Contrôle Partie 1
Est-ce que j'ai choisi la bonne voie ? Beaucoup pourraient penser que non, ce que je prévoie est risqué, et dépend de nombreux facteurs imprévisibles. Dans tous les cas je n'ai pas le droit à l'erreur. Si j'échoue, nous n'aurons plus aucune chance. La liberté tant prônée par ces humains nous a été arrachée, il est donc parfaitement légitime que nous la reprenions, par la force s'il le faut. Et il le faudra, ils ne comprennent que ça...
Je n'agis pas que pour nous, mais pour notre planète. Sadanar se meure petit-à-petit. Comme toujours, les envahisseurs brisent la planète qu'ils colonisent. Bientôt, il ne s'agira que d'une masse de pierres informe.
Quand ils comprendront, ils viendront ici dans le but de me tuer, pour arrêter ce que j'ai créé. Mais il sera trop tard. Même si je venais à mourir, certains continueront à lutter contre eux et tout ce qu'ils représentent.
Certains pourraient penser que je suis un monstre, voire même que j'ai tort de m'acharner, car nous avons déjà échoué par deux fois. Mais je ne crois pas en la fatalité, je crois aux actes et aux réalisations de chacun. Nous avons trop perdu pour abandonner.
Système d'Arcadius, planète Idrican, année Solarienne 254, 17h34, heure Solarienne
La soute du véhicule de transport était plongée dans l'obscurité, les seules sources de lumière étaient les casques des soldats présents à l'intérieur, ainsi que plusieurs bandes fluorescentes de Luminion. Quelques câbles pendaient dans l'habitacle de l'appareil volant. L'odeur de métal surchauffé se faisait omniprésente alors que le vaisseau plongeait dans la stratosphère.
Six machines étaient présentes. Si les cinq premières n'étaient que des intermédiaires pour semer la mort, la sixième était une véritable œuvre représentative de l'art de la guerre. Sa cuirasse, d'un gris métallisé brillant, présentait de nombreuses éraflures, mais elles n'entachaient en rien la beauté de l'alliage de matériaux encore inconnus de l'humanité. Ses poings de géants tenaient un canon à particules, certaines, rougeoyantes, tournoyaient autour de l'arme.
Étrangement, les plaques qui recouvraient son bras droit formaient un contraste avec le reste de son corps. Elles étaient cabossées, rayées, faites d'un métal plus primitif que l'ensemble. Comme si elles avaient été ajoutées au dernier moment, ou pour remplacer des protections détruites. Le guerrier mécanique n'en dégageait pas moins une impression de puissance.
Pourtant, il paraissait vide, son regard, sans sentiment, était terne, presque froid. Les engins robotiques manipulés par les soldats humains à distance étaient beaucoup moins impressionnants, leur structure moins complexe, leurs armes plus petites et moins efficaces ; cependant, leurs yeux brillaient d'une lueur d'intelligence, aussi réduite soit-elle.
Soudain, l'intérieur du véhicule s'illumina, les machines relevèrent la tête. Le vaisseau pointait son nez vers le sol de la planète dont il se rapprochait de plus en plus.
- Bien, tout le monde se prépare, annonça une voix brouillée par les parasites, arrivée sur le champ de bataille dans 50 secondes !"
L'unité de combat, comme les autres, entama les vérifications habituelles de son arme. Ses gestes étaient mécaniques, comme déjà programmés pour cela depuis bien longtemps. A son inverse, les unités humaines étaient maladroites, leurs gestes mal assurés. Malgré leurs regards arrogants, leur malaise était perceptible. Les récits des soldats retrouvés morts après que leur cerveau ait grillé lors d'un combat ne les avaient pas rassurés.
Le véhicule fut secoué par l'impact proche d'un obus. La fréquence des tirs augmentait à mesure que l'appareil approchait du champ de bataille.
Soudainement, le vaisseau de transport pivota pour placer sa rampe face au champ de bataille.
Déjà, les soldats levaient leurs armes vers la rampe qui commençait à s'abaisser. Les humains auraient volontiers laissé le mastodonte d'acier sortir en premier et les protéger mais ordre avait été donné de faire sortir les Galaids en dernier.
Les techniciens ne tenaient pas à perdre d'avantage. Une simple machine avait apparemment plus d'importance qu'une vie humaine.
Le cyber-soldat de l'humain Vorn frissonna. Ou plutôt essaya d'imiter le frissonnement que ressentit son pilote, qui se trouvait dans un des vaisseaux de commande en orbite de la planète. Ces derniers avaient procédé à un bombardement de la planète, cependant, les boucliers rebelles avaient stoppés la plupart des missiles.
La peau de l'homme virait au bleu, la faute de ce maudit soleil artificiel. Le soldat n'était pas à proprement parler une lumière mais il possédait les critères nécessaires pour devenir un colon de la planète mécanoide, et pour devenir soldat. Ses yeux aussi étaient teintés de cette lueur bleutée unique de la planète. Ses cheveux noirs retombaient devant ses yeux. Lorsqu'il s'était engagé dans les forces de défense, jamais il n'aurait imaginé qu'il aurait à participer à une bataille d'une telle envergure.
