
I Want You Back
CHAPITRE 31
Fleur
Je regarde la silhouette de Jules s'éloigner petit à petit de moi jusqu'à ne plus l'apercevoir. Il est beau, même de loin. Ça me fait comme un gros pincement au cœur.
À l'intérieur du restaurant, la fête a repris. Nous avons vite été oubliés, Raphaël, Eliott, Jules et moi. Comme quoi on est peu de choses en ce monde.
Je m'adosse à la façade du Marquis, dépitée. C'est le bon moment pour un petit résumé de ma situation. En faisant ça, je trouve souvent des solutions.
1) Raphaël m'aime toujours (Eliott avait raison !) et veut me "récupérer".
2) Eliott taquine le coma éthylique avec ses amis en semaine alors qu'il a lycée le lendemain.
3) Raphaël a constaté qu'Eliott n'était pas étonné de me voir (étrange !).
4) Jules est parti et, malgré ce qu'il m'a dit, je ne sais pas s'il souhaite me revoir un jour.
Bilan : j'ai peut-être perdu les deux personnes auxquelles je tiens le plus au monde, Eliott et Jules.
Un courant d'air passe dans la nuit. Je frissonne. Je me sens plus seule que jamais. J'ai besoin d'une épaule pour pleurer sans honte, d'une voix qui réchauffe le cœur et d'une paire de pupilles qui réconforte. Résignée, je dégaine mon portable et je compose le numéro de la seule personne qui serait prête à m'accorder ce dont j'ai besoin.
- Allô ? Tu peux venir me chercher s'il te plaît ?
J'ai l'impression d'être une fille de quinze ans qui appelle sa mère pour venir la chercher à la fin de la soirée, à la fin du rêve. Mais Charlie ne bronche pas.
- Tu es où, ma chérie ?, s'enquiert-elle.
- Devant chez Alban.
- Ne bouge pas, j'arrive, m'assure ma sulfureuse amie blonde, et au ton de sa voix je sens que je vais aller mieux.
Quelques minutes plus tard, une Twingo surgit dans la nuit. Ses phares m'éblouissent. La portière côté conducteur s'ouvre, puis une voix charmante m'interpelle.
- Alors ? On attend pas Charlie ? On veut faire la fête sans sa meilleure amie ? C'est nouveau ça !
- Je suis tellement heureuse de te voir, dis-je, le sourire aux lèvres.
- Bon, grimpe ! Ce n'est pas que je n'aime pas le lieu mais on sera mieux chez moi, non ?
J'ouvre la portière côté passager et je m'effondre sur le siège à côté de Charlie. Elle entreprend un examen minutieux de mon apparence, m'examine sous toutes les coutures, avant de donner son verdict.
- Tu t'es maquillée : c'est rare. Donc tu n'étais pas seule. Ton mascara a coulé, d'habitude tu fais très attention : tu as pleuré. Tu es décoiffée : tu as couru après quelqu'un. C'est qui ce sale type ma belle ?, demande ma sauveuse en allumant le contact pour quitter le Marquis.
- Ce n'est pas un sale type !, protesté-je.
- C'est Jules, affirme Charlie sans flancher, en pleine manœuvre de marche arrière. Alors, qu'est-ce qui ne lui a pas plu ? La mentalité des gens ? L'impression de passer sous rayons X à travers les yeux des traders ? L'homosexualité d'Alban ? Ou bien le fait que notre Marquis lui fourre Soufiane dans les pattes pour en savoir plus sur lui ? Il fait toujours ça, Alban, n'est-ce pas ?
- Il y avait ça, mais il y a eu pire.
- Non ???, s'étrangle Charlie. Eddy s'est encore improvisé DJ ?
- Pire que ça, je te dis !
- Bah non, il ne peut pas y avoir pire qu'Eddy comme DJ ! Avec lui, ta soirée est gâchée, c'est évident !
- Charlie, soupiré-je. On peut en parler chez toi ? Parce que j'ai l'impression que ma vie s'effondre sous mes pieds. Je ne contrôle plus rien. Je ne peux plus rien faire, sauf attendre que ça passe et essayer de recoller les morceaux petit à petit.
Charlie ne prononce plus un mot jusqu'à ce qu'elle se gare devant chez elle et affirme :
- Je ne savais pas qu'une soirée avec Eddy comme DJ pouvait te mettre dans cet état-là.
Et c'est cette phrase carrément stupide qui me fait éclater en sanglots. Charlie a beau me prendre dans ses bras, me dire "Mais ma chérie, ça va aller, ne t'inquiète pas !", je ne m'arrête pas. Elle me cale sous un plaid, sur son canapé, et une grande partie des mouchoirs de la boite mise à ma disposition finit en petits tas de mouchoirs mouillés et roulés en boule.
- Maintenant, explique-moi ce qui s'est passé, me recommande-t-elle lorsque je suis calmée.
- Raphaël s'est ramené avec Brice, il a pris un serveur en otage et ne l'a libéré que quand je lui ai promis d'écouter ce qu'il avait à dire. Il m'a raconté qu'il avait besoin de moi et qu'il voulait que je revienne, puis Eliott et ses amis du lycée sont arrivés ivres morts au Marquis, Raphaël a pris Eliott par la peau des fesses et lui a mis une gifle dehors, et après ça Jules est parti.
- La police n'est pas venue arrêter Raphaël pour sa prise d'otage foireuse ?
- Non, reniflé-je.
- En même temps, nous vivons à une époque où la pizza arrive plus vite que la police, alors ce n'est pas vraiment étonnant.
- Comment tu fais pour être aussi positive dans des moments comme ça ?, ris-je. Je viens de te réveiller en pleine nuit, je suis sûre que tu bosses demain, et tu sors des phrases dignes d'un recueil humoristique.
- Je ne sais pas, l'habitude peut-être, rétorque Charlie. Avec toi on est toujours dans des situations pas croyables. Mais pourquoi, il est parti, ton Jules ? Je croyais que c'était l'amour fou, vous deux.
- Il a appris que je dirigeais Studvices®. Ça faisait trop pour lui, il n'a pas supporté, il est parti chez sa sœur.
- Il a les nerfs fragiles, le pauvre petit. Il va falloir qu'il s'accroche si il veut survivre dans ce monde hostile. N'empêche, c'est gonflé de sa part de s'être fait la malle comme ça. Ce n'est pas Théodore qui ferait ça...
- Écoute, je suis persuadée que Théodore est un homme parfait, mais c'est le tien. Il fait partie de ta vie, pas de la mienne. Si Théodore avait à subir les quelques petits problèmes que j'ai, du genre homicide, dépression (et oui, ça sert à ça mes médicaments), ou bien que je suis en instance de divorce avec un type qui pense que son fils et de l'argent, c'est la même chose, je ne pense pas qu'il survivrait, le petit Théodore qui habite bien sagement à Montretout.
- Visiblement, tu es énervée, constate Charlie. Je vais me coucher, parce que je bosse demain, effectivement. L'aspirine est dans le placard de la cuisine, en haut à droite. Bonne nuit.
Je laisse Charlie regagner sa chambre. Je suis ingrate et pitoyable. Je me suis passablement énervée contre elle, et c'est également de ma faute si Jules est parti. Je fouille dans la pochette que j'ai prise ce soir, récupère mon portable et envoie un message à Jules, avant de remonter le plaid sur moi pour me coucher.
"Cesser de te voir serait me condamner à mort. S'il te plaît, reviens."
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