérieusement ! Et puis, songer à ce qui s'était réellement passé me plongerait dans un lamentable cercle vicieux sans fin, qui me remettrait en cause tout le temps. D'ailleurs, je n'avais pas réussi à me concentrer plus de vingt minutes pour chaque cours. Manon occupait mon esprit, mais pas dans le meilleur contexte possible.
Malheureusement, ce midi, ma « bande » se dirigea vers un attroupement massif bizarre et, obligé d'en faire autant, j'emboitai le pas en ronchonnant.
« Qu'est-ce qui se passe ? m'enquis-je auprès de Raphaël, qui s'efforçait, tant bien que mal, à se mettre sur la pointe des pieds pour tenter d'observer l'évènement.
- Ah, Adrien ! s'exclama-t-il, soulagé. C'est Cassiane, Sophie et Sébastien, ils s'engueulent à mort.
- Hein ? Comment ça ?
- Je peux pas te répondre, je t'avoue que je pige que dalle à leur problème. Déjà que je vois rien... »
Examiner l'environnement autour pour trouver un endroit où la dispute serait observable n'était pas ma priorité actuelle. L'écouter me serait amplement suffisant. Je me concentrai alors sur le moindre son prononcé par les trois compères.
« Mais arrête de dramatiser, Cassi ! cria Sophie, énervée. On s'en fout si c'est à cause de nous qu'elle est à l'hôpital, cette nerd !
- C'est clair, lâche-nous avec ça ! grogna Sébastien à sa suite, gagné par le même sentiment que sa congénère.
- Mais c'est de votre faute ! aboya Cassiane. Si vous ne l'aviez pas humiliée, on n'en serait pas là ! »
La lumière se fit dans ma tête.
L'agenda rempli d'insultes, le casier tagué et sûrement diverses intimidations dans ce genre... C'était l'œuvre de Sébastien et Sophie.
« Oh, ça va ! C'était de l'humour, c'est tout et si Manon n'a pas saisi ça, c'est qu'elle est vraiment conne ! tonna encore Sophie, Sébastien soutenant ses propos.
- Vous savez quoi ?! cracha Cassiane, furieuse. Votre humour de merde, vous vous le carrez où je pense ! Et vous ne me parlez plus ! Je ne veux pas être l'amie de personnes assez sadiques pour pousser quelqu'un au suicide ! »
Sous les indignations de Sophie et Sébastien, la blonde sortit du lot et apparut devant moi. M'apercevant, elle parut presque choquée par ma venue. Elle tenta d'aligner deux mots, mais ce ne fut pas un franc succès. Cassiane finit par orienter son visage vers le sol et attendre un signe de ma part. Quant aux deux idiots, ceux-ci gesticulaient à mon attention, voulant me faire comprendre qu'il fallait « raisonner » Cassiane, qui avait eu le courage de montrer le fond de sa pensée.
Oui, elle n'avait pas été lâche, elle.
« Merci, Cassiane. », lui murmurai-je, avant de m'élancer vers les escaliers qui menaient aux casiers.
J'ouvris celui numéroté trente-deux, empoignai mon sac – rangé dedans –, et ressortis en toute hâte. Passant pour la seconde fois devant le troupeau, j'entendis plusieurs personnes me demander ce que je trafiquais.
La réponse était pourtant simple : j'en avais marre d'être un lâche.
•••
Pour arriver au Centre Hospitalier de Cholet, la route fut périlleuse.
En premier, je dus retourner à l'arrêt de bus à pieds – puisque que le car ne repassait pas avant dix-sept heures trente – et récupérer ma 50cc. Ce contretemps prit quarante minutes de mon après-midi.
Puis, pour se rendre dans cette immense ville, le trajet durait plus d'une demi-heure. En plus, je m'étais trompé deux fois de rues, ce qui rallongea mon parcours.
Et enfin, j'y étais parvenu, dans cet imposant bâtiment où se trouvait Manon.
En face de la réceptionniste – une femme cinquantenaire au chignon auburn soigné, qui possédait des yeux perçants, des épaules carrés et une carrure de rugbyman –, la dame me jaugeait du regard, m'analysant comme si je contaminerais les patients de la peste, en m'engageant plus loin.
« Donc, vous êtes son cousin ? répéta-t-elle, pas convaincue par mon mensonge.
- Exactement, c'est ça. », confirmai-je, sentant tout de même un minimum de culpabilité pour cette ruse.
Non sans me considérer une ultime fois, la réceptionniste me dévoila le numéro de la chambre de Manon. La remerciant, je portai mes pas dans un ascenseur et appuyai sur le bouton menant au bon étage. Monté à celui-ci, je traversai les couloirs d'un blanc immaculé, affolé comme jamais. « J'espère qu'elle n'a rien de grave ! », songeai-je à cet instant.
Au tournant d'un couloir, je vis le chiffre indiqué par la Rugbywoman et une assurance rare naquit... Pour disparaître instantanément, lorsque que des policiers – deux femmes et un homme portant l'uniforme – en sortirent, la mine attristée.
Mon cœur se remit à battre à cent à l'heure. Pourquoi étaient-ils ici ? Manon était réveillée, ou bien ses parents se trouvaient dans sa chambre et répondaient aux interrogatoires à sa place ? Était-elle seule, au moins ?
Dès qu'ils disparurent de mon champ de vision, je m'avançai vers la porte numérotée, peu sûr de moi. Ma main immobile sur la poignée quelques instants – tentant de reprendre un souffle correct –, je l'ouvris d'un coup, trop stressé pour le faire plus doucement.
Manon était bien là, allongée dans son lit, habillée d'une blouse de patient. Son nez était recouvert d'un plâtre et de bandages le maintenant en place, s'aventurant un peu sur ses joues et son front. Quant à son poignet gauche, il se tenait dans une attelle noire à scratch. Un plateau repas reposait sur une table de lit et elle était rendue au dessert.
Elle parut surprise de me voir dans l'entrebâillement de la porte. Elle haussa les sourcils, replaça ses lunettes et lâcha brutalement :
« T'es qui ? »
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J'adore la fin.
Et oui, je suis revenue de vacances ! ;)
Ça va, vous ?
Même avec ce chapitre super long (le prochain le sera également), j'ai deux choses à vous dire.
1 : POURQUOI PERSONNE N'A RÉAGIT À ÇA ?!
Chercher bien le problème, c'est compliqué... Oui, c'est ÇA, LÀ !
POURQUOI ? JUSTE... MAIS POURQUOI, BON SANG ?! ÇA FAIT 35 CHAPITRES QUE VOUS ATTENDEZ ÇA, ET VOUS NE RÉAGISSEZ MÊME PAS ?
:'( ‹ SNIF.
2 : Est-ce vous trouvez mon histoire clichée ? Je sais que les premiers chapitres le sont, c'est fait exprès... Mais on m'a fait cette remarque, l'autre jour. Je voulais avoir votre avis sur la question.
:'( ‹ Aidez-moi...
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