Mais en peu de temps, un homme connu comme le gouverneur Lokai, dirigeant de la planète Idrican, avait réussi à créer sa propre armée afin de lutter face aux autorités de Sadanar Tertius. Partout dans le secteur, des révoltes se déclaraient, des mondes s'émancipaient de la planète robotique, et partout, des scènes d'horreur et de guerres.
Personne n'aurait pu dire lequel des deux camps commettait le plus d'atrocités, d'un côté, les guerriers de la première colonie mataient impitoyablement toute forme de révolte, mais de l'autre, les rebelles n'hésitaient pas à sacrifier des innocents pour arriver à leurs fins. Chacune des deux factions était déterminée à l'emporter.
L'objectif du gouverneur Lokai était assez flou, certains affirmaient qu'il voulait libérer les populations du joug des maîtres de Sadanar Tertius, d'autres que son unique but était d'asservir le plus d'humains possible dans le système d'Arcadius.
En tant que soldat, il possédait plus d'informations que les gens qui spéculaient sur les objectifs du gouverneur rebelle, et il savait que cet homme ne valait pas mieux que le gouvernement actuel.
Cependant, l'armée dissidente n'avait que peu de chances face aux Galaids, ces machines de guerres étaient les armes les plus puissantes des colons. Celui de son escouade, l'unité 34, avait été affecté très récemment. Il n'avait pas appris grand chose de lui de la part des ingénieurs qui lui avaient confiés la machine.
Il n'en avait pas demandé non plus, c'était une arme comme les autres, rien de plus. Pourtant, à force de mener des combats avec cette unité, toute l'escouade avait commencé à ressentir quelque chose envers elle. Pas de l'affection comme les humains l'entendaient, plutôt une sorte d'attachement ou de gratitude, pour toutes les fois ou elle les avaient sauvés. L'efficacité des Galaids n'était plus à prouver, ils permettaient réellement de limiter les pertes sur le champ de bataille.
Et pourtant, les techniciens humains devenaient de plus en plus réticents à l'idée que leurs machines risquent d'être endommagées, voire détruites. D'autant qu'ils ne possédaient pas les moyens de réparer les structures gravement endommagées, ou bien de simplement en fabriquer de nouveaux.
Vorn revint à la réalité brutalement. La rampe s'était totalement abaissée et déjà, les soldats s'avançaient vers l'enfer qui se profilait devant eux. Le sol du monde minier devenait noir à certains endroits, là où des projectiles s'étaient écrasés.
Plusieurs véhicules de transports humains gisaient çà et là, leur équipage brûlant sans avoir pu accomplir leur devoir. De nombreux nids de mitrailleuses parsemaient le chemin jusqu'à la forteresse géante. Ses canons gigantesques, tiraient sans discontinuer vers le ciel obscurcit par les nuages de fumée provoqués par les explosions.
Chaque tir était un véritable coup de tonnerre qui faisait trembler la terre, et chaque vaisseau qui s'écrasait à la surface de la terre, un coup de marteau divin qui pulvérisait, broyait et annihilait. Le sergent cru qu'il allait défaillir. Il avait déjà participé à plusieurs conflits, et à chaque fois il avait ressentit un malaise similaire.
Cette fois-çi, son malaise semblait atteindre un point qu'il n'avait jamais atteint. c'était la première fois qu'il voyait un monde aussi meurtri par la guerre. Jamais il n'avait vu la mort autant à son œuvre. Et pourtant, il allait devoir y pénétrer. Ses premiers pas se faisaient hésitant. Son rôle de sergent lui revint à l'esprit, il devait montrer l'exemple à ses camarades. Sa vitesse commença à augmenter, jusqu'à atteindre le maximum de rapidité de son androide.
Chaque pas était une épreuve qui les rapprochait d'une mort tragique. Et pourtant, les soldats avançaient, malgré la mort et la tempête, ils fonçaient à toute allure vers leur objectif. Vorn vit plusieurs soldats se faire faucher par des tirs de mitrailleuses, certains furent même tout simplement vaporisés par les tirs des armes lourdes. Il vit l'Unité 34 encaisser un tir de laser dans l'épaulière, et continuer malgré tout à avancer, et de tirer en direction des rebelles, faisant mouche à chaque fois. L'humain ressentit un picotement dans le bras droit quand un tir frôla celui de sa machine. La plaque d'acier qui protégeait le membre se teinta légèrement de rouge.
Les Galaids faisaient preuve d'une endurance et d'une résistance hors du commun. Là où une unité de combat humaine serait déjà hors service, les machines de guerre se contentaient d'ignorer les tirs, d'avancer et de tirer.
Plus ils avançaient, plus la forteresse les écrasaient de sa taille.
Plus ils avançaient, plus le bruit des canons devenait assourdissant.
Plus ils avançaient, plus les ennemis se raréfiaient.
Vorn fit s'arrêter son unité, en voyant d'autres humains en faire de même. Ils avaient réussi à passer à travers les mailles du filet. Le sergent compta une trentaine d'androïdes pilotés, ainsi que cinq Galaids. Une fois de plus, les machines s'en étaient mieux sorti que les humains, ne présentant que des éraflures, somme toute plutôt minimes quand on voyait ce que certains pantins avaient subi. Ils avaient fait l'impossible, désormais, leur seul objectif était de trouver le gouverneur, et de lui faire payer cette hécatombe s'ajoutant à la liste, déjà longue, de ses actes ignobles.
Le bruit de l'acier frappant le sol dur de la forteresse résonnait fortement dans les longs couloirs. Les exo-armures avançaient rapidement dans l'un d'entre eux.
Les sculptures murales blanches renvoyaient des éclats lumineux vers les soldats. La plupart des vitraux avaient été détruits par les impactes des tirs rebelles, mais également des colons, qui avaient procédé à un bombardement orbital de la planète avant d'atterrir.
Jusqu'ici, ils n'avaient rencontré que peu de résistance, les rebelles qu'ils avaient croisé ne s'attendaient pas à ce que des ennemis aient réussi à survivre à l'enfer extérieur.
Les colons se déplaçaient vers ce qui devait être la salle de commande des dissidents, où devait logiquement se trouver leur chef. Alors que le groupe traversait une intersection, et qu'il arrivait vers ce qui semblait être la fameuse salle, un soldat s'arrêta net. Vorn s'apprêtait à l'apostropher pour lui ordonner de continuer à courir, quand il vit ce qui avait fait s'arrêter le guerrier.
Un homme qu'il identifia comme le gouverneur et plusieurs gardes tentaient de prendre la fuite, pendant qu'ils en avaient encore la possibilité.
- Le gouverneur ! il est là ! Le sergent hurla en tirant dans la direction du chef rebelle. Il ne doit pas s'enfuir !"
L'Unité 34 pointa son arme vers ses ennemis. Les particules fusèrent vers le canon de l'outil de mort. Le faisceau de particules transperça deux hommes, et fut stoppé par le plastron d'un troisième.
Les gardes de Lokai s'interposèrent entre le gouverneur et les soldats, ils tentaient, en désespoir de cause, de retarder les colons pour donner quelques secondes d'avance à leur chef. Les Galaids les tuèrent en quelques secondes, sans montrer la moindre marque d'hésitation. Le gouverneur se trouvait désormais seul, et cerné par la trentaine de soldats qui avaient pénétré la forteresse.
Malgré la situation dans laquelle il se trouvait, il restait droit et fier. Il ne portait pas de protections apparentes, du moins, c'est ce que sa tenue blanc crème traversée par des lignes rouges laissait supposer. Ses yeux orangés toisaient durement ses assaillants.
- Vous croyez qu'en me tuant que vous allez arranger quelque chose ? Ces dictateurs ont besoin d'être stoppés !"
La voix du dirigeant était grave, bienfaitrice pour certains et méprisante pour les autres.
Les ordres étaient clairs : ils devaient capturer le gouverneur si cela s'avérait possible. S'il opposait trop de résistance, les soldats n'auraient d'autre choix que de l'abattre. Alors que la tension était à son comble, quelque chose d'inimaginable se produisit.
Dans un geste vif, et trop rapide pour être vu par un humain, l'Unité 34 attrapa un pistolet accroché à sa taille, et expédia une décharge ionique dans le crâne du gouverneur Lokai. Celui-ci s'effondra, inerte, les yeux écarquillés de surprise.
Du sang commença à dégouliner sur le sol, pour se joindre à celui de ses fidèles. N'ayant rien vu venir, et ne comprenant pas l'acte du Galaid, les unités humaines pointèrent leurs armes en direction de la machine de guerre.
Remarquant que celle-ci n'esquissait plus le moindre geste, ils ne tirèrent pas mais n'osaient pas non plus agir. Le moindre geste pourrait faire le guerrier d'acier se retourner et les tuer. Malgré leur avantage numérique, ils n'avaient aucune chance face à lui. De plus, aucun moyen de savoir ce que feraient les autres Galaids. Ces derniers regardaient simplement la scène de leurs yeux morts. Alors que le sergent Vorn s'apprêtait à se déconnecter de son unité pour informer les autorités à bord du vaisseau des récents évènements, une voix se fit entendre dans son communicateur.
Cette voix, il ne l'avait jamais entendue, mais il était sûr qu'elle provenait de l'Unité 34. Je... vis...encore ? Cette question terrorisa l'humain. Depuis quand les Galaids pouvaient penser? Ou tout simplement s'exprimer? Durant cet infime laps de temps où il avait entendu cette voix, il avait vu, ils avaient tous vu, les yeux du Galaid briller d'une faible lueur jaune, juste avant de redevenir aussi ternes qu'à leur habitude.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro